LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. MODIFICATION ADOPTÉES EN PREMIÈRE DÉLIBÉRATION

En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté sans modification les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

II. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE RECONDUCTIBLE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement minorant les crédits de 3.196.408 euros destiné à financer les mesures annoncées par le Président de la République en faveur de l'emploi.

III. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE NON RECONDUCTIBLE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à majorer à titre non reconductible de 4.500 euros les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 12 novembre 2008 sous la présidence de M.  Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport spécial de M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial, sur la mission « Immigration, asile et intégration » et les articles 62 et 63 rattachés.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial , a rappelé que cette mission, créée par la loi de finances pour 2008, constituait le support budgétaire du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Il a indiqué qu'elle n'était pas la seule à concourir à la politique française de la politique de l'immigration et de l'intégration : ses crédits de paiement - 513,8 millions d'euros en 2009 - ne représentent que 20 % de l'ensemble des dépenses consacrées à cette politique. Au total, la politique française de l'immigration et de l'intégration atteindrait, selon le document de politique transversale, 2,6 milliards d'euros en 2009.

Il a observé que cette mission était :

- un facteur de constitution d'un service public des étrangers cohérent, afin d'améliorer les conditions d'accueil et d'intégration des personnes étrangères que la France souhaite recevoir sur son territoire ;

- la déclinaison d'une stratégie fondamentalement européenne, telle que l'avait définie le pacte européen sur l'immigration et l'asile adopté par le Conseil européen du 16 octobre 2008, à l'initiative de la France ;

- l'application d'une politique souhaitée par le Président de la République, telle que précisée dans la lettre de mission en date du 9 juillet 2007 adressée au ministre de l'immigration.

Enfin, il a noté une difficulté de périmètre administratif, entre la mise en oeuvre d'un premier accueil des personnes étrangères assurée par le ministère de l'immigration, et une politique plus transversale d'insertion dans la société française, qui ne relevait pas de la mission.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial , a précisé que la mission, qui se composait de deux programmes, présentait trois caractéristiques :

- 53 % de la dépense (267,6 millions d'euros) est liée à l'hébergement des demandeurs d'asile et des réfugiés ;

- le ministère délègue l'essentiel de ses crédits à des opérateurs de l'Etat (l'OFPRA, qui instruit les demandes d'asile, l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), qui est l'organe exécutif du ministère, ou une société d'économie mixte, l'ADOMA, ex-SONACOTRA, compétente pour le logement des travailleurs migrants) ;

- la mission regroupe 613 emplois, soit uniquement les effectifs d'une administration d'état-major, les services déconcentrés ne figurant pas au sein de la présente mission. Le ministère doit donc exercer son autorité sur des services aux cultures hétérogènes, afin de renforcer la cohérence de la politique de l'immigration et de l'intégration, et son efficacité.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial , a ensuite formulé ses principales observations.

Il a souligné que la prévision budgétaire pour l'ANAEM n'apparaissait pas plus satisfaisante en 2009 qu'elle ne l'avait été en 2008, puisqu'elle ne permettait pas au Parlement de constater la nécessité d'une subvention pour charge de service public de 15 millions d'euros, ou celle d'un relèvement des taxes affectées, à hauteur de 18 à 20 millions d'euros, pour faire face à des besoins sur lesquels il existait un réel manque de visibilité. Ce manque de transparence budgétaire, non spécifique à l'ANAEM, mais concernant l'ensemble des opérateurs de l'Etat, était bien le symptôme d'une « agencisation de l'Etat » mal contrôlée.

Puis il a observé que les crédits consacrés à l'hébergement des demandeurs d'asile apparaissaient sous-dotés, ce qui rendait l'exécution du budget 2009 difficilement soutenable : ces sous dotations concernent l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile et l'allocation temporaire d'attente. En effet, en 2008, on a assisté à deux phénomènes :

- après une période de plusieurs années de forte baisse, la demande d'asile s'accroît de manière sensible et non anticipée. A la fin du mois de septembre 2008, on enregistrait une hausse de 12,6 % par rapport à la même période en 2007. D'ici à la fin 2008, la demande d'asile pourrait donc augmenter de 15 % par rapport à 2007 ;

- les délais de jugement de la Cour nationale du droit d'asile augmentent (ils sont passés de 357 jours en 2007 à 415 jours en 2008, alors qu'on attendait au contraire une baisse).

Il a montré que ces paramètres avaient un impact sur la dépense consacrée à l'hébergement des demandeurs d'asile, impact qui n'avait été prévu, ni pour 2008, ni pour 2009. Si en 2008, la question avait été résolue par l'ouverture de crédits supplémentaires dans le cadre d'un décret d'avance, gagé par le non versement de la subvention à l'ANAEM, pour 2009, la situation est beaucoup plus délicate.

Aussi, si la demande d'asile se stabilisait en 2009, le besoin supplémentaire de financement serait de 45,2 millions d'euros, et si elle progressait encore de 10 % en 2009, ce besoin serait de 55,8 millions d'euros.

Enfin il a évoqué les reconduites à la frontière, indiquant que le développement de l'aide au retour volontaire devait être conforté : le coût de l'aide au retour volontaire est très en deçà de celui d'une reconduite à la frontière, qu'une première estimation, à affiner, permettait d'évaluer à 20.970 euros par personne, bien au-delà du coût d'un départ volontaire. Il a précisé que ces retours volontaires représentaient en 2008 de l'ordre d'un tiers des reconduites à la frontière, mais qu'il était possible de faire davantage.

Compte tenu de ces éléments, M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial, a proposé tout d'abord un amendement portant sur les crédits, visant à recentrer l'ANAEM, et l'établissement public appelé à lui succéder, sur ses missions et donc à réduire la subvention pour charge de service public d'1,5 million d'euros et à redéployer ces crédits pour faire face aux besoins au titre de l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile.

Puis M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial , a proposé à la commission d'adopter les crédits de la mission ainsi modifiés.

Enfin, il a présenté les deux articles rattachés.

L'article 62 simplifie le régime des taxes sur l'immigration familiale et de travail, et supprime un certain nombre d'exonérations. Il l'a jugé opportun dans son principe et conforme aux orientations de la commission sous réserve de trois amendements :

- le premier pour éviter les effets pervers liés à la taxe acquittée par l'employeur au titre de l'embauche d'un travailleur étranger permanent. Afin d'en moderniser le régime, il a proposé de substituer au tarif actuel un taux proportionnel ;

- le deuxième pour corriger un défaut structurel des droits de timbre, en proposant leur indexation automatique sur l'inflation ;

- le troisième relatif à la contribution spéciale s'appliquant à l'employeur ayant embauché un travailleur étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, afin de doubler cette contribution spéciale.

S'agissant de l'article 63, tirant les conséquences d'un arrêt du Conseil d'Etat du 18 juin 2008 relatif à l'allocation temporaire d'attente versée aux demandeurs d'asile et qui donne une base légale à une disposition règlementaire, il en a proposé l'adoption sans modification.

Un débat s'est ensuite engagé.

M. Philippe Dallier s'est étonné qu'il existe encore des « poches » de surbudgétisation. Il a exprimé ses réserves quant à un éventuel relèvement de la contribution spéciale, en rappelant qu'au moment de la régularisation d'un salarié en situation irrégulière, les préfectures imposaient comme préalable aux employeurs le paiement de cette contribution, et qu'il s'ensuivait de la part de certaines entreprises la tentation de déposer leur bilan afin d'échapper à la taxation. Il a donc souhaité que la mesure proposée n'ait pas de conséquences négatives pour les salariés concernés. Il ne fallait donc pas lier la décision de régularisation d'un salarié en situation irrégulière au paiement par l'employeur de la contribution spéciale.

M. Jean Arthuis, président , a invité le rapporteur spécial à vérifier si la sanction administrative était déductible des résultats des entreprises.

M. Denis Badré , évoquant les reconduites à la frontière, a considéré que le coût élevé de ces dernières devait pouvoir être réduit.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial , a rappelé que le montant de la contribution spéciale payée par les employeurs indélicats était proche de celui versé par les entreprises qui embauchaient des personnes en situation régulière. Il a souligné que l'amendement visait à interroger le Gouvernement sur le recouvrement effectif de la taxe. S'agissant des reconduites à la frontière, il a rappelé que leur coût était supérieur à celui présenté par les documents budgétaires, qui ne prenaient en compte que le prix des billets d'avion. Il a fait valoir que les premières estimations qu'il avait réalisées n'intégraient pas les crédits publics consacrés au contentieux des étrangers et à l'aide juridictionnelle.

M. Jean Arthuis, président , a souligné que cette mission paraissait contrevenir à l'exigence de sincérité posée par la LOLF, car certaines dotations sont sous-évaluées, tandis que d'autres lignes budgétaires apparaissent sur-dotées.

Après que la commission eut adopté l'amendement portant modification de crédits et trois amendements sur l'article 62 rattaché, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » et l'article 62 ainsi modifiés, ainsi que l'article 63 sans modification.

Réunie à nouveau le jeudi 20 novembre 2008, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé son vote favorable à l'adoption avec modification des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » tels qu'amendés par l'Assemblée nationale , à l'adoption avec modifications de l' article 62 visant à déterminer les ressources propres du futur opérateur en charge de la politique d'immigration et d'intégration et à l'adoption sans modification de l'article 63 tendant à réviser les catégories de bénéficiaires de l'allocation temporaire d'attente (ATA).

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