IV. LE SUIVI DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE EN NOUVELLE-CALÉDONIE

A. L'AUDITION DE MME ANNE DUTHILLEUL PAR LA COMMISSION LE 7 JUIN 2006

Votre rapporteur spécial a mené, en 2005, une mission de contrôle sur pièces et sur place, sur les grands projets d'usines de traitement du nickel en Nouvelle-Calédonie 3 ( * ) .

Au titre des suites de ce contrôle, Mme Anne Duthilleul, présidente de l'ERAP, et chargée, intuiti personae , d'une mission permanente d'évaluation et de conseil sur ces projets, a été entendue par la commission des finances le 7 juin 2006 4 ( * ) , afin de l'éclairer sur les enjeux particulièrement complexes de ce dossier.

Au moment où a eu lieu cette audition, les OPA lancées dans le secteur minier provoquaient en Nouvelle-Calédonie de graves incertitudes , par le biais de trois tentatives de rachat sur les deux industriels impliqués dans les projets :

- une OPA amicale d'INCO, qui conduisait le projet du Sud, sur Falconbridge, maître d'oeuvre du projet du Nord ;

- une OPA inamicale de la société canadienne « Teck Cominco » sur INCO ;

- une OPA inamicale de la société suisse Xstrata sur Falconbridge.

Ces trois OPA simultanées, sur lesquelles peu d'informations circulaient, faisaient peser des doutes sur la conduite des deux projets, notamment celui du Nord.

A cette incertitude liée aux OPA s'ajoutait, alors même que les travaux étaient largement engagés, une manifestation menée par des militants indépendantistes et écologistes, le 1 er avril 2006, sur le site de l'usine de Goro , qui avait dégénéré et provoqué pour plus de 3 millions de dollars de dégât . La société INCO avait interrompu les travaux durant quelques semaines, et avait demandé des mesures afin de garantir la sécurité des personnels.

B. LE TEMPS DES SOLUTIONS ?

Au mois de novembre 2006, la situation était la suivante :

- en ce qui concerne les OPA, elles ont abouti cet été, d'une part au rachat de Falconbridge par Xstrata le 14 août 2006 et, d'autre part, au rachat d'INCO par la société brésilienne CVRD (Companhia Vale do Rio Doce), dans le cadre d'une contre-OPA devenue amicale, le 23 octobre 2006 ;

- en ce qui concerne les travaux pour l'usine du Sud, ceux-ci se sont poursuivis activement sur le site, puisque les premiers modules construits aux Philippines sont arrivés début août, que le port a été achevé et le convoyeur monté dans cette même période. Toutefois, une nouvelle interruption a été déplorée durant une quinzaine de jours entre le 25 septembre et le début octobre , en raison cette fois d'une grève générale déclenchée par le nouveau syndicat CSTNC, qui avait déjà bloqué le site, ainsi que d'autres services et mines de la SLN, en décembre 2005 et à plusieurs reprises au printemps 2006. Le travail a repris normalement sur le site après déblocage des accès par la gendarmerie. La revendication adressée à Goro Nickel porte sur le travail de Philippins , se substituant à la main d'oeuvre locale insuffisante en personnels qualifiés, qui ne sont toutefois accueillis en Nouvelle-Calédonie qu'après vérification qu'aucune candidature locale ne peut remplir les postes ouverts. C'est ainsi que le nombre d'employés de Goro Nickel et ses sous-traitants venant de Nouvelle-Calédonie s'élève à plus de 2.000, pour une prévision initiale de 700 environ pendant la période de construction.

La contre-expertise environnementale en cours depuis octobre 2005 à la demande de la province du Sud, notamment sur la question du rejet en mer des effluents contenant du manganèse, doit rendre ses conclusions avant la fin de l'année, ce qui permettra à Goro Nickel de déposer une nouvelle demande de permis d'exploitation conforme au design actuel de l'usine en construction, comme il l'avait prévu en 2004, et respectant les dernières préconisations en matière environnementale.

- en ce qui concerne l'usine du Nord, les études préliminaires se sont achevées en juillet 2006. Toutefois le nouvel actionnaire a demandé à Xstrata Nickel, qui a repris toutes les activités nickel de Falconbridge, de lui présenter une revue de « renouvellement » du projet, remettant à jour les hypothèses économiques et financières, avant la fin de l'année 2006. Xstrata Nickel s'est engagé en septembre 2006 à présenter aux autorités françaises les conclusions de cette revue et le calendrier en résultant dans le même délai.

Votre rapporteur spécial, qui suit avec attention ces dossiers, ne peut que réitérer les remarques qu'il a déjà émises par le passé, à savoir que ces investissements cruciaux pour la Nouvelle-Calédonie doivent être réalisés, mais à deux conditions :

- d'une part, une intégration de ces projets dans leur environnement à la fois humain et environnemental , ce qui suppose un engagement sans faille de l'Etat et des autorités de Nouvelle-Calédonie, et la prise de conscience par les partenaires industriels de la nécessité d'associer pleinement les populations locales aux décisions ;

- d'autre part, le respect des grands équilibres budgétaires, à la fois de l'Etat, notamment dans l'octroi des garanties et des enveloppes de défiscalisation, et des autorités de Nouvelle-Calédonie, qui ont consenti des exemptions fiscales très importantes. A ce sujet, votre rapporteur spécial rappelle son accord total avec le projet de redevance minière proposé par Mme Anne Duthilleul, redevance qui devrait permettre de mieux associer les collectivités de Nouvelle-Calédonie au succès économique des projets .

* 3 Rapport d'information n° 7 (2005-2006).

* 4 Le compte-rendu de cette audition est consultable sur le site de la commission des finances à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/bulletin/20060605/fin.html#toc2

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