Rapport n° 339 (2005-2006) de M. Jean-Claude CARLE , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 10 mai 2006

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N° 339

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 10 mai 2006

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur la proposition de loi, MODIFIÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , relative aux délégués départementaux de l' éducation nationale,

Par M. Jean-Claude CARLE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Jacques Legendre, Serge Lagauche, Jean-Léonce Dupont, Ivan Renar, Michel Thiollière, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Pierre Martin, David Assouline, Jean-Marc Todeschini, secrétaires ; M. Jean Besson, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jean-Marie Bockel, Yannick Bodin, Pierre Bordier, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Christian Demuynck, Denis Detcheverry, Mme Muguette Dini, MM. Louis Duvernois, Jean-Paul Émin, Mme Françoise Férat, MM. François Fillon, Bernard Fournier, Hubert Haenel, Jean-François Humbert, Mme Christiane Hummel, MM. Soibahaddine Ibrahim, Alain Journet, André Labarrère, Philippe Labeyrie, Pierre Laffitte, Simon Loueckhote, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Jean-Luc Mélenchon, Mme Colette Mélot, M. Jean-Luc Miraux, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jean-François Picheral, Jack Ralite, Philippe Richert, René-Pierre Signé, André Vallet, Marcel Vidal, Jean-François Voguet.

Voir les numéros :

Sénat : Première lecture : 483, 511 (2004-2005), 28 et T.A. 26 (2005-2006)

Deuxième lecture : 299 (2005-2006)

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : Première lecture : 2625 , 2929 et T.A. 571

Éducation nationale.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi, adoptée en première lecture au Sénat dans un très large consensus, à l'initiative de votre rapporteur, du président et d'autres membres de la commission des affaires culturelles, vise, par son article unique, à modifier une disposition introduite par la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école.

L'interdiction pour les délégués départementaux de l'éducation nationale (DDEN) d'exercer leur fonction dans leur commune ou leur arrondissement de résidence, prévue par l'article 40 de cette loi, tout en répondant à un légitime souci d'impartialité, s'est révélé poser d'importantes difficultés d'application.

En effet, bénévoles chargés de l'inspection des écoles primaires, les DDEN sont attachés à la proximité dont dépend l'efficacité de leur mission.

Aussi, afin de concilier ces critères à l'exigence de neutralité, l'article 1 er de la présente proposition de loi limite aux seuls délégués départementaux de l'éducation nationale ayant un mandat municipal l'interdiction d'exercer leur mission sur le territoire de la commune dans laquelle ils sont élus, ou dans les écoles au fonctionnement desquelles cette commune participe.

Saluant l'opportunité et la pertinence d'une telle modification, l'Assemblée nationale a approuvé cet article à l'unanimité, dans les mêmes termes que le Sénat.

En outre, elle a complété la proposition de loi par un nouvel article 2, adopté à l'initiative du Gouvernement.

Cette disposition de caractère technique tend à apporter une base juridique sécurisée au recrutement d'« emplois de vie scolaire » (EVS) destinés à exercer leurs fonctions dans les écoles.

Ces personnels, recrutés sur la base des contrats aidés relancés par le Gouvernement en juin dernier, apportent un concours précieux aux directeurs d'école et aux équipes éducatives. Ils contribuent à renforcer le nombre d'adultes présents dans les établissements scolaires pour encadrer les élèves.

Sur les 45 000 emplois de vie scolaire recrutés depuis la rentrée dernière, seuls près de 8 000 exercent leurs fonctions dans les écoles.

La clarification proposée était devenue nécessaire et impérieuse pour accompagner la montée en charge de ce dispositif dans le premier degré. En effet, le ministre de l'éducation nationale, M. Gilles de Robien, vient d'annoncer au mois d'avril dernier la création de 50 000 emplois de vie scolaire supplémentaires dans les écoles, dans le cadre du protocole d'accord sur la direction d'école en cours de négociation avec les syndicats.

Partageant le souci de procéder au plus vite à ces recrutements, qui répondent à des besoins importants dans les écoles, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

L'adoption définitive de cette proposition de loi permettra la mise en oeuvre immédiate des dispositions relatives tant aux délégués départementaux de l'éducation nationale qu'aux emplois de vie scolaire, qui vont toutes deux dans le sens d'une amélioration du fonctionnement matériel de nos écoles et de l'encadrement humain de nos enfants.

EXAMEN DE L'ARTICLE

Article 2 (nouveau) Recrutement de personnels sous contrats aidés

I. Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Introduit en première lecture à l'Assemblée nationale par voie d'amendement du Gouvernement, cet article vise à faciliter le recours à des personnes recrutées sur la base de contrats aidés dans les écoles.

En effet, dans la mesure où les écoles n'ont pas le statut d'établissement public et, partant, pas de personnalité juridique propre, elles ne peuvent procéder directement à ces recrutements, qui sont effectués par les chefs d'établissement des collèges et lycées du secteur.

C'est pourquoi le présent article transpose aux personnes recrutées sur la base d'un des contrats prévus aux articles L. 322-1 à L. 322-6 du code du travail, dont l'État prend en charge une partie du coût, le dispositif en vigueur pour les assistants d'éducation.

Créé par la loi n° 2003-400 du 30 avril 2003, leur statut a prévu, au troisième alinéa de l'article L. 916-1 du code de l'éducation, que « les assistants d'éducation peuvent exercer leurs fonctions dans l'établissement qui les a recrutés, dans un ou plusieurs autres établissements ainsi que, compte tenu des besoins appréciés par l'autorité administrative, dans une ou plusieurs écoles. Dans ce dernier cas, les directeurs d'école peuvent participer à la procédure de recrutement. »

L'article 2 de la présente proposition de loi complète, par un nouvel alinéa rédigé sur ce modèle, l'article L. 421-10 du code de l'éducation, qui prévoit déjà des modalités d'association entre les écoles et les établissements publics locaux d'enseignement, par voie de convention, notamment pour mutualiser leurs ressources humaines et matérielles.

Les contrats visés par le présent article sont, dans le secteur non marchand :

- les contrats d'accompagnement dans l'emploi (article L. 322-4-7 du code du travail), destinés à favoriser l'insertion professionnelle de personnes rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi ;

- les contrats d'avenir (article L. 322-4-10 du code du travail), destinés à faciliter l'insertion sociale et professionnelle des bénéficiaires de minima sociaux.

Ces deux types de contrat, institués par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, portent sur « des emplois visant à satisfaire des besoins collectifs non satisfaits » . Ils se sont substitués aux précédentes formes de contrats « aidés », à savoir les « contrats emploi solidarité » (CES) et « contrats emploi consolidé » (CEC).

Dans l'éducation nationale, les personnels recrutés par les établissements scolaires sur la base de ces contrats sont dénommés « emplois de vie scolaire » (EVS).

Leur rémunération est prise en charge à 90 % par le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et à 10 % par le ministère de l'éducation nationale.

A la rentrée 2005, le ministre de l'éducation nationale a annoncé un renforcement significatif de leurs effectifs, avec le recrutement de 45 000 EVS, qui se traduit par :

- le renouvellement des 25 000 contrats aidés déjà existants sous la forme des CES ou des CEC ;

- la création de 20 000 contrats supplémentaires.

Ces EVS sont recrutés par les établissements scolaires, sur leur demande et en fonction de leurs besoins, pour exercer, selon les profils définis, les fonctions suivantes :

- aide aux élèves handicapés ;

- assistance administrative ;

- aide à l'accueil, à la surveillance et à l'encadrement des élèves ;

- participation à l'encadrement des sorties scolaires ;

- aide à la documentation, à l'animation des activités culturelles, artistiques ou sportives ou à l'utilisation des nouvelles technologies.

La durée du contrat varie de six mois, renouvelable deux fois, pour les titulaires de contrats d'accompagnement dans l'emploi, à deux ans pour les titulaires de contrats d'avenir. Le temps de travail hebdomadaire est de 20 heures pour les premiers et de 26 heures pour les seconds, pour une rémunération au SMIC horaire 1 ( * ) .

Les personnes recrutées reçoivent une formation avant d'être affectées dans une école, un collège ou un lycée. Elles bénéficient par ailleurs d'actions de formation et de validation des acquis de l'expérience destinées à accompagner la réalisation de leur projet professionnel.

Les emplois proposés et les candidatures sont recueillis par les agences locales pour l'emploi (ANPE), qui transmettent ensuite aux établissements employeurs une liste de personnes correspondant au profil d'accès à ces emplois.

Si les collèges et lycées, en tant qu'établissements publics locaux d'enseignement (EPLE), ont la personnalité juridique et l'autonomie administrative et financière leur permettant de procéder directement à ces recrutements, cela n'est pas le cas des écoles, dépourvues de personnalité juridique propre. Or les emplois de vie scolaire ont également vocation à y exercer leurs missions.

C'est pourquoi le présent article apporte une base juridique claire à l'affectation d'« emplois de vie scolaire » dans les écoles, qui s'est révélée nécessaire aux chefs d'établissement procédant aux recrutements et à leurs agents comptables.

Afin que les profils des personnes recrutées correspondent aux besoins des écoles, il est prévu, dans ce cas, que les directeurs d'école concernés puissent participer à la procédure de recrutement.

Par ailleurs, par souci de souplesse, est ouverte la possibilité de partager le service de ces personnels entre plusieurs établissements scolaires.

Ces garanties tendent à consolider un dispositif déjà mis en marche, puisque sur les 45 000 EVS en poste, un peu moins de 8 000 exercent leurs fonctions dans les écoles.

Ils apportent une aide et un soutien importants aux directeurs d'écoles et aux équipes éducatives, notamment pour les suppléer dans leurs tâches administratives et matérielles, pour accompagner les élèves handicapés, animer les bibliothèques ou aider à l'utilisation des outils informatiques.

II. La position de votre commission

Cette disposition, adoptée dans un large consensus par les députés, répond au besoin de sécuriser au plan juridique un dispositif appelé à monter en puissance.

En effet, le ministre de l'éducation nationale a annoncé, en avril dernier, la création de 50 000 nouveaux contrats d'« emplois de vie scolaire », soit un par école , afin d'apporter une assistance aux directeurs d'école, dont les conditions de travail se sont considérablement alourdies ces dernières années, dans l'accomplissement des tâches matérielles et d'accueil.

Cette mesure s'inscrit dans le cadre d'un protocole d'accord sur la direction d'école en cours de négociation entre le ministère et les syndicats du premier degré, destiné à mettre un terme à près de dix ans de conflits et six ans de grève administrative.

Parmi les autres mesures proposées, on relèvera notamment :

- l'accord d'une décharge d'enseignement d'un jour par semaine aux directeurs d'école de quatre classes, alors que cela ne bénéficiait jusqu'alors qu'aux directeurs d'écoles de cinq classes et plus ;

- l'instauration d'une « décharge de rentrée scolaire » pour les directeurs d'école d'une à trois classes, d'une durée de deux jours fractionnables, dans les quinze jours qui suivent la date de la rentrée scolaire ;

- l'augmentation de 20 % du montant de l'indemnité perçue par les directeurs d'école, qui est actuellement de 925,44 euros par an (soit 1 110 euros à partir du 1 er septembre 2006).

Votre rapporteur salue ces avancées significatives, qui répondent à des attentes fortes et anciennes de la part des directeurs d'école, auxquelles il n'avait pas été trouvé, jusqu'à présent, de réponse satisfaisante.

Par ailleurs, il souhaite que le ministre présente, par exemple au moment de l'examen du projet de loi de finances, un bilan sur le recrutement des emplois de vie scolaire dans les écoles, sur les missions qui leur sont confiées et sur le devenir des personnes au terme de leur contrat.

Sous réserve de cette remarque, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une réunion tenue le mercredi 10 mai 2006, sous la présidence de M. Jacques Valade, président, la commission a examiné le rapport de M. Jean-Claude Carle en vue de la deuxième lecture de la proposition de loi n° 299 (2005-2006), modifiée par l'Assemblée nationale, relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Jacques Valade, président , a exprimé son adhésion à la proposition du rapporteur d'approuver le texte sans modification, pour aboutir ainsi à son adoption définitive et ne pas retarder l'application de la disposition relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale.

Si elle s'est félicitée de l'approbation unanime de l'article 1 er par les députés, Mme Annie David a indiqué, toutefois, qu'elle ne voterait pas l'article 2, en raison d'un désaccord de fond avec les types de contrats précaires auxquels il fait référence. En outre, elle a vivement critiqué, sur le plan de la méthode, l'introduction d'un tel cavalier gouvernemental dans un texte qui faisait consensus, puisqu'une proposition de loi similaire avait été déposée par le groupe communiste républicain et citoyen. Aussi s'est-elle interrogée sur la nature de son vote sur l'ensemble du texte.

Partageant ces observations, M. Serge Lagauche s'est inquiété, par ailleurs, des conditions de recrutement des emplois de vie scolaire, craignant que cela ne pose des difficultés aux établissements dans leur fonctionnement.

M. Jean-Marc Todeschini a demandé si ces personnels n'étaient recrutés que pour une année scolaire, c'est-à-dire neuf mois environ.

M. Jacques Legendre a rejoint les critiques formulées par Mme Annie David quant aux conditions d'adoption de l'article 2, soulignant son lien très ténu avec la disposition relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale, dont il contribue à retarder l'entrée en vigueur.

Après s'être interrogé, d'une part, sur le coût supplémentaire généré par le recrutement de ces emplois de vie scolaire et, d'autre part, sur l'adaptation de ces personnels aux besoins réels des écoles, il a indiqué qu'il n'approuverait pas l'article 2.

En réponse à ces intervenants, M. Jean-Claude Carle, rapporteur , a apporté les précisions suivantes :

- le lien entre les deux articles peut être trouvé dans le souci commun d'améliorer le fonctionnement des écoles et d'y renforcer la présence d'adultes ; par ailleurs l'adoption de l'article 2 était devenue nécessaire pour lever une difficulté juridique posant problème aux établissements scolaires ;

- les contrats d'avenir sont d'une durée de 2 ans et les contrats d'accompagnement dans l'emploi sont renouvelables dans la limite de 24 mois ; leur objectif n'est pas d'être pérennisés mais de servir de tremplin pour ces personnes, qui bénéficient en parallèle d'un suivi par l'agence nationale pour l'emploi (ANPE) ;

- le coût supporté par le ministère de l'éducation nationale n'est pas très conséquent, puisque 90 % de la rémunération des emplois de vie scolaire sont pris en charge par le budget du ministère de l'emploi.

La commission a ensuite approuvé la proposition de loi dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale , sous réserve de deux abstentions et les groupes socialiste et communiste républicain et citoyen ne prenant pas part au vote.

* 1 Soit une rémunération de 695,40 ou 904,18 euros mensuels (SMIC horaire de 8,03 euros applicable à compter du 1 er juillet 2005).

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