C. LES QUATRE MESURES PRIORITAIRES DU PRÉSENT PROJET DE BUDGET

Lors de leur audition par votre commission des finances, le 3 novembre 2004, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales et M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales, ont présenté les quatre mesures phares du présent projet de budget à savoir :

- le lancement de l'assurance récolte pour faire face aux aléas climatiques, en concertation avec les exploitants agricoles et les compagnies d'assurance ;

- la création d'un fonds unique consacré à la rénovation des bâtiments d'élevage afin de mieux maîtriser les pollutions d'origine agricole ;

- l'engagement d'une politique volontariste dans le domaine phytosanitaire afin de mieux contrôler la sécurité sanitaire des produits d'origine végétale ;

- enfin le renforcement de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole .

1. Le lancement de l'assurance récolte

a) Etat de la réflexion sur la notion d'assurance récolte

Le décret n° 2004-718 du 19 juillet 2004 porte application de l'article L. 361.8 du code rural qui prévoit qu'« en vue de favoriser le développement de l'assurance contre les risques agricoles énumérés par décret, le fonds prend en charge, pendant une période minimale de sept ans, une part des primes ou cotisations d'assurance afférentes à ces risques. Cette prise en charge est forfaitaire, dégressive et variable suivant l'importance du risque et la nature des cultures ».

Ce décret intègre la mesure déjà existante, relative à l'assurance grêle et l'étend à de nouveaux contrats d'assurance que les compagnies sont à même de commercialiser : gel-grêle sur vignes et vergers, multirisques climatiques en grande culture.

Il répond au souci d'apporter aux agriculteurs un instrument plus efficace pour intégrer le risque dans l'exploitation. L'assurance permet, en effet, aux agriculteurs de faire leurs choix dans un univers moins incertain.

Le décret précise les types de contrats d'assurance qu'il est prévu d'encourager et définit le barème de l'aide en fonction des types de contrats, de la qualité de l'exploitant (majoration en faveur des jeunes agriculteurs) et de la participation éventuelle des collectivités territoriales.

Lorsque les contrats bénéficient d'une aide des collectivités territoriales, il en est tenu compte afin d'éviter que le cumul des aides ne conduise à des taux de prise en charge supérieurs à ceux autorisés par la réglementation communautaire. Dans le souci de laisser aux collectivités territoriales une marge significative d'intervention, le montant de l'aide de l'Etat reste ainsi en deçà de 50 %.

Pour l'année 2004, en se fondant sur les hypothèses fournies par les assureurs et sur l'assiette et la répartition de l'aide, la dépense relative à ce dispositif pourrait s'élever à 10 millions d'euros.

L'indemnisation, par les assureurs et le FNGCA, des pertes subies par les exploitants agricoles du fait des aléas climatiques représente un coût total estimé à 401 millions d'euros par an (en moyenne) réparti entre les exploitants d'une part (309 millions d'euros, dont 90 millions d'euros de contributions et 219 millions d'euros de primes d'assurance), et l'Etat d'autre part (92 millions d'euros, dont 82 millions d'euros de versement moyen annuel au FNGCA et 10 millions d'euros d'aide à l'assurance).

Dans son rapport remis au ministre de l'agriculture le 18 février 2004, notre collègue député Christian Ménard fait l'hypothèse que ces pertes pourraient être couvertes par une assurance multirisques climatiques et multiproduits (« assurance pérennité ») qui se substituerait quasi intégralement au FNGCA, et ce de façon viable (niveau de franchise répondant aux besoins des exploitants, montant des primes acceptable par les exploitants et permettant l'équilibre financier de l'assurance, meilleur niveau d'indemnisation des exploitants, soutien public aux primes moins coûteux que l'ensemble des aides « calamités » actuelles...).

Selon ce même rapport, l'offre multiproduits contribuera à une bonne mutualisation du risque, tandis que le niveau de franchise, calibré sur les possibilités supposées d'auto-assurance et d'épargne de précaution des exploitations (indemnisation des seules pertes supérieures à 35 %, en moyenne) permettrait de contenir le niveau des primes, et donc favorisera l'adhésion et la mutualisation.

b) Le lancement d'une assurance récolte généralisée par le présent projet de budget

Après trois années d'expérimentations sur les assurances gel - grêle en arboriculture et sur vigne, et suite au rapport remis au gouvernement le 18 février 2004 par notre collègue député Christian Ménard, un produit d'assurance multirisques et multi-cultures sera proposé, à compter de 2005, aux agriculteurs et encouragé par l'Etat par une prise en charge partielle des cotisations .

L'année 2005 sera marquée par un amorçage du dispositif qui a vocation à monter en puissance dans les années qui viennent. C'est pourquoi les crédits nécessaires sont provisionnés et ont vocation à être abondés en loi de finance rectificative en tant que de besoin.

Les modalités pratiques sont en cours d'élaboration et le travail technique est en cours associant le ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie en lien étroit avec les organisations professionnelles agricoles et les assureurs, pour en affiner les conditions pratique en vue d'un lancement à compter de 2005.

Contrairement à l'indemnisation publique par le Fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), mécanisme très redistributif (les contributions des exploitants au financement du dispositif sont très largement indépendantes de leur propre exposition au risque), l'assurance repose, via les primes, sur « le prix du risque » inhérent à certains choix productifs et contribue ainsi à des décisions de production plus rationnelles.

L'avantage économique de l'assurance sur le FNGCA, pour les exploitants, réside dans une meilleure régulation de la variabilité de leurs résultats, avantage dont la perception varie d'un exploitant à l'autre, en fonction de son « aversion au risque » : cette perception conditionne l'appétence pour le produit, difficile à prévoir a priori et dépendant du niveau de l'aide à la prime.

L'objectif est d'assurer la pérennité des exploitations agricoles touchées par un sinistre d'origine climatique, en substitution progressive du fonds national de garantie contre les calamités agricoles (FNGCA).

L'assurance sera facultative, et diverses options seront laissées au libre choix des signataires du contrat d'assurance.

Au titre de l'année 2005, une somme de 10 millions d'euros est prévue dans le présent projet de budget .

Interrogé lors de son audition par votre commission des finances sur les conditions de mise en oeuvre de l'assurance récolte, le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a déclaré que toutes les conditions de mise en oeuvre du mécanisme d'assurance récolte n'avaient pas encore été définies. Il a, toutefois, indiqué que le principe retenu avait été de limiter le dispositif d'assurance récolte aux seules cultures de vente, de rendre l'application du système progressive sur cinq ans, sans le rendre immédiatement obligatoire, de plafonner la participation budgétaire de l'Etat à 130 millions d'euros par an à l'horizon 2010, enfin, de mettre en place une franchise à hauteur de 25 %. En outre, il a indiqué que deux offres assurantielles à destination des agriculteurs existaient à l'heure actuelle sur le marché, une offre de Groupama, globale et multisectorielle, et une offre du Crédit agricole, privilégiant une approche filière par filière, production par production.

Pour conclure, il a précisé que la montée en puissance du dispositif d'assurance récolte serait supervisée par une institution indépendante.

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