B. UN CONTEXTE DIFFICILE

1. Les contraintes économiques

Comme le souligne le rapport général de votre commission des finances, en son tome I, la croissance en France a été décevante en 2002 et est soumise à de forts aléas pour 2003.

Certes, les derniers résultats publiés vont plutôt dans le bon sens (consommation des ménages en octobre et enquête de l'INSEE sur l'investissement des entreprises).

Cependant, l'OCDE, révisant en forte baisse ses prévisions pour 2003, ne table plus, en ce qui concerne notre pays, que sur une croissance de 1 % en 2002 et de 1,9 % en 2003.

Selon une enquête réalisée par Le Monde, publiée le 19 octobre dernier, le ralentissement de la croissance s'est répercuté sur les dépenses de recherche et développement des entreprises françaises en 2001. L'augmentation de ces dépenses (+ 5 %) a ainsi été deux fois moindre que les années précédentes et inférieure à la progression des chiffres d'affaires des sociétés concernées (sauf dans l'informatique, les télécommunications, l'aéronautique et les industries de défense).

Les responsables de recherche des grands groupes auraient, selon l'enquête, maintenu le même rythme, ralenti, d'augmentation de leur effort de recherche en 2002.

Il en faudrait davantage pour atteindre l'objectif fixé au Sommet de Barcelone, d'une participation des entreprises privées atteignant, en 2010, les deux tiers d'un financement global porté à 3 % du PIB.

La création d'entreprises innovantes risque, elle aussi, de pâtir du retournement de conjoncture actuel.

Selon les chiffres recueillis dans l'Indicateur Chausson Finances pour le premier semestre de 2002, la baisse des investissements consentis par les capital-risqueurs, prolongeant une décrue amorcée il y a deux ans, aurait été de 17 % par rapport au semestre précédent.

Selon Le Figaro du 1 er octobre, les disparitions de fonds de capital risque se multiplient sous l'effet d'un désengagement de leurs actionnaires.

Le marasme boursier et l'éclatement de la bulle spéculative des technologies de l'information ont ainsi des conséquences douloureuses sur le financement de l'innovation.

2. Les contraintes budgétaires

L'horizon s'assombrit aussi du point de vue budgétaire.

La préparation du prochain projet de loi de finances rectificative a, en effet, été l'occasion d'annoncer la constatation de moins-values fiscales, par rapport aux prévisions, estimées à 1,55 milliard d'euros. Les ressources du présent projet de loi de finances pour 2003 devraient s'en trouver amoindries de 700 millions d'euros.

Le gouvernement est actuellement à la recherche d'économies ou de recettes supplémentaires compensatrices afin de limiter le déficit budgétaire de l'an prochain à 2,6 % du PIB.

Or, déjà, le BCRD et le budget du ministère de la recherche ont été négociés, à l'origine, en tenant compte :

- de l'hypothèse d'un ralentissement de la croissance (2,5 % représentant déjà un infléchissement par rapport aux 2,8 % initialement escomptés) ;

- de la nécessité de corriger une dérive budgétaire en cours, incompatible avec nos engagements européens 11 ( * ) ;

- de la priorité accordée aux dépenses régaliennes de l'Etat (sécurité, justice, défense) parmi lesquelles il n'aurait pas été inconcevable, selon votre rapporteur, de faire figurer la recherche fondamentale (mais il est vrai qu'elle est de plus en plus difficile, parfois, à distinguer de la recherche finalisée).

Comme l'a très justement souligné le « chief economist » de l'OCDE, M. Jean-Philippe Cotis, « les gouvernements ont tendance à gérer de façon procyclique leur politique budgétaire, relâchant l'effort en période de vaches grasses et le resserrant pendant les vaches maigres ».

C'est exactement l'inverse qu'il faudrait faire : se servir, de façon contracyclique , du budget comme un instrument de relance lorsque cela est nécessaire.

Malheureusement, le déficit structurel français s'est accru lors des deux derniers cycles de croissance forte qu'a connus notre pays, de 1988 à 1991 et de 1997 à 2000, des baisses d'impôt ayant été accordées sans réductions correspondantes des dépenses.

Il n'y avait donc pratiquement aucune marge de manoeuvre budgétaire disponible, du côté de l'Etat, pour augmenter les dépenses publiques de recherche en 2003, sauf au détriment des autres priorités retenues 12 ( * ) .

Cela, au demeurant, n'apparaissait pas nécessairement souhaitable, dans la mesure où nous sommes déjà le pays, à part l'Italie, où le financement public de ces dépenses est le plus important (en pourcentage du PIB), avec des résultats -on l'a vu- plutôt mitigés.

Mais, en tout état de cause, une autre latitude apparaissait, au vu des résultats de l'exécution des exercices précédents : mobiliser plus efficacement les fonds réellement disponibles.

* 11 Interdiction d'un déficit public et d'une dette publique supérieurs, respectivement, à 3 % et 60 % du PIB en vertu du pacte de stabilité et de croissance (PSC) adopté par le Conseil européen à Amsterdam le 17 juin 1997.

* 12 Escomptant une « sortie de crise » par la science, l'Etat, au Japon, a augmenté ses dépenses de recherche en pleine récession, par exception à la politique d'austérité qu'il poursuit par ailleurs.

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