C. LES AUTRES MESURES RELATIVES À LA BRANCHE AT-MP

1. L'allongement de la durée de prescription des actions en indemnisation devant le FIVA (article 49)

L' article 49 du présent projet de loi propose, d'une part, de modifier le régime de prescription des demandes d'indemnisation adressées au FIVA et, d'autre part, de clarifier une disposition relative à son rôle en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur .

a) Un dispositif actuel peu sécurisé

L'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 relatif au FIVA ne précise pas les règles de prescription applicables aux actions en indemnisation menées par les victimes de l'amiante devant le FIVA. En l'absence de dispositions législatives, le conseil d'administration du fonds en a donc déterminé les principes par une décision en date du 17 juin 2003. Ainsi, a-t-il été décidé :

- de transposer aux actions en indemnisations devant le fonds le dispositif de prescription quadriennale des créances publiques ;

- de choisir, comme point de départ de cette prescription, le certificat médical initial pour les plaques pleurales et les épaississements pleuraux, et cinq ans après le certificat médical initial pour les cancers en l'absence de constat d'aggravation. En pratique, le fonds retient le document médical qui fait le lien entre la pathologie et l'exposition à l'amiante.

La Cour de cassation, dans deux arrêts rendus le 3 juin et le 8 juillet 2010, a remis en cause la pratique adoptée par le FIVA en précisant que : « la prescription quadriennale applicable à la demande d'indemnisation ne peut commencer à courir tant que la consolidation 75 ( * ) du dommage n'a pas été constatée ».

Or cette position n'est pas sans poser certaines difficultés. En particulier, elle conduit à traiter de façon différenciée les victimes de maladies professionnelles et les victimes environnementales 76 ( * ) , le document retenu pour constater la consolidation n'étant pas le même dans les deux cas. Pour les victimes d'une maladie professionnelle, ce document peut être la constatation de consolidation réalisée par la caisse de sécurité sociale alors que, pour les victimes environnementales, la constatation de consolidation devra être réalisée par un médecin désigné par le FIVA. Elle interviendra donc nécessairement après le dépôt de la demande de la victime, ce qui rendra cette demande imprescriptible.

b) Le dispositif proposé


Le I de l'article 49 du présent projet de loi introduit ainsi un régime spécifique de prescription pour le FIVA :

- prévoyant, d'une part, une prescription décennale ;

- choisissant, d'autre part, un point de départ identique de la prescription : la date du premier certificat médical établissant le lien entre la maladie et l'exposition à l'amiante.

Deux exceptions à ce principe sont posées. Le délai de prescription ne court :

- pour l'indemnisation des préjudices résultant de l'aggravation d'une maladie dont un certificat médical a déjà établi le lien avec l'exposition à l'amiante, qu'à compter de la date du premier certificat médical constatant cette aggravation ;

- pour l'indemnisation des ayants droit d'une personne décédée, quand son décès est lié à l'exposition à l'amiante, qu'à partir de la date du premier certificat médical établissant le lien entre le décès et cette exposition.


Le II précise l'entrée en vigueur du dispositif.

Le nouveau délai de prescription de dix ans s'appliquera immédiatement aux dossiers en cours en tenant compte du délai écoulé depuis l'établissement du premier certificat médical. Les certificats médicaux établis avant le 1 er janvier 2004 seront réputés l'avoir été à cette date, ce qui est favorable aux victimes.

En outre, un délai supplémentaire sera accordé aux personnes dont les dossiers ont déjà été rejetés au motif qu'ils étaient prescrits avant l'entrée en vigueur de la présente loi . Les auteurs d'une demande d'indemnisation pourront jusqu'au 1 er janvier 2014, demander au FIVA un réexamen de leur dossier. En contrepartie, ces personnes devront se désister de leur action en cours à l'encontre de la décision de rejet.

Il est prévu que le fonds informe les personnes concernées de ces nouveaux délais de prescription.

Ces dispositions ont vocation à limiter le développement de contentieux.


Le 2° et 3° du I clarifient, quant à eux, les conséquences pour la victime de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur à laquelle le FIVA est partie.

c) La capacité d'absorption du FIVA

Votre rapporteur pour avis est favorable à ces dispositions qui tendent à sécuriser le régime de prescription des demandes d'indemnisation adressées au FIVA , dans un sens favorable aux victimes.

Il convient néanmoins de s'assurer de la « capacité d'absorption » de ces nouvelles demandes par le fonds, un rapport conjoint de l'Inspection générale des finances (IGF) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de juillet 2008 ayant mis en évidence de graves difficultés d'organisation du FIVA ( cf . encadré).

L'étude d'impact prévoit un afflux modéré de dossiers nouveaux . Par ailleurs, selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, les pistes de réorganisation du fonds formulées par la mission conjointe IGAS-IGF et tendant à formaliser et à fiabiliser les procédures de traitement des demandes, permettront de répondre à ce nouvel afflux de demandes.

Les conclusions de la mission d'audit IGAS/IGF

Un rapport conjoint de l'Inspection générale des finances (IGF) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de juillet 2008 a mis en évidence de graves difficultés d'organisation du FIVA. A cette date, près de 24 000 demandes d'indemnisation étaient en instance d'instruction ce qui représentait environ vingt mois de traitement alors que la loi impose au FIVA de faire une offre dans les six mois après que le dossier ait été jugé recevable. Seules 18 % des demandes étaient ainsi instruites dans ce délai et près de 150 000 euros d'intérêts de retard avait été payés sur les cinq premiers mois de l'année 2008. Ce montant était en croissance rapide puisqu'il était quasi nul en 2006.

Selon les réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur pour avis, suivant les recommandations de la mission conjointe d'inspection, un « dispositif d'urgence » a être mis en place en 2009, et prolongé en 2010, pour traiter le stock très important de demandes simples. Une extension des locaux du fonds est intervenue en juin 2010. En 2011, les pistes de réorganisation du fonds formulées par la mission IGAS-IGF et tendant à formaliser et à fiabiliser les procédures de traitement des dossiers seront mises en place .

Un contrat de performance a été signé entre l'Etat et le fonds le 15 février 2010.


* 75 Le moment où les lésions se fixent et prennent un caractère permanent, tel qu'un traitement n'est plus nécessaire, si ce n'est pour éviter une aggravation.

* 76 Victimes dont la pathologie n'a pas fait l'objet d'une reconnaissance de maladie professionnelle, mais figure sur une liste de maladies valant justification de l'exposition à l'amiante fixée par un arrêté du 5 mai 2002 ou qui ont subi un préjudice résultant directement d'une exposition à l'amiante sur le territoire de la République française.

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