TROISIÈME PARTIE - LE BUDGET DE L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE POUR 2009 : REFUSER LA PÉNURIE

Il y a un an, votre rapporteur qualifiait le budget de l'enseignement agricole pour 2008 de « budget d'attente » et lançait un appel au ministre de l'agriculture et de la pêche, en l'exhortant à ne pas décevoir les espoirs de la communauté éducative agricole.

Un an plus tard, force est de constater que ces espoirs sont sur le point d'être déçus.

Car quelles que soient les ambitions que formulera, pour l'enseignement agricole, le 5 e schéma en cours de préparation, celles-ci seront vaines si elles ne sont accompagnées des crédits suffisants pour les poursuivre.

L'enseignement agricole est donc à la croisée des chemins : sans doute survivrait-il encore quelques années à la pénurie budgétaire, mais celle-ci ne pourrait qu'achever d'épuiser les énergies et les enthousiasmes qui faisaient sa force. Il lui faut désormais ou s'affirmer à nouveau ou disparaître.

Votre rapporteur tient à le souligner, loin de toute rhétorique inutile : pour la première fois depuis des années, elle sent ses interlocuteurs au bord de l'épuisement, si ce n'est du renoncement .

Longtemps, ils ont oeuvré sans grande reconnaissance, dans l'ombre de leurs voisins de l'éducation nationale. Cette discrétion n'enlevait rien à l'efficacité remarquable des formations agricoles, qui offraient de nouvelles perspectives à des jeunes hommes et femmes, qui souvent avaient perdu confiance en l'École et en leurs capacités.

En trois années, tout semble avoir changé : l'enseignement agricole est à présent sous la lumière et a fait l'objet de multiples rapports qui ont l'un après l'autre mis en évidence ses résultats remarquables et ont vu dans ses pratiques pédagogiques et humaines un véritable modèle.

Mais au moment même où s'esquissait cette reconnaissance nationale, l'enseignement agricole entrait en crise par le fait d'arbitrages et de pratiques budgétaires qui ont instauré dans les établissements une véritable pénurie .

Votre rapporteur tient à le souligner d'emblée, la situation est désormais devenue insupportable . Sans doute des réformes de structure peuvent-elles être menées dans l'enseignement agricole et nombreuses sont celles qui ont déjà été engagées. Mais à l'évidence la question n'est plus, dans l'enseignement agricole, celle de la bonne gestion des deniers publics, mais celle de la survie du service public de l'éducation et de l'égalité entre les élèves des différentes administrations mettant en oeuvre ce service .

Ces formules, votre rapporteur les emploie en toute conscience : loin de tout excès, elles transcrivent ainsi l'extrême inquiétude qui règne parmi la communauté éducative agricole.

Il est grand temps d'y répondre en apportant les garanties budgétaires nécessaires au bon fonctionnement de l'enseignement agricole. Votre rapporteur vous proposera donc d'abonder le programme 143 de la somme de 50 millions d'euros , prélevés en crédits de paiement sur le budget du programme « Enseignement scolaire public du second degré », dont le budget s'élève, dans le projet de loi de finances, à 28,685 milliards d'euros .

A l'évidence, un tel effort peut être consenti par l'éducation nationale. Il permettra de « remettre à flot » l'enseignement agricole et d'aborder dans des conditions normales les réformes qui l'attendent.

Votre rapporteur tient enfin à le souligner, l'intervention qu'elle vous propose sera la dernière et il reviendra à l'avenir au ministre de l'agriculture et de la pêche et à lui seul, en lien avec le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, de construire des budgets soutenables pour l'enseignement agricole.

A l'heure des choix, il revient en effet à chacun de prendre ses responsabilités : votre rapporteur vous proposera donc d'affirmer la volonté du Sénat, à charge pour le Gouvernement d'en prendre acte et d'agir enfin.

BUDGET DE L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE 2007-2009

Demandés pour 2009

Titre 2 (personnel)

Titre 3 (fonctionnement)

Titre 5 (investissement)

Titre 6 (intervention)

Total

Action 1: Enseignement public

600 750 734

1 730 000

37 973 000

640 453 734

Action 2: Enseignement privé

215 236 559

309 270 695

524 507 254

Action 3: Aide sociale aux élèves

81 250 000

81 250 000

Action 4: Autres missions

4 621 875

4 621 875

Action 5: Moyens communs à l'enseignement agricole

4 447 000

4 447 000

Total

81 598 7293

6 177 000

433 115 570

1 255 279 863

Votés pour 2008

Titre 2 (personnel)

Titre 3 (fonctionnement)

Titre 5 (investissement)

Titre 6 (intervention)

Total

Action 1: Enseignement public

613 239 602

1 699 419

28 326 100

643 265 121

Action 2: Enseignement privé

211 943 030

303 024 933

514 967 963

Action 3: Aide sociale aux élèves

80 837 986

80 837 986

Action 4: Autres missions

3 949 472

3 949 472

Action 5: Moyens communs à l'enseignement agricole

4308 180

4 308 180

Total

825 182 632

6 007 599

416 138 491

1 247 328 722

Consommés en 2007

Titre 2 (personnel)

Titre 3 (fonctionnement)

Titre 5 (investissement)

Titre 6 (intervention)

Total

Action 1: Enseignement public

639 144 054

2 556 447

38 316 674

680 017 175

Action 2: Enseignement privé

189 698 651

54 658

317 421 065

507 174 374

Action 3: Aide sociale aux élèves

78 995 910

78 995 910

Action 4: Autres missions

5 004 052

5 004 052

Action 5: Moyens communs à l'enseignement agricole

4 062 217

13 843

191 520

4 267 580

Total

828 842 705

6 673 322

13 843

439 929 221

1 275 459 091

VARIATION DES CRÉDITS DE L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE (2007-2009)

Variation 2008/2009

Titre 2 (personnel)

Titre 3 (fonctionnement)

Titre 6 (intervention)

Total

Action 1: Enseignement public

-2,04%

1,80%

34,06%

-0,44%

Action 2: Enseignement privé

1,55%

2,06%

1,85%

Action 3: Aide sociale aux élèves

0,51%

0,51%

Action 4: Autres missions

17,03%

17,03%

Action 5: Moyens communs à l'enseignement agricole

3,22%

3,22%

Total

-1,11%

2,82%

4,08%

0,64%

Variation 2007/2009

Titre 2 (personnel)

Titre 3 (fonctionnement)

Titre 6 (intervention)

Total

Action 1: Enseignement public

-6,01%

-32,33%

-0,90%

-5,82%

Action 2: Enseignement privé

13,46%

NA

-2,57%

3,42%

Action 3: Aide sociale aux élèves

2,85%

2,85%

Action 4: Autres missions

-7,64%

-7,64%

Action 5: Moyens communs à l'enseignement agricole

9,47%

NA

NA

4,20%

Total

-1,55%

-7,44%

NA

-1,55%

-1,58%

Sources : Rapport annuel de performance 2007 ; Projet annuel de performance 2009

I. UN BUDGET EN TRÈS LÉGÈRE PROGRESSION QUI NE PERMETTRA PAS DE RÉPONDRE AUX BESOINS

A. UN BUDGET QUI N'EST À LA HAUTEUR NI DES ATTENTES NI DES BESOINS

1. Une très faible croissance budgétaire attendue en 2008 et un plafond d'emplois qui poursuit sa baisse

Le budget proposé par le ministre de l'agriculture et de la pêche pour 2009 est en très légère progression par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2008 : les crédits de paiement augmentent de 0,64 %.

Toutefois, cette augmentation n'est qu'apparente : si l'on compare en effet les crédits de paiement demandés pour 2009 aux crédits effectivement consommés en 2007, le budget de l'enseignement agricole poursuit sa décroissance à hauteur de -1,58 % .

Votre rapporteur tient à le souligner, le mode de calcul adopté pour dégager ce taux de croissance sur deux ans minore l'effet de baisse en loi de finances initiale : les crédits consommés étant toujours inférieurs aux crédits effectivement votés, particulièrement dans l'enseignement agricole où l'exécution est régulièrement marquée par des annulations importantes, le taux de décroissance sur deux ans est donc en réalité plus net encore : elle s'élève en effet à -1,73 % .

Cette baisse s'explique par la poursuite en 2009 des suppressions d'emploi engagées depuis 2007. Le plafond d'emplois du programme 143 diminuera ainsi, hors mesures de périmètre, de 170 ETPT en 2009, dont 83 ETPT correspondent à des suppressions nouvelles. Au total, ce sont donc 223 postes qui seront supprimés en 2008, dont 159 postes au titre des nouvelles mesures. Ces suppressions d'emplois correspondent à 1,05 % des ETPT du programme 143 en 2008.

Ramené au nombre de départs à la retraite par catégorie d'agents, ces réductions de poste correspondent à un ratio d'un départ à la retraite sur deux d'enseignant non remplacé et de deux départs à la retraite sur trois de personnels administratifs non remplacés.

Si rien n'est fait, le plafond d'emplois du programme 143 poursuivra donc en 2009 la nette décrue amorcée depuis 2005 : à l'époque, il était en effet de 19 164 ETPT, alors qu'il s'élève désormais à 15 809 ETPT, soit, en cinq années, une baisse de 3 355 ETPT, qui correspondent à 17 % des emplois du programme.

ÉVOLUTION DU PLAFOND D'EMPLOIS SUR 3 ANS (2008-2010)
Programme 143

2008 (1)

2009

2010

ETPT

EP (1)

ETPT

EP

ETPT

EP

Extension année pleine de n-1 : titulaires enseignants

- 64

- 108

Extension année pleine de N-1 : titulaires non enseignants

- 23

- 32

Extension année pleine de N-1 : transferts

Variations au titre de l'année précédente

- 87

- 140

Plafond en extension-pleine

16 154

15 669

Évolution des titulaires enseignants ( tiers d'année )

- 25

- 89

- 51

- 159

Évolution des titulaires non enseignants ( demi-année )

- 17

- 40

- 32

- 64

Évolution des vacataires ( année pleine )

- 64

- 64

+ 50

+ 50

Variations au titre de l'année

- 106

- 193

- 33

- 173

Lettre plafond (avant variation de périmètre)

17 862

16 121

Décentralisation ( année pleine )

- 1 489

- 1 531

- 312

- 312

Autres transferts externes

- 97

- 97

Mouvements internes

- 35

- 35

Variations de périmètre

- 1 621

- 1 663

- 312

- 312

Plafond

16 241

15 809

(1) pour mémoire ; y compris rebasage de -21 au titre des retraites supplémentaires constatées

Détail des transferts : cf. infra, enseignement public

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche .

2. Des suppressions d'emplois qui se traduisent par une forte réduction de la masse salariale du programme

Ces suppressions d'emplois se traduisent, pour le programme 143, par une réduction très significative de la masse salariale : celle-ci passera en effet de 825,18 millions d'euros en 2008 à 815,99 millions d'euros en 2007.

Cette baisse de 1,11 % est encore plus nette si l'on neutralise l'effet lié à la hausse du taux de contribution au CAS pensions : hors crédits destinés à ce dernier, la masse salariale régressera en 2009 de - 1,52 % , les crédits affectés au CAS pensions augmentant quant à eux de 0,44 %.

ÉVOLUTION DE LA MASSE SALARIALE ENTRE 2008 ET 2009

LFI 2007

LFI 2008

PLF 2009

Intitulé

Crédits

Dont CAS pensions

Crédits

Dont CAS pensions

Crédits

Dont CAS pensions

Variation 2008 à 2009

Variation hors CAS pensions

Variation CAS pensions

Enseignement technique agricole (143)

859 332 960

177 615 779

825 182 632

172 266 812

815 987 293

173 027 505

- 1,11 %

- 1,52 %

+ 0,44 %

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

3. Des réductions d'emplois qui se poursuivent à un rythme insoutenable dans l'enseignement public

Les réductions d'emplois toucheront au premier chef l'enseignement agricole public , qui regroupe un peu moins des deux tiers des enseignants payés directement par l'État du programme 143 ainsi que les deux tiers de l'ensemble des personnels relevant du titre 2.

ÉVOLUTION DU PLAFOND D'EMPLOIS SUR 3 ANS (2008-2010)
Programme 143 - Enseignement public

2008 (1)

2009

2010

ETPT

EP (1)

ETPT

EP

ETPT

EP

Extension année pleine de n-1 : titulaires enseignants

- 35

- 60

Extension année pleine de N-1 : titulaires non enseignants

- 23

- 32

Extension année pleine de N-1 : transferts

Variations au titre de l'année précédente

- 58

- 92

Plafond en extension-pleine

11 247

10 833

Évolution des titulaires enseignants ( tiers d'année )

- 15

- 50

- 28

- 88

Évolution des titulaires non enseignants ( demi-année )

- 17

- 40

- 32

- 64

Évolution des vacataires ( année pleine )

- 64

- 64

+ 50

+ 50

Variations au titre de l'année

- 96

- 154

- 10

- 102

Lettre plafond (avant variation de périmètre)

12 926

11 237

Décentralisation ( année pleine )

- 1489

- 1 531

- 312

- 312

Autres transferts externes

- 97

- 97

Mouvements internes

- 35

- 35

Variations de périmètre

- 1 621

- 1 663

- 312

- 312

Plafond

11 305

10 925

(1) pour mémoire ; y compris rebasage de -11 (dont 5 enseignants) au titre des retraites supplémentaires constatées

TOS optants

- 202

TOS emplois vacants

- 45

TOS vacataires (chiffre en l'état du dossier)

- 12

TOS postes libérés retraites

- 53

Total

- 312

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

Ces nouvelles réductions conduiront quasi mécaniquement à des fermetures de classe : en quelques années, l'effort de maîtrise de la masse salariale a en effet été tel qu'il a conduit les établissements publics dans une situation extrêmement difficile.

A la rentrée 2009, la suppression d'un peu moins de 29 classes est pour l'heure envisagée. 13 ( * ) Le projet de budget pour 2009 conduit ainsi non seulement à annihiler l'effort d'ouverture effectué à la rentrée 2008, mais à un solde net de plus de 14 classes fermées entre 2007 et 2009.

Par ailleurs, le non-renouvellement de deux personnels administratifs sur trois partant à la retraite risque de conduire à des situations dramatiques dans les établissements : ce constat est partagé par l'ensemble des interlocuteurs entendus par votre rapporteur, tous s'accordant à redouter les conséquences de ce qu'il faut bien appeler un abandon administratif des établissements.

Au total, l'ensemble des crédits de l'action n° 1 auront régressé entre 2007 et 2009 de 5,82 % et les restrictions accumulées font naître dans l'esprit de votre rapporteur de très grandes inquiétudes.

En effet, votre rapporteur ne perçoit pas la logique de telles suppressions d'emplois, qui conduisent à réduire l'offre d'enseignement dans les régions et à affaiblir de manière indiscutable l'enseignement public.

Aux yeux de votre rapporteur, la situation est à présent telle qu'elle exige que soient prises des mesures immédiates : elle vous propose donc de rétablir 100 postes d'enseignants dans l'enseignement public ainsi que d'annuler l'intégralité des suppressions de postes administratifs.

4. Des engagements à l'endroit de l'enseignement privé du temps plein qui ne sont toujours pas tenus

L'enseignement privé du temps plein est également concerné par les suppressions d'emplois prévues par le projet de loi de finances pour l'ensemble du programme 143. En 2009, ce sont en effet 52 ETPT qui seront supprimés, dont 23 au titre des nouvelles réductions d'emplois.

A la rentrée 2009, 71 nouveaux postes d'enseignants seront donc supprimés. Là encore, votre rapporteur s'étonne de la poursuite de suppressions d'emplois dont la logique lui échappe alors même que les établissements agricoles, qu'ils soient publics ou privés, sont bien souvent confrontés à une croissance des demandes d'inscription formulées par les familles.

ÉVOLUTION DU PLAFOND D'EMPLOIS SUR 3 ANS (2008-2010)
Programme 143 - Enseignement privé

2008 (1)

2009

2010

ETPT

EP (1)

ETPT

EP

ETPT

EP

Extension année pleine de n-1 : titulaires enseignants

- 29

- 48

Extension année pleine de N-1 : titulaires non enseignants

Extension année pleine de N-1 : transferts

Variations au titre de l'année précédente

- 29

- 48

Plafond en extension-pleine

4 907

4 836

Évolution des titulaires enseignants ( tiers d'année )

- 10

- 39

- 23

-71

Évolution des titulaires non enseignants ( demi-année )

Évolution des vacataires ( année pleine )

Variations au titre de l'année

- 10

- 39

- 23

-71

Lettre plafond (avant variation de périmètre)

4 936

4 884

Décentralisation ( année pleine )

Autres transferts externes

Mouvements internes

Variations de périmètre

Plafond

4 936

4 884

(1) pour mémoire ; y compris rebasage de -10 au titre des retraites supplémentaires constatées

Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2009 est marqué une nouvelle fois par l'incapacité de l'État à tenir dans des délais raisonnables les engagements qu'il a pris.

Outre les dépenses de personnels enseignants, prises directement en charge par l'État, les établissements privés du temps plein sont également financés via une subvention de fonctionnement qui doit couvrir, à hauteur de 80 % de son montant, les rémunérations des personnels enseignants ainsi qu'à hauteur de 20 % les dépenses de fonctionnement proprement dites.

L'article R. 813-38 du code rural fixe les règles applicables au calcul de cette subvention. Il dispose ainsi que « la subvention de fonctionnement par élève est constituée, selon le mode d'accueil, d'une part correspondant à l'externat simple et, lorsqu'il y a lieu, d'une deuxième part correspondant à la restauration et d'une troisième part correspondant à l'hébergement.

Le montant de chaque part est fixé par référence au coût moyen par élève des dépenses correspondantes des établissements d'enseignement technique agricole publics, calculé à partir d'une enquête quinquennale effectuée par le ministère chargé de l'agriculture, sur la base d'un échantillon de référence d'établissements d'enseignement technique agricole publics dont la répartition des formations est comparable à celle qui existe dans les établissements mentionnés à l'article L. 813-8 du code rural.

Les dépenses mentionnées à l'alinéa précédent comportent les frais de personnel non enseignant et les dépenses de fonctionnement à la charge de l'État et des collectivités territoriales, selon les compétences qu'ils exercent à l'égard des établissements d'enseignement technique agricole publics.

Les parts représentatives des différents modes d'accueil sont fixées respectivement à 100 % pour l'externat simple, 60 % pour la restauration et 50 % pour l'hébergement des dépenses correspondantes des établissements publics constituant l'échantillon de référence.

Entre deux enquêtes quinquennales, la subvention est indexée dans des conditions déterminées par un arrêté conjoint du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé du budget.

Chaque année, un arrêté des mêmes ministres fixe, selon le mode d'accueil des élèves, un montant moyen de subvention à l'élève identique pour toutes les associations ou organismes responsables d'établissements d'enseignement agricole privés. »

Le 2 e et le 5 e alinéa de cet article font explicitement référence à une enquête quinquennale destinée à actualiser l'une des deux bases de calcul de la subvention de fonctionnement, à savoir le coût moyen par élève constaté dans le public.

Cette enquête doit en vertu du droit en vigueur avoir lieu tous les cinq ans. Pourtant, si le coût par élève a été fixé pour la première fois en 1994, il n'a pas été réévalué pendant huit années.

Dans l'intervalle, deux protocoles d'accord ont été signés :

- le premier, dit « Puech », devait couvrir les années 1995 à 1998 et prévoyait une enquête en 2007. Il n'a jamais été honoré ;

- le second, dit « Vasseur », devait couvrir les années 1998 à 2000 et prévoyait une enquête en 2000. A son tour, il n'a jamais été honoré : l'enquête conduite en 2001 n'a en effet pas été prise en compte.

Il a fallu un troisième protocole, dit « Gaymard », signé le 20 janvier 2003, pour que l'enquête, finalement effectuée en 2001, soit enfin prise en compte et permette la revalorisation de la subvention des établissements du temps plein.

Ce protocole prévoyait la prise en compte échelonnée sur trois ans de cette revalorisation : en 2005, le protocole « Gaymard » est donc arrivé à son terme : il a donc fallu 11 ans à l'État pour honorer pour la première fois ses engagements qui supposaient une revalorisation tous les 5 ans.

La conséquence de cette incurie est des plus simples : à peine le protocole « Gaymard » arrivé à son terme, il a fallu prévoir une nouvelle enquête afin de respecter la périodicité de 5 ans fixée par la loi. Au demeurant, cette nouvelle enquête était prévue par le protocole, dont elle constituait l'un des éléments.

Là encore, il a fallu du temps à l'État pour agir : ce n'est qu'en 2007 que cette nouvelle enquête a été menée à partir des coûts constatés en 2006. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2008, ses résultats étaient connus, mais n'avaient toujours pas été pris en compte.

ÉVOLUTION DU COÛT PAR ÉLÈVE
DANS L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE PUBLIC
(2001-2006)

2001

2006

Evolution 2001-2006 (en %)

Inscrit au PLF 2008

Inscrit au PLF 2009

Externe

1 324

1 411

6,57

1 340

1 351

Demi-pensionnaire

1 807

1 954

8,13

1 655

1 668

Interne

3 341

3 539

5,96

2 435

2 454

A cette occasion, votre rapporteur avait déjà souligné la nécessité pour l'État de tenir au plus vite ses engagements. Tel ne sera pas le cas en 2009, puisque la revalorisation effective du coût par élève, qui devait commencer l'année prochaine, est repoussée à 2010.

En 2009, seules les autorisations d'engagement (AE) correspondant à la première tranche de la revalorisation du coût par élève seront ouvertes.

Les établissements devront donc attendre 2010 pour bénéficier des premiers crédits de paiement (CP) liés à une revalorisation à un niveau constaté en 2006. Celle-ci ne sera pleinement effective qu'en 2012.

Le calendrier d'apurement des dettes ainsi contractées par l'État envers les établissements du temps plein est en effet le suivant :

- 9 millions d'euros d'AE seront ouverts en 2009 et convertis en CP en 2010 ;

- 10 millions d'euros d'AE seront ouverts en 2010 et convertis en CP en 2011 ;

- 10 millions d'euros d'AE seront ouverts en 2011 et convertis en CP en 2012.

Au total, 29 millions d'euros seront ainsi dégagés sur 4 ans.

Votre rapporteur se félicite de l'existence d'un calendrier et d'un chiffrage, mais ne comprend pas que le versement effectif de la première tranche de la revalorisation ait été différé jusqu'en 2010.

A cet égard, elle tient à rappeler que la prise en compte de l'enquête de 2006 n'a rien d'une concession bienveillante que le Gouvernement ferait à l'enseignement privé du temps plein. Les différents protocoles signés par les ministres successifs en charge de l'agriculture ne sont en effet que des modalités d'application, acceptées par les établissements, des obligations posées par le code rural. Ces dernières sont de niveau règlementaire, elles s'imposent au Gouvernement et, le cas échéant, l'inaction de ce dernier ne pourra qu'être sanctionnée par les juridictions compétentes.

Tel sera au demeurant très vraisemblablement le cas, puisque les établissements du temps plein ont engagé la procédure précontentieuse qui conduira inévitablement à la condamnation de l'État.

Votre rapporteur tient à le souligner, le fait même d'être arrivé à une action juridictionnelle des établissements démontre la légèreté avec laquelle les Gouvernements successifs ont analysé leurs obligations règlementaires.

Cette légèreté est d'autant plus insatisfaisante que les protocoles marquaient eux-mêmes un recul au regard des engagements gravés dans le code rural et n'avaient été acceptés par les établissements qu'afin de surmonter dans des conditions satisfaisantes l'inertie fautive dont faisaient preuve les Gouvernements.

En 2009, la troisième enquête quinquennale d'évaluation des coûts devrait être menée : si le projet de loi de finances reste en l'état, les pouvoirs publics, loin de mener cette nouvelle enquête en 2009, n'auront pas même commencé à prendre en compte les conséquences de la seconde.

Aux yeux de votre rapporteur, cette situation n'est pas acceptable : aussi vous proposera-t-elle d'entamer dès 2009 la revalorisation effective de la subvention , afin d'éviter que ne se développe un contentieux qui prospérera sans aucun doute.

5. Un enseignement privé du rythme approprié qui continue à supporter l'essentiel des mesures d'économie en exécution

S'agissant de l'enseignement privé du rythme approprié, votre rapporteur se félicite du fait que les engagements pris par le ministère de l'agriculture en 2004 aient été tenus.

En effet, ces établissements sont uniquement financés par le biais d'une subvention unique couvrant l'ensemble de leurs dépenses prises en charge par l'État , qui inclut notamment les rémunérations des formateurs qui y interviennent. Le mode de calcul de cette subvention est défini aux articles R. 813-46 et suivants du code rural .

Elle est assise sur le coût du formateur multiplié par un taux d'encadrement variant selon le niveau de formation des élèves accueillis. Par ailleurs, le coût du poste de formateur est défini par référence au coût moyen des formateurs intervenant dans des filières analogues des établissements privés du temps plein .

Là encore, la question de la revalorisation de ce coût s'est posée. Après deux années de blocage, elle est intervenue en 2003 et a été suivie en 2004 d'un protocole d'accord signé par le ministère de l'agriculture et les deux fédérations réunissant ces établissements.

Ce protocole organisait le rattrapage de subvention sur deux principes :

- un rattrapage formel au titre de l'année 2002, représentant 14 millions d'euros, versé en 4 années (2 millions d'euros en 2005, 3 millions d'euros en 2006, 4 millions d'euros en 2007 et 5 millions d'euros en 2008) ;

- une revalorisation effective dès 2004, représentant 4 millions d'euros.

Toutefois, la conclusion de ce rattrapage n'a été rendue possible que par l'introduction d'un plafond d'effectifs finançables qui vient désormais s'intercaler entre les effectifs réels et les effectifs contractualisés.

De fait, ce dispositif, en actant le découplage des effectifs réels et des effectifs financés, est venu limiter la croissance du nombre d'élèves accueillis dans l'enseignement privé du rythme approprié.

En tout état de cause, les engagements pris en 2004 par le ministère de l'agriculture et de la pêche ont été, dans leur ensemble, tenus.

Il y aurait tout lieu de s'en réjouir si la subvention versée aux établissements privés du temps plein ne faisait l'objet de reports de charge extrêmement significatifs.

Pour l'essentiel, ces reports de charge s'expliquent par l'intervention de mouvements inopportuns en exécution, le plus souvent justifiés par la nécessité de financer, au sein du ministère de l'agriculture et de la pêche, des plans d'urgence liés à des catastrophes ou calamités naturelles.

Les subventions versées aux établissements privés supportent régulièrement l'essentiel des conséquences de ces annulations. S'agissant en effet des crédits hors titre 2, ils se voient appliquer un taux de mise en réserve particulièrement important, transformant ainsi ces lignes budgétaires en un véritable vivier pour les annulations futures .

MISE À DISPOSITION DES CRÉDITS

PAR PRINCIPALE CATÉGORIE DE DÉPENSES

(1) y compris la subvention dite de « l'article 44 » soit 12,768 M€.

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

Ainsi se constituent, année après année, des reports de charge de plus en plus importants qui conduisent le ministère de l'agriculture et de la pêche à commencer l'exécution budgétaire avec une dotation inférieure aux besoins réels.

Pour sortir de ce cercle vicieux, il convient donc d'opérer une remise à niveau significative des crédits concernés, afin d'apurer une part substantielle du report de charge accumulé.

Aux yeux de votre rapporteur, cette remise à niveau est d'autant plus nécessaire que les reports de charges sont devenus tels que leur existence même annule l'effet des protocoles passés entre le ministère et ses partenaires .

ÉVOLUTION DES REPORTS DE CHARGES DEPUIS 2006 (RYTHME APPROPRIÉ)

LFI 2006

181,231 M€

Solde des engagements antérieurs à 2006

19,304 M€

Mouvements budgétaires

- 3,292 M€

Subvention due année scolaire 2005-2006

183,861 M€

Dotation nette

177,939 M€

Besoin sur année civile 2006

203,165 M€

LFI 2007

191,195 M€

Solde des engagements antérieurs à 2007

25,226 M€

Mouvements budgétaires

+ 3,377 M€

Subvention due année scolaire 2006-2007

189,390 M€

Dotation nette

194,572 M€

Besoin sur année civile 2007

214,616 M€

LFI 2008

193,398 M€

Solde des engagements antérieurs à 2008

20,044 M€

Mouvements budgétaires

- 12,437 M€

Subvention due année scolaire 2007-2008

196,920 M€

Dotation nette

180,961 M€

Besoin sur année civile 2008

216,964 M€

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

Au total, le rattrapage obtenu, après des mois de négociations, par l'enseignement privé du rythme approprié s'élevait en effet à 14 millions d'euros. Fin 2008, le seul décalage entre la dotation nette et le besoin sur année civile sera de 36 millions d'euros.

Les reports de charge réduisent donc à néant les accords passés par l'enseignement du rythme approprié.

Dans une moindre mesure, l'exécution budgétaire a un même effet sur la subvention allouée à l'enseignement privé du temps plein : si une partie du financement de ces établissements échappe à une mise en réserve excessive, les crédits concernés relevant du titre 2, la subvention versée au temps plein est également affectée par les mouvements d'exécution, ce qui conduit là encore à la constitution de reports de charge significatifs.

ÉVOLUTION DES REPORTS DE CHARGES DEPUIS 2006 (TEMPS PLEIN)

LFI 2006

111,017 M€

Solde des engagements antérieurs à 2006

8,020 M€

Mouvements budgétaires

- 2,285 M€

Subvention due année scolaire 2005-2006

104,47 M€

Dotation nette

108,732 M€

Besoin sur année civile 2006

112,489 M€

LFI 2007

105,050 ME

Solde des engagements antérieurs à 2007

3,757 M€

Mouvements budgétaires

- 2,776 M€

Subvention due année scolaire 2006-2007

106,6 M€

Dotation nette

102,274 M€

Besoin sur année civile 2007

110,357 M€

LFI 2008

106,435 M€

Solde des engagements antérieurs à 2008

8,083 M€

Mouvements budgétaires

- 6,654 M€

Subvention due année scolaire 2007-2008

106,6 M€

Dotation nette

99,781 M€

Besoin sur année civile 2008

114,683 M€

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

Sur l'ensemble des actions du programme, les reports de charge atteindront une somme globale de 58,52 millions d'euros en 2009. Une telle stratégie budgétaire ne peut donc plus être poursuive indéfiniment.

LES REPORTS DE CHARGES
DU PROGRAMME « ENSEIGNEMENT TECHNIQUE AGRICOLE »

(en euros)

Programme

Libellé

Reports de charges 2007

Reports de charges 2008

Report de charges 2009

Sous-action

AE

CP

AE

CP

AE

CP

14322

Accident du travail

1.052.240

1.052.240

2.060.890

2.060.890

2.210.890

2.210.890

14332

Privé du rythme approprié

32.632.647

20.044.022

7.971.147

24.399.079

20.520.452

36.768.384

14335

Privé temps plein

13.218.269

8.082.884

2.593.932

4.516.121

9.607.932

10.966.121

14340

Bourses sur critères sociaux

2.525

2.525

3.627.759

3.627.759

8.597.759

8.597.759

Programme 143

46,9

29,18

41,15

56,57

40,83

58.52

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche (octobre 2008)

Votre rapporteur vous proposera, en conséquence, d'engager l'apurement des reports de charge pesant sur les trois lignes budgétaires où leur croissance est exponentielle :

- la sous-action « Enseignement privé du rythme approprié », à hauteur de 25 millions d'euros ;

- la sous-action « Enseignement privé du temps plein », à hauteur de 4,6 millions d'euros ;

- la sous-action « Accidents du travail », à hauteur de 2 millions d'euros.

S'agissant de la sous-action « Bourses sur critères sociaux », le report de charge potentiel a, semble-t-il, été apuré.

6. Une gestion budgétaire qui doit être revue en profondeur

Votre rapporteur s'interroge également sur les pratiques qui peuvent conduire à aggraver ainsi en exécution des sous-dotations prévisibles dès le stade de l'autorisation.

Au demeurant, cette sous-dotation est indiscutable et était déjà soulignée par la Cour des comptes dans ses rapports successifs sur l'exécution de la loi de finances pour 2007 : « par ailleurs, certaines des annulations effectuées dans les décrets d'avance n'ont pas porté sur des crédits devenus sans objet, contrairement à ce que prévoit l'article 14 de la LOLF. Dans certains cas, l'annulation a créé une situation d'insuffisance de crédits : ainsi des programmes Rayonnement culturel et scientifique (pour la subvention à l'agence pour l'enseignement français à l'étranger), Enseignement technique agricole ou Audiovisuel extérieur (contributions à RFI et à TV5 Monde). » 14 ( * )

En conséquence, votre rapporteur souhaite que l'approche budgétaire retenue pour le programme 143 soit profondément transformée :

- un rebasage des crédits doit être effectué au niveau des besoins réels pour 2009 et être pris intégralement en compte dans la préparation de la loi de finances pour 2010 ;

- l'enseignement technique agricole doit cesser d'être la variable d'ajustement principale choisie par le ministère de l'agriculture et de la pêche en autorisation comme en prévision . A cet égard, votre rapporteur souhaite que des engagements extrêmement clairs soient pris par le ministre concerné ;

- afin de rendre impossible les annulations massives de crédits hors titre 2 destinés à l'enseignement privé, les différents taux de mise en réserve doivent être portés à un niveau soutenable, qui prennent en compte le fait, au moins pour le rythme approprié, que ces crédits servent essentiellement à la rémunération de personnels ;

- enfin, le ministère de l'éducation nationale étant, en vertu des principes de la LOLF, mis à contribution dès lors que la sous-dotation de l'enseignement agricole devient particulièrement criante, des réunions de suivi budgétaire communes aux deux ministères doivent être organisées régulièrement tout au long de l'année.

Votre rapporteur a eu l'occasion de participer à la première du genre et souhaite que l'expérience se renouvelle aussi fréquemment que nécessaire.

* 13 Le décomptage par classes prend en compte les sections, qui équivalent à ½ classe, et les domaines EIL, qui équivalent à 1/8 classe. Le nombre de classes supprimées n'est donc pas nécessairement un entier.

* 14 Cour des comptes, Rapport sur la gestion et les résultats budgétaire de l'État pour 2007.

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