Question de M. MADRELLE Philippe (Gironde - Socialiste et républicain) publiée le 17/11/2016

M. Philippe Madrelle attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche sur les conséquences économiques de la paralysie du trafic sur la rocade bordelaise. Il lui rappelle que, depuis 1995, en tant que président du conseil départemental, il avait fait réaliser une étude de faisabilité pour un grand contournement autoroutier de l'agglomération bordelaise. En 2001, le contrat de plan confirmait cette faisabilité et, en 2004, le ministre de l'équipement de l'époque confirmait également les conditions de réalisation de ce projet. Il souligne la position de Bordeaux qui occupe un point essentiel du dispositif autoroutier français et européen. L'augmentation du trafic de transit et du transport de fret, conjuguée à l'augmentation des conséquences économiques de l'allongement de la durée des parcours exigerait la construction d'un grand contournement autoroutier de Bordeaux permettant d'enrayer cette paralysie quotidienne. En ce cas, il lui demande de bien vouloir mettre à nouveau à l'ordre du jour l'étude de la réalisation de cette infrastructure indispensable à l'économie de la Nouvelle-Aquitaine.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 25/01/2017

Réponse apportée en séance publique le 24/01/2017

M. Philippe Madrelle. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais aborder un problème récurrent pour de nombreux habitants de la Gironde et de la métropole bordelaise, celui de l'asphyxie et de la saturation du trafic routier sur la rocade bordelaise, la plus congestionnée de France !

Ce véritable « serpent de mer » empoisonne le quotidien, comme en témoignent ces chiffres éloquents : plus de 100 000 véhicules par jour sur le pont d'Aquitaine et plus de 140 000 sur la rocade est !

Par ailleurs, en moyenne 23 000 poids lourds empruntent quotidiennement la rocade bordelaise et la densité du trafic de fret grève lourdement l'usage de cette infrastructure. Selon les chiffres de votre propre ministère, monsieur le secrétaire d'État, chaque camion a une influence sur le trafic équivalant à 2,5 véhicules légers.

Si l'on veut rendre une image réelle de la saturation de la rocade de Bordeaux, il faut donc comprendre que celle-ci supporte des trafics moyens journaliers hors du commun, de l'ordre de 265 000 véhicules par jour !

Chaque automobiliste communautaire doit consacrer 1 heure et 20 minutes pour ses déplacements quotidiens. Les plus de 4,7 millions de déplacements journaliers dans le département, dont 3,3 millions à l'intérieur de la seule métropole, sont effectués à 65 % en voiture et 226 000 sont affectés par un passage sur la rocade.

Les projections les plus sérieuses annoncent une progression effrayante – de plus de 2 millions – du nombre des déplacements dans l'agglomération ; elles font craindre le pire.

Une telle saturation se traduit d'ores et déjà par le gaspillage quotidien de plus de 300 000 heures, dont au moins 60 000 heures perdues sur la rocade par tous ceux qui travaillent et sont obligés d'emprunter cette voie périurbaine.

Au-delà de tout ce temps perdu, il faut tenir compte des conséquences économiques et environnementales de la thrombose de cette infrastructure, que je chiffre à près de 1 million d'euros par jour !

Dès 1989, alors président du conseil départemental, j'avais émis l'idée d'un grand contournement autoroutier. En 1995, j'avais fait réaliser une étude de faisabilité pour un raccordement des autoroutes en provenance de Paris – l'A10 et la route nationale 10 –, de Lyon – l'A89 –, de l'Espagne – l'A64 et l'A63. En 2001, le contrat de plan confirmait cette faisabilité. Puis sont intervenus les débats nationaux du Grenelle de l'environnement, aboutissant à l'abandon du projet.

Vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, Bordeaux est un point de passage obligé sur l'itinéraire entre Paris, le nord de l'Europe et l'ouest espagnol, le Portugal, voire les pays du Maghreb.

Cet élément essentiel du dispositif autoroutier français et européen est devenu le maillon faible de cet axe nord-sud de l'Europe.

La réalisation d'un grand contournement de l'agglomération bordelaise s'impose de façon urgente ! Il y va de l'avenir économique de toute la région Nouvelle Aquitaine ! Si seulement 20 % du trafic des 240 000 véhicules empruntant au quotidien les deux ponts d'Aquitaine et François Mitterrand était transféré, le gain économique ainsi que le gain de temps seraient considérables ! Et je ne parle même pas des conséquences en termes d'émissions de gaz à effet de serre !

Les statistiques de l'Union routière de France obligent à être alarmiste. Le trafic des poids lourds à Hendaye s'est accru de près de 50 % entre 1985 et les années 2000, soit plus du double de la moyenne nationale !

Comme pour le pont de Normandie, le viaduc de Millau, la deuxième ceinture autoroutière lyonnaise ou le doublement de l'autoroute A9 à Montpellier, l'agglomération bordelaise doit pouvoir bénéficier de la construction d'un contournement autoroutier.

Il n'est plus question aujourd'hui d'une approche velléitaire, du simple énoncé d'une question. Ce dont nous avons besoin, c'est d'une décision politique prioritaire concernant cette infrastructure indispensable et plus que jamais nécessaire. Des milliers d'automobilistes n'en peuvent plus d'être ainsi pris en otage quotidiennement, coincés dans leur voiture, et c'est l'avenir de toute une région qui est en jeu !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Le Gouvernement est sensible à la problématique de congestion du trafic sur la rocade bordelaise, qui mêle trafic local – majoritairement – et trafic de transit.

Comme vous le soulignez, monsieur le sénateur, un grand contournement autoroutier avait un temps été envisagé afin d'écarter le trafic de transit de cet itinéraire. Il s'agissait d'une infrastructure autoroutière d'une centaine de kilomètres en tracé neuf, dont le coût était estimé, voilà dix ans, à plus de 1 milliard d'euros.

Conformément aux orientations du Grenelle de l'environnement, ce projet a été abandonné en 2008, car il ne répondait pas à une nécessité de sécurité ou d'utilité collective et présentait un impact non négligeable sur l'environnement. De ce fait, il n'a pas figuré au schéma national des infrastructures de transport de 2011.

La commission « Mobilité 21 », qui a priorisé les grands projets d'infrastructures de transport en 2013, n'a pas non plus retenu le projet de grand contournement de Bordeaux. Aujourd'hui, aucun nouvel élément ne permet de remettre en cause ces conclusions.

Toutefois, l'État est pleinement conscient des problèmes de congestion que rencontrent quotidiennement les usagers de la rocade. Celle-ci cumule à la fois les déplacements quotidiens des habitants de la métropole et le passage du trafic de transit français et européen.

C'est pourquoi, depuis 2009, l'État s'est engagé aux côtés de Bordeaux Métropole pour son élargissement à 2x3 voies dans les plus brefs délais.

Les travaux d'élargissement de la moitié sud de la rocade ouest, entre les échangeurs 10 et 16, se sont achevés en novembre 2016 et ont coûté plus de 100 millions d'euros, pris en charge à 75 % par l'État.

Les travaux concernant la moitié nord de la rocade ouest débuteront en 2017. Là encore, un investissement important de plus de 130 millions d'euros est consenti, à parité, entre l'État et la métropole de Bordeaux.

Ces investissements permettront d'améliorer significativement la circulation sur la rocade et, ainsi, de diminuer les temps de parcours. Le premier bilan des mises en service des élargissements progressifs fait d'ores et déjà ressortir des résultats très positifs : les trafics sur la rocade ont été fluidifiés et les voiries urbaines, délestées.

C'est donc dans ce sens que le Gouvernement veut conduire une politique des infrastructures de transport pour notre pays, de manière à répondre aux attentes des Français tout en ciblant les investissements de l'État, dans un contexte budgétaire que l'on sait contraint.

M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.

M. Philippe Madrelle. Je reconnais les quelques efforts fournis par l'État, mais, en tant qu'utilisateur régulier de cette rocade, je sais à quel point la question doit être traitée en urgence. La thrombose est réelle !

Par conséquent, monsieur le secrétaire d'État, votre réponse ne pourra satisfaire les populations girondines. D'ailleurs, le nombre de réactions recueillies à la suite de l'enquête menée par notre grand quotidien régional Sud-Ouest sur cette problématique est révélateur de l'exaspération. Aujourd'hui, huit personnes interrogées sur dix se déclarent réellement en colère. Elles se retrouvent bloquées dans leur véhicule, avec des murs de camions qui défilent ! Pour elles, il faut absolument dériver le flux des poids lourds !

Et je n'évoquerai pas, au-delà de l'exaspération des automobilistes, la gabegie économique et le problème de la sécurité routière. Je vous assure, monsieur le secrétaire d'État, que le problème est très grave.

À Montpellier, on a fait ce qu'il fallait faire ! C'est maintenant au tour de Bordeaux, et de cet axe nord-sud qui est réellement bloqué.

Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, j'ai souhaité intervenir assez fortement sur le sujet ce matin.

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