Question de M. MADRELLE Philippe (Gironde - SOC) publiée le 09/04/2009

M. Philippe Madrelle appelle l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les dramatiques conséquences de l'amputation de 37 % de sa dotation pour les instituts universitaires de technologie (IUT). Pour l'IUT de Bordeaux 3, cette amputation budgétaire représente une perte de 300 000 euros sur un budget de 800 000 euros. Le nouveau système d'allocation des ressources budgétaires pour les établissements publics (« SYMPA ») ne convient pas aux besoins de financement du service d'enseignement supérieur technologique et de recherche. En conséquence, il lui demande de bien vouloir revenir sur cette amputation budgétaire afin de sauvegarder ce service public des IUT, qui depuis 1967, s'attache avec succès à la formation professionnelle de milliers d'étudiants.

- page 852


Réponse du Secrétariat d'État chargé de l'outre-mer publiée le 27/05/2009

Réponse apportée en séance publique le 26/05/2009

La parole est à M. Philippe Madrelle, auteur de la question n° 517, adressée à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Philippe Madrelle. Depuis leur création, voilà quarante ans, les instituts universitaires de technologie représentent en France un exemple original et envié de l'université française, qui fonctionne bien. Mais il est fort à craindre de devoir aujourd'hui utiliser l'imparfait…

Devant l'inquiétude des enseignants, j'avais demandé, en décembre dernier, à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, que les IUT puissent continuer à être dotés de moyens respectant leur spécificité.

Dans sa réponse, le 20 janvier dernier, Mme la ministre rappelait que les IUT étaient « les piliers de notre système d'enseignement supérieur » et que la mise en service de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, dit loi LRU, devait profiter aux IUT dont les budgets ne devaient pas baisser. Elle m'assurait alors que les moyens affectés aux IUT seraient consolidés.

Mais force est de constater que la réalité est tout autre ! À titre d'exemple, en application de la loi LRU et du nouveau système d'allocation des ressources aujourd'hui en vigueur, l'IUT de l'université de Bordeaux 3se trouverait amputé de près de 37 % de sa dotation budgétaire et d'un quart de ses emplois, ce qui représente une perte de 300 000 euros au titre de la dotation globale de fonctionnement, la DGF, sur un budget de 820 000 euros.

Les directeurs d'IUT dénoncent l'inadaptation de ce nouveau système d'allocation des ressources budgétaires pour les établissements publics, dit SYMPA – il ne l'est d'ailleurs pas tant que cela –, qui ne convient pas aux besoins de financement du service d'enseignement supérieur technologique et de recherche, en particulier aux IUT.

Le système d'allocation utilisé précédemment, le dispositif San Remo, était fondé sur les besoins déterminés à partir d'un programme pédagogique national. Ce système avait le mérite de préserver l'aspect national et la valeur du diplôme, quels que soient la région et l'IUT concernés.

Vous comprendrez l'inquiétude des professeurs, mais aussi celle des étudiants et de leurs familles, face à une telle situation de paupérisation. Privés de moyens et de budget, les IUT sont en péril.

À ce jour, malgré une série de dispositifs – la charte de bonne conduite régissant les relations entre les universités et les IUT, le contrat interne d'objectifs et de moyens à négocier en 2009 par chaque IUT avec son université, la création d'un comité de suivi quadripartite comprenant les présidents d'université et d'IUT, les directeurs d'IUT et la direction générale pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle, la DGESIP, du ministère –, le système d'allocation budgétaire SYMPA conduirait à une baisse très importante – de 35 % en moyenne – de la dotation globale de fonctionnement et d'investissement et à la suppression de 15 % à 25 % de postes statutaires, suppression qui ne saurait être compensée par des contrats précaires. Tout cela ne peut que menacer la pérennité des IUT.

Faut-il le rappeler, les enquêtes nationales menées sur le devenir des diplômés des IUT montrent le parcours de réussite effectué par les étudiants titulaires du Diplôme universitaire de technologie, ou DUT. La cinquième enquête nationale fait état de nombreux exemples illustrant la nécessaire et efficace spécificité des IUT dans la sphère universitaire.

Il ne faut pas oublier que, depuis quarante ans, les IUT assurent une belle mission de formation de techniciens supérieurs et de cadres intermédiaires.

Cette filière universitaire et professionnelle est unanimement reconnue par le monde des entreprises. Les cent seize IUT de France ont constitué l'un des vecteurs essentiels de la démocratisation et de la professionnalisation de l'enseignement supérieur et de l'administration du territoire.

Les IUT accueillent plus de 140 000 étudiants, dont 36 % sont titulaires de bourses, avec un taux de réussite supérieur à 75 %.

Tenant une grande part de réussite dans ce partenariat entre l'université et les milieux professionnels les plus variés, les IUT représentent en France un exemple original, qui fonctionne bien.

Décidément, les conséquences du désengagement de l'État n'épargnent aucun domaine : les collectivités locales, l'hôpital public, les transports, les services publics ! Après quatre mois de conflit, les universités françaises semblent toujours dans l'impasse et se trouvent très affaiblies. On a l'impression d'un grand et regrettable gâchis.

Que propose le Gouvernement pour assurer la survie des IUT ? Il ne peut pas prendre la responsabilité de casser ainsi une structure qui fonctionne et qui nous est enviée par les universités étrangères Sachez, monsieur le secrétaire d'État, que votre réponse est attendue avec une certaine fébrilité !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Valérie Pécresse, qui est retenue en ce moment au Collège de France.

Vous évoquez une diminution potentielle de crédits. C'est le contraire ! Permettez-moi de vous dire que la présentation que vous faites de la situation de l'IUT de Bordeaux ne correspond en rien à la réalité de décisions qui ont été prises par le Gouvernement en application de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités.

À ma connaissance, l'IUT de Bordeaux 3 dépend de l'Université de Bordeaux 3. Cette dernière dispose désormais d'un budget global avec des crédits non fléchés, qu'elle administre librement et, contrairement à ce que vous laissez croire, elle voit sa dotation en crédits de fonctionnement progresser de 17,6 % en 2009 par rapport à 2008, du jamais vu dans l'histoire récente de l'Université de Bordeaux 3 !

Même pour créer une fébrilité, qui peut être utile, dans certaines périodes, à certains combats politiques, il ne faut pas énoncer des contre-vérités, d'autant que des garanties ont été apportées, au sein même de l'université, pour que les relations entre l'université et l'IUT soient les meilleures possibles et que ce dernier soit doté des crédits nécessaires à son bon fonctionnement.

Je vous confirme donc le grand attachement du Gouvernement aux IUT, comme en témoignent les mesures qui ont été prises, notamment la charte, établie en décembre dernier, visant à définir les principes de bonnes relations entre les universités et leurs IUT.

Toutes les universités et IUT sont en train de travailler à des contrats d'objectifs et de moyens, qui seront finalisés avant le 30 juin, afin que, à l'intérieur du budget des universités – et ce sera vrai pour Bordeaux 3 comme pour toutes les universités – soient fléchés les crédits affectés aux IUT, selon les besoins de chacun.

Les présidents d'université se sont engagés, à la demande de Mme la ministre, à maintenir jusqu'en 2010 les moyens dédiés à leurs IUT.

Vous le voyez, il n'y a aucune raison d'être inquiet quant à la volonté du Gouvernement de porter très haut l'ambition des IUT. C'est une volonté politique forte – je sais que vous ne la partagez pas – de faire vivre l'autonomie des universités et de laisser les organisations et les instances universitaires, en l'occurrence, le conseil d'administration de Bordeaux 3, décider de la meilleure affectation des crédits et des moyens consacrés à l'IUT, en s'entourant de toutes les précautions qui ont été prises.

Monsieur le sénateur, l'augmentation historique des moyens de l'université de Bordeaux 3, donc de ceux de l'IUT, devrait permettre d'accomplir du bon travail, une fois que l'esprit de la réforme sera bien compris par chacun des acteurs.

M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.

M. Philippe Madrelle. Monsieur le secrétaire d'État, certes, le budget de l'IUT pour l'année civile 2009 a été reconduit sur les bases de celui de 2008, puisque le nouveau système d'allocation des ressources budgétaires pour les établissements publics, dit SYMPA, découlant de la loi LRU n'est entré en vigueur que le 1er janvier 2009.

Néanmoins, pour 2010 et surtout les années suivantes, l'application du système SYMPA aura de graves conséquences, puisqu'il se traduira, en moyenne, par une diminution de 35 % de la dotation globale de fonctionnement et de 15 à 25 % des emplois.

Je constate que vous essayez de vous défausser sur les universités en prévoyant que chaque IUT devra négocier avec l'université dont il dépend.

Or comment certaines universités, telles les universités de lettres et de sciences humaines, notamment celle de Bordeaux 3, pourront-elles donner aux IUT l'équivalent des moyens affectés à ces derniers par l'État en 2008 ou en 2009 pour leur permettre de répondre à leurs besoins, alors même que les sommes allouées aux universités sont déjà largement insuffisantes ? En effet, ce budget n'étant pas déterminé, lui non plus, en fonction des besoins des unités de formation et de recherche, les UFR, il ne pourra jamais répondre à ceux de l'IUT.

Le problème de fond, c'est celui du désengagement de l'État à l'égard de l'université dans sa totalité.

- page 5026

Page mise à jour le