Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l'action publique.

Rappel au Règlement

Mme Éliane Assassi .  - Le débat qui va s'ouvrir est fondamental. Les dernières campagnes électorales, la place des médias dans la vie publique ont mis en exergue l'exaspération face au rôle de l'argent dans la vie politique.

Des affaires d'enrichissement personnel et de corruption ont rythmé l'actualité en masquant le dévouement, la probité et le sens de l'intérêt général de l'immense majorité des élus.

Comment, dans ces conditions, ne pas débattre ici de la représentativité des élus, de la place des médias, de leurs rapports avec puissance d'argent et forces politiques, mais aussi des instituts de sondages aux mains des grands groupes privés ?

Le Parlement doit demeurer un lieu de débat alternatif. Où aura-t-il lieu sinon ? Au Conseil des ministres ?

De nombreuses, trop nombreuses irrecevabilités ont été décrétées pour refuser d'emblée l'examen d'amendements. La plupart au motif qu'ils n'auraient pas, comme l'exige l'article 45 de la Constitution, de lien direct voire indirect avec le projet de loi.

Monsieur le président de la commission des lois, la réforme de 2008 avait pourtant pour objet d'élargir le droit d'amendement, non de le restreindre. Dois-je lire des extraits du rapport de M. Hyest, votre prédécesseur, et de ses interventions en séance publique dans ce sens ?

Le Parlement doit défendre ses prérogatives avec fermeté face à un Conseil constitutionnel dont la légitimité pose question et qui restreint ainsi le champ du droit d'amendement dans l'un de ces revirements de jurisprudence dont il a le secret.

Le renforcement du pouvoir exécutif décidé et mis en oeuvre très rapidement par M. Macron doit nous faire réfléchir. Le droit d'amendement est crucial pour respecter l'équilibre des pouvoirs. L'utilisation habile de l'article 45 donne au Gouvernement la clé du droit d'amendement. Monsieur le président de la commission des lois, je vous recommande la plus grande prudence dans l'utilisation de cet article qui met en péril les prérogatives du Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois .  - Les auteurs de certains amendements, sur tous nos bancs, ont eu à déplorer l'irrecevabilité appliquée à leurs textes, car ils n'étaient pas en rapport avec le projet de loi examiné. Ce fut également le cas dans une période récente, notamment sur le projet de loi relatif à la justice du XXIe siècle et sur le projet de loi de lutte contre la corruption, présenté par Michel Sapin. Le Conseil constitutionnel eut alors l'occasion de réaffirmer sa jurisprudence.

La commission des lois est le gardien de la procédure législative définie par la Constitution dont le Conseil constitutionnel reste le seul interprète.

Ce n'est pas le titre d'un projet de loi qui détermine le champ des amendements possible. C'est le contenu même des dispositions proposées par le Gouvernement qui définit l'irrecevabilité de certains amendements. En tout état de cause, le Conseil constitutionnel aura sans doute une nouvelle fois l'occasion de dire le droit s'il est saisi.

M. le président.  - Acte est donné de vos interventions.

Discussion des articles du projet de loi

ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°107, présenté par M. Cabanel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 44, il est inséré un article L. 44-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 44-1.  -  Ne peuvent faire acte de candidature les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes :

« 1° Les crimes ;

« 2° Les délits prévus aux articles 222-27 à 222-31, 222-33 et 225-5 à 225-7 du code pénal ;

« 3° Les délits traduisant un manquement au devoir de probité prévus à la section 3 du chapitre II du titre III du livre IV du même code ;

« 4° Les délits traduisant une atteinte à la confiance publique prévus aux articles 441-2 à 441-6 dudit code ;

« 5° Les délits de corruption et de trafic d'influence prévus aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 du même code ;

« 6° Les délits de recel, prévus aux articles 321-1 et 321-2 dudit code, ou de blanchiment, prévus aux articles 324-1 et 324-2 du même code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;

« 7° Les délits prévus aux articles L. 86 à L. 88-1, L. 91 à L. 100, L. 102 à L. 104, L. 106 à L. 109, L. 111, L. 113 et L. 116 du présent code ;

« 8° Le délit prévu à l'article 1741 du code général des impôts.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. » ;

2° Le 3° de l'article L. 340 est ainsi rétabli :

« 3° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions mentionnées à l'article L. 44-1. » ;

3° Au premier alinéa de l'article L. 388, les mots : « loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats » sont remplacés par les mots : « loi n° ... de ... pour la régulation de la vie publique » ;

4° Au dernier alinéa de l'article L. 558-11, après la référence : « L. 203 », sont insérés les mots : « ainsi que le 3° ».

II.  -  Le a du 3° du I de l'article 15 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales est ainsi rédigé :

« a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« ?I.  -  Le titre Ier du livre Ier du présent code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales, à l'exception des articles L. 15, L. 15-1, L. 46-1 et L. 66, est applicable à l'élection :? ; ».

III.  -  Les I et II du présent article s'appliquent :

1° S'agissant des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers de Paris, à compter du premier renouvellement général des conseils municipaux suivant la promulgation de la présente loi ;

2° S'agissant des conseillers départementaux, à compter du premier renouvellement général des conseils départementaux suivant sa promulgation de la présente loi ;

3° S'agissant des conseillers régionaux, des conseillers à l'Assemblée de Corse, des conseillers à l'assemblée de Guyane et des conseillers à l'assemblée de Martinique, à compter du premier renouvellement général des conseils régionaux suivant la promulgation de la présente loi.

M. Henri Cabanel.  - Les Français attendent des actes qui illustrent l'exemplarité et l'équité qu'ils exigent désormais de leurs responsables politiques. L'amendement obligeant à fournir un casier judiciaire vierge a pour but de répondre à cette double exigence, qui est conforme au programme d'Emmanuel Macron.

Plus de 300 professions exigent un casier judiciaire vierge pour toute candidature. Comment un élu pourrait-il s'en exonérer ?

On objecte l'anticonstitutionnalité de la mesure ? Le texte a pourtant été voté à l'Assemblée nationale. Je vous demande de considérer la nécessité de changer de pratiques.

M. le président.  - Amendement identique n°197 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mme Archimbaud.

M. Joël Labbé.  - Je souscris aux explications de M. Cabanel. Seul un souci technique m'a empêché de signer son amendement. Il répond à la crainte d'une inéligibilité à vie. Il oublie toutefois de répondre à un certains nombres de préoccupations. Par exemple, des faucheurs volontaires d'OGM, que je salue, seraient écartés... (Rires sur des bancs du groupe Les Républicains) ou encore celles des résistants à la ferme des mille vaches... (M. Alain Bertrand applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°232 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Bertrand et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mme Jouve et M. Requier.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 44, il est inséré un article L. 44-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 44-1.  -  Ne peuvent faire acte de candidature les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes :

« 1° Les crimes ;

« 2° Les délits prévus aux articles 222-27 à 222-31, 222-33 et 225-5 à 225-7 du code pénal ;

« 3° Les délits traduisant un manquement au devoir de probité prévus à la section 3 du chapitre II du titre III du livre IV du même code ;

« 4° Les délits traduisant une atteinte à la confiance publique prévus aux articles 441-2 à 441-6 dudit code ;

« 5° Les délits de corruption et de trafic d'influence prévus aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 du même code ;

« 6° Les délits de recel, prévus aux articles 321-1 et 321-2 dudit code, ou de blanchiment, prévus aux articles 324-1 et 324-2 du même code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;

« 7° Les délits prévus aux articles L. 86 à L. 88-1, L. 91 à L. 100, L. 102 à L. 104, L. 106 à L. 109, L. 111, L. 113 et L. 116 du présent code ;

« 8° Le délit prévu à l'article 1741 du code général des impôts.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. » ;

2° Le 3° de l'article L. 340 est ainsi rétabli :

« 3° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions mentionnées à l'article L. 44-1. » ;

3° Au premier alinéa de l'article L. 388, la référence : « loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats » est remplacée par la référence : « loi n°     du      pour la régulation de la vie publique » ;

4° Au dernier alinéa de l'article L. 558-11, après la référence : « L. 203 », sont insérés les mots : « ainsi que le 3° ».

II.  -  Le a du 3° du I de l'article 15 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales est ainsi rédigé :

« a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« ?I.  -  Le titre Ier du livre Ier du présent code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales, à l'exception des articles L. 15, L. 15-1, L. 46-1 et L. 66, est applicable à l'élection :? ; ».

Mme Françoise Laborde.  - La conformité aux lois de la République est l'une des premières qualités que nos concitoyens recherchent chez leurs élus. La solution proposée dans cet amendement n'est pas satisfaisante à cause du principe d'individualisation des peines. D'autant que la liste des crimes et délits mentionnés n'est pas exhaustive. À l'heure actuelle, les magistrats disposent de suffisamment de possibilités. D'où notre souhait de revenir au texte examiné en février dernier à l'Assemblée nationale.

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois.  - Avis défavorable à ces trois amendements qui, paradoxalement, semblent plus sévères que le texte de la commission, alors qu'ils le sont moins. En effet, l'effacement d'une mention sur le bulletin n°2 peut se faire dans un délai de six mois après la condamnation. La règle s'appliquerait de manière très aléatoire, selon que le candidat ait pris ses précautions ou non.

Le Sénat doit protéger les droits fondamentaux. Or quoi de plus fondamental pour un citoyen que de pouvoir se présenter à une élection. Cela concerne tout de même 1,6 million de Français qui se présentent aux élections, y compris municipales. C'est loin d'être anecdotique. Ne pas prévoir l'intervention d'un juge pour décider d'une inéligibilité est choquant.

Nous prévoyons une règle plus sévère, égale pour tous, en évitant une application rétroactive. Avis fermement défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice.  - Le Gouvernement est défavorable aux amendements car s'il partage le souhait de renforcer la probité des candidats, cette mesure pourrait s'analyser comme une peine automatique, contraire au principe d'individualisation des peines. Nous avons donc fait le choix d'une peine d'inéligibilité obligatoire mais expressément prononcée par le juge, qui pourra l'écarter par une décision spécialement motivée.

M. Joël Labbé.  - Je retire mon amendement au profit de l'amendement n°107 de M. Cabanel.

Mme Françoise Laborde.  - Je retire aussi le mien.

Les amendements nos197 rectifié bis et 232 rectifié bis sont retirés.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Pour restaurer la confiance dans la vie publique, commençons par tenir nos promesses. Le président de la République a annoncé à plusieurs reprises qu'il rendrait impossible la candidature aux élections parlementaires et présidentielle à celui qui n'a pas un casier judiciaire vierge. Il est vrai que le président de l'Assemblée nationale lui-même avait promis de soutenir le vainqueur des primaires de la gauche et ne l'a pas fait... (Exclamations amusées à droite)

M. Alain Gournac.  - Hors sujet !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - L'argument constitutionnel sera vite levé. Lorsqu'il a examiné la loi Sapin 2, le Conseil constitutionnel a considéré qu'une telle mesure relevait d'une loi organique. Eh bien, vous ne pourrez pas vous dérober quand nous examinerons le projet de loi organique !

Notre amendement est complémentaire de la mesure voulue par le Gouvernement, car celle-ci ne s'appliquera qu'aux infractions perpétrées après la promulgation de la loi, alors que les délits antérieurs sont consignés au casier judiciaire.

Nos concitoyens ne veulent plus de passe-droits ni de combines. (M. Joël Labbé applaudit.)

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'argument du respect des promesses est important. J'en ajouterai d'autres. Dans sa décision du 18 novembre 1982, le Conseil constitutionnel a considéré que « la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont pas exclus pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité, ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu ». C'est bien ce dont il s'agit avec notre amendement, qui ne concerne que les comportements malhonnêtes prouvés et condamnés lors d'un procès régulier et contradictoire.

En outre, l'inscription d'une condamnation au bulletin numéro deux n'est pas une peine complémentaire, mais une conséquence de plein droit de cette condamnation - à laquelle le juge peut cependant déroger.

La jurisprudence constitutionnelle a évolué, comme Mme la ministre le sait bien, puisqu'elle n'écarte plus le principe des peines obligatoires, à condition que le principe d'individualisation des peines soit respecté. C'est le cas ici, puisque le juge peut à tout moment ordonner l'omission de la mention d'une condamnation au casier judiciaire.

Enfin, il y a un lien manifeste entre l'absence d'inscription au casier de condamnations pour atteinte à la probité et l'exercice d'un mandat électif. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent aussi.)

L'amendement n°107 n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°108 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles 222-33 et 222-33-2 du code pénal ;

Mme Laurence Rossignol.  - Les élus sont aussi des employeurs. Leur comportement vis-à-vis de leurs collaborateurs peut faire l'objet de condamnations pénales. Songeons à un maire condamné pour agression sexuelle envers une subordonnée et qui continue néanmoins d'exercer son mandat. La victime est, elle, totalement détruite.

Il s'agit par cet amendement de garantir l'exemplarité des élus, mais aussi de protéger leurs salariés, dans le cadre de ce lien de subordination très particulier, en étendant l'inéligibilité aux condamnations pour harcèlement moral et sexuel.

M. le président.  - Amendement n°234 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Collombat, Mme Costes, M. Guérini et Mme Jouve.

Après l'alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles 222-7 à 222-16-3, 222-33, 222-33-2 à 222-33-2-2 et 223-13 du présent code.

Mme Françoise Laborde.  - Ce amendement part du même principe que l'amendement précédent, en allant plus loin.

L'article premier réserve la peine complémentaire obligatoire d'inéligibilité aux crimes et à une liste de délits. Le problème des listes est qu'elles sont rarement exhaustives... Pourquoi les délits financiers seraient-ils plus sévèrement traités que les atteintes aux personnes ? Le comportement des élus doit être irréprochable dans leur rapport aux autres comme en matière financière.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La rédaction de l'amendement de Mme Rossignol atteint, Madame Laborde, vos objectifs. Retrait de l'amendement n°234 rectifié au profit de l'amendement n°108 rectifié ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Vous soulevez une question à laquelle le Gouvernement est très attentif. Avec Mme Schiappa, nous avons engagé un travail dans ce domaine et espérons avancer très rapidement. Nous sommes néanmoins soucieux de la cohérence du texte et du respect de la Constitution. Vous proposez d'étendre la peine obligatoire d'inéligibilité aux cas de harcèlement sexuel et moral, mais non à toutes les violences et agressions sexuelles - l'exposé écrit de l'amendement semant un léger doute à ce sujet. Le Gouvernement propose de la réserver aux infractions contre la probité - entendue en un sens très large - ainsi qu'aux crimes. Attention à ne pas l'étendre au-delà du contrôlable, d'autant qu'il faut respecter les principes de proportionnalité et de nécessité des peines.

Restons-en là pour le moment. Nous continuerons à travailler à l'élaboration d'une liste cohérente et pertinente.

Mme Laurence Rossignol.  - J'ai moi-même dû composer avec les réticences de la Chancellerie à l'égard des listes... Mais faut-il vous lire celles que dresse l'article premier ? Le harcèlement moral ou sexuel, surtout dans le cadre de fonctions publiques, n'est pas dissociable des atteintes à la probité. Il n'est pas moins grave.

En outre, un signal important doit être envoyé à la société française. Les femmes qui subissent un rapport hiérarchique intrusif doivent savoir que la loi les protège. Je regrette vivement l'opposition du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et communiste républicain et citoyen ; Mmes Françoise Laborde et Corinne Bouchoux ainsi que M. Joël Labbé applaudissent également.)

Mme Françoise Cartron.  - J'adhère totalement à ce qui vient d'être dit. Depuis plus d'un an, à la suite de la révélation de faits malheureux dans une autre assemblée, un travail a été entrepris à ce sujet au Sénat. Un code de déontologie sera distribué à tous les nouveaux sénateurs. Puisque ce projet de loi a pour objet de rendre confiance dans les élus, cet amendement doit être voté. Nous avons besoin d'un signe fort. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et communiste, républicain et citoyen)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Je suis stupéfaite de la réponse du Gouvernement. L'amendement n°108 rectifié prolonge le travail entrepris par la délégation aux droits des femmes depuis plusieurs années pour la reconnaissance des atteintes dont sont victimes les femmes dans les relations hiérarchiques. L'argument de la liste nous est régulièrement servi... Je soutiens l'amendement avec chaleur et enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent également.)

Mme Nathalie Goulet.  - Le groupe de l'Union centriste votera cet amendement qui envoie un signal fort. Ne décourageons pas le président Bas lorsqu'il émet un avis favorable ! (Applaudissements au centre et à gauche)

Mme Éliane Assassi.  - Les hommes aussi peuvent intervenir !

Mme Françoise Laborde.  - Je retire mon amendement n°234 rectifié au profit de l'amendement n°108 rectifié. Ce serait dommage d'éparpiller les voix. (Applaudissements à gauche et au centre)

L'amendement n° 234 rectifié est retiré.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Entendons-nous bien, le Gouvernement partage pleinement votre objectif. Nous avons seulement le souci de la sécurité juridique et de la cohérence. (Protestations à gauche)

M. Alain Bertrand.  - Ce n'est pas le Conseil constitutionnel qui fait la loi !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Nous devons veiller, cependant, à ce que la loi votée soit conforme à la Constitution. Je crains, sinon, les déceptions...

L'amendement n°108 rectifié est adopté.

(Vifs applaudissements à gauche et au centre)

M. le président.  - Amendement n°233 rectifié quater, présenté par MM. Collombat, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mme Jouve et M. Requier.

Après l'alinéa 5

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

«  -  les délits prévus aux articles 313-1 et 313-2 du code pénal, lorsqu'ils sont commis en bande organisée ;

«  - les délits d'association de malfaiteurs prévus à l'article 450-1, lorsqu'ils ont pour objet la préparation des délits mentionnés au troisième alinéa du présent article ;

M. Pierre-Yves Collombat.  - L'article premier dresse une liste à trous, y compris dans le domaine qu'elle est censée traiter, les délits financiers. Un oubli, sans doute...

Je propose d'y ajouter au moins l'association de malfaiteurs et la grande délinquance économique et financière. J'aurais souhaité étendre encore la liste aux délits mentionnés à l'article 704 du code de procédure pénale, mais on m'a convaincu que c'était trop compliqué - comme souvent en matière financière...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Contrairement à ce qu'a laissé entendre Mme Goulet, la commission a émis nombre d'avis favorables, comme ici.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable pour des raisons de cohérence. Trop élargir la liste des infractions y nuirait. En outre, la rédaction de l'amendement n'est pas satisfaisante, car le code pénal ne connaît que l'abus de confiance, sans distinguer selon qu'il porte ou non sur la TVA.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La cohérence, la beauté du texte l'emportent sur toute autre considération... À quoi servons-nous donc ?

M. Henri de Raincourt.  - M. Collombat est lucide. (Rires)

M. Roger Karoutchi.  - Il est réaliste !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Votre objection, madame la garde des sceaux, tombe car l'amendement a été rectifié.

Si l'on est disqualifié en raison d'une mauvaise gestion des deniers publics, on doit l'être aussi lorsqu'on se rend coupable d'infractions relevant de la grande délinquance, même s'il s'agit de deniers privés.

L'amendement n°233 rectifié quater est adopté.

M. le président.  - Amendement n°88, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles L. 241-3 et L. 242-6 du code du commerce ;

M. Christian Favier.  - Le printemps a mis en lumière la défiance de nos concitoyens. Ce projet de loi est nécessaire. Les élus doivent être irréprochables, y compris dans leur vie professionnelle. C'est pourquoi nous proposons d'ajouter à la liste dressée par l'article premier l'abus de bien social, appropriation illégale voisine de l'abus de confiance. Comment des élus qui s'en seraient rendus coupables pourraient-ils gérer correctement le bien commun ?

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable en remerciant nos collègues de l'excellence de leur travail.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment. Le Gouvernement a déjà adopté une liste très large, dont il souhaite préserver la cohérence d'ensemble. Jusqu'où irons-nous, sinon ?

L'amendement n°88 est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER BIS

M. le président.  - Amendement n°205, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - La commission des lois a modifié la rédaction du délit de prise illégale d'intérêts au motif que la jurisprudence retient une acception trop imprécise de la notion d'intérêt. Il en résulterait pour les élus locaux une forte exposition au risque de condamnations pénales pour des manquements purement formels.

Le Gouvernement conteste cette analyse et souhaite rétablir le texte initial. Il faut pouvoir sanctionner des personnes dépositaires de l'autorité publique qui interviennent dans des décisions qui intéressent directement leurs proches : ainsi lorsqu'un élu intervient dans l'attribution d'un immeuble appartenant à la commune à un membre de sa famille, au prix du marché, en écartant d'autres candidats. Si la collectivité n'en subit aucun préjudice, l'élu n'en a pas moins manqué à l'impartialité.

Soulignons que les juridictions font une application particulièrement limitée de ces dispositions : le nombre de condamnations annuelles pour des faits de prise illégale d'intérêts oscille autour d'une quarantaine. Une modification de l'incrimination diminuerait encore ce nombre.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je suis navré de devoir émettre un avis défavorable. Le Sénat, représentant des collectivités territoriales, a constaté des excès de sévérité dans la condamnation d'élus, pour avoir subventionné des associations auxquelles ils appartenaient à la demande même de la collectivité territoriale, par exemple. La notion d'« intérêt quelconque » est trop floue. Nous avons donc retenue la proposition équilibrée de M. Collombat. L'intérêt en question est défini comme un intérêt personnel distinct de l'intérêt général : cela reste très large, mais cela évitera que la Cour de cassation se croie obligée de confirmer des condamnations qui ne se justifient pas. Faisons entrer un peu de pragmatisme et de bon sens dans ce débat.

M. Charles Revet.  - On en a bien besoin.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La façon dont est libellé l'article 432-12 du code pénal aboutit à des situations ubuesques. Dans le Var, un maire a été condamné pour avoir participé à la délibération révisant le plan d'occupation des sols, pour la seule raison qu'il est propriétaire d'un terrain concerné par ce plan, sans que la révision ait rien changé à son statut. Les juges appliquent la jurisprudence, plus que la loi d'ailleurs, mais en prononçant des peines qui disent le contraire : en l'espèce, il a été condamné à une amende avec sursis. Il arrive que les élus soient dispensés de peine.

Tout cela est aberrant. Nous proposons une solution simple. Le juge sera assez perspicace pour sanctionner les comportements qui le méritent.

L'amendement n°205 n'est pas adopté.

L'article premier bis est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

L'amendement n°167 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°41, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, les mots : « Sous peine d'irrecevabilité », sont remplacés par les mots : « Hors les cas de connexité avec d'autres infractions faisant l'objet d'une procédure judiciaire ou de découverte incidente dans le cadre d'une procédure pénale, ».

M. Éric Bocquet.  - Cent fois sur le métier, remettez votre ouvrage ! Nous proposons une nouvelle fois de supprimer le verrou de Bercy.

La constitution d'un Parquet financier fut un progrès significatif. Mais celui-ci demeure confronté à l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, qui soumet le dépôt des plaintes à l'avis conforme de la commission des infractions fiscales, véritable « juge d'instruction » en la matière. Il est temps de lever cet obstacle, afin que les administrations ayant repéré des faits de fraude fiscale puissent engager des poursuites, quitte à prévoir des mesures conservatoires - saisie de sommes illégalement en transit...- et l'information de l'administration fiscale au plus haut niveau. Un mémorandum du Premier président de la Cour des comptes soulignait déjà en août 2013 la nécessité d'une meilleure coopération entre la DGFip et les douanes.

Vous me répondrez, je le sais, que les procédures judiciaires sont longues et incertaines et qu'il vaut mieux faire pression sur les fraudeurs pour qu'ils rendent l'argent qu'ils doivent...

M. le président.  - Amendement n°203 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° L'article L. 228 est ainsi modifié :

a) À la fin du premier alinéa, les mots : « sur avis conforme de la commission des infractions fiscales » sont remplacés par les mots : « dans les conditions de droit commun » ;

b) Les deuxième à dernier alinéas sont supprimés ;

2° Les articles L. 228 A et L. 228 B sont abrogés.

II.  -  L'article 1741 A du code général des impôts est abrogé.

III.  -  Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après le mot : « République », la fin de l'article L. 711-21 est supprimée ;

2° Après le mot : « République », la fin du VI de l'article L. 725-3 est supprimée.

M. Joël Labbé.  - Pour l'écologiste non inscrit que je suis (sourires), la justice est un élément clé pour la restauration de la confiance dans l'action publique. Cet amendement supprime le verrou de Bercy, qui empêche les poursuites pour fraude sans l'accord de l'administration fiscale. (M. Éric Bocquet applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°68, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Par exception, les plaintes concernant les personnes soumises à une obligation de déclaration au sens de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique sont directement déposées par l'administration sans avis de la commission des infractions fiscales. »

Mme Nathalie Goulet.  - Espérons que ces amendements feront l'effet des trompettes de Jéricho et que le verrou de Bercy sera levé au septième jour !

Ma proposition diffère légèrement des autres pour passer sous les fourches caudines de la navette parlementaire : lever le verrou uniquement pour les personnes soumises à l'obligation de déclaration par la loi relative à la transparence de la vie publique. Avec notre collègue Anziani, nous dénoncions déjà en 2013 l'opacité la plus complète qui entoure le nombre de procédures traitées par la commission des infractions fiscales et les montants en jeu - on les dit extraordinairement élevés.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mme Lienemann.

I.  -  Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 5° de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa, lorsqu'il apparaît qu'un indice laissant supposer qu'une fraude fiscale a été commise dans l'une des conditions prévues aux 1° à 5°, l'agent en charge du contrôle qui le constate en informe directement le procureur financier et transmet à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :

Titre ...

Dispositions relatives à la lutte contre la fraude fiscale

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - J'invite le Sénat, qui a voté la suppression du verrou de Bercy en avril 2016, à confirmer sa position. On ne convaincra pas nos concitoyens que nous voulons la transparence si l'on traite différemment puissants et misérables, si l'on donne le sentiment que certains peuvent négocier et passer entre les gouttes. C'est une question de morale, de vertu comme on dit en République, mais aussi d'efficacité. Tout l'intérêt d'une procédure judiciaire réside dans l'ouverture de l'enquête judiciaire grâce à laquelle on parvient à caractériser le délit. Souvenez-vous des difficultés qui ont été rencontrées pour poursuivre ceux qui ont recouru à la technique dite du carrousel de TVA.

Mon amendement autorise un agent à solliciter directement le juge, il ne lève pas totalement le verrou de Bercy.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Me voici embarrassé par ces propositions qui relèvent davantage de la commission des finances que de celle des lois.

Le 22 juillet 2016, le Conseil constitutionnel a jugé constitutionnel le fait de confier à l'administration fiscale la lutte contre la fraude. Le but est, non de faire rendre gorge au contribuable fraudeur, mais de lui faire rendre l'argent. Le verrou de Bercy est dans l'intérêt de la Nation. J'ajoute qu'il ne fait nullement obstacle à une procédure judiciaire pour fraude fiscale. Par prudence, donc, avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je partage l'avis de votre rapporteur. D'autant que ces quatre amendements sont un peu éloignés de l'objet de la loi.

La saisine de la Commission des infractions fiscales est une garantie procédurale pour les contribuables. On ne peut pas dire que la suppression du verrou de Bercy est de nature à garantir l'égalité de traitement des citoyens. Ce serait laisser entendre que la pratique de l'administration fiscale n'est pas guidée par l'intérêt général. Le Gouvernement ne partage bien évidemment pas ce soupçon. Il est nécessaire de définir une politique pénale ad hoc pour ne pas surpénaliser la fraude fiscale.

La plupart du temps, l'application des pénalités fiscales suffit à réparer les torts. La procédure judiciaire, cela est fixé dans la jurisprudence constitutionnelle, doit être réservée aux fraudes les plus graves. Retrait, sinon rejet.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Parler de « surpénalisation de la fraude fiscale » ne manque pas de sel... Un traitement particulier est réservé à la délinquance financière : tout ce qui concerne l'argent se négocie. Si donner aux citoyens l'assurance que la même justice s'applique dans tous les cas n'est pas de nature à rétablir leur confiance, qu'est-ce qui le sera ?

M. Alain Anziani.  - Merci à Mme Goulet d'avoir rappelé le combat que je mène depuis des années pour lever le verrou de Bercy et, en particulier, à l'occasion de la loi de 2013 dont j'étais le rapporteur.

L'initiative des poursuites appartient au Parquet, sinon en matière fiscale. Les professionnels du droit condamnent cette exception. La Cour des comptes, également, ne s'est pas montrée tendre sur le sujet ; elle a rappelé qu'il vaut mieux être un fraudeur millionnaire qu'un maçon portugais. Le second aura tôt fait de se retrouver devant le tribunal quand le premier pourra négocier en mettant des millions sur la table.

Mme Nicole Bonnefoy.  - Très bien !

M. Alain Anziani.  - Selon Bercy, grâce au verrou, l'État récupérerait plus d'argent. C'est dire la confiance en la justice... Enfin, si ces amendements n'ont rien à voir avec la confiance, la transparence et la moralisation, je ne sais quelles propositions y ont trait. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, communiste républicain et citoyen, La République en marche, Union centriste et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Philippe Dominati.  - Ces amendements, que je ne voterai pas, me semblent néanmoins utiles. Si le Gouvernement veut conserver un système différencié, il faudra le perfectionner et faire en sorte que l'administration fiscale traite des cas semblables en suivant la même approche.

M. André Reichardt.  - Je voterai ces amendements pour les mêmes raisons que M. Anziani. Ils sont de bonne politique, nous sommes dans une période de moralisation. En revanche, je ne voterai pas la proposition de Mme Goulet : pourquoi créer une exception ? Il y en a assez de ces atteintes régulières aux personnes soumises à l'obligation de déclaration par la loi relative à la transparence.

M. Éric Bocquet.  - Pour éclairer nos débats, un exemple : Google doit 1,1 milliard d'euros à la République française ; que la firme américaine ne paiera pas, a-t-on annoncé le 14 juin dernier. Il y a de quoi s'inquiéter... (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste et républicain)

M. le président.  - L'amendement de M. Bocquet est adopté. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen, socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent également.)

L'amendement n°41 est adopté et devient un article additionnel.

Les amendements nos203 rectifié bis, 68 et 7 rectifié sont sans objet.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°92, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 2

Après les mots :

déontologie parlementaire

insérer les mots :

et avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

Mme Éliane Assassi.  - Il s'agit d'associer la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique à la prévention des conflits d'intérêts au Parlement. Je le dis d'autant plus tranquillement que je suis membre du comité de déontologie du Sénat.

Des progrès ont été accomplis. Dès 2011, la Haute Assemblée a prévu un dispositif de déclaration. Pour autant, il faut sortir de l'entre-soi. La Haute Autorité, par son expérience et son statut indépendant, nous sera une ressource précieuse.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable : ce n'est pas le rôle de la Haute Autorité. Sauvegardons l'autonomie des assemblées.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. Le Gouvernement a la plus grande confiance dans les assemblées.

M. Alain Fouché.  - Très bien !

L'amendement n°92 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°141, présenté par M. Marie, Mme S. Robert, M. Botrel, Mmes Perol-Dumont et Lepage et MM. Daudigny, Lalande, Carcenac et Montaugé.

Mme Sylvie Robert.  - Cet amendement rétablit la définition édictée à l'article 2 de la loi de 2013. Sur le fond, il serait problématique que les conflits d'intérêts public-public soient écartés de cette loi. Un parlementaire siégeant, y compris au titre de son mandat parlementaire, dans un établissement public ou une société d'aménagement peut se retrouver en situation de conflit d'intérêts public-public.

M. le président.  - Amendement identique n°182 rectifié, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

M. Joël Labbé.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Il n'y a pas de conflit d'intérêts entre intérêts publics : l'essence même de notre mission est de les concilier.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Des conflits entre un intérêt public et un intérêt public ? C'est se tromper lourdement sur la nature de notre mission. Comme l'a dit le rapporteur, nous passons notre temps à arbitrer entre des intérêts publics. L'intérêt général naît de la confrontation des points de vue, de notre débat collectif.

Je vous félicite, madame la garde des sceaux, de ne pas avoir repris la définition de la loi de 2013. Avec de telles idées, les personnes qui s'y connaissent un tant soit peu sur un sujet ne pourront plus s'exprimer dessus. (Mme Sophie Primas applaudit.)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet amendement, déposé dans un but louable, aboutirait à une contradiction perpétuelle. Nous sommes tous élus d'un département. On pourrait nous accuser d'utiliser notre mandat national au profit d'un intérêt local parce que nous avons défendu tel projet d'aménagement ou évoqué une entreprise en difficulté...

Élus de la République, il nous appartient de délibérer entre des intérêts publics pour trouver l'intérêt de la Nation.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Excellent !

Les amendements identiques nos141 et 182 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°228 rectifié ter, présenté par Mme Aïchi, MM. Delcros, Longeot, Luche, Capo-Canellas, Médevielle et Kern et Mme Doineau.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, notamment à l'égard de la composition et du fonctionnement des groupes interparlementaires d'amitié

Mme Leila Aïchi.  - Cet amendement, comme l'amendement n°226 rectifié ter, vise à éviter toute dérive au sein des groupes d'amitié parlementaires. J'y suis très attachée, valorisons-les en prévoyant que les assemblées adoptent un ensemble de règles pour y prévenir les conflits d'intérêts.

M. le président.  - Amendement n°226 rectifié ter, présenté par Mme Aïchi, MM. Delcros, Longeot, Luche, Médevielle, Kern, Bonnecarrère et Gabouty et Mme Doineau.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque assemblée parlementaire définit les conditions dans lesquelles les députés ou les sénateurs souhaitant devenir membres d'un groupe interparlementaire d'amitié déclarent les intérêts qu'ils détiennent dans le pays entrant dans le champ de ce groupe, ainsi que ceux de leurs familles.

Mme Leila Aïchi.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Conseil constitutionnel détermine ce qui figure dans le règlement des assemblées. Les dispositions que vous proposez relèvent de leur autonomie et engagent la compétence de leur bureau, non celle du législateur.

Exiger d'un parlementaire ayant de la famille à l'étranger que celle-ci décline ses intérêts représenterait une atteinte à la vie privée. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Cela relève de la compétence des bureaux des assemblées.

L'amendement n°228 rectifié ter n'est pas adopté.

L'amendement n°226 rectifié ter est retiré.

La séance est suspendue à 16 h 30.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 h 45.