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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Sénateur en mission

Accord en CMP

Géolocalisation (Candidatures à une éventuelle CMP)

Modification à l'ordre du jour

Reconnaissance du vote blanc (Deuxième lecture)

Discussion générale

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

M. François Zocchetto, rapporteur de la commission des lois

M. François Fortassin

Mme Hélène Lipietz

M. Pierre Charon

Mme Cécile Cukierman

M. Philippe Kaltenbach

M. Yves Détraigne

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois

M. Alain Vidalies, ministre délégué

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Nicolas Alfonsi

ARTICLES ADDITIONNELS

Intervention sur l'ensemble

M. Christian Cointat

Géolocalisation (Nominations à une éventuelle CMP)

Mineurs isolés étrangers

Discussion générale

M. Jean Arthuis, auteur de la proposition de loi

M. René Vandierendonck, rapporteur de la commission des lois

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Hélène Lipietz

M. Philippe Bas

M. Yves Détraigne

M. Christian Favier

M. Pierre-Yves Collombat

M. Éric Doligé

M. Jean-Pierre Michel

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux

M. Philippe Marini , président de la commission des finances

Discussion des articles

ARTICLE 2

M. René-Paul Savary

M. René Vandierendonck, rapporteur

M. Jean Arthuis, auteur de la proposition de loi

Ville et cohésion urbaine (Conclusions de la CMP)

Discussion générale

M. Claude Dilain, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. François Lamy, ministre délégué auprès de la ministre de l'égalité des territoires et du logement, chargé de la ville

Mme Esther Benbassa

M. Michel Bécot

Mme Muguette Dini

Mme Mireille Schurch

M. Philippe Esnol

M. Jean-Jacques Mirassou

Vote sur le texte élaboré par la CMP

Géolocalisation (CMP - Nominations)

Consommation (Conclusions de la CMP)

Discussion générale

M. Alain Fauconnier, co-rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Martial Bourquin, co- rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Mme Élisabeth Lamure

Mme Muguette Dini

Mme Évelyne Didier

M. Stéphane Mazars

M. Joël Labbé

Mme Delphine Bataille

M. Yannick Vaugrenard

Vote sur le texte élaboré par la CMP

ARTICLE 17 QUATER

Intervention sur l'ensemble

M. Jacques Mézard

Ordre du jour du jeudi 13 février 2014

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mercredi 12 février 2014

70e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de M. Jean-Claude Carle,vice-président

Secrétaires : M. Jean Boyer, M. Jacques Gillot.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Sénateur en mission

M. le président.  - Par courrier en date du 11 février 2014, M. le Premier ministre a fait part de sa décision de placer, en application de l'article L.O.297 du code électoral, M. Alain Bertrand, sénateur de la Lozère, en mission temporaire auprès de Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement. Cette mission portera sur le soutien au développement économique dans les territoires ruraux.

Accord en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Géolocalisation (Candidatures à une éventuelle CMP)

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission des lois a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la géolocalisation.

Cette liste a été affichée conformément à l'article 12, alinéa 4 du Règlement et sera ratifiée si aucune opposition n'est faite dans le délai d'une heure.

Modification à l'ordre du jour

M. le président.  - Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement a demandé la modification de l'ordre du jour de la séance du jeudi 20 février 2014. Cet ordre du jour se poursuivra, éventuellement, le vendredi 21 février 2014, à 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir.

En conséquence, l'ordre du jour des séances des jeudi 20 et vendredi 21 février 2014 s'établit comme suit :

JEUDI 20 FÉVRIER 2014

À 10 heures 30 :

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

1°) Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.

À 15 heures :

2°) Questions d'actualité au Gouvernement

À 16 heures 15 et le soir :

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

4°) Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale

5°) Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture de la proposition de loi visant à reconquérir l'économie réelle

ÉVENTUELLEMENT, VENDREDI 21 FÉVRIER 2014

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :

- Suite de l'ordre du jour de la veille

Reconnaissance du vote blanc (Deuxième lecture)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen d'une proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à reconnaître le vote blanc aux élections.

Discussion générale

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - La reconnaissance du vote blanc est intimement liée à la notion de démocratie représentative. Le président de la République en a fait la demande lors de ses voeux aux bureaux des assemblées, le 21 janvier dernier. Il s'agit de rendre aux citoyens confiance en leurs institutions, alors que la dernière étude du Cevipof de janvier peut inquiéter, même si la confiance envers le Parlement progresse.

La reconnaissance du vote blanc enrayera-t-elle le progrès du vote protestataire pour les extrêmes ? Nul ne se risquerait à le prédire.

Certes, comme le disait M. Leconte, la démocratie appelle des choix, pas des états d'âme. Mais le vote blanc mérite bien d'être reconnu et distingué du vote nul ou de l'abstention : comme l'écrivait le regretté Guy Carcassonne, « les électeurs assez sophistiqués pour voter blanc ne doivent pas être comptabilisés en vrac avec les paresseux ou les imbéciles »...

Au terme de la navette, nous sommes parvenus à un équilibre. Certains voudraient que le vote blanc soit reconnu comme un suffrage exprimé, faisant valoir qu'avec une telle règle, François Hollande n'aurait pas été élu avec la majorité absolue des suffrages exprimés. Mais Jacques Chirac non plus...

Cette solution soulevait d'importants problèmes juridiques et politiques.

Fallait-il ou non assimiler une enveloppe vide à un bulletin blanc ? À défaut, soit un électeur souhaitant voter blanc devait se munir lui-même d'un bulletin blanc...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Cela n'eût pas été insurmontable !

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - ... soit il faudrait mettre de tels bulletins à sa disposition... Le Gouvernement se félicite que le Sénat se soit rallié à l'assimilation qui ne vaut pas exclusion : qui voudra glisser un bulletin blanc dans son enveloppe pourra le faire.

Reste la question de la date d'entrée en vigueur de la loi. Son application dès les prochaines élections municipales, envisagée en février 2013, pose désormais des problèmes pratiques, d'ordre informatique notamment.

En revanche, ces problèmes techniques ne se présentent pas pour les prochaines élections européennes. Je suis donc satisfait que notre commission propose un vote conforme.

Le décompte du vote blanc sera la reconnaissance d'une démarche civique et d'une insatisfaction devant l'offre politique. C'est un message qui a sa place dans le débat démocratique et dans l'expression du suffrage universel dont l'objectif premier reste de choisir une politique.(Applaudissements)

M. François Zocchetto, rapporteur de la commission des lois .  - Près d'un an après la première lecture, nous sommes de nouveau saisis de ce projet de loi. La question du statut du vote blanc dépasse nos frontières. En France, nous n'avons jamais été aussi près d'aboutir : nos deux assemblées ont admis la reconnaissance du vote blanc, sans cependant l'assimiler à des suffrages exprimés, sauf à bouleverser le droit électoral en revenant sur un principe constant depuis 1839. Ce compromis a suscité quelques frustrations, mais en autorisant un mode d'expression supplémentaire, nous prendrons la mesure du phénomène et nous pouvons espérer attirer plus d'électeurs aux urnes.

Parmi les points restant en discussion, l'article 2 bis, introduit à l'Assemblée nationale en deuxième lecture à la demande du Gouvernement, n'est qu'une coordination.

Le report de la date d'entrée en vigueur, objet de l'article 5, paraît nécessaire ; le décompte des votes blancs s'appliquera pour la première fois lors des élections européennes et des élections des conseillers consulaires par les Français de l'étranger.

En première lecture, contrairement à l'Assemblée nationale, le Sénat avait considéré qu'une enveloppe vide ne saurait être assimilée à un bulletin blanc ; les députés ont maintenu leur position en deuxième lecture : mettre des bulletins blancs à la disposition des électeurs serait coûteux et inciterait à voter blanc. En première lecture nous nous étions longuement interrogés sur la façon d'apprécier si un bulletin confectionné par l'électeur est vraiment blanc  mais la commission s'est ralliée à la position simple et pragmatique de l'Assemblée nationale.

Ni l'élection présidentielle, ni les référendums locaux ne sont concernés par cette réforme, car aux termes des articles 7 et 72-1 de la Constitution, il faudrait pour cela une loi organique, que j'appelle de mes voeux avant la prochaine échéance présidentielle. Je crois qu'un consensus existe sur ce point. Je remercie le Gouvernement de son ouverture.

La commission des lois vous appelle à voter ce projet de loi sans modification, afin qu'il soit définitivement adopté aujourd'hui. (Applaudissements)

M. François Fortassin .  - Plus de 150 ans après la proclamation du suffrage universel en 1848, la démocratie reste un idéal jamais atteint, et nos règles électorales demeurent perfectibles.

Le projet de loi n'est pas mauvais, mais est-il utile ? Le vote blanc est une sorte d'abstention civique, dont les progrès récents témoignent de la défiance des électeurs à l'égard du monde politique.

Joint au vote extrême, il a conduit à l'éviction du candidat socialiste du deuxième tour de l'élection présidentielle en 2012...

Il existe ainsi des électeurs intermittents, dont l'abstention n'est pas un signe de désintérêt, mais de désenchantement. Le débat sur l'enveloppe vide n'est pas fait d'arguties théologiques : il faut des règles claires et le RDSE reste dubitatif sur celles retenues par la commission. Une simple erreur ne saurait être comptée comme un vote blanc. Quid de tous ces bulletins qui ne seront pas tout à fait blancs ?

En distinguant le vote blanc du vote nul, nous reconnaissons qu'il est délibéré, et nous limitons peut-être le risque d'une remise en cause du suffrage lui-même...

Déplorant que ce texte n'aille pas au bout de sa logique, nous ne nous y opposerons cependant pas, mais le RDSE se partagera entre approbation et abstention. (Applaudissements)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Un vote blanc !

Mme Hélène Lipietz .  - Il semble que certains tiennent à laisser leur nom dans les annales législatives... Après avoir débattu de l'impossible référendum d'initiative partagée...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Il est désormais possible !

Mme Hélène Lipietz.  - ... Dans les textes seulement ! Nous examinons à présent une proposition de loi qui reconnaît le vote blanc, sans toutefois l'assimiler à un suffrage exprimé...

Voter blanc, c'est pourtant avoir renoncé à sa partie de pêche à la ligne ! C'est exprimer son insatisfaction devant l'offre politique. À qui la faute ? À nous, ou aux citoyens ?

Ce texte reste au milieu du gué, comme le soulignait le doyen Gélard. Pourquoi refuser de décompter vraiment les votes blancs ? En cas de liste unique, même avec de nombreux votes blancs, nous aurons toujours un score à la cubaine de 100 %... Craindre que mettre des bulletins blancs à la disposition des électeurs revienne à les inciter à voter blanc, c'est les considérer comme lunatiques. Si nous ne leur faisons pas confiance, pourquoi nous feraient-ils confiance ?

Les écologistes voteront ce texte qui n'est pourtant qu'un premier pas et en craignant qu'il nous empêche de revenir bientôt sur le sujet... Au moment où le Gouvernement recule devant des rassemblements, en laissant en plan les familles en peine de recomposition, il y a fort à parier que le nombre de votants blancs va augmenter...Cependant mieux vaut voter blanc que voter bleu marine !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - La chute est bonne!

M. Pierre Charon .  - Le consensus semble prévaloir : il est nécessaire d'adopter ce texte sans plus attendre. Le vote blanc n'est pas qu'une vague fantaisie mais un thermomètre de la démocratie. Nous devons entendre la détresse de nos concitoyens, pour mieux leur répondre.

Le Sénat avait préféré rester prudent sur le périmètre du vote blanc, afin d'éviter qu'une erreur soit comptabilisée : d'où l'exclusion des enveloppes vides. Mais nous ne saurions ni obliger les électeurs à se munir d'un bulletin blanc, ni en fournir, ce qui serait une incitation au vote blanc.

L'Assemblée nationale a reporté l'entrée en vigueur de ce texte après les élections municipales : petite manoeuvre du Gouvernement destinée à sauver les apparences, sans doute, alors que ces élections s'annoncent comme un test.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Absurde.

M. Pierre Charon.  - Adoptons le texte sans plus tarder. (Applaudissements)

Mme Cécile Cukierman .  - Comme cela était demandé depuis deux décennies le vote blanc va trouver sa place dans notre droit électoral. Le principe fait consensus. Le vote blanc est un acte délibéré et positif, contrairement le plus souvent au vote nul, qui procède d'une maladresse ou d'un rejet de l'offre politique. On ne saurait toutefois le considérer comme un suffrage exprimé, puisqu'une élection est un choix.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

Mme Cécile Cukierman.  - Sans clore le débat, nous nous rallions pour l'heure à la solution de consensus.

Reconnaître l'enveloppe vide comme un vote blanc est parfaitement acceptable, si l'électeur est informé des conséquences de son choix. Ce texte ne suffira pas à mettre fin à la crise politique, tant s'en faut : le bipartisme, lui aussi, décourage nos concitoyens.

De qui parle-t-on lorsqu'on parle des extrêmes ? Il n'y a pas d'un côté des partis seuls capables de gouverner, de l'autre des agitateurs. Le Front national, c'est vrai, est un parti d'extrême-droite et un parti dangereux ; pour notre part, nous nous efforçons d'élaborer une alternative politique crédible. (Applaudissements)

M. Philippe Kaltenbach .  - Ce début est singulier, Parlementaires, nous ne cessons d'encourager nos concitoyens à voter, mais aujourd'hui, nous nous apprêtons à reconnaître le vote blanc. C'est qu'il s'agit d'une opinion comme une autre.

Reconnaître le vote blanc comme un suffrage exprimé aurait bouleversé notre droit électoral. Ne fermons cependant pas la porte à cette éventualité : nous verrons à l'usage s'il faut remettre l'ouvrage sur le métier.

Sur le statut des enveloppes vides, le compromis proposé par la commission des lois paraît sage, car mettre à disposition des bulletins blancs coûterait cher. Une réserve cependant : la solution retenue garantit mal le secret du vote, car on distingue facilement une enveloppe vide d'une autre qui contient une feuille au format A4 pliée en huit...

Ce texte est un progrès, qui fait écho à de nombreuses initiatives parlementaires : je me bornerai à rappeler la proposition de loi de MM Fabius et Ayrault, en 2003, tendait à rendre le vote obligatoire et à comptabiliser les votes blancs, celle de M. Courteau en 2011, une autre enfin, plus récemment, du député Urvoas.

La Suisse, l'Espagne et la Suède reconnaissent déjà le vote blanc, au moins pour certaines élections.

Le premier objectif poursuivi est de lutter contre l'abstention, en offrant un choix de plus aux électeurs. Ceux qui se tournent, en guise de protestations, vers des partis populistes et antidémocratiques pourront exprimer différemment leur rejet de l'offre politique.

M. Roland Courteau.  - Exactement.

M. Philippe Kaltenbach.  - Lorsque le choix est restreint, par exemple lorsqu'il n'y a qu'une seule liste ou deux candidats d'un même bord, il est légitime d'offrir aux citoyens la possibilité de voter blanc.

M. Charon aurait aimé que le texte entre en vigueur avant les élections municipales, pour que les Français puissent ainsi sanctionner le Gouvernement... Il oublie que les votes blancs et nuls restent limités !

M. Jean-Pierre Sueur.  - C'était une analyse très politicienne.

M. Pierre Charon.  - À Clamart, il y a danger !

M. Philippe Kaltenbach.  - Il n'eût pas été raisonnable d'appliquer les textes à si brève échéance.

Le vote blanc traduit une attente non satisfaite, qui est aussi une forme d'espérance. Le groupe votera le texte, qui n'est peut-être qu'un premier pas. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Yves Détraigne .  - Ce texte a pour objet de résoudre un ancien problème : les bulletins blancs et nuls doivent-ils être distingués ? Chaque électeur, quoi qu'en disent les politologues, donne à son vote le sens qu'il souhaite. Dans l'isoloir en effet, on est libre de son choix. Il est donc raisonnable de ne pas comptabiliser les votes blancs dans les suffrages exprimés. Les Français prennent parfois un malin plaisir, lors des référendums en particulier, à exprimer leur sentiment général, hors de la question posée...

Reste la question de la différence entre enveloppe vide et bulletin blanc. Le Sénat s'est, en première lecture, opposé à l'assimilation de l'enveloppe vide au vote blanc. L'Assemblée nationale soutient que la mise à disposition de bulletins blancs aurait un coût non négligeable. Cet argument paraît spécieux et il revient à inverser la règle, puisque les enveloppes vides étaient jusqu'à présent considérées comme des votes nuls. Au contraire, certains qui se seront munis de leur propre bulletin blanc verront leur vote comptabilisé comme nul à cause du format de leur feuille de papier.

Notre position me semblait préférable à celle de l'Assemblée nationale, mais il faut savoir mettre un terme à un débat et faire avancer les choses sans affaiblir la notion de « suffrages exprimés ». Le groupe UDI-UC votera donc ce texte. (Applaudissements)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois .  - Je me réjouis de l'accord recueilli sur cette proposition de loi. J'y vois un progrès démocratique et dans le respect dû aux électeurs.

Le vote blanc témoigne en effet d'une démarche distincte de celle qui conduit à voter nul. La suggestion d'une loi organique modifiant les règles relatives à l'élection du président de la République et aux référendums est bienvenue. L'intégration des bulletins blancs dans les suffrages exprimés saperait le principe d'une élection à deux tours : le cas peut se présenter d'un deuxième tour sans majorité pour un candidat...

Deuxième argument : l'assimilation des votes blancs et des suffrages exprimés viderait de leur sens les seuils applicables, notamment pour le droit de se présenter au second tour, et modifierait les seuils effectifs pour le remboursement de frais de campagne. La puissance publique devrait alors financer une position particulière.

Enfin, si les électeurs qui votent blanc doivent être respectés, l'essence de la démocratie est de faire des choix. Pierre Mendès-France disait lui-même que la politique consiste à choisir.

M. Alain Vidalies, ministre délégué .  - Je remercie l'ensemble des orateurs pour leur participation à ce débat. M. Zocchetto a raison : le Gouvernement prendra toutes les dispositions techniques nécessaires pour les élections consulaires.

Monsieur Fortassin, l'enveloppe vide pose moins de difficultés : elle sera sans doute préférée au bulletin blanc à proprement parler. La jurisprudence a en outre précisé que le bulletin blanc demeurait tel, quelle que soit sa taille, sauf à ce qu'il révèle une préférence manifeste.

Le report de l'application de ce texte aux européennes ne s'explique pas comme le soupçonne M. Charon. Si nous avions pensé qu'il aurait des conséquences sur les municipales, nous aurions fait en sorte qu'il s'applique alors. Convenez que ç'aurait été notre avantage en la circonstance ! (Sourires) Madame Cukierman, je suis surpris que vous vous soyez sentie visée par le mot « partis extrêmes ». Bien loin de moi de penser une chose pareille du Parti communiste et des autres composantes de votre groupe. Nous sommes ici entre représentants de partis républicains.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Nicolas Alfonsi .  - « Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires »... Cette formule bien connue est encore faible dans le cas qui nous occupe. Un vote blanc n'exprime rien, c'est une évidence. L'article premier a donc peu de portée. Le vote blanc est une expression matériellement différente du vote nul, voilà tout. Dans quelques années, on comptabilisera à part, dans les bulletins blancs, les bulletins vraiment blancs et les enveloppes vides... Voter, c'est faire un choix.

L'article premier est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président. - Amendement n°1, présenté par Mme Lipietz.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article L. 58 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sur cette table il est déposé, par les soins du maire, une information indiquant qu'une enveloppe ne contenant aucun bulletin est assimilée à un bulletin blanc. »

Mme Hélène Lipietz.  - La possibilité réglementaire, d'afficher les modalités expresses du vote, est insuffisante. Cet amendement garantit la pleine mise en oeuvre de la loi.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Cette possibilité est prévue par l'article R56 du code électoral. Des affiches doivent être placardées à l'entrée des bureaux, qui mentionnent de telles informations. Votre amendement est satisfait et peut être retiré.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - À cet excellent argument j'ajoute que le vote blanc aurait, avec cet amendement, un statut particulier, car faisant l'objet d'une information spécifique.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - C'est tout-à-fait inconstitutionnel.

L'amendement n°1 est retiré.

L'article 2 bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par Mme Lipietz.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le livre Ier du code électoral, il est inséré un chapitre préliminaire et son article ainsi rédigés :

« Chapitre préliminaire

« Du décompte des suffrages

« Art. L. 1 A. - Est un suffrage exprimé le vote par un bulletin nominatif ou par un bulletin blanc.

« Pour le second tour de l'élection présidentielle, est un suffrage exprimé le vote par un bulletin nominatif. »

Mme Hélène Lipietz.  - Les votes blancs doivent être comptabilisés parmi les suffrages exprimés, les arguments avancés par le président Sueur ne me convainquent pas : un seuil n'est rien qu'un pourcentage...

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par Mme Lipietz.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 561 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La question soumise au référendum a comme réponse oui lorsque la majorité relative des bulletins porte le oui. »

Mme Hélène Lipietz.  - Même logique, à propos des référendums.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Faut-il que les votes blancs soient comptabilisés parmi les exprimés ? La question a été tranchée en première lecture. Nous n'avons pas l'intention de modifier les règles constitutionnelles concernant l'élection présidentielle.

Défavorable à l'amendement n°3 ainsi qu'à l'amendement n°4 qui n'a de sens que si l'amendement n°3 est adopté.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Même avis. Ces amendements sont très dangereux pour le pluralisme. Ils auraient des effets sur les seuils de remboursement des dépenses et d'accès au deuxième tour.

Mme Hélène Lipietz.  - Devant un danger tel qu'à côté les tempêtes dues au réchauffement climatique ne seraient rien (marques d'irritation), je retire mes amendements.

L'amendement n°3 est retiré, ainsi que l'amendement n°4.

L'article 5 est adopté.

Intervention sur l'ensemble

M. Christian Cointat .  - Je ne suis pas un grand partisan du vote blanc, mais je ne vois pas pourquoi nous refuserions ce choix à ceux qui veulent le faire. Toutefois, nous nous y prenons mal. Permettre de voter blanc impose de fournir des bulletins blancs. M. Alfonsi l'a dit : les lois inutiles affaiblissent les nécessaires. Une enveloppe vide n'est pas un suffrage blanc.

Les bulletins blancs coûteraient cher ? Les urnes aussi ! D'ailleurs, les bulletins blancs non utilisés peuvent resservir la fois suivante...

Je voterai néanmoins cette loi d'appel, comme l'on dit.

La proposition de loi est définitivement adoptée.

Géolocalisation (Nominations à une éventuelle CMP)

M. le président.  - Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la géolocalisation, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été affichée ; je n'ai reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 12 du Règlement. En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire, en tant que titulaires : MM. Jean-Pierre Sueur, Jean-Pierre Michel, Gaëtan Gorce, Mme Éliane Assassi, MM. Jean-Jacques Hyest, André Reichardt et Yves Détraigne et, en tant que suppléants : Mme Nicole Bonnefoy, MM. Jean-Patrick Courtois, Félix Desplan, Patrice Gélard, Mme Hélène Lipietz, MM. Jacques Mézard et François Zocchetto.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.

Mineurs isolés étrangers

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de loi relative à l'accueil et à la prise en charge des mineurs isolés étrangers.

Discussion générale

M. Jean Arthuis, auteur de la proposition de loi .  - Nous n'assumons pas notre responsabilité face aux mineurs isolés étrangers ; aussi ai-je déposé cette proposition de loi. Nous nous donnons bonne conscience en nous défaussant sur les départements. Cela ne peut plus durer.

Le phénomène des mineurs isolés étrangers a commencé dans les années 1990. Le rapport Landrieu, celui de l'Igas, celui de Mme Debré ont alerté sur le problème sans que l'on parvienne pour autant à le traiter concrètement. Les élus locaux ont alors dû prendre les mesures visant à faire face à l'urgence. L'État et l'Aide sociale à l'enfance ont signé un protocole en 2012 afin de clarifier les rôles de chacun. L'État assume, depuis, la prise en charge des mineurs isolés étrangers dans un premier temps, avant d'en confier la charge aux départements. Je m'étonne, madame la ministre, que vous ayez validé la sordide péréquation géographique de ces jeunes qui a été créée alors.

En Mayenne, nous avons accueilli autant de mineurs isolés étrangers ces deux derniers mois que pendant toute l'année dernière. À dire vrai, les quatre cinquièmes de ces prétendus mineurs sont majeurs. Leur âge est difficile à vérifier ; leur discours stéréotypé leur a manifestement été dicté par des réseaux de passeurs. L'interprétariat est difficile à assurer, et la cohabitation de ces adultes immigrants avec les jeunes pris en charge n'est pas toujours évidente. J'ai accueilli en Mayenne les responsables de la cellule coordination de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). En Ile-de-France, de nombreuses demandes sont écartées. Or de ces décisions, aucune trace. Les mineurs retentent alors leur chance dans un autre département.

Les Nations unies recommandent d'intensifier la lutte contre la traite des enfants : est-ce la tâche des départements ou de l'État ?

L'évaluation des flux est incertaine. Lors de la signature du protocole, les flux étaient estimés à 1 500 personnes. On parle maintenant de 4 020 jeunes. Que deviennent-ils après leur prise en charge par l'Aide sociale à l'enfance ? Ils demandent l'asile et, quand leur requête est rejetée, ils disparaissent dans la clandestinité.

L'accueil de ces jeunes ne saurait être une responsabilité purement locale : confions-la à l'État. C'est l'objet de cette proposition de loi, qui rend l'État responsable d'organiser l'accueil et l'évaluation, au niveau régional ou inter-régional, des jeunes repérés par l'Aide sociale à l'enfance ou les associations. Cela ne concernerait nullement les mineurs étrangers demeurés sur la garde de leurs parents comme le craignait le rapporteur.

Tous les moyens doivent être utilisés pour vérifier la minorité et l'isolement de ces jeunes, et leur proposer un retour dans leur famille ou la définition d'un projet personnel. Seul l'État en est capable. L'État serait également responsable des jeunes pris en charge à la suite d'une décision de justice. Mettons fin à la répartition géographique arbitraire de ces mineurs.

Notre proposition de loi crée en outre un fichier national recensant les mineurs isolés étrangers. La Cnil conteste la nécessité d'un fichier biométrique. C'est pourtant nécessaire, pour retrouver ceux qui fuguent et pour identifier les filières.

D'aucuns estiment que cette proposition de loi procède à un transfert de compétence, et doit donc gager financièrement les responsabilités transférées. Vous connaissez mon sentiment sur l'article 40 de la Constitution : j'en ai toujours demandé la suppression pour que le Parlement soit responsable de ses votes.

La commission s'est montrée hostile à ce texte, suggérant qu'il était urgent d'attendre. Pendant ce temps, un protocole s'applique, qui bouscule les compétences des uns et des autres. Tout nouvel ajournement serait accablant. La péréquation territoriale ne peut suffire. Je souhaite que nous progressions. (Applaudissements à droite et au centre)

M. René Vandierendonck, rapporteur de la commission des lois .  - Je partage en grande partie le diagnostic de la situation. La circulaire de mai dernier est la première intervention d'un gouvernement sur le sujet.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice.  - Tout de même.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - On évalue à 8 000 le nombre de mineurs étrangers isolés présents sur notre territoire et à 4 020 le nombre d'entrées annuelles. La concentration géographique de ces mineurs étrangers isolés dans certains départements s'explique par la présence d'aéroports ou la proximité d'une frontière. La tradition d'accueil de certains territoires joue aussi.

Aucune définition juridique des mineurs étrangers isolés n'existe. Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'évoque les mineurs que pour interdire leur éloignement en vertu d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une expulsion. Le droit français transgresse ainsi les engagements internationaux de la France, en particulier l'article 22 de la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant, qui stipule qu'un enfant dépourvu de tutelle parentale doit jouir d'une protection équivalente aux autres enfants.

Les départements ont une triple compétence : la mise à l'abri, l'évaluation et l'orientation des mineurs, leur prise en charge consécutivement à une décision judiciaire de placement. L'Assemblée des départements de France chiffre le coût de ces compétences à 250 millions d'euros par an. L'adéquation des capacités d'accueil aux besoins est problématique : 27,8 % des mineurs étrangers isolés ont 15 ans, 48 % 16 ans, 11,9 % 17 ans.

Cette proposition de loi recentralise les compétences en matière de prise en charge de mineurs étrangers isolés : à l'État la phase d'orientation et d'évaluation, aux départements la mise à l'abri en urgence et la prise en charge à plus long terme, les charges de cette dernière obligation faisant l'objet d'un remboursement par l'État.

J'ai pris le temps d'interroger la Cnil sur l'opportunité de créer un fichier biométrique. La proportionnalité des moyens aux finalités poursuivies n'est pas évidente.

Notre collègue Michel, auteur d'un rapport à Mme Taubira sur la protection judiciaire de la jeunesse, conclut, comme Mme Debré dans son excellent rapport, à la nécessité d'organiser la première phase sur un plan régional ou inter-régional.

Ce gouvernement est le premier à se saisir du problème ; un comité de suivi du protocole de 2013 a été constitué, qui s'est déjà réuni deux fois ; un rapport des trois inspections générales concernées sera rendu fin avril ; un texte sur les compétences des départements est en attente. Pour toutes ces raisons, j'ai proposé un renvoi en commission, non à des fins dilatoires, mais pour améliorer le texte.

Juridiquement d'abord : on ne sait pas, au moment où l'ASE prend en charge, si le mineur est isolé ou si une autorité parentale existe. Je ne prétends pas faire votre métier, que vous faites excellemment, mais je pose une difficulté. De même, l'obligation constitutionnelle de compensation financière en cas de transfert de charges joue dans les deux sens.

Cela dit, la commission des lois a eu raison de considérer que ce sujet méritait un débat en séance. (Applaudissements à gauche)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Le sujet est sérieux et délicat. Le Gouvernement a voulu y apporter dès le premier jour une réponse durable, par le protocole national du 1er juin 2013. En arrivant aux responsabilités, alertés notamment par les départements de Paris et de Seine-Saint-Denis, nous avons trouvé une situation très préoccupante. Le dispositif existant arrivait à échéance en juillet 2012. Qu'avait fait M. Mercier ? Il avait fait signer une convention entre départements et associations. J'ai décidé de la proroger d'un trimestre, le temps d'entamer les discussions avec l'Assemblée des départements de France (ADF). Elles ont été plus longues que prévu, d'où une nouvelle prorogation de trois mois. Grâce à la détermination de M. Lebreton, président de l'ADF, un groupe de travail, réunissant l'ADF et les trois ministères concernés, a abouti à la conclusion, en juin 2013, d'un protocole national de solidarité entre les territoires et à la mise en place d'un comité de suivi - celui-ci a été installé et travaille de manière rigoureuse.

L'estimation initiale du nombre de mineurs isolés étrangers s'est faite de manière consensuelle : nous évaluions alors à 1 500 le nombre de mineurs à prendre en charge chaque année. Nous disposons désormais des chiffres réels sur lesquels la transparence est totale : 2 515 mineurs en huit mois, soit 4 000 mineurs isolés étrangers par an. Quatre pour cent de l'ensemble des mineurs pris en charge par les départements...

À la vérité, cette proposition de loi exclut les mineurs isolés étrangers de la prise en charge de droit commun, sur la seule base de leur origine nationale.

Je ne sous-estime pas les difficultés des conseils généraux, preuve en est que j'ai trouvé les financements nécessaires, qui n'y étaient pas, pour proroger le dispositif de M. Mercier, mettre en place le groupe de travail et appliquer le nouveau protocole. Les élus locaux que vous êtes savent que la situation est tendue depuis des années. À qui fera-t-on croire que ces mineurs isolés étrangers sont la cause des tensions qui pèsent sur les infrastructures et les budgets des conseils généraux ?

M. Éric Doligé.  - Nous allons vous l'expliquer !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Il faudra le faire avec des éléments tangibles... Bien sûr, notre action et celle de l'ADF, au volontarisme de laquelle je rends hommage, a donné de la visibilité à ce sujet mais, je le redis, les mineurs dont nous parlons ne sont que 4 %... Je rappelle que la loi de 2007 a été votée à l'unanimité, qui confie ces mineurs à la responsabilité des conseils généraux. La protection de l'enfance doit prévenir les difficultés rencontrées par les mineurs séparés de leur famille, ce sont les termes de l'article L. 112-3 du code de l'action sociale ; Mme Pécresse, alors rapporteure du texte, les avait rappelés. Patricia Adam avait en outre enrichi le même code : un mineur étranger, sans représentant légal, doit être considéré comme un enfant en danger. Le Défenseur des droits avait repris cette formule en décembre 2012. Un seul arrêté départemental de suspension a fait l'objet d'une annulation contentieuse. Une dizaine d'autres ont été annulés par leurs signataires, preuve qu'ils partagent le même point de vue. (On le conteste à droite)

Cette proposition de loi ne modifie pas l'article L. 112-3 du ode de l'action sociale et des familles, mais introduit une dérogation qui pose problème au regard du principe d'égalité énoncé à l'article premier de la Constitution, de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 22 de la Convention internationale des droits de l'enfant.

Il faut répondre aux difficultés auxquelles sont confrontés les conseils généraux. Quatre pour cent d'enfants, c'est peu et c'est beaucoup. Je ne crois personne ici indifférent aux situations individuelles. Certains enfants arrivent avec un papier dans leur poche, racontent une histoire formatée... Nul ne nie la réalité. Mais ce sont des enfants sans référent majeur, livrés à eux-mêmes, souvent victimes de réseaux de traite. Reconnaissez que le Gouvernement a entrepris une lutte impitoyable contre ces réseaux, y compris au niveau européen. Mais prenez aussi en compte le droit et les engagements internationaux de la France.

Disperser les enfants, les voir mettre dans un taxi, cela fend le coeur, dites-vous. Cela fend plutôt le coeur de les voir dormir dans le métro ou sous les portes cochères, livrés à tous les dangers et à toutes les tentations...

Nous voulons améliorer le système. L'État s'est engagé comme il ne l'avait jamais fait : prise en charge financière de 250 euros par jour et par enfant pendant cinq jours, bien des versements étant intervenus dès octobre 2013. Le total se monte déjà à 1,7 million d'euros. L'État fournit aussi du personnel et les informations nécessaires au comité de suivi. Celui-ci s'est déjà réuni trois fois.

Une évaluation menée par trois inspections générales est en cours, son rapport sera remis le 15 avril. Aucun sujet ne sera éludé, ni le financement, ni la question de l'évaluation -  risque-t-on vraiment de se tromper en identifiant comme un mineur un enfant de 12 ans ? -, ni celle des flux migratoires, ni la situation administrative des majeurs isolés.

Les conseils généraux ont trop longtemps été laissés à eux-mêmes. L'État a parfois fait un geste, mais toujours limité en ampleur et en durée. Pour la première fois, un dispositif durable a été mis en place, qui organise la solidarité nationale. Cette proposition de loi a le mérite d'engager le débat devant la chambre qui représente les collectivités territoriales. Le Gouvernement a démontré qu'il était aux côtés de celles-ci ; il ne demande qu'à améliorer le dispositif mis en place. (Applaudissements à gauche)

M. Thani Mohamed Soilihi .  - Malgré l'absence de statistiques précises, on sait qu'il y a en France 8 000 mineurs isolés étrangers concentrés dans quelques départements, Paris, la Seine-Saint-Denis, le Nord et le Pas-de-Calais, Mayotte, la Guyane. Ce sont des enfants fuyant la guerre ou la misère, ou abandonnés en France par leurs parents... Tous en situation de grande vulnérabilité.

Des élus ont dénoncé la saturation de leurs structures d'accueil et le poids financier de la prise en charge de ces mineurs. Sensible à ce problème, la Chancellerie a publié une circulaire par laquelle l'État s'engage notamment à participer au financement de l'accueil des mineurs isolés étrangers pendant cinq jours, à hauteur de 250 euros par enfant et a créé une cellule de répartition.

Certains présidents de conseil général, dont vous-même, monsieur Arthuis, se sont mis dans l'illégalité en suspendant la prise en charge des mineurs isolés étrangers dans leur département. D'où cette proposition de loi.

M. Jean Arthuis.  - J'assume !

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Je regrette que vous n'ayez pas attendu les conclusions des travaux en cours, ni pris en compte, pas plus que la circulaire d'ailleurs, les problèmes spécifiques de l'outre-mer. À Mayotte et en Guyane, il appartient à l'État de prendre en charge les mineurs isolés étrangers, au moins temporairement, car ces départements n'ont que peu de moyens et le problème relève davantage de la politique migratoire de l'État. À Mayotte, 3 000 enfants sont livrés à eux-mêmes, dont 500 en grande fragilité ; 87 % d'entre eux viennent des Comores où le PIB par habitant est huit fois inférieur. Certains maires refusent de les scolariser, qui ne peuvent déjà pas accueillir les enfants mahorais dans de bonnes conditions. L'AME n'existe pas à Mayotte et la prise en charge sanitaire incombe aux structures médicales locales, déjà dépourvues... Il n'existe pas non plus de structures adaptées à la mise à l'abri des mineurs confrontés aux difficultés les plus graves, ou à leur placement. L'aide sociale à l'enfance est réduite à la portion congrue : trois assistantes sociales seulement. Les 78 familles d'accueil hébergent parfois jusqu'à six enfants et le seul foyer de l'île, qui ne compte que sept places, est dédié à l'enfance délinquante.

L'accès au statut de région ultrapériphérique devrait nous donner plus de moyens.

Le Gouvernement ne saurait se contenter de compter sur l'esprit civique des citoyens ou des structures associatives. Un observatoire des mineurs isolés de Mayotte, mis en place en 2010, a déjà rendu plusieurs rapports alarmants ; la situation de ces jeunes y est décrite comme « une catastrophe sociale, économique et humanitaire » et il y est question d'une bombe à retardement. À Mayotte, la mèche est allumée... Il est temps d'agir. (Applaudissements à gauche)

Mme Hélène Lipietz .  - Les mineurs isolés étrangers ont été peu à peu montrés du doigt : de mineurs isolés, dignes de la protection de la France, ils sont devenus avant tout des mineurs étrangers, stigmatisés en raison de leur extranéité... La France était pourtant pionnière en 1989.

De tout temps, les mineurs ont été amenés à bouger, à quitter leur famille. Aujourd'hui, les mirages de la télévision conduisent des adolescents à l'exode... Ils y sont parfois aidés par des réseaux qui ne sont pas toujours mafieux, ethniques et familiaux parfois. Ils sont si différents et si proches de nos enfants.

Cette proposition de loi aborde le sujet sous un angle économique : ces mineurs isolés étrangers coûteraient cher. Ils ne prennent pourtant pas la place des mineurs d'ici, ils ont le même droit à la protection. Au lieu de les tenir pour des boucs-émissaires, demandons-nous qui doit, en France avoir la charge de la solidarité.

Les écologistes espèrent, depuis mai 2012, une grande loi sur l'accueil des étrangers. Cette proposition de loi n'apporte au plus qu'une réponse financière et policière.

Combien de jeunes sont considérés comme majeurs par l'ASE et comme mineurs par l'Ofpra, pour qui les documents d'état civil font foi ? Le présent texte néglige ce problème. Rien n'est dit non plus de la représentation légale dès la prise en charge initiale, ni des différents moyens d'évaluer l'âge, ni des réseaux de passeurs, qui empêchent souvent ces mineurs, notamment les jeunes filles, de se présenter aux services sociaux.

L'article L.313-15 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) fut un grand progrès que nous devons à Mme Debré, qui a d'abord regardé ces étrangers comme des jeunes. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Bas .  - Que la France ait des obligations vis-à-vis des enfants sans famille, quelle que soit leur nationalité, c'est entendu et elle n'a pas attendu la Convention de protection des droits de l'enfant pour les assumer. Mais est-ce aux départements de les prendre en charge ?

Des départements de tous bords ont fait part de leurs difficultés : la Seine-Saint-Denis et Paris furent les premiers à suspendre par arrêté la prise en charge des mineurs isolés étrangers. Le problème est désormais national. L'afflux s'accélère : de 1 500 arrivées annuelles, on est passé en un an à 4 000. On peut parler d'explosion.

La loi de 2007, contrairement à ce qu'on entend, n'a nullement réglé la question des compétences respectives de l'État et des départements. Cette loi, pour tous ceux en charge de l'appliquer, c'est de l'orfèvrerie, ce sont des mécanismes sensibles, des équilibres précaires. Les mineurs isolés étrangers ne représentent que 4 % des enfants pris en charge, dites-vous, les départements protestent avant d'avoir mal... C'est méconnaître la réalité de la politique de protection de l'enfance dans les départements. Car nous nous réorientons aujourd'hui vers l'accompagnement intensif en milieu ouvert - ce qui permet pour la même dépense d'accompagner cinq enfants là où, en hébergement, nous n'en accompagnons qu'un.

Ce n'est pas qu'une question de crédits - c'est cela aussi -, c'est d'abord une question de disponibilité de structures d'hébergement et de familles d'accueil. Ne laissons pas désorganiser nos politiques d'aide sociale à l'enfance.

Le Gouvernement a peut-être desserré l'étau provisoirement pour certains départements, mais diffusé le problème sur tout le territoire...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Qu'est-ce d'autre que la solidarité ?

M. Philippe Bas.  - Il est temps de changer d'approche et de prendre le problème à bras-le-corps. Cette proposition de loi est indispensable. Le fonds national de protection de l'enfance n'a jamais été suffisamment doté : votre gouvernement s'honorerait à prendre le contrepied de ses prédécesseurs. (Applaudissement au centre et à droite)

M. Yves Détraigne .  - Cette proposition de loi, loin d'être isolée, fait suite à de nombreux travaux, comme ceux du préfet Landrieu, de l'Igas ou de Mme Debré. Le temps d'agir est venu.

La situation est préoccupante. Les filières d'immigration clandestine se développent. Les mineurs arrivent à Roissy, où ils sont laissés à eux-mêmes. Ils sont souvent exploités par des majeurs. Comme le disait M. Alain Richard en commission, il s'agit de trafic de personnes humaines. N'encourageons pas ce phénomène, qui nuit à notre cohésion sociale comme aux mineurs eux-mêmes.

Cette proposition de loi exprime le ras-le-bol des conseils généraux, dont les services sont dépassés, et entend éviter les débordements. La question est celle de la répartition des responsabilités - de l'entrée sur le territoire, de la détermination de l'état de minorité, de l'accueil et de la prise en charge. Le législateur doit intervenir, le statu quo est impossible.

La circulaire de juin 2013 n'a pas réglé tous les problèmes. La méthode employée n'est pas la bonne. Cette proposition de loi est sans doute imparfaite, mais faisons confiance à la navette. Le nombre des mineurs isolés étrangers est en augmentation. Les centres d'accueil sont pleins dans de nombreux départements, qui doivent réserver des chambres d'hôtel...

Qui autorise l'arrivée de ces mineurs sur le territoire ? C'est l'État. Ils savent dire « mineurs » en français et faute de preuve, nous ne pouvons leur répondre « majeurs ». Les conventions internationales lient l'État, non les conseils généraux ; la vérification de l'âge est de son ressort.

Le Gouvernement envisagerait de nous opposer l'article 40. J'espère qu'il s'agit d'une rumeur... La proposition de loi aggrave les charges publiques, mais c'est le cas de 90 % des propositions de loi... Invoquer l'article 40 serait irrespectueux à l'égard de notre groupe et du Sénat. Si une nouvelle jurisprudence se met en place, nous saurons vous le rappeler... Que le débat ait lieu ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Christian Favier .  - Je regrette que nous soyons si peu de représentants de départements pour aborder ce sujet qui les concerne directement : cinq ou six présidents de conseils généraux sur 35...

Selon la PJJ, entre 8 000 et 9 000 mineurs isolés étrangers sont pris en charge par les départements. Je m'honore que mon pays assume ce devoir de solidarité, bien que dans mon département, cela représente 18 % du budget total de l'ASE.

Malgré leurs difficultés financières, de nombreux conseils généraux ont fait les efforts nécessaires à une prise en charge adaptée. Les mineurs isolés étrangers représentent 4 % des effectifs pris en charge par l'Ase : ce sont des boucs-émissaires commodes.

Ce texte les soustrait au droit commun au seul motif qu'ils sont étrangers. Ce faisant, on passe de la protection de l'enfance au contrôle migratoire, au mépris de nos engagements internationaux.

Les mineurs isolés étrangers ne sont pas en situation irrégulière... Le Défenseur des droits a récemment rappelé qu'ils devaient bénéficier de la protection prévue par le droit pour les mineurs, avant que de regarder leur nationalité. La question à poser est celle des moyens donnés aux départements pour assurer leurs missions. La circulaire de 2013 est un premier pas, qui éclaircit la responsabilité de l'État en matière de vérification de la minorité et de soutien financier. L'État pourrait soutenir davantage la formation des personnels de l'ASE et faciliter la délivrance de titres de séjour aux mineurs qui deviennent majeurs. Le Défenseur des droits a souligné en 2012 que les demandes en ce sens devraient être étudiées avec bienveillance. Il faut que le Gouvernement respecte l'engagement de François Hollande de compenser totalement les allocations de solidarité versées par les départements.

Des pistes d'amélioration existent donc : exploitons-les. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Je me réjouis que nous débattions d'une proposition de loi manifestement irrecevable au regard de l'article 40 de la Constitution et dont le premier signataire est M. Arthuis dont on a pu apprécier à quel point il fut le fidèle gardien du foyer que constitue l'article 40 et des régions...

En 2010, l'un de mes amendements relatif à la consultation obligatoire de la population en cas de fusion d'un département et d'une région a été refusé au motif qu'il aggraverait les charges de l'État. Rien de comparable avec cette proposition de loi ! La cohérence des raisonnements juridiques de la commission des finances ne laisse aucune place à l'aléa, dit-on ; à la surprise, sans doute.

La question des mineurs isolés étrangers pose deux problèmes pour les départements : celui de leurs compétences, à clarifier, et des moyens.

L'État est bien sûr compétent en matière migratoire et de justice de mineurs.

Certains départements sont plus concernés que d'autres : en 2009 Paris et la Seine-Saint-Denis accueillaient en effet deux tiers des mineurs isolés étrangers à eux seuls, le tiers restant étant réparti notamment entre le Loiret, la Vienne, le Rhône et les Bouches-du-Rhône.. À Mayotte, M. Mohamed Soilihi l'a montré, la situation est dramatique.

La solution proposée n'est pas bonne. Les départements ont une compétence globale de protection de l'enfance. Vu l'adoration portée à la règle d'or budgétaire, il n'est pas douteux que les compensations accordées aux départements seront prises sur les compensations dues à d'autres départements... La question est plus globale, comme pour toutes les allocations de solidarité. Le niveau de ressources par habitant et le reste à charge diffèrent sensiblement selon les départements. Le cadre global dans lequel il conviendrait d'examiner ce problème pourrait être le prochain projet de loi Escoffier-Lebranchu.

Il devra traiter des charges et des ressources des départements, ainsi que des moyens nécessaires à cette politique de prise en charge des mineurs isolés étrangers. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Éric Doligé .  - Vous craigniez d'entendre des choses inexactes, madame la ministre ; en tant que membre du comité de suivi, j'annonce d'emblée que mes chiffres seront exacts.

Mon département est l'un de ceux qui accueillent le plus, relativement à sa population, de mineurs isolés étrangers. Avec René-Paul Savary, également membre du comité de suivi, nous analysons régulièrement les données, sans angélisme.

Le phénomène est peu connu. La société l'ignore largement. Et pourtant, il interpelle. Claude Bartolone a été le premier à prendre un arrêté de suspension de la prise en charge de ces jeunes. Neuf autres présidents de conseils généraux l'ont suivi. Les raisons sont connues : le coût de ces 4 % de mineurs étrangers pour l'aide sociale à l'enfance ; l'éviction des mineurs locaux, hébergés de ce fait dans des hôtels. D'ailleurs, la proportion est bien souvent supérieure à 4 % : 200 mineurs isolés étrangers pour 1 200 enfants pris en charge dans le Loiret.

Avant 2011, les flux d'entrée représentaient le tiers de ceux enregistrés en 2013. Le phénomène n'est plus absorbable.

Nul n'a évoqué le problème des jeunes majeurs. Conséquence logique du nombre de mineurs isolés étrangers accueillis, il augmente. De 18 à 21 ans, ils ne sont pas accueillis, ni formés ; l'État, Pôle-Emploi et les régions sont défaillants à cet égard. De plus, tous n'obtiennent pas de papiers - je vous ai alerté sur ce problème, en vain.

La durée moyenne d'accueil d'un mineur français est de trois mois ; pour les étrangers, elle est de dix-huit mois. Le problème d'accueil est évident. Cessons de fermer les yeux.

Le problème financer en découle directement. Dans mon département, la charge correspondante est passée de 1,5 à 5 millions d'euros et le total, pour les départements, avoisine les 700 millions d'euros. Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt et pensons aux enfants qui sont les premiers à souffrir de cette situation. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Pierre Michel .  - Je m'attendais à entendre évoquer la situation -  préoccupante - des mineurs isolés étrangers; je n'ai entendu évoquer que celle - bien plus grave - des conseils généraux...

Certes, tous ces jeunes ne sont pas mineurs ni isolés. Mais la situation de la plupart est tragique : à ceux qui viennent de pays en guerre, qui ont subi les pires traitements, nous disons : nous n'avons pas de quoi vous accueillir, rentrez chez vous !

M. Jean-Noël Cardoux.  - C'est du Zola !

M. Jean-Pierre Michel.  - J'ai connu un certain nombre de ces jeunes. Dans mon rapport sur la PJJ, je n'ai pu éluder le problème, car ce sont des enfants en danger ! Tous doivent être traités de la même manière.

Bien sûr, les conseils généraux n'en peuvent plus. Les parquets signalent un certain nombre de difficultés : les mineurs n'ont aucun recours, n'ont accès à aucun conseil ; ils sont hors droit, hors sol, hors vie ; hors tout !

Certains s'en sortent, apprennent le français, trouvent du travail. Cela peut prendre du temps. Que fait-on lorsqu'ils ont 18 ans et 1 jour ? Certains départements ont conclu une convention avec la PJJ pour qu'ils soient encore pris en charge pendant quelque temps. Pas tous.

Nous ne pouvons pas traiter cette proposition de loi pour elle-même. Le rapporteur a suggéré son renvoi en commission. Là nous allons devoir voter pour ou contre, alors que M. Détraigne a admis que le texte méritait d'être amélioré. Nous sommes dans une impasse. Le groupe socialiste votera contre, à regret. (Applaudissements à gauche)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux .  - Merci d'avoir été au fond du problème. Nous l'examinons avec rigueur. Ce n'est pas le bon dispositif, dites-vous, mais aucun autre n'est proposé.

La situation des jeunes majeurs fera l'objet de l'évaluation conduite par les trois inspections, qui me rendront leur rapport le 15 avril.

La PJJ s'occupe d'un certain nombre de ces jeunes. Chaque cas est différent. Certains mineurs apprennent vite et réussissent leur scolarité. Je ne sous-estime pas l'action des conseils généraux ni leurs difficultés. Les chiffres que j'ai donnés sont sincères. J'ai parlé de 4 %, hypothèse haute, et M. Bas, au détour d'une phrase, est passé à 5 %. En année pleine, la projection est de 4 000 jeunes, puisqu'on était passé de 1 500 à 2 500 mineurs accueillis mais c'est une hypothèse haute, en tendance.

Monsieur Doligé, je crois avoir répondu à votre lettre - avec retard sans doute, et je m'en excuse.

M. Éric Doligé.  - Après que j'ai pris mon arrêté...

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - J'ai demandé à mes services de combler le retard pris dans les réponses aux questions de parlementaires, mais nous en recevons 700 en quinze jours...

Vous avez signalé la situation du Loiret : 63 jeunes y sont entrés, 35 y ont été pris en charge. Donc 28 sont sortis : vous avez bénéficié du mécanisme de solidarité.

M. René-Paul Savary.  - Et le stock ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Monsieur Bas, votre suggestion sur l'usage du fonds national créé par la loi de 2007 mérite réflexion. Le législateur a alors précisément défini - vous y avez contribué - les responsabilités de chacun. Notez que le décret d'application relatif au fonds n'a été pris qu'en 2010...

M. Philippe Bas.  - Je le déplore également.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - ... et que le fonds n'a jamais été abondé. Il est désormais placé sous la tutelle de la ministre des affaires sociales. Notez aussi que votre proposition exigerait de modifier le décret. Je garde cette idée dans un coin de ma tête, en attendant le rapport des inspections générales.

Le Gouvernement aurait pu invoquer l'article 40 avant même que le débat ait lieu, en saisissant la Conférence des présidents. Mais nous estimions le débat utile. Celui-ci nous a éclairés et éclairera sans doute le travail des trois inspections...

Aucun amendement n'ayant été déposé, il me semble que nous sommes arrivés au terme de la discussion. C'est donc à présent que j'invoque l'article 40. (Remous à droite)

M. Philippe Marini , président de la commission des finances .  - La commission des finances a récemment adopté un rapport sur l'irrecevabilité financière au regard de l'article 40 de la Constitution, sur lequel je me fonde.

Les articles 1 et 5 de cette proposition de loi auraient pour conséquence d'aggraver une charge publique. L'article premier transfère à l'État une compétence des départements. L'article 5 confie aux centres d'hébergement des mineurs isolés des compétences qui ne leur sont pas attribuées et qui excèdent leurs charges de gestion - notion explicitée dans notre rapport.

Les autres articles ne sont pas irrecevables financièrement, ni inséparables du corps du texte.

Discussion des articles

L'article premier est déclaré irrecevable.

ARTICLE 2

M. René-Paul Savary .  - Je remercie le président de la commission des finances pour sa démonstration qui nous permet de nous exprimer sur une partie du texte.

J'ai été un membre assidu du comité de suivi. Celui-ci a proposé d'améliorer la formation des travailleurs sociaux chargés de la prise en charge des mineurs. Tous les parquets ne suivent pas les préconisations que vous avez faites en la matière, Madame la garde des sceaux.

Tous les départements ne sont pas sur un pied d'égalité. Les 4 % que vous avez évoqués sont une moyenne. Il faut distinguer le flux et le stock. Dans la Marne, 79 mineurs étrangers isolés sont entrés, et 50 ont été hébergés, ce qui représente une charge de 2,5 millions pour un programme de protection de la jeunesse de 50 millions d'euros.

La péréquation a doublé le nombre de mineurs étrangers que nous avons dû prendre en charge : comprenez que nous ayons le sentiment d'avoir fait une mauvaise affaire...

L'intégration de ces jeunes mineurs entre dans le cadre des programmes du fonds social européen, dans son volet « Jeunes » : à l'État.

Le placement d'un majeur supposément mineur dans un foyer pour mineurs est dangereux : si les choses tournent mal, nous en sommes responsables.

M. Michel a parlé de ceux qui deviennent majeurs : de fait les conseils généraux consentent de gros efforts de formation et de pédagogie pour intégrer ces jeunes mineurs et à leur majorité, ils sont expulsés ! Il faut une meilleure politique d'immigration.

Enfin, voyez le dépliant des services de l'aide sociale à l'enfance : j'ai rencontré un jeune à qui son passeur a donné l'adresse du foyer départemental de l'enfance qui y figure... Attention à ne pas soutenir les filières.

M. René Vandierendonck, rapporteur .  - Je me réjouis que le débat ait eu lieu. Soit nous attendons la fin du créneau horaire, soit nous attendons la fin des travaux en cours, comme je le proposais. Si vous voulez épater la galerie, poursuivons nos débats ; si nous voulons légiférer, finissons-en.

M. Jean Arthuis, auteur de la proposition de loi .  - Je remercie chacun pour sa contribution au débat.

Nous faisons face à un problème aigu qui suscite nombre d'incompréhension. D'aucuns ont cité l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; je citerai son article 15 : tout citoyen a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. C'est l'objet de cette proposition de loi.

Il ne s'agit pas de discriminer les mineurs étrangers isolés par rapport aux mineurs français. Madame la ministre, votre circulaire elle-même distingue les uns des autres. Laissons-là les soupçons. Il en va du respect de nos engagements internationaux.

Les jeunes confiés à l'aide sociale à l'enfance sont de plus en plus nombreux. Les travailleurs sociaux sont débordés et n'ont pas été formés pour évaluer l'âge des jeunes. J'ai fait appel de douze décisions du tribunal de Laval et à huit reprises, la cour d'appel m'a donné raison s'agissant de majeurs titulaires de faux papiers.

Faisons preuve de réalisme : l'effectivité de l'action des services de l'aide sociale à l'enfance est en cause.

La tentation de la procrastination est très forte. Résistons-y.

Le fonds d'aide va être alimenté ? Le premier président de la Cour des comptes a rappelé hier que la tenue des objectifs de déficit était soumise à de nombreux aléas.

Pour le reste, poursuivons le débat, sans que cela préjuge de ce que donnera le rendez-vous du 15 avril.

À la demande du groupe socialiste, l'article 2 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°145 :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 347
Pour l'adoption 170
Contre 177

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Nous sommes arrivés au terme du temps imparti pour l'examen de ce texte. Il appartiendra à la Conférence des présidents d'inscrire la suite de son examen à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

La séance, suspendue à 18 h 30, reprend à 18 h 35.

Ville et cohésion urbaine (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

Discussion générale

M. Claude Dilain, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - La CMP n'a eu aucun mal à parvenir à un texte commun le 4 février dernier. C'est grâce au climat de coopération que vous avez toujours entretenu, monsieur le ministre. Je rends hommage à mon homologue à l'Assemblée nationale, M. Puponni.

La réforme de la géographie prioritaire de la politique de la ville concentre les moyens et assure une parfaite transparence, parce que le critère est unique.

Le deuxième volet de ce texte, c'est le Nouveau programme de renouvellement urbainn (NPRU). Les nouveaux contrats de ville réconcilient l'urbain et l'humain - qui étaient fâchés, paraît-il ! Enfin, ce projet de loi fait le choix de la co-construction avec les habitants.

La CMP n'est pas revenue sur la plupart des votes du Sénat : le maintien de la dotation de développement urbain, la meilleure prise en compte des objectifs de la politique de la ville dans les schémas de planification, la possibilité pour les conseils citoyens de faire appel à des experts extérieurs, ou encore le recentrage des conventions intercommunales d'attribution de logements sociaux. Nous avions sécurisé le régime des anciens migrants. Enfin, nous avions permis à l'Epareca d'intervenir à proximité d'un quartier prioritaire.

À l'article premier bis A, la CMP a prévu que le rapport étudierait l'opportunité de sanctionner les intercommunalités qui ne s'engageraient pas dans les contrats de ville. En première lecture, l'Assemblée nationale avait prévu des sanctions automatiques ; l'opposition du Sénat ne portait que sur les modalités. Nous sommes donc d'accord pour que la question soit réexaminée.

À l'article 5, nous avons précisé le rôle du maire dans la mise en oeuvre des contrats de ville, et accepté le rétablissement d'une instance de pilotage intercommunale - qui n'empêche pas la mise en place de structures plus locales.

À l'article 5 bis nous avons revu la composition des conseils citoyens, avec tirage au sort et parité. À l'article 16 bis, nous avons rétabli le rapport sur la création d'emplois et d'entreprises dans les quartiers prioritaires.

La CMP a aussi procédé à diverses coordinations juridiques avec la loi relative aux métropoles et adopté divers amendements rédactionnels.

Ses conclusions ne remettant pas en cause nos travaux, je vous invite à les adopter en l'état. (Applaudissement à gauche)

M. François Lamy, ministre délégué auprès de la ministre de l'égalité des territoires et du logement, chargé de la ville .  - Je n'ai pas été surpris de l'issue de la CMP, car ce texte est issu d'une longue coopération, qui date d'avant même les dernières élections et à laquelle une association que M. Dilain connaît bien, l'Association des maires Ville et Banlieue de France, a contribué. Le texte a été enrichi au cours des débats parlementaires.

Son apport principal réside dans la réforme de la géographie prioritaire. L'objectivité du critère unique facilitera des révisions apaisées.

Le financement de l'achèvement du premier programme national de rénovation urbaine (PNRU) est assuré et nous en lançons sans attendre un deuxième.

Avec ce projet de loi, nous disposons du cadre pour modifier l'ensemble des politiques publiques au service des quartiers en difficulté. La politique de la ville doit exercer un effet de levier.

Merci au rapporteur, merci à tous pour la qualité de nos échanges, qui aboutissent à un texte équilibré et ambitieux. Je ne doutais pas que le Sénat jouerait son rôle. (Applaudissements)

Mme Esther Benbassa .  - Je l'ai dit : s'il y a un domaine où une réponse était attendue, c'était celui-ci. Dix ans après la loi de 2003, le texte engage une nouvelle étape de la politique de la ville. Je salue le travail des deux rapporteurs et l'ouverture du ministre. Nous nous réjouissons qu'ait été retenue la rédaction de l'article premier issue des travaux du Sénat. Le rôle des habitants y est affirmé d'emblée. Nous nous réjouissons aussi que le droit à une alimentation saine soit énoncé.

En revanche, nous déplorons le sort de notre amendement n°63, qui pénalisait l'abus de droit de préemption à des fins discriminatoires. Alors même qu'une feuille de route pour l'intégration vient d'être adoptée, le Sénat s'est privé de faire entendre sa voix. En revanche, l'article 10 A crée un nouveau critère de discrimination, en fonction du lieu de résidence : c'est un nouveau pas vers l'égalité.

Le groupe écologiste souhaitait un texte plus ambitieux, mais soutiendra le texte. (Applaudissements à gauche)

M. Michel Bécot .  - Ce projet de loi s'inscrit dans un ensemble législatif fourni, auquel les majorités successives ont participé. La politique de la ville ne peut résoudre à elle seule le principal problème des quartiers, celui du chômage. Mais elle montre la voie.

Nous connaissons tous la source des difficultés chroniques des quartiers : les grands ensembles, dont la greffe dans le tissu urbain n'a jamais pris. Dès 1982 était conclue une convention de développement social des quartiers. L'acte inaugural de la politique de la ville reste toutefois la loi du 1er août 2003. Tirons les enseignements des dix dernières années : la réhabilitation des quartiers doit se faire dans un contexte déjà sécurisé, là où le dialogue entre acteurs locaux fonctionne bien.

Dorénavant, il faudra surtout nous préoccuper de l'intégration économique des quartiers. Le programme urbain doit se concentrer sur un objectif simple, leur réhabilitation ; d'où nos critiques sur l'article premier.

Les moyens prévus pour le deuxième PNRU sont insuffisants, bien moindres que pour le premier PNRU. Certes, le contexte est difficile, mais vous auriez pu modérer vos propos sur la précédente majorité.

Nous approuvons en revanche la simplification de la géographie prioritaire, et la mise en place d'une veille active pour les quartiers qui en seront exclus. Regrettons cependant que les modalités d'identification des quartiers soient renvoyées au pouvoir réglementaire.

M. François Lamy, ministre délégué.  - Leur liste !

M. Michel Bécot.  - Les contrats de ville sont-ils pertinents ? Quid du niveau intercommunal ? Nous sommes réservés sur la participation des habitants. Ceux-ci sont rarement enthousiasmés par les projets de réhabilitation, quitte à en être souvent très satisfaits après-coup.

Deux motifs nous empêchent de voter ce texte : l'absence de liste des quartiers prioritaires, et le bavardage de l'article premier. Voilà pourquoi, malgré le louable effort de simplification qu'il porte, l'UMP s'en tiendra à l'abstention.

Merci au président et au rapporteur de la commission des affaires économiques, cependant, pour leur écoute.

Mme Muguette Dini .  - L'enfer est pavé de bonnes intentions qui ne résistent pas aux contraintes de la réalité. Ce projet de loi, fruit d'une concertation approfondie, avait fait l'objet au Sénat d'un dialogue constructif. En séance, Mme Létard avait salué les trois piliers de ce texte, que sont l'effort de simplification, la reconnaissance du niveau intercommunal comme chef de file de la politique de la ville, et la poursuite du PNRU. Des interrogations demeuraient, mais nous abordions ce texte avec bienveillance et le tiers des membres de notre groupe l'ont voté.

Hélas, la CMP a rigidifié le nouveau dispositif, bridant l'initiative locale et privant la politique de la ville de réactivité et de souplesse. C'est particulièrement vrai à l'article 5 bis, où la CMP est entrée excessivement dans le détail et a prévu un tirage au sort des membres des conseils citoyens... C'est méconnaître les initiatives locales. Les dépenses de fonctionnement des collectivités s'en trouveront alourdies. Ce texte exprime, au fond, votre défiance à l'égard des collectivités et demeure excessivement complexe.

Nous regrettons l'insuffisant ciblage de la politique de la ville sur les publics prioritaires. Certaines politiques ne sauraient être circonscrites aux limites d'un quartier : lutte contre les violences intrafamiliales, contre la délinquance...

Enfin, l'article premier bis A prévoit des pénalités à l'égard des intercommunalités refusant de signer un contrat de ville. Ouvrir la possibilité d'une sanction, c'est laisser à penser qu'une collectivité pourrait s'exonérer d'une compétence obligatoire. C'est incohérent ! 

Espérons enfin que le secret gardé sur la liste des quartiers prioritaires ne réserve pas de mauvaises surprises.

Le groupe UDI-UC s'abstiendra. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Mireille Schurch .  - Nous avons apprécié le sens du dialogue de M. le ministre, qui a permis d'aboutir à un projet de loi bien meilleur que le texte initial. Enfin, les banlieues ne sont plus considérées comme un problème à nettoyer mais comme une promesse et un défi à relever !

La refonte de la géographie prioritaire, sur la base d'un critère de revenus, est bienvenue, de même que la mobilisation des politiques de droit commun. Quant au lancement du deuxième PNRU, nous nous en réjouissons, même si nous aurions aimé des moyens plus importants. Pour éviter que des projets d'aménagement soient conduits contre le gré des habitants, nous avons fait adopter un amendement reconnaissant le caractère intrinsèquement humain de la politique de la ville.

L'idée de la co-construction est fort intéressante. Un juste partage des compétences entre communes et intercommunalités permettra de satisfaire au mieux les besoins des habitants. En admettant que des contrats de ville puissent être conclus dans les quartiers qui échappent aux nouveaux critères, on se donne les moyens de mesurer les conséquences de la réforme et de revoir éventuellement les critères.

La sortie de la géographie prioritaire de la moitié des quartiers relevant d'un contrat de cohésion sociale et urbain nous inquiète. Et surtout, nous déplorons la baisse de 4,5 milliards en trois ans des dotations aux collectivités territoriales. Elle aura une incidence directe sur la politique de la ville et ne fera que renforcer les inégalités territoriales. Dans les quartiers, il faut des crèches, des écoles, des médecins, des policiers.

Ce qui mine les quartiers prioritaires, c'est d'abord le chômage et la baisse du pouvoir d'achat : nous saluons donc le choix de la CMP sur l'organisation de la politique de l'emploi dans les quartiers.

Nous voterons le texte, qui crée un cadre et des outils intéressants. Ne manquent désormais que les moyens. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Esnol .  - Le groupe RDSE est satisfait que le ministre, peu soucieux de faire table rase du passé, ait voulu simplifier la politique de la ville. Le nouveau zonage a une vertu majeure : cibler objectivement les quartiers les plus en difficulté. Il est bon de montrer que les sénateurs savent s'entendre pour faire prévaloir l'intérêt général sur les intérêts particuliers.

Nous nous réjouissons d'avoir été entendus sur le rôle du maire : car si l'intercommunalité est l'échelon de la contractualisation, la commune reste l'échelon de proximité. Les départements et les régions seront parties aux contrats. Ce qui répercute leur caractère partenarial.

Le nouveau dispositif doit être évalué, comme toute politique moderne : nous sommes satisfaits, à cet égard, du choix de la CMP.

La composition des conseils citoyens, paritaire et largement ouverte aux associations, permettra aux acteurs du terrain de faire entendre leur voix.

Nous voterons ce texte, consensuel. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Jacques Mirassou .  - Ce projet de loi répond à une attente très forte des élus, des associations comme des habitants. Issu d'une longue concertation, il devrait être voté à une large majorité. La CMP a montré que les deux assemblées savaient travailler en bonne intelligence.

Ce texte ambitieux favorisera les synergies et améliorera les conditions de vie des habitants. La nouvelle géographie prioritaire, plus simple et plus efficace, interdira les passe-droits. Nous nous réjouissons que les maires aient vu leur rôle réaffirmé : ce sont eux, en définitive, qui seront chargés de la mise en oeuvre des contrats.

La CMP a également officialisé l'instance de pilotage que nous jugions trop complexe. Le projet de loi mobilisera les solidarités locales et nationales grâce à des moyens financiers repensés. La spécificité de l'outre-mer devra être prise en compte. Un compromis a été trouvé de sorte qu'un temps de réflexion plus long sera donné pour trouver des modalités plus incitatives que coercitives.

Nous avons longtemps débattu ici comme en CMP des conditions de participation des habitants. La parité et la représentation des acteurs locaux va dans le bon sens, et relève d'une dynamique citoyenne - je pense en particulier à ceux qu'on a trop souvent laissés pour compte. La co-construction est une innovation puissante de ce texte.

C'est la volonté politique partagée de tous les acteurs de la politique de la ville qui donnera ses lettres de noblesse à ce texte. Vous l'avez voulu, monsieur le ministre, nous l'avons voulu avec vous citoyen et républicain : voilà deux raisons supplémentaires de le voter. (Applaudissements à gauche)

La discussion générale est close.

Vote sur le texte élaboré par la CMP

Les conclusions de la CMP sont adoptées.

(Applaudissements à gauche)

Géolocalisation (CMP - Nominations)

M. le président.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la géolocalisation.

En conséquence, les nominations intervenues précédemment prennent effet.

La séance est suspendue à 19 h 35.

présidence de M. Didier Guillaume,vice-président

La séance reprend à 21 h 35.

Consommation (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la consommation.

Discussion générale

M. Alain Fauconnier, co-rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - La CMP, réunie le 10 février dernier au Sénat, est parvenue sans difficulté à un compromis sur ce texte, qui réussit la prouesse d'être à la fois ambitieux et largement accepté, et même attendu. Concertée, présentée de façon pédagogique, cette loi concilie compétitivité et protection des consommateurs.

La tarification des parkings publics au quart d'heure a finalement été préférée, pour des raisons pratiques, à la tarification à la minute. Ce n'est pas le texte du Sénat, ce n'en est pas moins une avancée importante dont l'initiative revient à notre Haute assemblée.

La CMP unanime a approuvé la possibilité d'appliquer une retenue de 20 % sur le montant remboursable de la taxe d'aéroport, lorsque la demande n'a pas été faite en ligne : c'est une position équilibrée.

Des dispositions contraires au droit européen ont été supprimées, comme l'encadrement des pratiques commerciales prévoyant le remboursement des montants versés sous certaines conditions, l'obligation faite aux vendeurs d'indiquer si la commande sera exécutée par une société partenaire ou les dispositions relatives à la fourniture périodique de services.

La mise aux normes des stations-services a été repoussée à 2016 pour celles distribuant plus de 500 mètres cubes.

L'important n'est pas de créer de nouvelles normes, mais de faire respecter celles qui existent.

Les factures d'énergie pourront être réglées par mandat compte ; la durée minimum des contrats de fourniture de GPL a été maintenue à cinq ans. En matière de démarchage téléphonique, la rédaction du Sénat l'a emporté. Le nouveau dispositif n'est pas un Pacitel bis : les entreprises se voient imposer de strictes contraintes, dont la méconnaissance sera sanctionnée. Que le ministère y veille et en fasse une des priorités de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

En matière d'optique, la concurrence sera renforcée, au bénéfice des consommateurs. Le relèvement de trois à cinq ans de la durée de validité des ordonnances de verres correcteurs n'a pas été retenu ; nous y reviendrons dans des textes ultérieurs.

La prévention du surendettement sort également renforcée de la CMP : une proposition de crédit amortissable alternative devra accompagner toute offre de crédit à la consommation. Le texte retenu par la CMP permettra la création rapide du registre national des crédits aux particuliers.

Le chapitre relatif aux indications géographiques a été adopté dans la rédaction proposée par le Sénat. Le texte a bénéficié d'un enrichissement continu : je vous invite donc à le voter.

M. Martial Bourquin, co- rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - Je m'associe aux propos de M. Fauconnier. Ce texte est majeur pour nos concitoyens. Il leur ouvre des droits nouveaux, sans porter atteinte à la compétitivité de nos entreprises.

La CMP a légèrement ajusté le dispositif de l'action de groupe, en préservant les apports du Sénat, notamment sur l'action de groupe simplifiée. Les propositions de Nicole Bonnefoy ont été retenues, ainsi que la compétence de tous les TGI voulue par M.  Tandonnet et adoptée à l'unanimité par le Sénat.

Un régime dérogatoire pour les factures récapitulatives avait été adopté lors de la navette en faveur du bâtiment. La CMP l'a supprimé pour ce secteur comme pour les entreprises de négoce hors Union européenne, dans un souci de préservation de la compétitivité de nos entreprises.

La CMP a adopté le texte du Sénat relatif à la régulation de la sous-traitance et aux contrats-types, et modifié le dispositif relatif aux magasins de producteurs. Ceux-ci peuvent vendre des produits bruts, mais aussi transformés par des artisans.

Le dialogue entretenu avec Alain Fauconnier, comme avec Razzy Hammadi et Annick Le Loch, les rapporteurs de l'Assemblée nationale, a contribué à la réussite de la CMP.

Je vous invite à adopter ce texte qui prend en compte les attentes des consommateurs et les défis de notre économie. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation .  - Ne reconnaissant pas tous les personnages et allégories représentés dans cet hémicycle, M. le président m'a fait parvenir une brochure qui m'a permis d'identifier la Prudence, la Force qui protège, la Vérité...

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - Les vertus mêmes du Sénat !

M. Benoît Hamon, ministre délégué.  - ... mais aussi la Tempérance. Belle illustration de l'esprit de ce projet de loi ! Il invite lui aussi à plus de tempérance dans la consommation des produits, grâce à la garantie légale de conformité et au réemploi. Il améliore l'information des consommateurs, qui ont droit à la vérité. Il favorise la justice - avec l'action de groupe - et protège avec force ceux qui en ont besoin. La vie de nos concitoyens en sera améliorée dès 2014. Les décrets seront pris le plus rapidement possible, une fois passé, probablement, le filtre du Conseil constitutionnel.

Je me réjouis des conclusions de la CMP. Sur l'action de groupe d'abord : la procédure simplifiée retenue sera garante de la sécurité juridique et permettra la réparation des préjudices dans les meilleures conditions. Les dispositions proposées par Nicole Bonnefoy sont tout à fait opportunes.

Tous les TGI et non les tribunaux d'instance seront compétents, comme l'avait proposé un amendement du RDSE : c'est une bonne chose.

L'article 17 quater restera associé au travail de M. Fauconnier. Il fera baisser significativement le prix des lunettes, mais sans porter préjudice aux industriels français. Rappelons que 3 millions de Français renoncent à s'équiper pour des raisons financières.

L'équilibre trouvé sur l'encadrement des relations commerciales est bon : les conditions générales de vente en restent le fondement ; nous prévenons tout retour vers les marges arrière et le ligne à ligne.

Nous avons bien travaillé. Je remercie le président Raoul, qui y est pour beaucoup. Travailler avec vous a été un honneur. Tous les textes votés par le Sénat sont profitables aux Français ; c'est particulièrement le cas de celui-ci. La création de l'action de groupe et du Registre national des crédits aux particuliers (RNCP) fera date, je n'en doute pas. (Applaudissements à gauche)

Mme Élisabeth Lamure .  - Sans surprise, la CMP n'a guère infléchi les orientations imprimées à ce texte depuis la première lecture, notamment la défiance à l'égard des entreprises.

Ce texte ne doit pas être pris pour ce qu'il n'est pas. Ce n'est pas un outil macro-économique. On ne soutient pas la consommation en modifiant le fonctionnement des contrats ou en augmentant les pouvoirs de la DGCCRF.

Cela étant, ce texte contient de véritables progrès. L'action de groupe renforce les droits des consommateurs. L'augmentation des pouvoirs de la DGCCRF va dans le bon sens. Nous souscrivons également aux mesures relatives au démarchage téléphonique ou aux obligations d'information des consommateurs.

Certains points demeurent obscurs. La mise en oeuvre de l'action de groupe est rien moins qu'évidente. C'est un bel outil, mais sa réalisation reste à parfaire. Vous avez toujours manifesté votre réticence à l'égard des méthodes d'opt-out et d'un système à l'américaine. Ce n'est pas suffisant.

Quant au RNCP, il ne présente pas toutes les garanties de protection des données personnelles. Nous saisirons le Conseil constitutionnel sur ce point.

L'allongement des délais relatifs aux défauts de conformité est extravagant, déconnecté des réalités économiques.

Les dispositions applicables aux sociétés d'assurance, comme le droit de résiliation infra-annuelle, augmenteront les primes réclamées aux assurés, comme ce fut le cas dans les pays voisins.

Notre inquiétude porte également sur les pouvoirs donnés à la DGCCRF et aux associations de consommateurs, de demander au juge de déclarer des clauses réputées non écrites. La DGCCRF cumulera un pouvoir d'instruction et de sanction.

Nous regrettons que l'amendement de M. Dallier sur la tarification à la minute des parkings ait été rejeté, et trouvons inapplicables l'obligation de mentionner le « Fait maison » imposée aux restaurateurs, d'autant que la DGCCRF n'aura pas les moyens d'exercer un contrôle.

Mme Évelyne Didier.  - La RGPP !

Mme Élisabeth Lamure.  - Un trop grand nombre de mesures présentées ici fragiliseront notre tissu économique car elles ignorent le fonctionnement des entreprises. Elles encourageront la délocalisation des entreprises de services à faible valeur ajoutée comme le démarchage téléphonique.

Le projet de loi est déséquilibré : le groupe UMP s'y opposera donc derechef. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Muguette Dini .  - La discussion du projet de loi relatif à la consommation arrive enfin à son terme. Comme mon groupe, j'en suis assez satisfaite.

Saluons les efforts du Gouvernement : le Parlement a eu le temps d'examiner ce texte ambitieux. N'hésitez pas, monsieur le ministre, à passer le mot à vos collègues : le Parlement peut faire son travail lorsqu'on lui en laisse les moyens... Je salue votre pugnacité et votre ouverture.

L'action de groupe est une avancée majeure. Reste à voir comment les associations s'en saisiront. Nous regrettons que l'action de groupe simplifiée demeure dans le texte. Il est à craindre qu'une des procédures prenne le pas sur l'autre.

Nous nous réjouissons de la création du RNCP, demande régulière de notre famille politique.

Certes, ce fichier n'est pas la panacée, mais il s'ajoute à une batterie de mesures utiles. Certes, il ne contient pas les crédits mobiliers, et nous déplorons la frilosité de la CMP sur ce point et sur le rachat de crédits, mais il constitue un premier pas pour lutter contre le surendettement.

L'obligation d'adjoindre une offre de crédit amortissable à toute offre de crédit renouvelable est une belle avancée. Nous regrettons en revanche que la CMP n'ait pas voulu interdire de rémunérer les vendeurs en fonction des crédits souscrits par les acheteurs. Quant aux délais de paiement, une exception pour le bâtiment aurait aidé ce secteur crucial pour notre économie, mais en difficulté. Notre plus grand regret se situe à l'article 9 bis : la gratuité de paiement des services essentiels - énergie, eau, télécommunications - pour les plus fragiles a finalement été limitée à l'énergie.

Je salue les rapporteurs et le président de la commission, qui a joué comme à son habitude un rôle de facilitateur. Merci aussi à M. le ministre de s'être montré ouvert. Le groupe UDI-UC votera en faveur de ce texte. (M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques, applaudit)

Mme Évelyne Didier .  - Ce projet de loi n'augmentera pas le pouvoir d'achat des Français - hors les mesures relatives à l'optique. Pourtant, la précarité progresse dans notre pays, en raison du double carcan de la politique d'austérité nationale et de l'harmonisation européenne maximale.

Nous avons soutenu le renforcement de l'information précontractuelle et la lutte contre les pratiques déloyales, mais nos amendements ont été systématiquement rejetés. Ainsi de celles relatives aux produits carnés bruts, ou aux conditions éthiques et environnementales de fabrication des biens.

Nous avons pris acte des engagements du ministre sur l'action de groupe, qui reste une bonne mesure.

Je redis en revanche notre opposition à la création du RNCP. Le problème du surendettement est plus large : c'est le moteur même de l'économie dans une société d'hyperconsommation. Nous avons proposé d'encadrer davantage crédit et cartes confuses, en vain.

Pour toutes ces raisons, nous ne soutiendrons pas ce texte et nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Stéphane Mazars .  - L'action de groupe est une avancée incontestable. Nous regrettons que nos propositions d'extension du dispositif à d'autres types de contentieux n'aient pas été retenues ; mais c'est un premier pas. Nous nous réjouissons que son contentieux ait été confié à tous les TGI, afin de préserver le maillage judiciaire du territoire.

Plusieurs membres de notre groupe craignent les conséquences du fichier positif, une autre innovation fondamentale de ce texte, pour les libertés. J'y suis pourtant favorable à titre personnel, car j'ai été confronté à la détresse des personnes surendettées. Le mécanisme reste perfectible cependant.

Notre groupe est attaché à l'encadrement des indications géographiques et je me réjouis que nos propositions sur l'article 23 aient été adoptées.

L'article 4 bis A crée la mention « Fait maison » dans la restauration : c'est une avancée majeure en faveur de la transparence. Le texte rééquilibre, plus largement, les relations commerciales.

Nous regrettons toutefois que certaines avancées n'aient pas passé le filtre de la CMP. Ainsi de nos propositions en matière de démarchage téléphonique ou des délais dérogatoires dans le BTP, qui permettraient aux PME du secteur de s'en sortir, tout simplement.

La CMP a en outre supprimé l'article 5 quater alors qu'il est indispensable d'encadrer les pratiques des sociétés de recouvrement.

Ce texte demeure un très bon texte : nous ne nous y opposerons pas. Certains d'entre nous le voteront même. (Applaudissements sur les bancs du RDSE et de la commission)

M. Joël Labbé .  - Enfin, cette loi arrive à son terme. Depuis des années, les citoyens réclamaient le droit de savoir pour pouvoir agir. Les scandales sanitaires et les défaillances dans la chaîne de production conduisent à des drames humains et environnementaux. Souvenez-vous des lasagnes à la viande de cheval, dont la fabrication faisait intervenir deux traders, quatre entreprises et cinq pays - un symbole du non-sens dans lequel nous nous trouvons.

Justice sociale et choix économiques sont indissociables des choix environnementaux. Nous devons protéger nos concitoyens contre leur insatiable envie de consommer.

La garantie légale de conformité nous convient parfaitement. La CMP l'a conservée, c'est heureux. La gratuité du paiement a toutefois été limitée aux factures d'énergie ; nous le déplorons.

En matière d'alimentation, certaines dispositions sont opportunes : l'étiquetage du « Fait maison » ; la sécurisation des magasins de producteurs. Le progrès vers des modes de consommation vertueux est rendu possible. Nous pouvons renouer avec une agriculture nourricière et de proximité. Je serai attentif aux décrets d'application dans toutes ces matières.

Le groupe écologiste considère l'action de groupe comme une première étape. Reste à l'étendre à la santé et aux préjudices écologiques.

Enfin, l'obsolescence programmée est reconnue, mais sa définition n'a pas été inscrite dans la loi. Elle est pourtant indispensable au développement d'une économie circulaire. L'équilibre a été rompu ces dernières années ; nous sommes passés dans une économie de surconsommation, de surproduction et de surexploitation des ressources de la terre. Lançons sans plus attendre un nouveau modèle. Seule une consommation éthique et partagée nous conduira sur la voie de la sobriété heureuse chère à Pierre Rabhi.

Nous voterons ce texte.

Mme Delphine Bataille .  - Ce projet de loi modernise et rééquilibre les relations entre consommateurs et professionnels. Il changera la vie de nos concitoyens.

La procédure d'action de groupe a été validée par la CMP, telle que prévue par le Sénat. C'est une grande avancée pour les victimes de tromperies ou d'obsolescence programmée. L'obligation de diffuser les pièces détachées et l'allongement du délai de conformité vont également dans le bon sens. Je passe rapidement sur la mention « Fait maison », les nouvelles règles d'assurance et les nombreuses autres mesures qui améliorent l'information du consommateur et renforcent ses droits. Certaines auront un effet direct sur leur pouvoir d'achat, comme la tarification au quart d'heure des parkings ou les nouvelles règles applicables en matière d'optique.

Pour aider les plus modestes, la possibilité sera offerte de régler gratuitement les factures énergétiques par mandat-compte.

Sur l'encadrement du démarchage téléphonique, beaucoup d'entre nous aurions aimé aller plus loin. Mon groupe fut cependant à l'initiative d'avancées réelles et qui demeurent, sans mettre en péril les emplois en France.

Dans l'ensemble, la CMP est parvenue à d'heureux compromis. Saluons un texte qui parle à tous les Français, et exprime une vision juste et ambitieuse de notre société. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Yannick Vaugrenard .  - Ce texte est porteur d'une belle ambition : soutenir les consommateurs en même temps que les entrepreneurs, car les opposer les uns aux autres n'a pas de sens. Cela n'a pas échappé à Frédéric Lefebvre.

Sur l'action de groupe, les équilibres trouvés au Sénat ont été maintenus, c'est heureux.

L'article 62 bis, qui crée des points de vente collectifs pour les agriculteurs, a fait débat. Le dispositif finalement trouvé apporte des garanties aux consommateurs sans pour autant désavantager le petit commerce traditionnel, si utile au monde rural.

Le respect des délais de paiement est devenu un enjeu de compétitivité : 11 milliards d'euros de trésorerie sont en jeu pour nos PME. Ce texte va dans le bon sens.

Monsieur le ministre, vous avez dû consulter au préalable, pour agir ensuite plus rapidement. Cette méthode permet d'allier protection des consommateurs et renforcement du tissu économique.

Initiative sociale majeure, le registre national des crédits aux particuliers protégera les plus faibles sans mettre en péril les libertés publiques. Grâce à un amendement du Gouvernement en séance publique, la Cnil sera représentée au sein de son comité de suivi. D'autres mesures renforceront le pouvoir d'achat des Français.

Quant à l'encadrement des délais de paiement, c'est une nécessité pour nos entreprises et un enjeu de la compétitivité.

Bref, c'est un texte gagnant-gagnant pour les entreprises et les consommateurs.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Yannick Vaugrenard.  - Un texte marqué par la volonté, la simplification, la justice, que nous soutenons avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

Vote sur le texte élaboré par la CMP

ARTICLE 17 QUATER

M. le président. - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 22

Remplacer le mot :

deuxième

par le mot :

troisième

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.  - Amendement de coordination.

M. Martial Bourquin.  - Favorable.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je regrette de n'avoir pas obtenu satisfaction sur la transparence du coût des assurances emprunteur.

M. le président.  - Ce n'est pas une explication de vote sur l'amendement.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Toujours est-il que je poursuivrai le combat.

L'amendement n°1 est adopté.

Intervention sur l'ensemble

M. Jacques Mézard .  - Nos échanges ont été constructifs et le RDSE a essayé d'y apporter sa pierre, même si certains d'entre nous s'abstiendront, moi le premier, car la CMP est revenue sur des points qui nous importaient particulièrement. Espérons que cela ne se reproduira pas trop souvent, faute de quoi, la prochaine fois, nous voterions contre, ou moi du moins. Ainsi de notre amendement sur le démarchage téléphonique : les lobbies ont gagné, comme le relate un article du Monde. De même, il était bon d'adresser un message de soutien aux artisans du bâtiment. Enfin, il est malheureux que, dans un texte destiné à protéger les consommateurs, on ait renoncé à encadrer les pratiques des sociétés de recouvrement.

Il y a dans ce texte beaucoup de points positifs, mais il est bon de temps en temps de faire passer des messages. Encore faut-il qu'ils soient entendus, ce dont je doute...

Le projet de loi est adopté.

M. Benoît Hamon, ministre délégué.  - Merci à tous.

La séance est levée à 22 h 55.

Prochaine séance demain, jeudi 13 février 2014, à 9 heures.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

Ordre du jour du jeudi 13 février 2014

Séance publique

De 9 heures à 13 heures

Présidence : M. Jean-Patrick Courtois, vice-président

Secrétaires : M. François Fortassin - Mme Odette Herviaux

1. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la santé (n°295, 2013-2014)

Rapport de M. Jacky Le Menn, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°324, 2013-2014)

Texte de la commission (n°325, 2013-2014)

De 15 heures à 15 heures 45

Présidence : M. Jean-Pierre Bel, président du Sénat

2. Questions cribles thématiques sur « Pratiques et réalités agricoles et code de la propriété intellectuelle »

De 16 heures à 20 heures

Présidence : M. Thierry Foucaud, vice-président

3. Proposition de loi relative au choix libre et éclairé d'une assistance médicalisée pour une fin de vie digne (n°182, 2013-2014)

Rapport de M. Jean Desessard, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°336, 2013-2014)

Résultat des travaux de la commission (n°337, 2013-2014)

4. Proposition de loi relative à la création d'un dispositif de suspension de détention provisoire pour motif d'ordre médical (n°232, 2013-2014)

Rapport de Mme Esther Benbassa, fait au nom de la commission des lois (n°342, 2013-2014)

Texte de la commission (n°343, 2013-2014)

Analyse des scrutins publics

Scrutin n° 145 sur l'article 2 de la proposition de loi relative à l'accueil et à la prise en charge des mineurs isolés étrangers

Résultat du scrutin

Nombre de votants :347

Suffrages exprimés :347

Pour :170

Contre :177

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (131)

Pour : 131

Groupe socialiste (127)

Contre : 127

Groupe UDI-UC (32)

Pour : 32

Groupe CRC (20)

Contre : 20

Groupe du RDSE (19)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 18

Groupe écologiste (12)

Contre : 12

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 6