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Table des matières



Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

Discussion générale

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur de la commission des lois

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

M. Yves Détraigne

Mme Cécile Cukierman

Mme Virginie Klès

Mme Hélène Lipietz

M. Jean-Jacques Hyest

M. Jacques Mézard

M. Philippe Kaltenbach

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur

M. Alain Vidalies, ministre délégué

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS

ARTICLE 3

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 4

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Jacques Hyest

Mme Cécile Cukierman

Mme Hélène Lipietz

Mme Virginie Klès

Commission spéciale (Démission et candidature)

Débat sur l'avenir de la production d'énergie

Rappel au Règlement

M. Ladislas Poniatowski

Orateurs inscrits

M. Stéphane Mazars, au nom du groupe RDSE

Mme Cécile Cukierman

M. Roland Courteau

M. Ladislas Poniatowski

M. Ronan Dantec

M. Jean-Claude Requier

M. Marcel Deneux

Rappel au Règlement

M. Jean Bizet

M. Ronan Dantec

Commission spéciale (Nomination)

Questions d'actualité

Décentralisation

M. Jean-Pierre Raffarin

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Réduction des dépenses publiques

M. Aymeri de Montesquiou

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget

Aides à la presse en ligne

M. David Assouline

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et de finances, chargé du budget

OGM

M. Joël Labbé

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Pouvoirs de la finance

M. Éric Bocquet

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget

Financement de la politique familiale

M. Jean-Pierre Chevènement

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget

Fonds structurels européens

M. Jean Bizet

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Éducation prioritaire

Mme Françoise Cartron

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative

Tourisme

M. Luc Carvounas

Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme

Inondations dans le Var

M. François Trucy

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Organisme extraparlementaire (Candidatures)

Simplification du droit dans les domaines justice et affaires intérieures (Procédure accélérée  -  Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Philippe Kaltenbach

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE PREMIER

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 2

ARTICLE ADDITIONNEL

ARTICLE 3 (SUPPRIMÉ)

ARTICLE 5

ARTICLE 7

ARTICLE 8

ARTICLE 9

ARTICLE 10

ARTICLE 11

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 15

ARTICLE 16

Décisions du Conseil constitutionnel

Saisines du Conseil constitutionnel

Organisme extraparlementaire (Nominations)

Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

Discussion générale

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur de la commission des lois

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

M. Yves Détraigne

Mme Cécile Cukierman

Mme Virginie Klès

Mme Hélène Lipietz

M. Jean-Jacques Hyest

M. Jacques Mézard

M. Philippe Kaltenbach

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur

M. Alain Vidalies, ministre délégué

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS

ARTICLE 3

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 4

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Jacques Hyest

Mme Cécile Cukierman

Mme Hélène Lipietz

Mme Virginie Klès

Débat sur l'avenir de la production d'énergie

Rappel au Règlement

M. Ladislas Poniatowski

Orateurs inscrits

M. Stéphane Mazars, au nom du groupe RDSE

Mme Cécile Cukierman

M. Roland Courteau

M. Ladislas Poniatowski

M. Ronan Dantec

M. Jean-Claude Requier

M. Marcel Deneux

Rappel au Règlement

M. Jean Bizet

M. Ronan Dantec

Commission spéciale (Démission et candidature)

Questions d'actualité

Décentralisation

M. Jean-Pierre Raffarin

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Réduction des dépenses publiques

M. Aymeri de Montesquiou

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget

Aides à la presse en ligne

M. David Assouline

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget

OGM

M. Joël Labbé

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Pouvoirs de la finance

M. Éric Bocquet

Financement de la politique familiale

M. Jean-Pierre Chevènement

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget

Ordre du jour du lundi 27 janvier 2014

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du jeudi 23 janvier 2014

60e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de M. Thierry Foucaud,vice-président

Secrétaires : Mme Marie-Noëlle Lienemann, Mme Catherine Procaccia.

La séance est ouverte à 9 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi portant réforme de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, présentée par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues à la demande du groupe RDSE.

Discussion générale

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi .  - Le RDSE se veut, aujourd'hui comme hier, à la pointe du combat pour les libertés, dans le sillon d'Albert Camus qui disait : « Si l'homme échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout ».

Le droit pénal a été victime ces dernières années d'attaques frontales entre stigmatisation du laxisme des juges et appel à la suppression du juge d'instruction. Ces attaques ont entamé le lien de confiance tacite dans un État de droit entre les magistrats et le peuple souverain. N'oublions pas, comme le disait Anatole France, que « la majesté de la justice réside dans chaque sentence rendue au nom du peuple français ».

Le glissement subreptice d'une politique pénale recherchant un difficile équilibre entre répression et prévention vers une politique globalement répressive, nous l'avons vigoureusement combattu au nom de la liberté, de la dignité et de l'égalité sans jamais verser dans l'angélisme. La justice sans la force est impuissante, disait Pascal. Nous nous sommes opposés à la politique aveugle menée sous le quinquennat précédent : la procédure de rétention, les peines plancher, la déchéance de la nationalité pour les auteurs de certains crimes, les jurys citoyens en matière correctionnelle, le tout-carcéral, qui pousse à construire des prisons plus modernes et plus déshumanisées.

Mme Hélène Lipietz.  - Tout à fait !

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi.  - Il y a urgence à refonder notre politique pénale, dix-huit mois après le changement de majorité, vu le bruit de fond inquiétant dans la société, nos concitoyens étant excédés par la délinquance, - preuve de l'inefficacité de la politique du tout-répressif. Aussi avons-nous en préalable déposé cette proposition de loi réformant la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Celle-ci fut créée par la loi Perben II de 2004, avant de voir son champ élargi en 2005, en 2009 et en 2011. Inspiré des systèmes britannique et américain, le « plaider-coupable » est étranger à l'esprit de notre droit pénal avec son fondement contractuel : l'autorité du juge s'en trouve affaiblie, réduit au rôle d'arbitre. En outre, la procédure donne une place déséquilibrée au ministère public.

Égalité devant la loi, présomption d'innocence, droit à un procès équitable, tels sont les principes qui doivent fonder la procédure pénale. La place centrale occupée par le procureur de la République dans la CRPC pose donc problème. Le statut du parquet français ne fait-il pas l'objet de réserves réitérées de la Cour européenne des droits de l'homme ?

L'actuelle majorité s'était interrogée dès 2004 : M. Le Bouillonnec, en 2004, doutait que le droit à un procès équitable fût ainsi garanti. Les décisions sur la culpabilité et la peine sont prises dans le bureau du procureur de la République, à l'encontre du principe de publicité des débats. M. Dreyfus-Schmidt parlait de « discrétion absolue », qui pourrait servir à des accusés peu soucieux de publicité...

Le prévenu peut subir de fortes pressions pour avouer, faute de quoi il s'expose à des peines plus sévères.

Le rapport de M. Collombat montre cependant que la CRPC est principalement utilisée dans des contentieux simples où la culpabilité ne fait pas de doute. La présence obligatoire de l'avocat renforce la valeur des aveux ; reste le problème de l'accès à un avocat spécialisé.

Il ne paraît toutefois pas opportun d'étendre encore cette procédure. Benjamin Constant nous a appris que « l'arbitraire n'est pas seulement funeste quand on s'en sert pour le crime. Employé contre le crime, il est encore dangereux ». Dans les juridictions surchargées, on aura tendance à privilégier la CRPC... À cela s'ajoute la charge supplémentaire de travail que cette procédure représente pour les tribunaux.

Cette proposition de loi limite donc la CRPC aux délits passibles de trois ans d'emprisonnement au plus, et en rend l'encadrement plus strict. Avec 65 000 procédures en 2013, soit 13 % des poursuites, la CRPC a certes trouvé son utilité. Nous prenons acte des observations des praticiens, tout en considérant que le recours à des procédures d'exception ne doit pas être encouragé dans le simple but de désengorger les tribunaux.

Nous nous félicitons de la position de la commission, qui a donné au juge la possibilité de revoir la peine à la baisse, prévu les conditions de caducité de la convocation à l'audience correctionnelle, et autorisé les victimes à adresser des observations au procureur.

Notre groupe a fait le choix du pragmatisme, sans posture idéologique. Le droit pénal doit chercher l'équilibre ente l'intérêt de la société et des victimes, et les droits des mis en cause. Pour faire reculer une justice de sûreté au profit d'une justice de liberté, nous vous invitons à voter ce texte. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Très bien !

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur de la commission des lois .  - La CRPC, créée en 2004, constitue l'essentiel des procédures accélérées destinées à désengorger les juridictions, ce qui ne plaide pas pour son innocence présumée. (Sourires) Je dois avouer quelques états d'âme, tant mes griefs, que je tirais souvent des principes, ont été mis à mal par ce que m'ont dit les praticiens qui se sont révélés bien plus attachés à cette procédure, même lorsqu'ils l'avaient combattue en 2004, que je ne me le figurais.

À l'origine, la CRPC est un emprunt à la common law, voire au plea barguaining états-unien... Outre-Atlantique, elle représente 95 % des procédures, sans doute pour éviter le passage devant des jurés pas spécialement tendres. En France, on ne plaide pas coupable, tout au plus se reconnaît-on coupable.

Cette proposition de loi vise à rapprocher la CRPC du procès ordinaire. Tentons cependant de comprendre pourquoi les praticiens s'y sont finalement ralliés. Pour des raisons pratiques essentiellement. La CRPC, qui représente 13 % du contentieux pénal, portant surtout sur des délits mineurs, un contentieux sans problème de culpabilité, dont l'exemple typique est l'alcool au volant.

Le texte de la commission, tout en respectant les grands équilibres de la CRPC, procède à des aménagements. L'accusé ne doit pas faire l'objet de pressions pour avouer : d'où l'interdiction de recourir à cette procédure après un défèrement. Nous supprimons aussi la possibilité de convoquer concomitamment la personne mise en cause devant le tribunal correctionnel et à l'entretien avec le procureur de la République pour une CRPC. Si le prévenu n'accepte pas la CRPC et si le juge refuse l'homologation, il faudra une nouvelle convocation.

Enfin, la victime pourra faire parvenir ses observations au procureur de la République dans la première phase de la procédure, car elle peut lui fournir des éléments d'appréciation utiles, l'enquête de police étant souvent très succincte.

La commission a supprimé toutes les dispositions qui auraient conduit à une quasi-disparition de la CRPC. Elle vous invite à voter son texte. (Applaudissements)

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - « Celui qui sait avouer peut oublier ». Le grand artiste surréaliste Francis Picabia ne se doutait pas qu'il exprimait ainsi l'esprit de la CRPC. Les travaux de Françoise Tulkens sur la justice imposée ou consensuelle nous incitent à réfléchir. Passer d'une peine imposée à une logique de contractualisation, voilà l'enjeu.

La proposition de loi du RDSE nous invite à jeter un regard critique sur la CRPC et à l'améliorer. La France fut l'un des derniers pays d'Europe à introduire le « plaider-coupable », longtemps étranger aux cultures juridiques continentales, où perdure « un rapport sacré à la loi, où la confrontation de l'individu à la loi est essentielle » comme le souligne le professeur de droit Papadopoulos.

Le Sénat réfléchit au sujet depuis longtemps. Je pense à l'étude de législation comparée, et aux rapports de 2003 et 2005 de M. Zocchetto. Nombreux étaient ceux qui s'interrogeaient sur les risques de pressions à l'encontre des justiciables, notamment les plus vulnérables. D'autres redoutaient une forme de marchandage.

Le choix du législateur français est finalement bien éloigné du « plaider-coupable » à l'américaine, et se rapproche plutôt d'une forme de contrat d'adhésion.

Le risque de voir les puissants protégés par le parquet a été écarté. La CRPC illustre le rôle déterminant du procureur dans la justice pénale : d'où l'importance de revoir son statut, de manière dépassionnée.

Le Gouvernement a demandé à la Chancellerie un bilan provisoire de la CRPC. Les résultats sont rassurants. Votre commission partage notre analyse. Comme le disait George Bernard Shaw : « Le progrès est impossible sans changement, et ceux qui ne peuvent pas changer leur esprit ne peuvent rien changer ».

La montée en charge de la CRPC fut progressive ; elle représente désormais 12 à 13 % des inscriptions au casier judiciaire.

Un autre rapport à la justice pénale peut s'instaurer grâce à la discussion entre le prévenu et les magistrats.

Les faits étant reconnus, le débat ne porte pas sur la culpabilité. Le contentieux routier représente 58 % des affaires concernées, la plupart sans victimes. La CRPC aboutit à des condamnations moins sévères ; les échecs - qui représentent 13 % des affaires - sont dus le plus souvent au défaut de présentation.

Les principales organisations professionnelles de magistrats et d'avocats conviennent que la CRPC n'est pas le plaider-coupable américain. La transplantation ne se fait jamais sans adaptation : l'exemple du jury anglais, introduit en France en 1791, en témoigne.

Selon la Chancellerie, le traitement d'un dossier de CRPC par le greffe prend 70 minutes contre 180 minutes pour un dossier de jugement. Cette procédure contribue donc au désengorgement des juridictions.

Cela n'autorise pas son développement sans limite. Nous gardons en mémoire les mots de Mme Delmas-Marty : « le risque existe que les procédures négociées ne représentent autre chose, à l'heure de la dérégulation, que l'introduction d'une économie de marché dans l'administration de la justice pénale ». Seul le procès dans certains cas est en mesure de jouer son rôle de pacification sociale. Il permet une mise à distance des parties par le rite, si important pour le juriste Antoine Garapon, une reconnaissance publique de l'infraction, une mesure publique de sa gravité, mais aussi une reconnaissance publique de la victime, qui peut ainsi se reconstruire.

La commission a supprimé l'article premier qui restreignait la CRPC aux délits passibles de moins de trois ans d'emprisonnement, et l'excluait dans les cas de récidive. Le Gouvernement approuve ce choix : le quantum de la peine n'est pas le critère le plus approprié, d'autant que les sanctions n'ont fait que s'aggraver ces dernières années avec la multiplication des circonstances aggravantes : un vol dans un distributeur de boissons, commis par deux personnes dans le RER peut valoir dix ans de prison ! De même pour la récidive : dans le contentieux routier, s'il n'y a pas de victimes, la CRPC est utile. Faisons confiance au discernement des magistrats. La CRPC peut être pertinente, car elle autorise un dialogue plus direct et responsabilise mieux le condamné.

Le texte de votre commission améliore substantiellement le droit positif. Il garantit les droits de la défense, énoncés par la CEDH. Le juge voit son rôle d'homologation renforcé : la nouvelle rédaction consacre la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel en 2004.

La CRPC ne pourra intervenir à la suite d'un défèrement : une personne fragilisée par une garde à vue ne peut pas toujours se prononcer en connaissance de cause.

Lorsque le prévenu est simultanément convoqué pour une CRPC et devant le tribunal correctionnel, imposer un délai de dix jours est une bonne chose afin d'éviter toute pression. Le Gouvernement proposera d'imposer au parquet de déposer au greffe sa proposition de peine dix jours à l'avance, afin de favoriser une discussion éclairée et la venue même des intéressés à l'audience. Nous sommes attachés à cet amendement, sans avoir réussi, semble-t-il, à vous convaincre jusqu'ici...

Votre commission souhaite enfin que la victime puisse adresser ses observations au procureur de la République et que le juge puisse refuser l'homologation s'il estime une audience au tribunal justifiée par la situation de la victime.

Le Gouvernement soutient cette proposition de loi qui renforce les droits des personnes. (Applaudissements à gauche et au banc de la commission)

M. Yves Détraigne .  - La proposition de loi du RDSE vise, selon son intitulé, à « réformer » la CRPC, sa rédaction initiale la faisait plutôt disparaître...

Pour sa part, le groupe UDI-UC croit à la pertinence et à l'efficacité de ce type de procédure. Malgré les interrogations légitimes qu'elle a soulevées, la CRPC a rencontré un franc succès : 65 000 affaires pénales en 2012, soit 13 % des poursuites. Ce taux n'a cessé d'augmenter depuis 2005.

Son champ a été étendu en 2011 à tous les délits.

L'objectif est louable : alléger les audiences correctionnelles des affaires simples, pour prononcer des peines plus efficaces.

Les juridictions ont su trouver un usage adapté de cette procédure : c'est ainsi que 58 % des contentieux routiers sont réglés. Elle désengorge nos juridictions tout en apportant une réponse efficace à des délits avérés.

Les exclusions prévues à l'article premier auraient été très préjudiciables ; nous nous félicitons de sa suppression.

Faut-il donner au juge la possibilité de diminuer la peine ? Cela déséquilibrerait les relations entre siège et parquet.

La présence du procureur de la République à l'audience ne nous paraît pas non plus nécessaire : que pourra-t-il dire de plus ?

Il est souhaitable, en revanche, que la victime puisse adresser ses observations au procureur, afin que celui-ci puisse proposer une peine plus adaptée.

Nous voterons donc le texte ainsi amélioré.

Mme Cécile Cukierman .  - La gauche s'était opposée fermement à l'instauration de la CRPC en 2004. Nous avons nous-mêmes déposé une proposition de loi pour la supprimer.

Cette procédure, comme le souligne l'exposé des motifs de la proposition de loi, laisse de trop larges pouvoirs au procureur, dont l'indépendance est contestée, et va à l'encontre du principe de séparation des autorités de poursuite et de jugement. Le prévenu et l'avocat n'ont qu'une très faible marge de manoeuvre.

Si l'article 495-8-4 du code de procédure pénale semble être un rempart, l'avocat, dans la pratique, constitue plutôt un alibi. La profession dénonce le peu de temps dont elle dispose pour préparer la défense des prévenus. On comprend donc l'intérêt d'un procès, lequel implique une publicité des débats contrairement à la CRPC - d'ailleurs, certains prévenus ont intérêt à ne pas voir leurs actes délictuels rendus publics.

Enfin, la CRPC, à l'utilisation variable selon l'engorgement des tribunaux, aboutit à une inégalité de traitement entre justiciables.

La commission des lois a mené un travail intéressant. Elle a voulu atténuer les pressions pesant sur les personnes mises en cause en rendant caduque la convocation concomitante à l'audience correctionnelle si le prévenu s'est présenté devant le procureur, et en interdisant la CRPC en cas de défèrement. De fait, si la garde à vue a été réformée, ce n'est pas suffisant : la privation de liberté demeure et fait obstacle à un choix éclairé.

Ensuite, le texte a précisé le pouvoir d'homologation du président du tribunal, suivant en cela les réserves d'interprétation du Conseil constitutionnel dans sa décision du 2 mars 2004. Reste que la CRPC, qui déplace la décision du siège au parquet, est trop souvent utilisée à seule fin de gérer le flux au sein des juridictions, et non en fonction de la nature des faits ou de la personnalité du prévenu ; les syndicats de magistrats auditionnés l'ont souligné. D'autres solutions existent : augmenter le budget de la justice, et dépénaliser certains contentieux comme le contentieux routier. En attendant, le groupe CRC votera ce texte. (Applaudissements à gauche et au centre)

Mme Virginie Klès .  - Après avoir failli débattre de la mise à mort de la CRPC, ou peu s'en faut, nous discutons d'un texte lui apportant d'utiles ajustements. Créée en 2004, cette procédure a été d'emblée critiquée. Pour les élus de gauche, il semblait que la présomption d'innocence était bafouée par la reconnaissance préalable de culpabilité, que le principe du contradictoire était mis à mal, de même que celui de la publicité des débats.

Finalement, la sagesse de la justice et des magistrats a inscrit cette procédure dans notre droit de manière très raisonnée. Et notre rapporteur a changé son fusil d'épaule pour améliorer par petites touches la CRPC, je lui rends hommage. Le champ d'application de la procédure - qui concerne 65 000 affaires par an, 10 % ou 15 % des décisions n'étant pas homologuées par le juge - ne changera pas ; finalement, le seuil de peine ne changera pas - et s'il en est ainsi, c'est que l'échelle des peines et devenue incohérente ; il faudra la toiletter.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Voire plus !

Mme Virginie Klès.  - Les droits de la défense ont été améliorés : l'avocat pourra assister son client lors de l'entretien avec le procureur de la République et s'entretenir avec lui hors la présence de ce dernier.

La pression pesant sur le prévenu sera allégée du fait de la modification du jeu des convocations. En revanche, monsieur le ministre, demander au procureur de la République de déposer la proposition de peine au greffe dix jours avant l'audience la renforcera.

Les droits des victimes n'ont pas été oubliés : elles pourront adresser leurs observations au procureur de la République dès la première phase de la procédure. La commission a en outre préféré ne pas donner au juge la possibilité de revoir la peine à la baisse ; à cet égard, un équilibre a été atteint.

Je rends hommage au rapporteur, qui a su convaincre tous ceux qui étaient vent debout contre la CRPC que cette procédure était utile. Le groupe socialiste votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Hélène Lipietz .  - S'agit-il d'un renoncement ? Comme d'autres, j'ai eu le plaisir de convaincre mon groupe de l'intérêt de ce texte. Ce n'était pas évident tant la procédure répondant au nom barbare de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité et au charmant diminutif de CRPC paraît étrangère à notre tradition juridique - certains y voyaient un clone du plaider-coupable américain.

Nous nous sommes ralliés, d'audition en audition, aux arguments des magistrats qui ont eu la sagesse de circonscrire le champ d'application de cette procédure. Nous approuvons le travail de la commission, dont le texte corrige certains défauts de la procédure. En revanche, était-ce le bon véhicule pour revoir la place des victimes dans notre droit ? Dans le droit pénal français, c'est le ministère public qui poursuit. Il y a là toute une philosophie : l'État s'interpose entre les citoyens pour éviter qu'ils se fassent justice eux-mêmes. La loi du talion était déjà une tentative de borner la vengeance privée... La réponse doit être proportionnée ; disant cela, je pense à toutes les victimes que j'ai défendues, qui veulent que leur voix soit entendue et leur place reconnue.

Cela étant dit, le groupe écologiste votera le texte. (Applaudissements à gauche et au centre)

M. Jean-Jacques Hyest .  - Le ministre, que j'ai toujours plaisir à entendre, a changé de ligne depuis 2004. Comme quoi, on peut évoluer... J'avais été impressionné en 2004 par les diatribes sur ce que l'on appelait un emprunt au système américain, contraire à notre tradition... Cet argument ne tient pas : nous sommes loin du plea bargaining, la CEDH l'a confirmé. D'ailleurs, le Conseil constitutionnel, s'il a émis des réserves auxquelles nous devons être attentifs, n'a pas censuré la loi du 9 mars 2004. Les magistrats, qui lui étaient extrêmement hostiles, y sont désormais attachés. La CRPC s'est adaptée à notre droit : elle est cantonnée au contentieux de masse ; elle a même été étendue à tous les délits en 2011 par un amendement de M. Détraigne, sous réserve de ceux visés aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal punis d'une peine de plus de cinq ans d'emprisonnement. En réalité, ce n'est pas le quantum de la peine qui importe, mais la nature du contentieux.

J'ajoute, madame Klès, que nous avions pesé au trébuchet le quantum des peines lors de la grande réforme de notre droit pénal. Les gouvernements successifs se sont acharnés, ensuite, à défaire ce travail. Il faudra un jour y faire le ménage...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Un grand ménage !

M. Jean-Jacques Hyest.  - La CRPC, cela a été dit, représente 15 % du contentieux pénal depuis 2009 ; elle n'est pas homologuée dans 12 % des cas seulement. Il n'y a pas lieu de la restreindre. Des garanties sérieuses sont apportées, au rang desquelles la présence de l'avocat, la publicité de l'audience d'homologation et l'examen des éléments du dossier par le président du TGI. Et il est bon d'inscrire dans la loi les réserves du Conseil constitutionnel sur le pouvoir d'homologation du juge, ainsi qu'un renforcement du droit des victimes.

Si nous n'aurions pas voté le texte initial, nous ne ferons pas obstacle à la version raisonnable que propose la commission des lois. Elle améliore l'administration de la justice - elle n'est pas seulement comptable, n'est-ce pas monsieur le ministre, après tout, le droit à un procès équitable, c'est aussi le droit à ce que les procédures ne s'éternisent pas.

Pour finir, tout cela nous ramène au sempiternel débat sur le statut du parquet et la réforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Qu'on prévoie l'avis conforme du CSM, et seulement cela, et un consensus pourra être trouvé au Parlement... (Applaudissements à droite)

M. Jacques Mézard .  - J'ai toujours plaisir à dialoguer avec vous, monsieur le ministre. Mais une fois de plus, aucun ministre en charge du dossier n'est là pour débattre avec le groupe du RDSE... Nous avons malheureusement pris l'habitude de cette absence de considération...

Certains intervenants n'ont pas changé d'avis depuis dix ans. M. Hyest en est, moi aussi : j'émets toujours les mêmes réserves à l'égard de la CRPC. Le ministre, comme sur l'interdiction du cumul des mandats, prêche avec le zèle du nouveau converti...

Pourquoi sommes-nous contre cette procédure ? Son utilité consiste à évacuer les dossiers quatre ou cinq fois plus vite que ne peut le faire le tribunal correctionnel. Et puis, nous sommes un pays de droit latin... La CRPC, c'est la distribution des peines. « Reconnaissez votre culpabilité, acceptez la CRPC, et cela se passera bien. Sinon, vous irez devant le tribunal correctionnel et la sanction risque d'être plus lourde ». Voilà le discours qu'on tient aux prévenus ; cette réalité, je l'ai vécue sur le terrain. Dans la pratique, les tribunaux, il est vrai, ont circonscrit le recours à cette procédure aux seuls cas où la culpabilité ne fait pas doute. Mais il suffit d'une volonté politique, et la CRPC sera utilisée différemment qu'elle ne l'est aujourd'hui ; il y aura alors danger. Ce n'est pas le cas, dont acte. Et nos magistrats sont respectueux de la République et des droits de la défense.

Le rapporteur, et il a eu raison, s'est employé à rogner les ailes de ma proposition de loi.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Le RDSE est pluraliste !

M. Jacques Mézard.  - Ce qui n'est pas le cas de tous les groupes...

Il fallait renforcer les droits de la défense, mais nous aurions dû nous pencher sur notre échelle des peines, qui est devenue totalement incompréhensible aux yeux des Français. Ces dernières années, certaines infractions économiques, semble-t-il, ont été sciemment écartées des tribunaux. Ce n'est pas un progrès pour notre démocratie.

Le groupe RDSE, avec ce texte, a prouvé son attachement aux libertés publiques et sa grande vigilance en attendant l'ambitieux projet de loi que nous présentera la garde des sceaux dans quelque temps - si toutefois elle daigne venir au Sénat. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et socialiste)

M. Philippe Kaltenbach .  - Beaucoup ont su faire évoluer leur position, magistrats, avocats, élus, si ce n'est M. Mézard sans doute, car la CRPC a démontré son utilité dans de nombreux contentieux. Avec 65 000 procédures, elle représente 13 % du contentieux ; en cela, elle contribue à désengorger nos tribunaux.

Le rapporteur a modifié sa position après avoir écouté les uns et les autres. Il propose d'améliorer la CRPC, de mieux l'encadrer, sans remettre en cause son équilibre. Il est bon de renforcer les droits des victimes ; je ne comprends pas l'interprétation de Mme Lipietz, il ne s'agit pas de revenir à la loi du talion. La victime pourra désormais adresser ses observations au procureur de la République dans la première phase. Je proposerai d'aller plus loin, malgré l'avis défavorable de la commission, en prévoyant que la victime puisse être entendue par le procureur dans la première phase. Donner à la victime la possibilité d'être écoutée, entendue, reconnue sera toujours un progrès. Tel est le sens de l'amendement que je vous soumettrai. Le groupe socialiste apportera évidemment son soutien à ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur .  - Merci à tous de leurs interventions. Quelques observations. On ne s'y retrouve plus aujourd'hui dans l'échelle des peines ; raison pour laquelle il eût été inutile de tenter de limiter l'usage de la CRPC par leur quantum... Si cette procédure a réussi, c'est qu'elle a été cantonnée à certaines catégories de délits. Notre système, signe de bonne santé, s'est autorégulé. En outre, avec la judiciarisation de notre vie sociale, la frontière est devenue floue entre les délits classiques et ceux qui ont une fonction de régulation sociale, ce qui nous renvoie aux pouvoirs confiés au Ciel dans la Chine classique. La CRPC est utile, appliquée à un champ donné ; l'étendre serait, en revanche, dangereux.

M. Alain Vidalies, ministre délégué .  - Léon Blum disait qu'en politique, on n'a qu'un choix...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Se répéter ou se contredire !

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - En effet. Mais il y a des exceptions... En 2004, des objections de principe ont été opposées à l'instauration de la CRPC ; elles peuvent subsister pour certaines et avec elles un devoir de vigilance. Mais il faut aussi faire preuve de réalisme. D'ailleurs, les craintes alors exprimées se sont révélées infondées : la CRPC est bien utilisée, et elle fait désormais l'objet d'un large consensus au sein de votre assemblée.

Monsieur Mézard, la vérité est que la garde des sceaux a passé son lundi au Sénat pour parler de la géolocalisation, son mardi pour débattre du Contrôleur des lieux de privation de liberté... Elle n'a pu être présente ce matin ; cette séance avait d'ailleurs été programmée à un autre moment. Rassurez-vous, vous aurez beaucoup d'autres occasions de débattre avec elle...

Nous avons une divergence d'interprétation sur l'amendement que présente le Gouvernement. Pour lui, le dépôt de la proposition de peine au greffe par le parquet ne va pas à l'encontre du renforcement des droits des justiciables. Il faudra aussi s'intéresser à la répartition géographique de l'usage de la CRPC, en droit pénal, ce ne peut pas être au petit bonheur la chance.

Le management de la justice, comme on dit aujourd'hui, est aussi une question de rapidité. Les justiciables eux-mêmes le demandent. Vient un moment où il faut sanctionner. En vérité, il y a une forme d'humanité dans cette procédure qui est vécue, non pas comme une échappatoire, mais comme une réponse juste à une infraction donnée.

Nous ferons vivre ce texte, en l'inscrivant dans l'ordre du jour réservé au Gouvernement s'il le faut ; le Gouvernement prend toute sa part dans ce débat.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier demeure supprimé.

L'article premier bis est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 495-7 du code de procédure pénale, il est inséré un article 495-7-1 ainsi rédigé :

« Art. 495-7-1. - La convocation établie en application de l'article précédent indique que la personne pourra, au moins dix jours avant sa comparution devant le Procureur de la République, consulter par l'intermédiaire de son avocat le dossier de la procédure, dans lequel figurera la proposition de peine envisagée. Elle précise également que la personne doit se faire assister d'un avocat et qu'elle peut à cet effet demander la désignation d'un avocat commis d'office. »

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Nous proposons que le dossier de la procédure comprenne désormais la proposition de peine que le procureur de la République envisage de faire au prévenu, et ce au moins dix jours avant la date de comparution. On peut soutenir que cela atténue les droits de la défense en bloquant le dialogue ou, à l'inverse, que cela les renforce puisque le prévenu et son avocat pourront mieux préparer l'audience.

Un prévenu, quand il reçoit sa convocation, se précipite sur Internet pour lire le code pénal ; vu la peine encourue, il pense n'avoir plus qu'à fuir, à liquider ses avoirs, que sais-je à rédiger son testament. (Sourires) Dix ans pour s'en être pris à un distributeur de canettes de coca dans le métro ! Ce rapport à la procédure est extrêmement anxiogène, expliquer à l'intéressé, affolé, qu'il ne s'agit que d'un quantum est souvent l'essentiel du travail de l'avocat. Finalement, faire figurer la proposition de peine dans le dossier de procédure revient à appliquer le principe d'individualisation de la peine.

Là où cela se pratique déjà, les choses se passent bien.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - Je suis mortifié de devoir donner un avis défavorable à une proposition du Gouvernement...

Que le quantum soit plus élevé que la sanction réellement encourue, cela vaut pour toutes les procédures... La cheville ouvrière de la CRPC, c'est le procureur de la République. Il doit pouvoir proposer la peine la plus appropriée. D'où la nécessité, pour lui, de recueillir les observations de la victime. Pensez par exemple aux affaires de harcèlement. D'où l'importance aussi de rencontrer le prévenu. Avec cet amendement, le procureur s'engagerait sur une peine avant de disposer de tous les éléments nécessaires. Pour le coup, on entre dans une logique de marchandage : « j'ai gagné deux ans ! ».

Laissons au procureur la responsabilité de ces décisions.

M. Jean-Jacques Hyest.  - J'admire l'habileté du ministre pour justifier ce qui... Comment le procureur pourrait-il décider de la peine avant même d'avoir vu le prévenu ? Franchement, cela priverait la procédure de son efficacité et d'une partie de sa justification. Ou alors, il faudrait deux audiences, mais cela ferait perdre à cette procédure l'essentiel de son intérêt.

Je ne voterai donc pas l'amendement. Il faudrait que je puisse le sous-amender pour retirer cette mention, en gardant l'idée que le prévenu doit tout de même être informé de ses droits.

M. le président.  - C'est impossible, les explications de vote ayant commencé. La seule possibilité serait que le Gouvernement accepte de rectifier son amendement.

Mme Virginie Klès.  - Rassurer le prévenu pour qu'il se présente à la convocation, c'est précisément le rôle de l'avocat. Quant à la victime, elle ne doit pas avoir le sentiment, vu la force de l'écrit, que les choses sont déjà tranchées. Avec cet amendement, on casse la logique de la CRPC.

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi.  - Le droit à se faire assister d'un avocat est déjà rappelé par la convocation. À cet égard, l'amendement n'apporte rien. En revanche, il parait inopportun que le procureur de la République se prononce d'emblée sur la peine, car il doit disposer d'éléments sur la personnalité du prévenu.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Certes, la rencontre est importante. Mais l'amendement vise à rassurer les prévenus. Le débat n'est pas clos. Ayant entendu vos arguments, je retire l'amendement.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Merci pour cette écoute.

L'amendement n°12 est retiré.

L'article 2 est adopté.

ARTICLE 3

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, première phrase

Remplacer le mot :

celles-ci

par les mots :

ces peines

Mme Hélène Lipietz.  - La rédaction actuelle est ambiguë.

L'amendement n°3 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, seconde phrase

Supprimer le mot :

ordinaire

Mme Hélène Lipietz.  - On ne peut modifier le statut de la victime au sein de notre droit pénal au détour de ce texte. Vous ne m'avez pas comprise, monsieur Kaltenbach. Pour moi, la loi du talion a constitué un progrès en assignant une limite à la peine, afin d'éteindre le désir de vengeance. Je ne crois pas que les victimes recherchent toujours la vengeance. Elles sont plutôt en quête de reconnaissance et de compréhension de ce qui leur est arrivé.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement devenu rédactionnel après qu'il a été longuement débattu en commission et rectifié.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Sagesse.

L'amendement n°4 rectifié est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La dernière phrase du second alinéa de l'article 495-9 du code de procédure pénale est complétée par les mots : « à compter de la comparution devant le procureur ».

Mme Hélène Lipietz.  - Précisons à partir de quel moment court le délai mentionné à l'article 495-9 du code de procédure pénale. Le sous-amendement du Gouvernement corrige utilement une erreur rédactionnelle.

M. le président.  - Sous-amendement n°13 à l'amendement n°6 de Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, présenté par le Gouvernement.

Amendement n° 6, alinéa 3

Remplacer les mots :

dernière phrase du second

par les mots :

seconde phrase du premier

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Ce délai est prévu non par le second alinéa du texte mais par le premier. Avis favorable à l'amendement ainsi sous-amendé.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - Cet excellent amendement est ainsi rendu encore plus excellent. (Sourires)

Le sous-amendement n°13 est adopté.

L'amendement n°6, modifié, est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Kaltenbach.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase de l'article 495-13 du code de procédure pénale, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Elle est entendue, à sa demande, accompagnée le cas échéant de son avocat, par le procureur de la République avant que celui-ci ne propose à l'auteur des faits d'exécuter une ou plusieurs peines encourues. »

M. Philippe Kaltenbach.  - Cet amendement traduit l'une des propositions du rapport que j'ai rédigé avec M. Béchu. Les procédures rapides de jugement, si elles accélèrent les délais de traitement des affaires, présentent le risque d'écarter la victime du procès pénal.

Je propose d'aménager la procédure de CRPC afin d'autoriser la victime à être entendue par le procureur de la République lors de la première phase de la procédure, si elle en fait la demande. En revanche, il n'est sans doute pas opportun qu'elle assiste à l'intégralité de l'entretien entre le procureur de la République, l'auteur des faits et son avocat. D'ailleurs, l'amendement ne précise pas si la victime doit être entendue en même temps que l'auteur des faits ou séparément : il convient de laisser au procureur de la République le soin d'en apprécier l'opportunité.

En outre, cet amendement donne au procureur de la République la connaissance d'éléments qui n'auraient pas été relevés dans l'enquête de police. Il y a peu de risques que les victimes se précipitent, s'agissant d'affaires de faible gravité. J'insiste donc, malgré mon peu de succès en commission.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - La victime peut être présente lors de l'audience d'homologation. Elle pourra adresser ses observations au procureur. Ne transformons pas la rencontre entre le procureur et le prévenu en une confrontation de celui-ci avec la victime. Aider les victimes, très bien, mais le but d'un procès est de juger. Et qui juge-t-on ? Le prévenu. N'oublions pas qu'il s'agit de délits mineurs. La CRPC leur apporte une réponse rapide, en respectant les droits des parties.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Nos concitoyens seraient bien surpris en lisant une étude de droit comparé sur le droit des victimes. Contrairement à ce qu'ils croient, la France est loin d'être arriérée en la matière.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Ailleurs, il n'y a pas de partie civile !

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - En effet. Dans tous les pays, c'est la société qui poursuit, mais la France admet en outre que la victime peut se constituer partie civile. Il faudrait sans doute éclairer les médias là-dessus.

L'amendement serait disproportionné, vu la nature des infractions. Il mettrait en danger la procédure elle-même. Avis défavorable.

Mme Hélène Lipietz.  - Sans misérabilisme, je suis consciente de la nécessité de revoir la place des victimes dans notre procédure pénale. Mais la réflexion doit être globale. Avec de tels amendements, il y aurait trois sortes de victimes : les unes auraient la chance de pouvoir exprimer leur ressenti lors d'une audience publique ; d'autres pourraient aller le dire au procureur ; d'autres enfin, seraient confrontées à un classement sans suite, sans pouvoir s'exprimer à aucun moment. Dans le cadre de cette proposition de loi, je ne voterai donc pas l'amendement.

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi.  - Le texte donne déjà à la victime le droit d'adresser des observations au procureur. Elle a un rôle à jouer à l'audience, où elle peut faire valoir des droits à réparation. L'amendement alourdirait la procédure, et s'éloigne de son esprit même.

Mme Virginie Klès.  - En effet, le texte donne à la victime un droit à se faire entendre. Il est aberrant d'obliger le procureur à l'entendre ; il lui revient de le décider s'il le souhaite.

M. Yves Détraigne.  - Nous sommes là pour améliorer la procédure de CRPC, non pour l'alourdir.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

L'article 3 bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

Après l'article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa de l'article 495-14 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Lorsque la personne n'a pas accepté la ou les peines proposées ou lorsque le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui n'a pas homologué la proposition du procureur de la République, le dossier est expurgé de toutes les pièces relevant spécifiquement de la procédure mentionnée aux articles 495-8 à 495-13 avant d'être transmis à la juridiction d'instruction ou de jugement, et ni le ministère public ni les parties ne peuvent faire état devant cette juridiction des déclarations faites ou des documents remis au cours de cette procédure. »

Mme Hélène Lipietz.  - Un prévenu peut craindre que son refus de se soumettre à une CRPC n'influence la décision du tribunal. Je croyais le code de procédure pénale assez protecteur mais, assistant à une audience, j'ai entendu le président du tribunal faire état de l'échec d'une CRPC. D'où cet amendement.

Je sais bien que, dans les petits tribunaux, tout se sait... Mais pour éviter toute pression, il faudrait aussi que le dossier ne mentionne pas la proposition de CRPC.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - En l'état actuel du droit, le procès-verbal ne peut être transmis, et il ne peut être fait état de l'échec d'une CRPC devant le tribunal. Vous êtes donc satisfaite. D'ailleurs, le verbe « expurger » est bizarre en droit pénal... Comment voulez-vous que les choses ne se sachent pas dans un tribunal ? Avis défavorable.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - L'article 495-14 répond déjà aux préoccupations de Mme Lipietz. Avec son amendement, l'existence même de la CRPC ne figurerait pas au dossier. Or la transparence est un fondement de notre droit pénal. La CRPC n'est pas une procédure cachée. Imaginez qu'une victime apprenne après coup que cette procédure a été tentée ! Avis défavorable.

Mme Hélène Lipietz.  - Mon amendement reprend l'article 495-14. Lorsque la CRPC réussit, la chose est publique. Je n'ai fait que prévoir l'expurgation des pièces relatives à la CRPC.

Mme Virginie Klès.  - Si l'on ne dispose plus des pièces, on pourra dire n'importe quoi sans vérification possible... Si la loi n'est pas respectée, charge à l'avocat de faire valoir les droits de son client.

M. Stéphane Mazars.  - Il faut, en effet, préserver les pièces montrant pourquoi la procédure a échoué. Le reste n'a aucun intérêt.

Mme Hélène Lipietz.  - Je m'incline.

L'amendement n°14 est retiré.

ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, première phrase

Supprimer les mots :

devant lui

L'amendement rédactionnel n°7, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

lui faire remettre

par les mots :

y joindre

L'amendement rédactionnel n°8 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, deuxième phrase

Supprimer les mots :

à la convocation

L'amendement rédactionnel n°9, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, dernière phrase

Après les mots :

au moins dix jours

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

après la date de comparution devant le procureur.

L'amendement rédactionnel n°11 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

L'article 5 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Jacques Hyest .  - Nous étions partis d'une réforme de la CRPC. Nous avons finalement procédé à quelques aménagements utiles en tenant compte des réserves d'interprétation du Conseil constitutionnel et de la pratique. La CRPC n'est pas la seule alternative au procès : il y a aussi la composition pénale. Chacun reconnaît qu'elle a sa place dans notre système judiciaire. Elle fait gagner du temps, elle diminue la pression, elle responsabilise le prévenu.

Grâce au Sénat, un bilan a été fait au bout de dix ans, à la suite de quoi on a modifié la loi. Bien souvent, on procède à rebours...

Le groupe UMP votera ce texte.

Mme Cécile Cukierman .  - Nous aussi voterons cette proposition de loi, telle que modifiée par nos débats, malgré nos réserves de principe à l'encontre de la CRPC. Comme l'a dit M. Hyest, la justice doit être rendue rapidement, mais la CRPC ne doit pas servir à la gestion des flux.

Mme Hélène Lipietz .  - Le texte nous a obligés à réfléchir, à surmonter certains préjugés, bien que je craigne encore les pressions exercées sur les prévenus. Merci d'avoir accepté mes amendements rédactionnels, qui m'ont été inspirés par le professeur Jacques-Henri Robert. Je tenais à lui rendre hommage : c'est lui qui m'a donné le goût du droit pénal.

Mme Virginie Klès .  - La CRPC est utilisée à bon escient et nous veillerons à ce qu'elle le demeure. Le groupe socialiste votera ce texte.

La proposition de loi est adoptée à l'unanimité.

(Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

Commission spéciale (Démission et candidature)

M. le président.  - J'ai reçu avis de la démission de M. Philippe Adnot, comme membre de la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel.

La réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'elle propose pour siéger à cette commission spéciale pour le remplacer.

Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du Règlement.

Débat sur l'avenir de la production d'énergie

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat sur la production énergétique en France : avenir de la filière du nucléaire et nouvelles filières de production d'énergie, à la demande du groupe RDSE.

Rappel au Règlement

M. Ladislas Poniatowski .  - Compte tenu de l'organisation des débats, l'opposition ne pourra s'exprimer, surtout si le ministre profite de sa liberté de s'exprimer quand il le souhaite... (M. Alain Vidalies, ministre, s'en défend) Quel exemple donnons-nous ? Le Sénat a fait l'objet d'articles plutôt désagréables ces dernières semaines. À moins que les orateurs de la majorité n'acceptent de nous faire place ?

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Nous nous sommes trouvés dans la même situation. L'ordre du jour des niches est fixé librement par les groupes. Quant à l'ordre des tours de parole, il est fixé par une règle qui s'applique à tous. Le groupe UMP parlera quand ce débat sera réinscrit à l'ordre du jour, lors d'une prochaine niche.

Le président Bel va réunir les membres du Bureau et de la Conférence des présidents pour réfléchir à une évolution des règles.

M. Jean Bizet.  - Ce débat est tronqué !

M. Jacques Mézard.  - Je comprends parfaitement les observations de M. Poniatowski ; je ne crois pas que nous ayons de grandes divergences de vues sur l'énergie avec l'UMP.

Pour sa part, le groupe RDSE est prêt à renoncer à son intervention en troisième position, il ne peut pas faire plus. Ce matin, on a appris que Fessenheim serait fermée en 2016, ce débat tombe à pic.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Philippe Martin, retenu à l'Assemblée nationale. J'en avais averti à l'avance le Sénat. Quant à l'organisation de vos travaux, le Gouvernement n'y peut rien : il sera lui-même privé de la possibilité de s'exprimer faute de temps mais l'aurait-il eue, qu'il ne l'aurait pas utilisée...

Orateurs inscrits

M. Stéphane Mazars, au nom du groupe RDSE .  - Mon groupe veille à susciter, à chaque fois qu'il le peut, un débat sur la production énergétique en France. C'est la troisième fois en un an.

Parce que l'énergie participe au bien-être des citoyens, la question ne peut être laissée aux seuls experts. Chacun a conscience de la raréfaction des ressources, notre facture énergétique s'élève à 70 milliards d'euros, soit le montant de notre déficit extérieur. Les trois quarts sont dus aux énergies fossiles. Nous devons tendre à un nouveau modèle plus économe, après les travaux du Groupe international d'experts sur le climat (GIEC). Dans ces circonstances, assurer notre souveraineté énergétique est plus que jamais nécessaire, en s'appuyant sur les deux filières du nucléaire et des énergies renouvelables (EnR) - la transition énergétique, voilà l'enjeu.

Ce qui est certain est que nous ne pouvons pas nous priver de l'avantage compétitif de l'énergie nucléaire. Nous devons le préserver pour nos entreprises et par respect de nos engagements de baisse de réduction des gaz à effet de serre.

Globalement, nous avons respecté le paquet énergie-climat qui fixe pour objectifs en 2020 : 20 % de réduction d'émission de gaz à effet de serre, 20 % d'EnR et 20 % d'économies d'énergies.

La Cour des comptes montre toutefois, dans un récent rapport, que nous n'atteindrons pas l'objectif en 2020. La part des EnR est passée de 9,6 % en 2005 à 13,1 % en 2012. Et les magistrats de proposer des pistes.

Dans les futures décisions et lors du prochain projet de loi sur la transition énergétique, veillons à ne pas répéter les erreurs du passé. Je pense, en particulier, à la politique tarifaire incohérente sur le photovoltaïque.

Dans cette transition, les collectivités territoriales sont les mieux à même de monter des projets opérationnels, au plus près du terrain, en liant traitement des déchets et réseaux de chaleur. Comment faire ? Les normes ont un rôle à jouer, dans le secteur du bâtiment. Le retard pris dans la publication de certains décrets est inacceptable. Autres outils, la tarification - inspirons-nous de l'exemple allemand sur le mix énergétique - et la fiscalité - sur le prix du gazole ou encore sur le photovoltaïque où la politique a été malheureusement erratique.

Le chantier de la transition énergétique est majeur ; nous devons faire preuve de volontarisme. Le débat national sur la transition énergétique a eu le mérite de dégager un consensus ; la préparation de la prochaine Conférence internationale sur le climat en 2015 à Paris doit être une occasion à saisir pour faire de la France un pays exemplaire. (Applaudissements sur les bancs du RDSE)

Mme Cécile Cukierman .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Mireille Schurch, qui a dû nous quitter.

Sur ce débat, il n'est pas inutile de clarifier la position de chacun. En 2011, les sénateurs de gauche votaient une proposition de résolution proposée par le groupe CRC. Celle-ci affirmait que « les activités de production, de transport et de commercialisation doivent être entièrement publiques et placées sous l'autorité d'un pôle public associant tous les acteurs ». Trois ans après, rien n'a été fait pour abroger les lois de dérégulation prises auparavant.

Parler de la production énergétique, c'est aussi parler des réseaux de transport ou encore de distribution.

C'est surtout dire que l'énergie n'est pas un bien comme les autres ; le mythe de la concurrence libre et non faussée a fait long feu. Compte tenu des travaux du GIEC sur le réchauffement climatique, nous ne pouvons pas nous passer d'un nucléaire sécurisé ; l'électricité produite par les EnR ne lui est pas substituable, en raison des difficultés de stockage. L'hydraulique joue un rôle important, nous nous élevons contre l'ouverture à la concurrence pour les concessions hydrauliques. Développons une filière technique pour le photovoltaïque et l'éolien au lieu d'importer des panneaux de Chine, ce qui ne diminue pas nos émissions de gaz à effet de serre. Cela créera des emplois.

Si nous ne pouvons pas nous passer de l'énergie nucléaire, elle comporte des risques incommensurables : l'accident et les déchets. Renforçons la sécurité et la participation du public.

Il nous faut donc changer de cap pour élaborer un vrai projet national et européen sur l'énergie, un projet politique et non comptable au service des peuples et non des marchés.

M. Roland Courteau .  - Lors du dernier congrès mondial sur l'énergie, un expert estimait que le monde devait investir 30 000 milliards d'euros en vingt ans pour subvenir aux besoins énergétiques d'une population en expansion. L'Ademe estimait que la transition énergétique pourrait créer 825 000 emplois d'ici 2050. Les retombées économiques seront au rendez-vous. La France a des atouts : de grandes entreprises, un territoire relativement vaste, des ressources naturelles appréciables en ce qui concerne la biomasse et les énergies marines. Pour en tirer parti, il faut faire en sorte que le tissu d'entreprises de taille intermédiaire (ETI) bénéficie de relations équitables avec les grands groupes et puisse s'appuyer sur une stratégie nationale.

Dans ce secteur dont le marché ne peut assurer à lui seul la régulation, l'État doit impulser, mettre en place des coopérations. Ces dernières, limitées sur le nucléaire avec l'Allemagne, sont plus prometteuses pour les EnR.

La cause serait perdue pour le photovoltaïque, à cause de la division du travail international, qui verrait l'Europe confinée à l'installation des panneaux tandis que l'Asie fournirait les modules. Je ne le crois pas : des projets sont à faire sur les panneaux, Thomson annonce un futur module composé à 95 % de composants européens. Nous y gagnerions en souveraineté énergétique et en emplois.

L'électricité nucléaire pas plus que les EnR ne peuvent répondre à elles seules aux besoins. La réponse idéale passe par le stockage.

Les stations de pompage n'ont pas trouvé leur modèle, mais a-t-on exploré toutes les pistes ?

La France dispose du potentiel technologique pour créer une filière de l'hydrogène, l'OPECST l'a rappelé dans un récent rapport.

L'Allemagne et la Corée l'exploitent : la première expérimente la méthanation, à ne pas confondre avec la méthanisation.

Les filières d'EnR ne se développeront que si elles disposent d'un encadrement adéquat. Or le cadre réglementaire est perçu comme trop instable. L'accompagnement doit donc faire l'objet d'une attention particulière.

Les entreprises allemandes bénéficient de conditions favorables de refinancement par la banque KfW. Faisons de même : la BPI doit devenir la banque de la transition énergétique.

Pour finir, le président de la République a parlé d'« Airbus de la transition énergétique ». Prenons cette expression au sens littéral : l'Airbus devra lui aussi faire sa transition et peut-être, un jour, voler avec du carburant provenant à 100 % d'éléments renouvelables. C'est cela aussi la transition énergétique : réussir à faire évoluer l'existant ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Ladislas Poniatowski .  - Merci à Jacques Mézard, et tout particulièrement à Jean-Claude Requier : il se trouve que nous séchons tous les deux une réunion de la FNCCR ce matin.

On se perd souvent dans les dédales techniques pour oublier le seul impératif qui vaille : réduire notre consommation d'énergies fossiles. Sans anticiper sur la proposition de résolution que le groupe UMP défendra le 26 février, abordons la question essentielle : quel mix énergétique ? Difficile d'y répondre en une heure.

Les EnR forment un ensemble de production très disparate : certaines sont coûteuses, d'autres non ; certaines émettent des gaz à effet de serre, d'autres moins. Commençons par le biogaz : il ne doit pas concurrencer les biocarburants. Surtout, il émet de nombreux polluants. Pour mémoire, il représente 1 % de notre production pour 6 TWh.

La géothermie a connu des progrès significatifs et pourrait être développée notamment en Alsace et en région parisienne. Mais les forages profonds, les plus efficaces, sont coûteux et provoquent des risques sismiques.

L'éolien et le solaire, eux, sont renouvelables mais coûteux : entre 6 et 12,5 centimes par KWh pour le premier, entre 12 et 25 centimes pour le second.

Cela dit, ces énergies sont intéressantes car le potentiel est énorme et les nouvelles technologies réduisent les coûts. Mais pour produire 15 % d'électricité d'origine éolienne, il faudrait installer 20 000 éoliennes sur le territoire. Les Français y sont-ils prêts ?

Que reste-t-il ? Le nucléaire. J'entends les arguments contre ; à moyen terme, c'est pourtant une nécessité. Ceux qui font fi du coût réduit de l'énergie nucléaire, des emplois qu'elle crée, de son incidence positive sur notre balance commerciale et de son rôle de vitrine technologique se trompent. Le président de la République, pour paraître écolo-compatible et peut-être faire plaisir à un voisin, a annoncé la fermeture de Fessenheim en 2016. Vous l'avez compris, le groupe UMP y est hostile. Cette décision appartient aux experts, comme l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), non aux politiques. Faisons-leur confiance ! Quant à réduire la part du nucléaire de 75 à 50 % d'ici 2030, nous y sommes encore plus hostiles : c'est technologiquement et économiquement impossible. Les Français ne veulent pas voir doubler leur facture d'électricité.

Ne renonçons pas au nucléaire, pas plus qu'aux EnR. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Ronan Dantec .  - Merci aux collègues encore présents pour ce débat.

M. Jean Bizet.  - Il n'y a pas de débat !

M. Ronan Dantec.  - Les écologistes se réjouissent toujours de discuter d'énergie. Nous soutenons les objectifs fixés par le président de la République, nous allons enfin sortir du tout nucléaire, de cette absurdité économique et écologique manifeste. Le prix du MWh de l'EPR installé en Angleterre sera de 100 euros contre 80 euros pour l'éolien terrestre, et 90 euros pour le photovoltaïque. Et je ne dis rien du MWh de Flamanville dont le coût du chantier est passé de 3 à 8,5 milliards, et ce n'est pas fini, pas plus qu'en Finlande !

Le nucléaire concentre encore la majeure partie des crédits destinés à la recherche sur les énergies, autant de retard pris pour les EnR. Finissons-en avec le leurre de cette énergie à bas coût pour remettre en ordre nos investissements et les diriger vers les EnR comme le font les Allemands.

Je ne reviens pas sur le gaz de schiste, le président d'Exxon a dit qu'il y laissait sa chemise et les Polonais déchantent.

Nous attendons avec impatience des précisions sur le futur géant franco-allemand de la transition énergétique : dans quel domaine ? Le photovoltaïque.

Dans le débat...

M. Jean Bizet.  - Il n'y en a pas !

M. Ronan Dantec.  - ... l'hydrogène mérite qu'on s'y arrête. Il est l'un des rares sujets qui peut faire consensus entre nous. Développons cette filière. Hier, l'Europe a présenté le paquet climat-énergie pour 2030 ; il est décevant.

Que la France relève ces ambitions et devienne exemplaire dans la perspective de la Conférence internationale sur l'environnement de 2015 à Paris.

M. Jean-Claude Requier .  - Je renonce à intervenir pour laisser ma place à M. Deneux.

M. Marcel Deneux .  - Je regrette la mauvaise organisation de ce débat, si important pour l'avenir. La meilleure énergie est celle qu'on ne consomme pas. Disons-le et redisons-le, la pédagogie, c'est notre responsabilité politique.

Nous n'avons pas atteint nos objectifs sur l'éolien et le photovoltaïque en 2013, faisons un effort.

Le Gouvernement a bien fait de lancer un appel d'offres sur les compteurs intelligents. Trouvons pour chaque territoire le bon mix énergétique en fonction des sommes que nous pouvons lui consacrer. Pour l'heure, ne commettons pas l'erreur de l'Allemagne qu'on cite souvent en exemple : conservons le nucléaire, nous en avons besoin.

Le gaz de schiste ? La France a toujours une peur d'avance. Ce n'est pas digne de notre pays, ne nous privons pas de la possibilité de mener des recherches.

On annonce l'adoption d'une loi de programmation pour la transition énergétique d'ici la fin de l'année. Je doute que ce soit possible. Prenons le temps de négocier ce virage.

Rappel au Règlement

M. Jean Bizet .  - Je veux dénoncer ce débat tronqué. Il n'a échappé à personne que le groupe écologiste a allongé le débat sur la CRPC en déposant huit amendements avec, sans doute, la complicité de la commission des lois. C'est lamentable.

M. Ronan Dantec .  - Ces propos sont inacceptables et je ne sais ce que dit le Règlement du Sénat en pareil cas. Les amendements que Mme Lipietz avait déposés ont tous été adoptés, preuve qu'ils amélioraient le texte de la commission. Prétendre qu'en les défendant elle a voulu allonger le débat est absurde... et lamentable !

Commission spéciale (Nomination)

M. le président.  - Je rappelle au Sénat que la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe a présenté une candidature pour la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel.

La présidence n'ayant reçu aucune opposition, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Philippe Darniche membre de la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel, en remplacement de M. Philippe Adnot, démissionnaire.

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Jean-Pierre Bel

La séance reprend à 15 heures.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Décentralisation

M. Jean-Pierre Raffarin .  - Aux yeux du Sénat, assemblée des territoires quoi qu'en dise le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, la décentralisation reste une grande ambition politique. Ce n'est pas un dossier technique. Aussi avons-nous mis en place une mission commune d'information, que j'ai eu l'honneur de présider et dont M. Krattinger était le rapporteur.

Quels sont les principes que nous défendons ? Il faut d'abord soutenir la commune, premier espace républicain ; et qui la soutient doit défendre l'intercommunalité, qui ne peut être que collégiale et non hiérarchique. (Marques d'approbation à droite) Ensuite, pour défendre la ruralité et les 15 millions de personnes qui y vivent, il faut défendre le département, en charge de la cohésion sociale et territoriale. Enfin, puisqu'il faut faire des économies, il faut éviter doublons et concurrence entre départements et régions. Celles-ci doivent être plus grandes et chargées de la stratégie, économie, universités...

Quelle place le Gouvernement réserve-t-il au Sénat et à ses idées dans sa réflexion ? (Applaudissements au centre et à droite)

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - M. le Premier ministre, en déplacement à Metz, m'a chargé de vous répondre.

Vos propos rejoignent ceux du président de la République, déterminé à poursuivre la simplification de l'organisation administrative de notre territoire. Un nouveau projet de loi clarifiera les compétences pour lutter contre les enchevêtrements et les trop nombreux doublons. Le rôle économique des régions sera renforcé par le transfert de nouvelles compétences d'État : aides aux entreprises ou soutien à l'innovation notamment.

Le Gouvernement a pris la pleine mesure du rôle des départements dans la cohésion sociale et territoriale. Leurs compétences à cet égard seront enrichies et précisées. La disparition des départements sur tout le territoire, que préconise M. Copé, serait un non-sens. (Applaudissements à gauche)

M. Alain Gournac.  - Ce n'est pas nous !

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Reste qu'il faut permettre aux collectivités territoriales de s'adapter aux spécificités de chaque territoire. C'est pourquoi le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale a créé la Conférence territoriale de l'action publique, au sein de laquelle les représentants des collectivités pourront affiner l'exercice de leurs compétences respectives. La taille des régions peut être revue ; si certaines ont la taille suffisante pour exercer les nouvelles compétences, d'autres pourraient être amenées à se regrouper ou à mutualiser leurs services. L'État apportera des incitations financières aux regroupements.

Le Gouvernement se félicite que le Sénat l'ait devancé, et salue la qualité du travail entrepris sous votre égide, monsieur le Premier ministre Raffarin, et sous celle de M. Krattinger. Nous poursuivrons la réflexion, avec vous. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Réduction des dépenses publiques

M. Aymeri de Montesquiou .  - Nous l'avons dit inlassablement : trop d'impôt tue l'impôt. Les recettes fiscales de 2013 en témoignent. Le président de la République vient de procéder à un aggiornamento et pris conscience du découragement croissant des entreprises depuis vingt mois ; il a annoncé une baisse de la fiscalité sur les entreprises et les ménages et la réduction du déficit dès 2015 à 3 % du PIB. Nous nous y sommes engagés envers Bruxelles et il y va de la crédibilité de notre signature sur les marchés.

Il est exclu d'augmenter l'investissement public. Il faut donc réduire les dépenses de fonctionnement. Le nombre d'agents publics par habitants est en France le plus élevé d'Europe, mais vous n'envisagez sans doute pas de baisser leurs rémunérations ou de revenir sur les 35 heures, malheureusement uniques au monde... Paraphrasant Paul Quilès, je vous dirai : il ne faut pas seulement dire qu'on va baisser les dépenses, il faut dire lesquelles !

Monsieur le ministre, quelle baisse du nombre des agents publics envisagez-vous ? Et ne me répondez pas que vous allez créer un nouveau haut comité consultatif... (Applaudissements au centre et à droite)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  - Sans doute les déficits diminueront-ils moins vite qu'ils n'ont augmenté par le passé, mais ils n'augmentent pas ! En 2012, lorsque nous sommes arrivés, le déficit public était à 5,3 % du PIB ; en 2013, ils sont tombés à 4,1 %. En l'espace de vingt mois, nous avons diminué de 10 milliards celui des comptes sociaux, qui avait spectaculairement augmenté sous le précédent quinquennat. (Marques d'approbation sur les bancs socialistes)

Comme j'ai senti un peu d'angoisse dans votre question, je veux vous rassurer pour que vous quittiez cet hémicycle plus serein que lorsque vous y êtes entré... (Sourires) Bien entendu, nous allons poursuivre l'effort. Entre 2007 et 2012, la dépense publique a augmenté de 170 milliards.

M. Aymeri de Montesquiou.  - Ce n'est pas la question !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Mais c'est ma réponse ! Soit de 2 % par an. En 2014, ce sera 0,4 %. Nous envisageons des économies de 50 milliards d'euros sur la période 2015-2017. Là où la RGPP avait permis 10 milliards d'économies en trois ans, nous en avons fait 15 en un an... Nous tiendrons nos engagements auprès de l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Aides à la presse en ligne

M. David Assouline .  - La presse subit de plein fouet la crise et les mutations technologiques. Tout est bouleversé. L'ancien meurt et le nouveau peine à naître. L'enjeu c'est la sauvegarde des titres et des emplois et plus globalement la survie d'une information de qualité, pluraliste, libre et indépendante, vitale pour notre démocratie.

La presse régionale est elle aussi, désormais, en grand danger. Pourtant les aides à la presse sont très importantes ; mais leur répartition est contestable. Que compte faire le Gouvernement ? Quand mettra-t-il fin à l'injustice qui résulte de l'application à la presse papier d'un taux de TVA de 2,1 % tandis que la presse en ligne subit le taux normal ? Cette différence freine la modernisation de tout le secteur et la migration des abonnés vers le numérique.

Sur ma proposition le Sénat a voté la fin de cette injustice. Je sais que Mme Filippetti se mobilise au niveau européen. Sans attendre, que compte faire le Gouvernement pour rendre effective la neutralité technologique ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et de finances, chargé du budget .  - Je connais votre engagement pour la neutralité de la fiscalité en fonction du support. La TVA applicable à la presse papier est de 2,1 %, la presse numérique n'existant pas encore au moment de l'adoption de la directive TVA. Or cette dernière s'est développée et son importance n'est pas moindre pour notre démocratie. L'engagement a été pris de lui étendre le taux réduit.

Le combat est partagé par bien d'autres États de l'Union, et c'est l'un des objectifs énoncés dans l'accord de coalition en Allemagne. Des consultations sont en cours pour élaborer la nouvelle directive TVA. Le Gouvernement prendra une initiative législative dans les semaines qui viennent et prendra, par instruction, des dispositions pour que l'alignement des taux entre rapidement dans les faits. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

OGM

M. Joël Labbé .  - Les écologistes sont tous satisfaits d'avoir vu l'Assemblée nationale adopter conforme notre proposition de loi encadrant l'usage des pesticides. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

Les États membres de l'Union européenne doivent bientôt se prononcer sur l'autorisation du maïs OGM 1507. En l'absence de majorité qualifiée, Bruxelles pourrait valider l'autorisation alors que le Parlement européen a voté une résolution en sens contraire. Nous comptons sur le Gouvernement pour y faire obstacle et promouvoir une sécurisation de la procédure d'autorisation.

Quant au maïs Mon 810, l'arrêté de mars 2012 le prohibant a été invalidé par le Conseil d'État. Le 1er août 2013, le Gouvernement a confirmé son engagement de maintenir le moratoire sur les semences OGM. Or la période des semis est proche... Le socle du projet de loi sur l'avenir agricole est l'agro-écologie ; qu'entend faire le Gouvernement pour préserver durablement notre territoire des OGM ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt .  - Vous soulevez d'abord la question urgente du maïs OGM 1507. La position de la France est claire, elle est hostile à son autorisation. L'Autorité européenne de sécurité des aliments a demandé à l'entreprise des études sur son impact environnemental, elle les attend encore. Le débat aura lieu le 11 février au Conseil européen des affaires générales.

Vous soulevez aussi la question plus globale des règles régissant les choix des États à l'échelle européenne. La France, se fondant sur la clause de sauvegarde, a interdit le maïs Mon 810. Or cette clause est contestée et contestable. Il faut donc définir un cadre juridique commun et solide qui permette aux États de faire des choix objectifs. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)

Pouvoirs de la finance

M. Éric Bocquet .  - Nous vivons un temps « où sous nos yeux la finance a pris le contrôle de l'économie, de la société et même de nos vies » disait il y a deux ans au Bourget un candidat à l'élection présidentielle...

M. Alain Gournac.  - Qui ?

M. Éric Bocquet.  - L'Autorité des marchés financiers - dont le rôle est de réguler les acteurs de la place financière française et, si nécessaire, de contrôler, d'enquêter et de sanctionner - a procédé au renouvellement de six membres de sa commission des sanctions. Une représentante de la banque UBS a été nommée. On connaît les procédures engagées contre cette banque pour démarchage illicite et blanchiment de fonds, ainsi que les sanctions qui lui ont été infligées en 2012 pour laxisme dans ses pratiques commerciales. Télescopage saisissant avec les règles de l'AMF...

Quels critères ont présidé au choix de la représentante d'UBS à l'AMF ? Qu'entendez-vous faire pour nous prémunir du contrôle par la finance de l'économie, de la société et même de nos vies ? (Applaudissements sur les bancs des groupes CRC et écologiste)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  - Je sais et salue votre combat contre la finance devenue folle. Votre détermination n'a d'égale que la nôtre. Faut-il rappeler les 60 mesures prises depuis 2012 pour lutter contre la fraude fiscale, sur le transfert des bénéfices, les peines applicables à la fraude fiscale via des sociétés écrans, le combat mené à l'échelle européenne pour l'échange automatique d'informations ?

M. Éric Bocquet.  - Vous ne répondez pas à la question !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - C'est ainsi que nous avons obtenu des résultats inédits. Nous pouvons escompter cette année en 2014 plus de 2 milliards d'euros de recettes au titre de la lutte contre la fraude fiscale. À la suite de ma circulaire de juin, nous avons déjà traité 11 000 dossiers, pour 1 milliard de recettes.

En ce qui concerne votre question... (exclamations à droite) la banque UBS fait l'objet de procédures judiciaires. Mes fonctions m'interdisent de faire des commentaires. (Rires et exclamations à droite ; protestations sur les bancs CRC ; applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

Financement de la politique familiale

M. Jean-Pierre Chevènement .  - Dans sa dernière conférence de presse, le président de la République a décidé de supprimer d'ici 2017, les cotisations familiales, qui pèsent sur les salaires à hauteur de 30 milliards d'euros. Le rapport Gallois prévoyait de relever la CSG pour compenser cette perte de recettes par les CAF. Le président de la République a dessiné une tout autre voie : la baisse de 50 milliards d'euros des dépenses publiques. Un comité stratégique des finances publiques s'est tenu ce matin. Comment le Gouvernement entend-il maintenir les ressources des CAF ? Garantira-t-il leurs ressources en les indexant sur la progression de la masse salariale ? À défaut, notre politique familiale serait mise en danger, alors que le taux de fécondité vient de passer sous le seuil de deux enfants par femme.

Pouvez-vous nous en dire plus sur les pistes d'économies à venir ? Celles-ci nécessitent de donner du temps au temps, pour citer M. Mitterrand. Pouvez-vous me rassurer sur l'avenir des allocations familiales et le pouvoir d'achat des familles ? (Applaudissements sur quelques bancs)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, le déficit de la branche famille était de 2,5 milliards. Dès l'an dernier, le Gouvernement a pris des mesures pour redresser cette branche. Des efforts de gestion ont été demandés aux CAF. La réforme du quotient familial, si décriée, poursuivait le même but.

Nous ne remettons pas en cause les prestations, bien au contraire : 275 000 places de crèches seront créées...

M. Philippe Dallier.  - Ce sont les collectivités territoriales qui les financent !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Avec le plan « grande pauvreté », les prestations familiales iront vers ceux qui en ont le plus besoin. Les pistes d'économies ? Sur la branche retraite et la branche famille, 4 milliards d'euros d'économie sont attendus. La maitrise des dépenses de l'État et de l'assurance maladie rapportera 20 milliards ; le solde viendra de réformes structurelles qui permettront de faire des économies sans que le service public en souffre et sans remettre en cause notre système de protection sociale. (Applaudissements sur plusieurs bancs socialistes)

M. Alain Gournac.  - Nous voilà rassurés !

Fonds structurels européens

M. Jean Bizet .  - Je me réjouis de pouvoir m'exprimer cet après-midi, n'ayant pu le faire ce matin dans un débat pourtant fondamental sur l'avenir de notre filière nucléaire, pas plus que le ministre en charge des relations avec le Parlement. Peut-être le Gouvernement n'était-il pas mécontent de ne pas devoir préciser sa position... alors même que la Commission européenne invite les États membres à réindustrialiser l'Europe. Ce n'est pas avec des moulins à vent que nous y parviendrons !

Fin décembre, la France a communiqué à la Commission européenne son accord de partenariat 2014-2020 : c'est un dossier de 23,4 milliards d'euros ! La validation de cet accord permettra de lancer les programmes opérationnels bénéficiant des fonds structurels. Le retard pris dans la finalisation de ces programmes ne constitue-t-il pas un handicap ? Il y aura un bonus de 7 % pour les régions qui auront consommé leurs crédits le plus rapidement... Les régions auront-elles bientôt les compétences et le personnel nécessaires à la gestion de ces projets ? Quelles garanties de transparence avons-nous ? L'opposition ne risque-t-elle pas d'être discriminée ? (Applaudissements à droite)

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - La France ne souffrira d'aucune restriction dans l'emploi des fonds structurels de 2014 à 2020 et bénéficiera d'une enveloppe de près de 12 milliards au titre du deuxième pilier de la PAC, désormais plus verte et plus juste grâce à M. Le Foll. (Applaudissements sur les bancs socialistes) La décentralisation des crédits, voulue par le président de la République, est un acte de confiance dans nos élus régionaux et nous rapproche des politiques menées par nos voisins. Pourquoi craindre la généralisation d'une expérimentation menée en Alsace avec votre majorité ? Connaissant les élus régionaux, je sais que les affectations s'effectueront en toute transparence.

Un code de bonne conduite a été mis en place, sur lequel les États membres doivent se prononcer avant le 10 mars prochain. Les fonds seront concentrés sur quelques thématiques, pour éviter le saupoudrage et le catalogue. Les régions négocient avec la Commission européenne pour faire approuver des programmes opérationnels.

Vous avez voté les transferts des services de l'État nécessaires dans la loi «  métropole » ; le transfert des personnels a fait l'objet d'une circulaire envoyée aux préfets de région le 16 décembre dernier. Quant à la réserve de performance de 7 %, elle n'interviendra qu'en 2019. Aucun mois ne sera perdu : à nous de consacrer nos énergies à la consommation de ces 27 milliards ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Éducation prioritaire

Mme Françoise Cartron .  - Le ministre de l'éducation nationale et celui de la ville ont lancé la réforme de l'éducation prioritaire, soutenue par d'importants moyens. C'est une question de justice sociale : donner plus à ceux qui ont moins. Après trente ans, les résultats de cette politique sont décevants : c'est en France que le poids de l'origine sociale sur la réussite scolaire est le plus fort, comme le montre le rapport Pisa 2012. Il y a de remarquables réussites locales, mais les équipes pédagogiques ont besoin de soutien et de moyens. La continuité est le maître mot dans ce domaine.

Refonder l'école, c'est refonder l'éducation prioritaire. Quels moyens entendez-vous donner pour mieux accompagner les 20 % d'élèves inscrits dans une ZEP urbaine ou rurale ? (Applaudissements à gauche et sur les bancs écologistes)

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative .  - Effectivement, la situation est inacceptable. Dans les quartiers prioritaires, les enfants issus de milieux modestes n'ont pas le niveau qu'ils devraient avoir, malgré le dévouement d'équipes enseignantes remarquables, comme je l'ai constaté ce matin à Marseille dans deux collèges extraordinaires. (Exclamations sarcastiques à droite ; applaudissements socialistes) Oui, il y a dans nos collèges des professionnels extraordinaires, on ne le dit pas assez ! Nous allons concentrer nos efforts dans ces zones défavorisées, notamment en ce qui concerne les postes de maitres, d'infirmières et d'assistantes sociales. Il faut aussi d'améliorer le climat scolaire et les relations partenariales de l'école, surtout avec les parents qui sont souvent éloignés des codes scolaires.

Un point me semble important : les enfants de sixième seront pris en charge de façon continue. Ils n'auront plus l'occasion de sortir de l'établissement : entre deux cours, ils bénéficieront d'accompagnement pédagogique, de tutorat, de moyens numériques... Enfin, les enseignants auront des moyens accrus, mais aussi plus de temps. C'est une réforme de longue haleine, mais elle est indispensable pour qu'aucun jeune de France n'ait le sentiment qu'il est laissé sur le bord du chemin. (Applaudissements à gauche)

Tourisme

M. Luc Carvounas .  - L'emploi reste la priorité du président de la République, du Gouvernement et de la majorité. Représentant 7 % de notre PIB et 2 millions d'emplois directs et indirects, l'industrie du tourisme, longtemps méprisée, connaît une véritable révolution culturelle. Le président de la République a rappelé en août lors de la Conférence des ambassadeurs que son développement était une grande cause nationale. Vous avez initié les Assises nationales du tourisme : quels sont leurs objectifs ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme . - Oui, le tourisme a une grande importance dans notre pays : 83 millions de visiteurs, 7 % du PIB, 12 milliards de recettes. Il contribue à la croissance et crée des emplois.

Pour donner un nouveau souffle à ce secteur longtemps délaissé, le Premier ministre a installé des Assises du tourisme autour de neuf thématiques ; je salue votre implication dans ce grand débat national, qui rassemble plus de 400 participants.

Les contributions des Français seront recueillies par Internet et aux travers d'assises territoriales.

L'enjeu ? Moderniser notre offre sur ce secteur de plus en plus concurrentiel, afin de créer des métiers d'avenir. Cela réclame l'implication des collectivités territoriales et des professionnels. J'invite tous les parlementaires, tous les élus et tous les professionnels à se rassembler dans ce but. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Voix à droite.  - Nous ne vous avons pas attendus !

Inondations dans le Var

M. François Trucy .  - J'associe à ma question MM. Falco et Collombat, sénateurs du Var.

M. le ministre de l'intérieur et M. le Premier ministre se sont rendus lundi dans le Var. Ils ont pu compter les morts, qui s'ajoutent aux 23 disparus de Draguignan en 2010, et constater les dégâts : 1 900 habitations dévastées, 600 véhicules et 100 bateaux détruits.

Les départements ont fait d'énormes efforts pour prévenir les incendies de forêts, mais il n'en est pas de même pour les inondations : presque tout reste à faire ! La mission commune d'information présidée par Louis Nègre et dont le rapporteur était M. Collombat a pourtant réalisé un travail remarquable ; il en est issu une proposition de loi sur la prévention des inondations, adoptée ici à l'unanimité, et plusieurs de ses mesures ont été reprises par Mme Lebranchu dans la loi « métropoles ».

Mais beaucoup reste à faire sur ce problème de sécurité majeur. Le Gouvernement doit se mobiliser et ne pas laisser le rapport croupir dans les oubliettes du Parlement. (Applaudissements à droite)

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - M. Valls regrette de ne pouvoir vous répondre personnellement. Il s'est rendu lundi dans le Var : c'est le devoir de l'État de se tenir aux côtés des sinistrés, et j'ai comme vous une pensée pour les victimes et leurs familles. L'engagement des acteurs du secours doit être salué.

La catastrophe passée, l'État n'abandonnera pas les territoires sinistrés. Les arrêtés de classement en zones de catastrophe naturelle seront pris dans quelques jours. M. Valls a laissé sur place des moyens militaires de sécurité civile : un chantier immense de nettoyage et de remise en état doit être mené à bien.

Mais vous l'avez dit : répondre à ces drames, c'est les prévenir. Aujourd'hui, 17 millions de Français vivent en zone inondable. Dans le Var, le préfet travaille à la mise en place rapide de projets de prévention des risques d'inondation.

Les collectivités territoriales doivent s'impliquer dans la prévention. À l'initiative de M. Collombat, une nouvelle compétence a été donnée aux collectivités territoriales dans la loi métropoles pour organiser la prévention.

Notre pays doit développer une vraie culture du risque, comme y appelait le rapport Nègre-Collombat mais aussi le rapport Anziani-Retailleau, qui ne resteront pas lettre morte. En Bretagne, à La Réunion, dans la Drome, ou aujourd'hui dans le Var, l'État sera présent aux côtés des populations sinistrées. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de M. Didier Guillaume,vice-président

La séance reprend à 16 h 15.

Organisme extraparlementaire (Candidatures)

M. le président.  - Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir lui faire connaître le nom de quatre sénateurs désignés pour siéger au sein du Conseil national du développement et de la solidarité internationale.

La commission des affaires étrangères propose les candidatures de M. Jean-Claude Peyronnet et de M. Christian Cambon comme membres titulaires, ainsi que de M. Jacques Berthou et de M. André Trillard comme membres suppléants. Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

Simplification du droit dans les domaines justice et affaires intérieures (Procédure accélérée  -  Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle, à la demande du groupe socialiste, la suite de l'examen du projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, sur lequel la procédure accélérée a été engagée.

Discussion générale (Suite)

M. Philippe Kaltenbach .  - Ce texte s'inscrit dans le chantier de modernisation de l'action publique avancé par le Gouvernement : simplification, clarification et modernisation du droit et des procédures sont autant d'objectifs que le groupe socialiste partage.

C'est le quatrième projet de loi d'habilitation que le Gouvernement nous présente. Le calendrier parlementaire est contraint et le président de la République a donc incité les ministres à faire preuve de « rapidité et de réactivité ». Bien sûr, les parlementaires ne sont jamais enthousiasmés par les ordonnances. Les ordonnances doivent rester exceptionnelles, sauf à remettre en cause les pouvoirs du Parlement. L'article 38 de la Constitution doit, si j'ose dire, « être consommé avec modération ».

Pourtant, entre 2004 et 2011, 304 ordonnances ont été prises, soit le double du nombre enregistré pendant les vingt ans précédents. Guy Carcassonne s'inquiétait de l'usage immodéré des ordonnances.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - En effet.

M. Philippe Kaltenbach.  - Il écrivait, je le rappelle, que « le tamis parlementaire a des vertus intrinsèques », allant jusqu'à qualifier les ordonnances de « législation de chef de bureau ».

Ce projet de loi simplifie la communication électronique en matière judiciaire, facilite la preuve de la qualité d'héritier pour les successions les plus modestes, réforme le tribunal des conflits, entre autres mesures de simplification. Quand c'était possible, notre rapporteur a judicieusement substitué des dispositions d'application directe à des habilitations.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Très bien.

M. Philippe Kaltenbach.  - Dans d'autres cas, la commission des lois a précisé le champ de l'habilitation. La suppression de l'article 3 du projet de loi, qui habilite le Gouvernement à refuser par ordonnance le livre III du code civil, est cruciale.

Le droit des contrats tout entier est concerné. Le code civil est un des textes fondateurs de notre droit. C'est, selon la formule célèbre, « la Constitution civile de la France ». Le droit des affaires, celui de la consommation, y puisent leurs sources.

Portalis lui-même demandait de « l'indulgence » pour les travaux préparatoires à la rédaction du code civil. Prévoyant qu'une discussion « solennelle » et « éclairée » pourrait en réparer les erreurs. La position du groupe socialiste est claire : l'article 3 concerne 300 articles du code civil. Regardez ce que cela représente : un bon centimètre d'épaisseur !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Voilà qui est démonstratif !

M. Philippe Kaltenbach.  - Nous demandons donc que cela fasse l'objet d'un projet de loi. Le texte ne doit pas être bien long à en être rédigé, si vos ordonnances sont prêtes. Le Sénat est prêt à créer les conditions pour que ce texte soit examiné dans le cadre de son ordre du jour dès le mois de mai. Il faut parfois des ordonnances, mais un sujet aussi considérable appelle un vrai débat parlementaire. Le groupe socialiste votera donc le texte de la commission des lois, qui a supprimé l'article 3.

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Leconte et Yung.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code civil est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l'article 171-2 est supprimé ;

2° Les articles 171-3 et 171-4 sont abrogés ;

3° Le deuxième alinéa de l'article 171-5 est supprimé ;

4° L'article 171-6 est abrogé ;

5° Les premier et deuxième alinéas de l'article 171-7 sont supprimés.

M. Jean-Yves Leconte.  - Pour simplifier les démarches que doivent accomplir les couples binationaux à l'occasion de leur mariage célébré à l'étranger, cet amendement supprime certaines dispositions relatives au certificat de capacité à mariage, instaurée par la loi du 14 novembre 2006, conformément aux observations émises par la Cour des comptes sur l'évolution des missions et de l'organisation des consulats français à l'étranger.

Seule la transcription des mariages faits à l'étranger a des effets en droit français. Or l'obtention du certificat de capacité peut prendre de longs mois. Une fois reçu, les couples doivent parfois attendre jusqu'à trois ans. Ce sont des dizaines de couples qui sont ainsi empêchés de vivre ensemble.

Les protections apportées par le certificat pourraient être obtenues autrement.

Je propose donc de laisser les gens qui s'aiment se marier !

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur de la commission des lois.  - Cet amendement supprime l'obligation d'obtenir un certificat de capacité à mariage, pour répondre aux difficultés administratives auxquelles les citoyens vivant à l'étranger se heurtent.

Faut-il supprimer cette formalité préalable ? Cela affaiblirait le contrôle a priori de la légalité du mariage. Sans doute cela serait-il au profit d'un contrôle a posteriori mais il serait assez difficile d'annuler un mariage.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice.  - Le mariage est devenu un sujet qui suscite des passions ! Si l'on supprime ce contrôle a priori, on alourdira les formalités de transcription du mariage. Cela déplacera le problème.

S'il y a des dysfonctionnements dans les délais de transcription, nous devrons y remédier mais on ne peut en faire un argument juridique.

Cet amendement créerait une rupture d'égalité puisqu'il y a audition préalable quand le mariage est célébré en France, et qu'il n'y aurait plus rien de tel quand il l'est à l'étranger. Je comprends l'impatience des amoureux (sourires), mais ces formalités sont nécessaires. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Leconte.  - Ce n'est pas une rupture d'égalité : il n'y a rien d'illogique à ce que la législation du mariage ne soit pas la même pour quelqu'un qui se marie à l'étranger, d'autant que ce mariage ne produit ses effets en France qu'au moment de la transcription. Nous pourrions imaginer une procédure prévoyant une audition préalable pour ceux qui le veulent.

Il y a de l'impérialisme à vouloir imposer à une personne française qui souhaite se marier à l'étranger un certificat de capacité à mariage. Je ne conteste pas l'exigence de combattre la polygamie et les mariages forcés ou blancs, je dis que le certificat n'est pas le bon moyen. D'ailleurs, la souveraineté des pays étrangers s'impose.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Impérialisme ? Les Français de l'étranger sont très heureux que le droit personnel français s'applique à eux. Il est bon que nous ayons introduit dans la loi sur le mariage pour tous le primat de l'ordre public français.

La simplification d'une démarche ne doit pas consister à différer les difficultés. Les conventions bilatérales ne peuvent pas se substituer au droit commun. Le mariage est une institution officielle. La loi française est protectrice pour les deux membres du couple. Une fois que le mariage est célébré, il importe que la transcription puisse se faire au plus vite et que le mariage produise tout de suite ses effets.

L'amendement n°1 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

-  supprimant le contrôle systématique du juge lorsque l'un ou l'autre des parents est décédé, ou se trouve privé de l'exercice de l'autorité parentale ou en cas d'exercice unilatéral de l'autorité parentale ;

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Nous souhaitons mettre un terme au contrôle systématique du juge sur l'administration du patrimoine d'un enfant mineur lors de la mort d'un parent. Actuellement, en pratique, c'est le greffe qui s'en charge le plus souvent. Ces dispositions ont 50 ans. Il fallait éviter que le parent survivant ne dilapide les biens de l'enfant mineur. Mais le décès est un moment douloureux. Faut-il imposer au parent survivant de se rendre au tribunal ? Il y a de plus en plus de familles monoparentales.

L'amendement du Gouvernement apporte une souplesse plus grande que la rédaction proposée par la commission des lois.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Cet amendement est contraire à la position de la commission des lois, laquelle a estimé nécessaire de conserver le contrôle symbolique du juge sur les actes de disposition, qui engagent le patrimoine de la personne concernée. Certes, l'intervention du juge peut être mal vécue, mais la protection des intérêts de l'enfant mineur doit l'emporter. La commission des lois a prévu que le juge pourrait alléger les modalités de son contrôle.

L'amendement n°17 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par le Gouvernement.

Après l'alinéa 12

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article 441 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le juge qui prononce une mesure de tutelle, peut, par décision spécialement motivée et sur avis conforme du médecin mentionné à l'article 431, constatant que l'altération des facultés personnelles de l'intéressé décrites à l'article 425 n'apparaît manifestement pas susceptible de connaître une amélioration selon les données acquises de la science, fixer une durée plus longue, n'excédant pas dix ans. »

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - La loi du 5 mars 2007 oblige à réviser les tutelles tous les cinq ans. L'engorgement des tribunaux est tel que j'ai dû prendre récemment des mesures conservatoires. Tous les acteurs de la protection juridique des majeurs protégés estiment que cette révision quinquennale ne se justifie pas toujours.

Nous proposons donc que le juge puisse décider que la révision aura lieu au-delà de cinq ans, jusqu'à dix ans, pour les pathologies lourdes dont une évolution positive est peu probable.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Certes les juridictions ont rencontré des difficultés pour traiter toutes ces révisions, mais, avec le temps, celles-ci s'échelonneront. Il faut bien que les parties se réunissent et que le juge puisse apprécier ce que vaut la tutelle et si elle est la mesure la plus adéquate. La commission des lois reste opposée à cet amendement.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - L'argument du rapporteur est que ce rendez-vous permettra aux parties de se réunir et au juge de procéder à une vérification. Mais certains états sont très peu susceptibles d'évolution positive. Neuf fois sur dix, la mesure est reconduite, parce qu?il est évident que la tutelle doit être maintenue. Vous voulez un dispositif lourd et contraignant juste pour que les parties se rencontrent. Organisons, si besoin, un rendez-vous régulier, ce qui n'est pas la même chose qu'une procédure. Il n'est pas raisonnable d'encombrer les juridictions avec cela.

Je vous fais observer que notre rédaction plafonne la durée maximale alors que la vôtre prévoit un premier contrôle, après lequel vogue la galère.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Vous cherchez à me prendre au mot, vous êtes tombée sur un mauvais client ! (Sourires)

Il ne s'agit pas de l'état de santé de l'intéressé mais de l'organisation de la mesure. Je comprends bien que les juridictions sont engorgées mais il ne faut pas déplacer sur ce terrain le débat juridique.

M. Jean-Jacques Hyest.  - S'il ne s'agit que de prendre des mesures de tutelle, une durée plus longue est envisageable. D'autres vérifications sont nécessaires, qui sont actuellement faites par des greffiers. Si vous dites que la simple confirmation des mesures de tutelle ne nécessite pas un dispositif aussi lourd, je vous entends. Pas si vous invoquez le manque de moyens de la justice. S'il s'agit de vérifier les conditions dans lesquelles la tutelle est exercée, il ne faut pas attendre cinq ans.

Pour une fois, je m'abstiendrai.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Je ne plaide pas pour les effectifs, encore que la question ne soit pas négligeable. Des emplois, nous en créons, quelque 500 chaque année et 590 cette année. Je dis seulement qu'il faut que le travail demandé aux juridictions ait un sens.

Oui, monsieur Hyest, il s'agit uniquement de renouveler la mesure de tutelle. En cas de difficulté particulière, il y a l'article 442 en vertu duquel toute personne peut saisir le juge ; lequel apprécie.

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

M. le président.  - Nous allons procéder au vote sur l'article.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je reviens sur mon amendement de tout à l'heure. L'an dernier, nous avons défendu l'idée que le mariage était un droit. Je plaide derechef pour les mariages binationaux à l'étranger. Faire attendre un, deux, trois ans nos ressortissants avant de pouvoir se marier, ce n'est pas les protéger ! J'aimerais vous convaincre.

M. le président.  - Les explications de vote sur article ne doivent être rien d'autre que des explications de vote sur article. (Sourires)

L'article premier est adopté.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

4° Instaurer un nouveau mode de preuve simplifié pour justifier de la qualité d'héritier dans les successions d'un montant limité ;

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Je crois au débat parlementaire, qui fait évoluer le texte.

Il s'agit cette fois de la recherche des héritiers pour de petits héritages. En France, 30 % des héritages sont inférieurs à 5 300 euros. Les héritiers doivent demander au maire de certifier qu'ils ont bien cette qualité. Avec une prudence bien compréhensible, beaucoup de maires craignent d'engager leur responsabilité et, dans 60 % des cas, refusent d'accéder à cette demande. Il faut alors se tourner vers un notaire, dont l'intervention coûte jusqu'à 200 euros. Les héritiers modestes renoncent donc souvent à la succession, constituée en pratique d'objets personnels auxquels est attachée une valeur sentimentale. Entre 2004 et 2012, les renoncements ont augmenté de 25 %.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Je salue la pugnacité de Mme la garde des sceaux qui ne lâche rien. Nous non plus.

Le Gouvernement souhaite rétablir l'habilitation que notre commission des lois avait supprimée. Nous ne voulons pas risquer de pénaliser d'autres héritiers potentiels. Lors de l'examen du projet de loi de séparation bancaire, nous avons eu ce débat. Nous nous étions attachés à la protection des héritiers. Le tarif de l'acte notarié est de 50 euros. Ce qui coûte de l'ordre de 150 euros, ce sont les formalités par lesquelles le notaire doit s'assurer de ce que chacun peut recevoir.

La compétence des greffiers pour établir des actes a été supprimée en 2007, ce qui est l'origine des difficultés actuelles.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Nous avons travaillé avec le Conseil supérieur du notariat ; d'où vient votre chiffre de 50 euros ?

Cela risque de pénaliser d'autres héritiers, peut-être mais combien ? Il s'agit de successions modestes, sans biens immobiliers. Elles ne concernent en pratique que des objets familiers à valeur sentimentale. La fraude existe, mais compliquer la vie de milliers de personnes pour l'hypothèse très peu probable et très résiduelle qu'un des héritiers potentiels n'ait pas ses 53 euros !

Si je n'arrive pas à convaincre la commission des lois, je me rends !

M. Claude Dilain.  - Madame la ministre, vous n'avez pas convaincu la commission mais vous m'avez convaincu. Je voterai votre amendement en me souvenant de mon expérience de maire.

Mme Cécile Cukierman.  - Nous avons été convaincus par Mme la ministre.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Les chiffres que j'ai donnés m'ont été fournis par les notaires que j'ai auditionnés. Mais votre dernier argument, madame la ministre, m'a convaincu. Je ne doute pas que les discussions aboutissent avec les professions. Sagesse plutôt favorable.

L'amendement n°21 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°31, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

I. - Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° L'avant dernier alinéa de l'article 972 est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

II. - Alinéa 13

Supprimer cet alinéa.

L'amendement rédactionnel n°31, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°32, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

Alinéa 14

Après le mot :

ou

insérer le mot :

pour

L'amendement rédactionnel n°32, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par MM. Mézard, Mazars, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l'article L. 213-4 du code de l'organisation judiciaire est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Elle doit obligatoirement être composée de juges des deux sexes. »

M. Jean-Claude Requier.  - On pourrait croire que cet amendement provient du groupe écologiste. (Sourires) Les promotions de l'ENM sont devenues majoritairement féminines. Or la mixité des formations de jugement est importante, notamment en cas de divorce et de séparation de corps.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Outre les difficultés pratiques que pose l'amendement, il pose un problème de principe. Les choix d'un juge sont-ils liés à son sexe ? D'après les études, non. (On le confirme sur les bancs CRC) D'ailleurs, la neutralité du service public est en cause. Avis défavorable.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Si l'on considère la composition des assemblées parlementaires qui, je n'en doute pas, légifèrent pour l'intérêt général..., la féminisation de la magistrature n'est pas un problème en soi. Mais la société a ses plafonds de verre. Les femmes restent minoritaires dans la haute magistrature, même si des progrès ont été faits ces derniers mois dans les nominations...

M. Jean-Jacques Hyest.  - Avec l'accord du Conseil supérieur de la magistrature, j'espère !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - La Chancellerie respecte les avis du CSM mais conserve un pouvoir de proposition et ses propositions ont été acceptées. Les magistrates, d'après les études de l'Institut des hautes études sur la justice, sont aussi rigoureuses que les hommes, et jugent en droit avec les mêmes scrupules. L'amendement n'a donc pas lieu d'être.

Mme Cécile Cukierman.  - À entendre le RDSE, les femmes juges avantageraient les épouses... Nous nous inscrivons en faux. Les affaires familiales méritent une réflexion plus sérieuse. Derrière certaines polémiques récentes se cache un projet de société réactionnaire que nous n'admettons pas.

Mme Hélène Lipietz.  - Gisèle Halimi fut la première à obtenir que les viols fussent jugés en assises. Les avocats se sont demandés s'ils devaient récuser les jurés hommes ou femmes. Or les études montrent que le sexe n'influe pas sur la décision. On m'a appris que sous la robe, il n'y a pas de sexe.

M. Jean-Claude Requier.  - Nous maintenons l'amendement.

L'amendement n°12 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE 3 (SUPPRIMÉ)

M. le président.  - Amendement n°39, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance les mesures, relevant du domaine de la loi, nécessaires pour modifier la structure et le contenu du livre III du code civil afin de moderniser, de simplifier, d'améliorer la lisibilité, de renforcer l'accessibilité du droit commun des contrats, du régime des obligations et du droit de la preuve, de garantir la sécurité juridique et l'efficacité de la norme et à cette fin :

1° Affirmer les principes généraux du droit des contrats tels que la bonne foi et la liberté contractuelle ; énumérer et définir les principales catégories de contrats ; préciser les règles relatives au processus de conclusion du contrat, y compris conclu par voie électronique, afin de clarifier les dispositions applicables en matière de négociation, d'offre et d'acceptation de contrat, notamment s'agissant de sa date et du lieu de sa formation, de promesse de contrat et de pacte de préférence ;

2° Simplifier les règles applicables aux conditions de validité du contrat, qui comprennent celles relatives au consentement, à la capacité, à la représentation et au contenu du contrat, en consacrant en particulier le devoir d'information, la notion de clause abusive et en introduisant des dispositions permettant de sanctionner le comportement d'une partie qui abuse de la situation de faiblesse de l'autre ;

3° Affirmer le principe du consensualisme et présenter ses exceptions en indiquant les principales règles applicables à la forme du contrat ;

4° Clarifier les règles relatives à la nullité et à la caducité, qui sanctionnent les conditions de validité et de forme du contrat ;

5° Clarifier les dispositions relatives à l'interprétation du contrat et spécifier celles qui sont propres aux contrats d'adhésion ;

6° Préciser les règles relatives aux effets du contrat entre les parties et à l'égard des tiers, en consacrant la possibilité pour celles-ci d'adapter leur contrat en cas de changement imprévisible de circonstances ;

7° Clarifier les règles relatives à la durée du contrat ;

8° Regrouper les règles applicables à l'inexécution du contrat et introduire la possibilité d'une résolution unilatérale par notification ;

9° Moderniser les règles applicables à la gestion d'affaires et au paiement de l'indu et consacrer la notion d'enrichissement sans cause ;

10° Introduire un régime général des obligations et clarifier et moderniser ses règles ; préciser en particulier celles relatives aux différentes modalités de l'obligation, en distinguant les obligations conditionnelles, à terme, cumulatives, alternatives, facultatives, solidaires et à prestation indivisible ; adapter les règles du paiement et expliciter les règles applicables aux autres formes d'extinction de l'obligation résultant de la remise de dette, de la compensation et de la confusion ;

11° Regrouper l'ensemble des opérations destinées à modifier le rapport d'obligation ; consacrer dans les principales actions ouvertes au créancier, les actions directes en paiement prévues par la loi ; moderniser les règles relatives à la cession de créance, à la novation et à la délégation ; consacrer la cession de dette et la cession de contrat ; préciser les règles applicables aux restitutions, notamment en cas d'anéantissement du contrat ;

12° Clarifier et simplifier l'ensemble des règles applicables à la preuve des obligations ; en conséquence, énoncer d'abord celles relatives à la charge de la preuve, aux présomptions légales, à l'autorité de chose jugée, aux conventions sur la preuve et à l'admission de la preuve ; préciser ensuite les conditions d'admissibilité des modes de preuve des faits et des actes juridiques ; détailler enfin les régimes applicables aux différents modes de preuve ;

13° Aménager et modifier toutes dispositions de nature législative permettant d'assurer la mise en oeuvre et de tirer les conséquences des modifications apportées en application des 1° à 12° du présent article.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Le Gouvernement souhaite le rétablissement de l'article 3, qui l'habilite à réformer le droit des contrats par ordonnances. Cette partie du code civil date de 1803, le droit n'ayant évolué depuis que par la jurisprudence. Le code manque de clarté à ce sujet, qui concerne le quotidien des Français. Voilà vingt ans que l'on réfléchit à cette réforme. Le droit des contrats est également essentiel à nos relations avec les autres pays. D'autres États, qui s'étaient inspirés de notre code civil ont réformé le leur, depuis, supprimant par exemple la notion de « cause ».

Dans la discussion générale vous m'avez dit que l'ordonnance...

M. Jean-Jacques Hyest.  - N'est pas le bon véhicule.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - ... mais elle est inscrite dans la Constitution. Le code civil a déjà été modifié par ordonnance en 2003 et 2004, sur des sujets d'importance.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Le Sénat s'y était opposé.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Reconnaissez pourtant que les modifications furent utiles, sur le droit de la filiation et des sûretés.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Ce ne furent que des corrections.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Ne faites pas de faux procès au Gouvernement. Les projets d'ordonnance vous ont été soumis.

La formule de Guy Carcassonne, selon laquelle les ordonnances sont une législation de chef de bureau, est magnifique...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Pas pour les chefs de bureaux !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - En réalité, elles sont écrites par des magistrats et juristes compétents, des parlementaires reconnus comme M. Anziani et Béteille, qui ont participé au groupe de travail. Nous avons aussi travaillé avec les représentants du monde économique.

Vous avez cité Portalis. Faut-il vous rappeler le contexte ? Il s'exprimait devant le Conseil d'État, non devant une assemblée élue. Le corps législatif adoptait alors sans les discuter les lois du Consulat, issu du coup d'État du 18 brumaire... Il y a quelque paradoxe pour une assemblée élue au suffrage universel à prendre une telle référence.

Les principes directeurs du droit civil sont établis, comme la bonne foi.

En réalité, vous choisissez que la jurisprudence continue à faire la loi. Vous vous privez ainsi de peser sur les décisions du Gouvernement.

Monsieur le président Sueur, vous avez soulevé la question de la résiliation unilatérale des contrats. Faut-il que la jurisprudence de la Cour de cassation de 1998 continue à avoir force de loi ?

Vous vous dites prêts à libérer une niche, soit quatre heures, pour examiner 300 articles... Vous, sénateurs, pouvez-vous décider que d'ici mai le Conseil d'État aura pu se prononcer ? Et ensuite ?

Si cette réforme n'est pas faite par ordonnance, elle ne sera pas faite pendant le quinquennat. Que chacun assume ses responsabilités.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - J'assumerai les miennes. Le Gouvernement veut réformer par ordonnance le droit des obligations, excusez du peu ! Vous m'avez convaincu, madame la garde des sceaux, que cette réforme est urgente. Mais il s'agit de la Constitution civile de la France ! Il est impensable de procéder par ordonnance.

Le code civil organise la vie de chacun. Sa réforme engage des choix politiques majeurs. Le doyen Carbonnier rappelait à propos des contrats : « des passions s'y combattent... le pessimisme ancien y flaire un piège ». Sécurité juridique, autonomie contractuelle et protection des contractants de bonne foi doivent être conciliés.

Une telle réforme a besoin de l'écho et de la publicité liés à un examen parlementaire.

Enfin, il n'est pas plus rapide de procéder par ordonnances.

Ainsi, la réforme du droit des successions, par voie parlementaire, a pris moins d'un an, avec l'adoption de 127 amendements dans notre assemblée. Croyez que le Sénat mettra toute l'énergie nécessaire à examiner cette réforme, si vous l'inscrivez à l'ordre du jour.

J'exprime donc solennellement l'opposition de la commission des lois à cet amendement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - J'ai beaucoup de respect pour votre action et votre force de persuasion, madame la ministre. Nous connaissons vos qualités rhétoriques, votre capacité à alterner la colère et l'humour.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Je suis vivante, voilà tout !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Je réponds à vos arguments. Vous nous avez rappelé dans quelles circonstances historiques Portalis s'est exprimé : il a voulu dire, avec humilité, devant une assemblée qui n'était certes pas élue, qu'il faisait confiance au travail de délibération collective. Les ordonnances sont inscrites dans la Constitution, nous le savons, leur utilisation est possible et pas forcément nécessaire. Réformer un cinquième du code civil sans que le Parlement en débatte est inacceptable. M. Hyest, alors président de la commission des lois, s'était opposé à l'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnances sur la filiation ou les sûretés. La commission unanime a exprimé le même avis à propos de votre amendement. J'ai travaillé sur la proposition de loi Warsmann, tombereau d'habilitations et de ratifications. C'était nécessaire parfois, mais dans d'autres cas ce n'était pas bien. Je me suis élevé, par exemple, contre la création par ordonnance des partenariats public-privé. Une paille ! Heureusement, le Conseil constitutionnel, saisi par le groupe socialiste, a formulé des conditions d'urgence et de complexité mais la loi aurait pu le faire ! Si vous étiez encore parlementaire, vous auriez défendu la même position avec véhémence.

Manque-t-on de temps ? Cela vaut pour tout ! Pour la réforme pénale par exemple, que j'eusse aimé voir examinée plus tôt, car elle est nécessaire. Nous avons proposé d'inscrire un projet de loi sur la réforme du droit civil à l'ordre du jour d'une semaine de contrôle. On pourrait débattre de ces semaines de débats, sans doute intéressants, mais sans portée législative...

Les ordonnances, dites-vous, sont écrites par d'éminents juristes. Mais pour toutes les lois, nous faisons appel à l'avis des spécialistes ! Votre argument ne tient donc pas. Vous avez cité M. Anziani : il a la même position que nous tous.

Peut-être une loi votée hier permettra-t-elle d'améliorer l'organisation de nos travaux...

Notre engagement est sérieux, madame la ministre, et nous espérons examiner un projet de loi dès que possible. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Jacques Hyest.  - Madame la garde des sceaux, sur la filiation, il n'était pas question de revoir le fond du droit par ordonnances... Je m'y étais opposé, mais il arrive que la commission des lois ne soit pas suivie par le Sénat. C'est regrettable.

Ce que vous avez dit sur l'époque de Portalis est exact mais le code civil a tenu longtemps parce qu'il était bien fait, et il a été enrichi par la jurisprudence. Le droit de la responsabilité tient en trois articles du code ; la jurisprudence l'a complété.

Les ordonnances ont été créées pour parer à l'urgence, non pour se substituer à la loi. Il est vrai qu'on encombre l'ordre du jour de lois inutiles, qui empêchent de voter les lois nécessaires...

Sur la prescription, le Gouvernement voulait légiférer par ordonnances. Eh bien ! La commission des lois a déposé une proposition de loi, après avoir beaucoup travaillé avec le professeur Catala notamment.

La loi a ses vertus, parmi lesquelles des travaux préparatoires dont la jurisprudence tient compte. Certains points doivent être tranchés au terme d'un débat public.

M. Gilbert Roger.  - Sans être membre de la commission des lois, je m'exprimerai en tant que sénateur. La Ve République n'est pas ma tasse de thé, mais sa Constitution prévoit les ordonnances. J'apprécie et soutiens sans réserves ce Gouvernement, qui propose d'aller vite pour simplifier la vie de nos concitoyens : c'est nécessaire. Un maître-nageur n'aime pas le rétropédalage... (Sourires) Je ferai donc confiance à Mme la garde des sceaux, en comptant sur elle, pour nous présenter très bientôt un bilan de l'application des ordonnances.

Mme Hélène Lipietz.  - Les écologistes sont opposés par principe aux ordonnances. Nous savons être conciliants, mais il est hors de question de procéder ainsi pour le code civil. Où est l'urgence ? Le délai de douze mois que vous demandez, profitons-en pour débattre au Parlement de ce sujet central.

Mme Cécile Cukierman.  - La commission des lois n'exprime là aucune défiance envers le Gouvernement. Le législateur ne se borne pas à exprimer confiance ou défiance. Un tel pan de notre droit ne peut être réformé sans examen du Parlement. Vous faites peut-être les frais, madame la garde des sceaux, de l'annonce du président de la République, lors de ses voeux, d'un plus grand recours aux ordonnances. Mais l'excès d'ordonnances est dangereux pour la démocratie. Le législateur a son mot à dire, sur un tel sujet ; bien plus, il doit se former un avis.

M. René Garrec.  - Président de la commission des lois, j'ai été confronté au même dilemme. Nous n'oublions pas que le Gouvernement a parfois besoin d'agir vite. Madame la garde des sceaux, vous avez tous les éléments pour déposer un projet de loi. Sur un problème de fond comme celui-là, procéder par ordonnances n'est pas conforme à l'esprit de la Constitution.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Vous m'offririez une fenêtre dans l'ordre du jour ? Je rappelle que le Parlement est bicaméral. L'ordre du jour des assemblées est engorgé. Je ne sais pas, par exemple, quand pourront être débattus des textes présentés en Conseil des ministres en avril et mai 2013, à tel point que j'ai dû introduire en loi de finances un amendement repoussant d'un an l'application de la loi de 2007 sur la collégialité de l'instruction. C'est absurde.

Le président de la République a pris des engagements devant les Français, il les traduit dans les faits. D'ailleurs, ce texte a été déposé avant ses voeux. Ce que nous souhaitons, c'est apporter des solutions rapides et efficaces aux problèmes quotidiens des Français. Les questions pratiques ne doivent pas être déterminantes, mais les conséquences peuvent l'être...

Je serais ravie d'avoir tort, mais je doute qu'un projet de loi puisse être adopté dans des délais acceptables. Même si les Français avaient à se débrouiller quelques mois de plus avec un droit des contrats et un régime des obligations juridiquement incertains... Et même si la France continuera à en pâtir au niveau international. Une bataille d'influence quotidienne, permanente, se livre en Europe entre notre droit continental et la common law. Notre droit des contrats n'inspire plus personne dans le monde car il n'a pas été réformé.

Monsieur Hyest, sur le droit des filiations...

M. Jean-Jacques Hyest.  - Les ordonnances n'ont fait que tirer les conséquences des dispositions déterminées par la loi...

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - L'habilitation concernait au contraire des sujets d'importance : conditions d'établissement de la filiation maternelle ou de constatation de la possession d'état, sécurisation du lien de filiation, préservation de l'enfant des conflits de filiation...

M. Jean-Jacques Hyest.  - J'étais contre !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Notre droit des contrats est très désorganisé.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Depuis deux siècles !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Oui, et même depuis 210 ans. Si nous renonçons à le modifier, assumons-le !

M. Jean-Jacques Hyest.  - N'exagérons pas !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - En citant M. Anziani, je n'ai fait que rendre hommage à son travail. Je crois avoir abondamment montré mon respect pour les parlementaires.

Ne me faites pas de procès d'intention. Et ne me faites pas le tort de comparer cette demande d'habilitation à celles de la loi Warsmann...

M. Jean-Jacques Hyest.  - Je n'en pensais pas le meilleur...

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Moi non plus... Les projets de loi d'habilitation que je vous soumets sont très écrits, très précis, le président de la commission peut en convenir... Et c'est particulièrement vrai de cet article. Nous avons soumis les projets d'ordonnance à la commission des lois, et la concertation reste ouverte. Le professeur Carbonnier a aussi dit que l'État était submergé par son droit, ce qui laisse entendre que les ordonnances ne sont pas les ennemies de la loi.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Ce sont les ennemies du Parlement.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Un éminent juriste a écrit : « Réviser le code civil en usant des mêmes procédés que ceux qui en furent les initiateurs, Colbert et d'Aguesseau, ou que ses rédacteurs, Tronchet ou Portalis - ordonnances royales ou lois consulaires votées par un corps législatif muet -, est-ce bien une hérésie ? »

À la demande du groupe socialiste, l'amendement n°39 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°123 :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 347
Pour l'adoption 1
Contre 346

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 3 demeure supprimé.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Vous avez raison de prendre en compte les questions pratiques, madame la garde des sceaux. Ce texte du Gouvernement a été inscrit mardi et aujourd'hui sur les six heures du temps réservé au groupe socialiste. C'est ce groupe qui a choisi de lui accorder la priorité. Si l'article 3 avait été rétabli, le texte n'aurait sans doute pas été voté... Si nous n'avons pas adopté ce texte à 20 h 15, il vous faudra l'inscrire à l'ordre du jour ou attendre le prochain temps réservé au groupe socialiste, s'il en décide ainsi...

M. le président.  - En effet, la séance sera levée à 20 h 15.

L'amendement n°7 rectifié n'est pas défendu.

L'article 4 est adopté.

ARTICLE 5

L'amendement n°8 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

Alinéa 4

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

IV. - Le titre II du livre VI du même code est ainsi modifié :

1° Les articles L. 622-1 à L. 622-3 deviennent les articles L. 621-5 à L. 621-7 ;

2° Les chapitres II et III sont supprimés et le chapitre Ier devient un chapitre unique qui comprend les articles L. 621-1 à L. 621-7 ;

3° Aux articles L. 621-5, L. 621-6 et L. 621-7, après les mots : « à Saint-Barthélemy », sont insérés les mots : « et à Saint-Martin ».

L'amendement rédactionnel n°27, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

L'article 6 est adopté.

ARTICLE 7

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  L'intitulé de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d'État est ainsi rédigé :

« Loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits »

II.  -  Les articles 1er à 18 de la loi du 24 mai 1872 précitée sont rétablis dans la rédaction suivante :

« Art. 1er.  -  Les difficultés de compétence entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire sont réglées par un Tribunal des conflits composé en nombre égal de membres du Conseil d'État et de la Cour de cassation.

« Art. 2.  -  Dans sa formation ordinaire, le Tribunal des conflits comprend :

« 1° quatre conseillers d'État en service ordinaire élus par l'assemblée générale du Conseil d'État ;

« 2° quatre magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation élus par les magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation ;

« 3° deux suppléants élus, respectivement, l'un, par l'assemblée générale du Conseil d'État parmi les conseillers d'État en service ordinaire et les maîtres des requêtes, l'autre, par l'assemblée générale des magistrats du siège de la Cour de cassation parmi les conseillers hors hiérarchie et référendaires.

« Les membres du Tribunal des conflits sont soumis à réélection tous les trois ans et rééligibles deux fois. Lorsqu'un membre titulaire ou suppléant cesse définitivement d'exercer ses fonctions, il est procédé à son remplacement jusqu'à la fin du mandat en cours dans les conditions prévues aux 1°, 2° ou 3° ci-dessus, selon le cas.

« Art. 3.  -  Les membres mentionnés aux 1° et 2°, de l'article 2 choisissent parmi eux, pour trois ans, un président issu alternativement du Conseil d'État et de la Cour de cassation, au scrutin secret à la majorité des voix.

« En cas d'empêchement provisoire du président, le Tribunal est présidé par le membre le plus ancien appartenant au même ordre de juridiction.

« En cas de cessation définitive des fonctions du président, le Tribunal, alors complété comme il est dit au dernier alinéa de l'article 2, est présidé par un membre du même ordre, choisi dans les conditions du dernier alinéa de l'article 2, pour la durée du mandat restant à courir.

« Art. 4.  -  Deux membres du Conseil d'État, élus par l'assemblée générale du Conseil d'État parmi les rapporteurs publics, et deux membres du parquet général de la Cour de cassation, élus par l'assemblée générale des magistrats hors hiérarchie du parquet général parmi eux, sont chargés des fonctions de commissaire du gouvernement.

« Ils sont élus pour trois ans et rééligibles deux fois.

« Le commissaire du gouvernement expose publiquement et en toute indépendance son opinion sur les questions que présentent à juger les affaires dont le Tribunal des conflits est saisi.

« Art. 5.  -  Sous réserve des dispositions de l'article 6, le Tribunal des conflits ne peut délibérer que si cinq membres au moins sont présents.

« Art. 6.  -  Dans le cas où, après une seconde délibération, les membres du Tribunal n'ont pu se départager, l'affaire est examinée en formation élargie dans les conditions précisées par décret en Conseil d'État. Cette formation est composée, outre les membres mentionnés aux 1° et 2° de l'article 2, de deux conseillers d'État en service ordinaire et deux magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation élus comme il est dit aux 1° et 2° de l'article 2, lors de l'élection des membres de la formation ordinaire.

« Les règles de suppléance sont applicables.

« Le Tribunal ne peut siéger que si tous les membres sont présents ou suppléés.

« Art. 7.  -  Les débats ont lieu en audience publique après une instruction contradictoire.

« Art. 8.  -  Le délibéré des juges est secret.

« Art. 9.  -  Les décisions sont rendues au nom du Peuple français. Elles sont motivées et comportent le nom des membres qui en ont délibéré.

« Elles sont rendues publiquement.

« Art. 10.  -  Lorsque la solution de la question soumise au Tribunal des conflits s'impose avec évidence, le président, conjointement avec le membre le plus ancien appartenant à l'autre ordre de juridiction, peut statuer par voie d'ordonnance dans les cas prévus par décret en Conseil d'État.

« Art. 11.  -  Les décisions du Tribunal des conflits s'imposent à toutes les juridictions de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif.

« Art. 12.  -  Le Tribunal des conflits règle la difficulté de compétence entre les deux ordres de juridiction, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'État :

« 1°) lorsque le préfet a élevé le conflit dans le cas prévu à l'article 13 ;

« 2°) lorsque les juridictions de l'un et l'autre ordre se sont respectivement déclarées incompétentes pour connaître d'un litige ayant le même objet ;

« 3°) lorsqu'une juridiction de l'un ou l'autre ordre lui a renvoyé la question de compétence soulevée dans un litige.

« Art. 13.  -  Lorsque le préfet estime que la connaissance d'un litige ou d'une question préjudicielle portée devant une juridiction de l'ordre judiciaire relève de la compétence de la juridiction administrative, il peut, alors même que l'administration ne serait pas en cause, demander à la juridiction saisie de décliner sa compétence.

« Art. 14.  -  Le conflit d'attribution entre les juridictions judiciaires et administratives ne peut être élevé en matière pénale.

« Il peut être élevé en toute autre matière, sauf sur l'action civile dans les cas mentionnés à l'article 136 du code de procédure pénale.

« Art. 15.  -  Le Tribunal des conflits peut être saisi des décisions définitives rendues par les juridictions administratives et les juridictions judiciaires dans les instances introduites devant les deux ordres de juridiction, pour des litiges portant sur le même objet, lorsqu'elles présentent une contrariété conduisant à un déni de justice.

« Sur les litiges qui lui sont ainsi déférés, le Tribunal des conflits juge au fond, à l'égard de toutes les parties en cause. Ses décisions ne sont susceptibles d'aucun recours.

« Art. 16.  -  Le Tribunal des conflits est seul compétent pour connaître d'une action en indemnisation du préjudice découlant d'une durée totale excessive des procédures afférentes à un même litige et conduites entre les mêmes parties devant les juridictions des deux ordres en raison des règles de compétence applicables et, le cas échéant, devant lui.

« Art. 17.  -  Les modalités de désignation prévues à l'article 2 entrent en vigueur lors du premier renouvellement des membres du Tribunal des conflits suivant l'entrée en vigueur de la présente loi. Jusqu'à ce renouvellement, les fonctions de président sont exercées par le vice-président précédemment élu en application de  l'article 25 de la loi du 24 mai 1872.

« Dans les deux mois suivant l'entrée en vigueur de la présente loi, il est procédé aux élections prévues au premier alinéa de l'article 6 pour la durée restant à courir du mandat des membres du Tribunal.

« Dans le même délai et pour la même durée, il est procédé à la désignation des commissaires du gouvernement selon les modalités prévues à l'article 4.

« Art. 18.  -  La présente loi, qui s'applique à tout le territoire de la République, entrera en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'État et au plus tard le 1er janvier 2015. »

III.  -  Sont abrogés :

- l'ordonnance du 1er juin 1828 relative aux conflits d'attribution entre les tribunaux et l'autorité administrative ;

- l'ordonnance du 12 mars 1831 modifiant celle du 2 février 1831 sur la publicité des séances du Conseil d'État et le mode de décision des affaires contentieuses et des conflits ;

- la loi du 4 février 1850 portant sur l'organisation du Tribunal des conflits ;

- le titre IV de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d'État, à l'exception de son article 25 qui est abrogé à compter du premier renouvellement des membres du Tribunal des conflits suivant l'entrée en vigueur de la présente loi ;

- la loi du 20 avril 1932 ouvrant un recours devant le Tribunal des conflits contre les décisions définitives rendues par les tribunaux judiciaires et les tribunaux administratifs lorsqu'elles présentent contrariété aboutissant à un déni de justice.

IV.  -  À compter de l'entrée en vigueur de la loi sur le Tribunal des conflits résultant du I du présent article, les mots : « vice-président du Tribunal des conflits » figurant à l'article 23 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sont remplacés par les mots : « président du Tribunal des conflits ».

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet amendement inclut dans le projet de loi les dispositions qui réforment le tribunal des conflits.

M. le président.  - Sous-amendement n°37 à l'amendement n°35 du Gouvernement, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

Amendement n° 35

A.  -  Alinéas 2 à 4

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

I.  -  La loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d'État est ainsi modifiée :

1° Dans l'intitulé, les mots : « portant réorganisation du Conseil d'État » sont remplacés par les mots : « relative au Tribunal des conflits » ;

2° Le titre IV est abrogé, à l'exception de l'article 25 qui est abrogé à compter du premier renouvellement des membres du Tribunal des conflits suivant l'entrée en vigueur du présent I;

3° Sont rétablis des articles 1er à 17 ainsi rédigés :

B.  -  Alinéa 5

Remplacer les mots:

difficultés de compétence

par les mots:

conflits d'attribution

et le mot :

réglées

par le mot :

réglés

C.  -  Alinéa 24

Remplacer le mot :

publiquement

par les mots :

en audience publique

D.  -  Alinéa 27

Remplacer les mots :

la difficulté de compétence

par les mots :

le conflit d'attribution

E.  -  Alinéas 37 à 41

Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :

II.  -  À la première phrase du premier alinéa de l'article 23 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, le mot : « vice- » est supprimé.

III.  -  1. Les I et II entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'État et au plus tard le 1er janvier 2015.

2. Les modalités de désignation prévues à l'article 2 de la loi du 24 mai 1872 précitée, telle qu'elle résulte du I du présent article, entrent en vigueur lors du premier renouvellement des membres du Tribunal des conflits suivant l'entrée en vigueur prévue au 1 du présent III.

Jusqu'à ce renouvellement, les fonctions de président, prévues à l'article 3 de la loi du 24 mai 1872 précitée, telle qu'elle résulte du I du présent article, sont exercées par le vice-président précédemment élu en application de l'article 25 de la loi du 24 mai 1872, dans sa rédaction antérieure à la présente loi.

3. Dans les deux mois suivant l'entrée en vigueur prévue au 1 du présent III, il est procédé aux élections prévues au premier alinéa de l'article 6 de la loi de la loi du 24 mai 1872 précitée, telle qu'elle résulte du I, pour la durée restant à courir du mandat des membres du Tribunal.

Dans le même délai, et pour la même durée, il est procédé à la désignation des commissaires du gouvernement selon les modalités prévues à l'article 4 de la loi du 24 mai 1872 précitée, telle qu'elle résulte du I du présent article.

IV.  -  Sont abrogés :

F.  -  Alinéa 45 et 47

Supprimer ces alinéas.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement, qui remplace des expressions imprécises, avis favorable à l'amendement du Gouvernement.

L'amendement n°10 rectifié n'est pas défendu.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Avis favorable sauf aux paragraphes B et D. Je souhaite un vote par division.

La division, demandée par le Gouvernement, est de droit.

Les paragraphes A, B, C, D, E et F du sous-amendement n°37 sont successivement adoptés.

L'amendement n°35, ainsi sous-amendé, est adopté.

L'article 7 est ainsi rédigé.

ARTICLE 8

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5, seconde phrase

Remplacer les mots :

que le destinataire est bien celui qui les a reçus et la date de cette réception

par les mots :

la date de réception par le destinataire

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - L'amendement n°23 concerne les dispositions relatives à la communication électronique dans la procédure pénale.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Le recours à la communication électronique en matière pénale n'est envisageable que si sont apportées les mêmes garanties qu'en cas de communication traditionnelle. La signature d'une lettre recommandée avec accusé de réception et éventuellement la vérification de l'identité par le facteur sont des éléments importants, tandis que l'accusé de réception électronique ne demande qu'un clic... Il est nécessaire de s'assurer que celui qui a lu est bien le destinataire. Avis défavorable.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Nous sommes très soucieux de la sécurité des procédures, croyez-moi. J'ai personnellement veillé à ce que nous ne prenions aucun risque. Notre droit prévoit des lettres recommandées avec accusé de réception, mais 80 % de ces courriers ne sont pas retirés ! Passer par voie électronique nous fera faire des économies de frais de justice, sachant que dès lors que le destinataire a exprimé son consentement, la sécurité est maximale. Cela garantit aussi le secret de la communication.

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°36, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

a) Au quatrième alinéa de l'article 114, les mots : « à l'article 803-1 » sont remplacés par les mots : « au I. de l'article 803-1 » ;

b) Au deuxième alinéa de l'article 167, les mots : « par l'article 803-1 » sont remplacés par les mots : « au I. de l'article 803-1 ».

L'amendement de coordination n°36, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 8, modifié, est adopté.

ARTICLE 9

L'amendement n°11 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 11

Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :

2° L'article L. 2213-14 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Afin d'assurer l'exécution des mesures de police prescrites par les lois et règlements, les opérations de fermeture du cercueil, lorsqu'il y a crémation, s'effectuent : » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le corps est transporté hors de la commune de décès ou de dépôt, les opérations de fermeture du cercueil et de transport sont assurées sous la responsabilité des régies, entreprises et associations habilitées conformément à l'article L. 2223-23. » ;

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - L'amendement de la commission des lois est meilleur. Je retire le mien.

L'amendement n°15 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°30, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

Alinéa 11

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

2° L'article L. 2213-14 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « du cercueil lorsque le corps est transporté hors de la commune de décès ou de dépôt et dans tous les cas » sont remplacés par les mots : « et de scellement du cercueil » et les mots : « , ainsi que les opérations d'exhumation à l'exclusion de celles réalisées par les communes pour la reprise des concessions et des sépultures échues ou abandonnées, de réinhumation et de translation de corps » sont supprimés ;

b) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« Lorsque le corps est transporté hors de la commune de décès ou de dépôt, les opérations de fermeture et de scellement du cercueil s'effectuent sous la responsabilité de l'opérateur funéraire, en présence de deux membres de la famille. À défaut, elles s'effectuent dans les mêmes conditions qu'aux deux alinéas précédents. »

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Cet amendement est un compromis avec la position du Gouvernement. La surveillance lorsque le corps doit être transporté d'une commune à l'autre est essentielle. Nous proposons ainsi que dans ce cas, comme pour la crémation, le cercueil soit scellé ; et le scellement puisse être effectué par l'opérateur funéraire en présence de deux membres de la famille - à défaut, la surveillance par un agent de police ou un garde champêtre serait maintenue.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Heureusement que la commission des lois a confié un rapport à M. Lecerf et à moi-même, qui a débouché sur une proposition de loi... Il était urgentissime de réformer le droit funéraire. Il a fallu deux ans d'efforts pour que le texte soit enfin adopté à l'unanimité par les deux assemblées... Des formalités il n'en est resté qu'une, que nous avons réduit en prévoyant qu'il n'y ait plus de contrôle par la police en cas d'exhumation.

L'opérateur habilité devra procéder au scellement en présence de membres de la famille ou, en leur absence, sous l'autorité du maire par un agent de police ou un garde champêtre. Les fonctionnaires de police pourront ainsi se consacrer en priorité aux tâches de sécurité publique.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Avis favorable. Les fonctionnaires de police sont en effet plus utiles ailleurs. Cet amendement satisfait le Gouvernement.

L'amendement n°30 est adopté.

L'amendement n°24 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°29, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

Alinéa 12

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

3° Après le premier alinéa de l'article L. 2223-21-1 du code général des collectivités territoriales, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les régies, entreprises et associations habilitées déposent ces devis, dans chaque département où elles ont leur siège social ou un établissement secondaire, auprès des communes où ceux-ci sont situés, ainsi qu'auprès de celles de plus de 5 000 habitants.

« Elles peuvent également déposer ces devis auprès de toute autre commune. »

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - L'amendement n°29 propose un compromis entre les positions du Gouvernement et de la commission des lois, s'agissant de l'obligation de dépôt en mairie des devis types de prestations funéraires.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Cet amendement est important. Après un décès, les familles endeuillées, vulnérables, doivent prendre un grand nombre de décisions en 24 heures. Je me bats depuis la loi de 1993 pour leur défense. Il a fallu attendre 2008 pour que des dispositions sur les devis types soient inscrites dans la loi. Mais certains ont cru pouvoir tirer parti de la rédaction d'alors pour s'exonérer de leurs obligations de dépôt.

Désormais, ces devis seront déposés là où l'entreprise a son siège, là où elle a un établissement, et dans les communes de plus de 5 000 habitants du même département. Les maires pourront les diffuser sur le site Internet de la commune. Ainsi, les familles pourront comparer. La transparence est aussi de l'intérêt des professionnels. Cet amendement est de protection des familles, qui ne doivent pas subir de préjudice.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°29 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Après l'alinéa 12

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Au premier alinéa de l'article L. 322-3 du code de la sécurité intérieure, les mots : « représentant de l'État dans le département » sont remplacés par les mots : « maire de la commune ».

II.  -  Alinéa 22

Supprimer cet alinéa.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet amendement concerne l'organisation des loteries. La règle est l'interdiction, il appartient à l'État de protéger les citoyens contre les chimères... La compétence d'autorisation est transférée aux maires.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Le Gouvernement renonce à demander l'habilitation, la commission s'en réjouit. Avis favorable.

L'amendement n°18 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Après l'alinéa 12

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  La section 2 du chapitre Ier du titre III du livre III du code du sport est ainsi modifiée :

1° L'intitulé est ainsi rédigé : « Autorisation et déclaration préalables » ;

2° Il est ajouté un article L. 331-8-... ainsi rédigé :

« Art. L. 331-8  -  ...  -  Les manifestations sportives ne comportant pas la participation de véhicules à moteur à l'intérieur du territoire d'une seule commune, font l'objet d'une déclaration auprès du maire de la commune concernée.

« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. »

II.  -  Alinéa 23

Supprimer cet alinéa.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet amendement a le même objet que le précédent ; il concerne les manifestations sportives.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe CRC.

Alinéa 23

Supprimer cet alinéa.

Mme Cécile Cukierman.  - L'imprécision de l'étude d'impact a suscité des inquiétudes. Le maire aura la responsabilité de s'assurer que l'organisateur a pris les mesures de sécurité nécessaires. Ces manifestations se déroulent sur la voie publique, cela donne l'impression que l'État transfère sa responsabilité au maire et pas seulement celle d'enregistrer la déclaration. Peut-être qu'en ces temps de judiciarisation, et au vu de la jurisprudence qui va se créer, les maires se diront-ils qu'ils feraient mieux de ne pas accorder d'autorisation... J'attends des précisions de la part de Mme la garde des sceaux. Les élus risquent d'être encore affaiblis par un transfert de responsabilités sans les moyens de les assumer.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - La proposition du Gouvernement est bienvenue. Retrait de l'amendement n°6.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Vos préoccupations sont légitimes et opportunes. Toutefois, si nous transférons les compétences des préfets aux maires, c'est pour leur faciliter les choses. Actuellement, le préfet saisit systématiquement le maire ; nous ne faisons que supprimer un échelon.

Le maire donne une autorisation en fonction de l'organisation de l'espace urbain : cela ne le rend pas responsable de la manifestation, c'est l'organisateur de celle-ci qui l'est. La responsabilité administrative n'incombe au maire qu'en cas de faute. Quant à la responsabilité pénale, il n'y a pas de procédure pénale qui impliquerait un maire à ce sujet. Les maires ne seront donc pas plus exposés. Retrait.

Mme Cécile Cukierman.  - Je ne souhaite pas que l'avenir me donne raison... Je doute que cette mesure simplifie les procédures pour les organisateurs de manifestations, car celles-ci peuvent s'étendre sur plusieurs communes. Vos propos nous rassurent toutefois. Nous retirons notre amendement.

L'amendement n°6 est retiré.

L'amendement n°16 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°22 rectifié, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Après l'alinéa 12

Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  Sont abrogés :

1° Le chapitre II et la section 2 du chapitre IV du titre II du livre Ier de la troisième partie du code des transports ;

2° Les articles 2 et 4 de la loi n° 77-6 du 3 janvier 1977 relative à l'exploitation des voitures dites de « petites remises » ;

3° Le 26° de l'article 9 de l'ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports.

Les autorisations d'exploiter des voitures de petite remise régulièrement exploitées à la date de publication de la présente loi demeurent régies par les dispositions mentionnées aux 1° et 2° jusqu'à leur terme.

...  -  A l'article L. 3551-1 du code des transports, la référence : « et le second alinéa de l'article L. 3122-1 » est supprimée.

II.  -  Alinéa 26

Supprimer cet alinéa.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet amendement concerne les voitures de petites remises. Ce dispositif, que je ne connaissais pas, est en extinction. Les usagers de toute façon le connaissent peu.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Avis favorable.

L'amendement n°22 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°28, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

Alinéa 31

1° Après le mot :

territoriale

insérer les mots :

et au centre de gestion et de formation de la fonction publique territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon

2° Remplacer la référence :

de l'article 13

par les références :

des articles 13 et 112

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Amendement de précision rédactionnelle.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement rédactionnel n°28 est adopté.

L'article 9, modifié, est adopté.

ARTICLE 10

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

Alinéa 15

Remplacer le mot :

publication

par le mot :

promulgation

L'amendement rédactionnel n°25, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 10, modifié, est adopté.

ARTICLE 11

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 6 à 14

Supprimer ces alinéas.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - L'amendement n°20 supprime le démarchage. Complément des dispositions votées dans la loi consommation, il ne transpose de la directive européenne que celles qui concernent les avocats. Crée-t-il un risque d'éclatement du droit ? Nous en reparlerons.

L'amendement n°5 n'est pas défendu.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Je le reprends et j'y intègre mon sous-amendent n°34.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°40.

Amendement n°40, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

I.  -  Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Alinéa 12

Après les mots :

le fait,

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

pour toute personne autre qu'un des membres d'une profession désignée au premier alinéa, de se livrer à une sollicitation personnalisée en vue de donner des consultations ou rédiger des actes en matière juridique.

II.  -  Alinéa 13

1° Remplacer les mots :

aux premier et deuxième alinéas

par les mots :

au premier alinéa

2° Remplacer les mots :

aux mêmes alinéas

par les mots :

au même alinéa

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Cet amendement avait initialement trois objets : suppression de l'autorisation faite aux professions exerçant le droit à titre accessoire de procéder, au même titre que les avocats, à des sollicitations personnalisées ; remplacement du mot « démarchage » par l'expression « sollicitation personnalisée » ; suppression de la répression pénale des démarchages abusifs par les avocats - seule subsisterait la sanction disciplinaire. Les avocats sont inquiets à la perspective de voir d'autres professionnels du droit, légalement autorisés à le pratiquer, se livrer au démarchage. La commission a intégré son sous-amendement n°34 pour exclure du champ de la sollicitation personnalisée les professions réglementées autorisées à faire du droit à titre accessoire et rétablir la sanction pénale pour les avocats, pour tout démarchage qu'ils effectueraient par une voie autre qu'écrite.

L'amendement n°13 rectifié n'est pas défendu.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - L'amendement n° 20... Le débat se limite à quelques questions. Est-il légitime qu'un expert foncier ou un administrateur de biens qui démarche pour la mise en vente d'un terrain soit sanctionné s'il propose de rédiger lui-même la promesse de vente ? On dit que les avocats sont tenus par une déontologie ; mais d'autres professionnels y sont aux aussi soumis, par exemple les experts comptables. L'inégalité actuelle de traitement n'est pas conforme aux exigences constitutionnelles ni aux règles communautaires en matière de prestations de services. Ne faut-il pas fixer dans la loi les conditions dans lesquelles le démarchage peut être effectué ? Est-il légitime que le niveau de répression du démarchage abusif de celui-ci pour les avocats soit abaissé ? Il est regrettable que le Gouvernement n'ait pas consulté les professionnels du droit.

L'essentiel est que le débat soit ouvert ; avec son amendement n°20 le Gouvernement veut le refermer. Avis défavorable.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - La commission des lois va au-delà de la directive services. La France a été condamnée pour non-conformité.

Certaines professions sont réglementées car elles assurent des missions d'intérêt public. Elles sont sans cesse mises en cause par l'Union européenne. Cette extension risque de les fragiliser. Les citoyens doivent avoir partout accès aux représentants de ces professions.

L'extension proposée nous paraît donc dangereuse, et elle va très au-delà de la directive « services ».

M. Jean-Jacques Hyest.  - On peut regretter que la question ait été traitée dans le projet de loi sur la consommation. La directive nous oblige à autoriser le démarchage pour les avocats. Or certaines professions peuvent être autorisées à exercer des activités de conseil juridique à titre accessoire. Faut-il leur étendre l'autorisation, comme le propose la commission ? Je ne le crois pas. Je suivrai donc le Gouvernement. N'entretenons pas la confusion. (M. René Garrec approuve) Je préférais « sollicitations personnalisées » à « démarchage »...

M. René Garrec.  - C'était plus élégant.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Cela figure dans l'état final de l'amendement n°40. J'ai repris les propositions de M. Pillet en y ajoutant un volet pénal en cas de démarchage abusif.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Nous avons prévu d'employer la formule « sollicitations personnalisées » dans le décret en Conseil d'État.

L'amendement n°20 est adopté.

L'amendement n°40 n'a plus d'objet, non plus que l'amendement n°33.

L'article 11, modifié, est adopté.

Les articles 12 et 13 sont successivement adoptés.

ARTICLES ADDITIONNELS

L'amendement n°2 n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°3.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par Mme Lipietz.

Après l'article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'avant-dernier alinéa de l'article 19 de la loi no 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque les délais ou les voies de recours n'ont pas été notifiés au destinataire d'une décision individuelle, la formation d'un recours contentieux irrecevable ou porté devant une juridiction incompétente proroge le délai de recours devant les juridictions administratives jusqu'à la notification des délais et voies de recours exacts par l'autorité administrative ou par la juridiction. »

Mme Hélène Lipietz.  - La loi du 12 avril 2000 oblige les administrations à indiquer les voies de recours aux destinataires de leurs décisions. Pendant des années, le Conseil d'État a considéré qu'à défaut, l'intéressé pouvait déposer un recours tardivement. Mais un revirement de jurisprudence a eu lieu en décembre 2013, le Conseil d'État ayant débouté un plaignant qui ne s'était pas acquitté du timbre fiscal. Mon amendement rappelle l'exigence posée par la loi de 2000.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - Un arrêt de 2013 a jugé tardif un deuxième recours intervenu plus de deux mois après le précédent. Nous ne connaissions pas encore la portée de cette jurisprudence. Dans ce cas, le justiciable avait bien saisi une juridiction mais ne s'était pas acquitté du droit de timbre. Ne s'agit-il que d'un cas d'espèce ? Qu'en pense le Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Il n'a pas interprété cette décision comme un revirement de jurisprudence, mais comme un cas d'espèce. Le principe du droit, c'est de donner toutes leurs chances aux parties pour faire valoir leurs droits, mais aussi qu'en fin de compte, une décision finisse par être prise. Avis défavorable.

Mme Hélène Lipietz.  - C'est bien d'une décision de principe qu'il s'agit, publiée au Lebon. Le requérant avait été mal informé. Lisez attentivement le texte de la décision !

M. René Garrec.  - Je ne comprends rien.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Un conseiller d'État !

M. René Garrec.  - Puisqu'un recours a été engagé, la personne était informée ! Je ne suis pas avocat, et cela se voit...

L'amendement n°4 n'est pas adopté.

L'article 14 demeure supprimé.

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après les mots : « doivent faire l'objet d'une signalétique », la fin du deuxième alinéa de l'article 32 de la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs est ainsi rédigée : « destinée à en limiter la mise à disposition à certaines catégories de mineurs, en fonction de leur âge. Lorsque le document contient un logiciel de loisir au sens du II. de l'article 220 terdecies du code général des impôts, chaque unité de son conditionnement doit faire l'objet d'une signalétique précisant le risque contenu dans le document. Les caractéristiques de la signalétique apposée sur les documents visés au premier alinéa sont homologuées par l'autorité administrative par décision implicite d'acceptation. »

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet amendement concerne la signalétique appliquée aux jeux vidéo. Le sujet est sérieux, puisqu'il s'agit de protéger les mineurs.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur.  - L'amendement a été déposé très tardivement. En outre, il paraît plutôt de nature réglementaire. Avis défavorable.

L'amendement n°19 n'est pas adopté.

ARTICLE 15

M. le président.  - Amendement n°38, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

1° Première phrase

Remplacer les mots :

de l'article

par les mots :

des articles 1er et

2° Après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

L'article 7 est applicable aux îles Wallis et Futuna.

3° Remplacer les mots (deux occurrences) :

à Wallis et Futuna

par les mots :

aux îles Wallis et Futuna

L'amendement de coordination n°38, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 15, modifié, est adopté.

ARTICLE 16

M. le président.  - Amendement n°26 rectifié, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission.

I. - Alinéa 3

Remplacer les mots :

ainsi que les articles 1er, 2 et

par les mots :

, le I des articles 1er et 2 ainsi que l'article

II. - Alinéa 4

Supprimer les mots :

et l'article 7

III.- Alinéa 9

Remplacer les mots :

les articles 1er, 2 et 7

par les mots :

le I des articles 1er et 2

L'amendement de coordination n°26 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 16, modifié, est adopté.

Le projet de loi est adopté.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Merci à tous les participants à ce débat, riche, passionné parfois, et particulièrement à vous, madame la ministre. Nous aurons de nouveau l'occasion de dialoguer, avec grand plaisir.

Merci au rapporteur M. Thani Mohamed Soilihi, qui a travaillé avec acharnement sans jamais se départir de sa sérénité ni de ses qualités d'écoute.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Merci à tous de ce travail sérieux, pointilleux, irritant parfois aussi mais c'est l'honneur de la démocratie.

Décisions du Conseil constitutionnel

M. le président.  - M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 23 janvier 2014, le texte de deux décisions concernant la conformité à la Constitution de la loi relative aux modalités de mise en oeuvre des conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie complémentaire et les professionnels, établissements et services de santé et de la loi relative à la modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.

Saisines du Conseil constitutionnel

M. le président.  - M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi le 23 janvier 2014, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de 60 députés, de la loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen, et, en application de l'article 61, alinéa 1, de la Constitution, par le Premier ministre, de la loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur.

Le texte de ces saisines est disponible au bureau de la distribution.

Organisme extraparlementaire (Nominations)

M. le président.  - Je rappelle que la commission des affaires étrangères a proposé quatre candidatures pour le Conseil national du développement et de la solidarité internationale. La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement. En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame M. Jean-Claude Peyronnet et M. Christian Cambon comme membres titulaires ainsi que M. Jacques Berthou et M. André Trillard comme membres suppléants du Conseil national du développement et de la solidarité internationale.

Prochaine séance, lundi 27 janvier 2014, à 16 heures.

La séance est levée à 19 h 40.

Jeudi 23 janvier 2014

Bas sommaire

Sommaire

Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité1

Discussion générale1

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi1

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur de la commission des lois2

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement2

M. Yves Détraigne2

Mme Cécile Cukierman2

Mme Virginie Klès2

Mme Hélène Lipietz2

M. Jean-Jacques Hyest2

M. Jacques Mézard2

M. Philippe Kaltenbach2

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur2

M. Alain Vidalies, ministre délégué2

Discussion des articles2

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS2

ARTICLE 32

ARTICLES ADDITIONNELS2

ARTICLE 42

Interventions sur l'ensemble2

M. Jean-Jacques Hyest2

Mme Cécile Cukierman2

Mme Hélène Lipietz2

Mme Virginie Klès2

Débat sur l'avenir de la production d'énergie2

Rappel au Règlement2

M. Ladislas Poniatowski2

Orateurs inscrits2

M. Stéphane Mazars, au nom du groupe RDSE2

Mme Cécile Cukierman2

M. Roland Courteau2

M. Ladislas Poniatowski2

M. Ronan Dantec2

M. Jean-Claude Requier2

M. Marcel Deneux2

Rappel au Règlement2

M. Jean Bizet2

M. Ronan Dantec2

Commission spéciale (Démission et candidature)2

Questions d'actualité2

Décentralisation2

M. Jean-Pierre Raffarin2

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement2

Réduction des dépenses publiques2

M. Aymeri de Montesquiou2

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget2

Aides à la presse en ligne2

M. David Assouline2

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget2

OGM2

M. Joël Labbé2

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt2

Pouvoirs de la finance2

M. Éric Bocquet2

Financement de la politique familiale2

M. Jean-Pierre Chevènement2

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget2

SÉANCE

du jeudi 23 janvier 2014

60e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de M. Thierry Foucaud,vice-président

Secrétaires : Mme Marie-Noëlle Lienemann, Mme Catherine Procaccia.

La séance est ouverte à 9 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi portant réforme de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, présentée par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues à la demande du groupe RDSE.

Discussion générale

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi .  - Le RDSE se veut, aujourd'hui comme hier, à la pointe du combat pour les libertés, dans le sillon d'Albert Camus qui disait : « Si l'homme échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout ».

Le droit pénal a été victime ces dernières années d'attaques frontales entre stigmatisation du laxisme des juges et appel à la suppression du juge d'instruction. Ces attaques ont entamé le lien de confiance tacite dans un État de droit entre les magistrats et le peuple souverain. N'oublions pas, comme le disait Anatole France, que « la majesté de la justice réside dans chaque sentence rendue au nom du peuple français ».

Le glissement subreptice d'une politique pénale recherchant un difficile équilibre entre répression et prévention vers une politique globalement répressive, nous l'avons vigoureusement combattu au nom de la liberté, de la dignité et de l'égalité sans jamais verser dans l'angélisme. La justice sans la force est impuissante, disait Pascal. Nous nous sommes opposés à la politique aveugle menée sous le quinquennat précédent : la procédure de rétention, les peines plancher, la déchéance de la nationalité pour les auteurs de certains crimes, les jurys citoyens en matière correctionnelle, le tout-carcéral, qui pousse à construire des prisons plus modernes et plus déshumanisées.

Mme Hélène Lipietz.  - Tout à fait !

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi.  - Il y a urgence à refonder notre politique pénale, dix-huit mois après le changement de majorité, vu le bruit de fond inquiétant dans la société, nos concitoyens étant excédés par la délinquance, - preuve de l'inefficacité de la politique du tout-répressif. Aussi avons-nous en préalable déposé cette proposition de loi réformant la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Celle-ci fut créée par la loi Perben II de 2004, avant de voir son champ élargi en 2005, en 2009 et en 2011. Inspiré des systèmes britannique et américain, le « plaider-coupable » est étranger à l'esprit de notre droit pénal avec son fondement contractuel : l'autorité du juge s'en trouve affaiblie, réduit au rôle d'arbitre. En outre, la procédure donne une place déséquilibrée au ministère public.

Égalité devant la loi, présomption d'innocence, droit à un procès équitable, tels sont les principes qui doivent fonder la procédure pénale. La place centrale occupée par le procureur de la République dans la CRPC pose donc problème. Le statut du parquet français ne fait-il pas l'objet de réserves réitérées de la Cour européenne des droits de l'homme ?

L'actuelle majorité s'était interrogée dès 2004 : M. Le Bouillonnec, en 2004, doutait que le droit à un procès équitable fût ainsi garanti. Les décisions sur la culpabilité et la peine sont prises dans le bureau du procureur de la République, à l'encontre du principe de publicité des débats. M. Dreyfus-Schmidt parlait de « discrétion absolue », qui pourrait servir à des accusés peu soucieux de publicité...

Le prévenu peut subir de fortes pressions pour avouer, faute de quoi il s'expose à des peines plus sévères.

Le rapport de M. Collombat montre cependant que la CRPC est principalement utilisée dans des contentieux simples où la culpabilité ne fait pas de doute. La présence obligatoire de l'avocat renforce la valeur des aveux ; reste le problème de l'accès à un avocat spécialisé.

Il ne paraît toutefois pas opportun d'étendre encore cette procédure. Benjamin Constant nous a appris que « l'arbitraire n'est pas seulement funeste quand on s'en sert pour le crime. Employé contre le crime, il est encore dangereux ». Dans les juridictions surchargées, on aura tendance à privilégier la CRPC... À cela s'ajoute la charge supplémentaire de travail que cette procédure représente pour les tribunaux.

Cette proposition de loi limite donc la CRPC aux délits passibles de trois ans d'emprisonnement au plus, et en rend l'encadrement plus strict. Avec 65 000 procédures en 2013, soit 13 % des poursuites, la CRPC a certes trouvé son utilité. Nous prenons acte des observations des praticiens, tout en considérant que le recours à des procédures d'exception ne doit pas être encouragé dans le simple but de désengorger les tribunaux.

Nous nous félicitons de la position de la commission, qui a donné au juge la possibilité de revoir la peine à la baisse, prévu les conditions de caducité de la convocation à l'audience correctionnelle, et autorisé les victimes à adresser des observations au procureur.

Notre groupe a fait le choix du pragmatisme, sans posture idéologique. Le droit pénal doit chercher l'équilibre ente l'intérêt de la société et des victimes, et les droits des mis en cause. Pour faire reculer une justice de sûreté au profit d'une justice de liberté, nous vous invitons à voter ce texte. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Très bien !

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur de la commission des lois .  - La CRPC, créée en 2004, constitue l'essentiel des procédures accélérées destinées à désengorger les juridictions, ce qui ne plaide pas pour son innocence présumée. (Sourires) Je dois avouer quelques états d'âme, tant mes griefs, que je tirais souvent des principes, ont été mis à mal par ce que m'ont dit les praticiens qui se sont révélés bien plus attachés à cette procédure, même lorsqu'ils l'avaient combattue en 2004, que je ne me le figurais.

À l'origine, la CRPC est un emprunt à la common law, voire au plea barguaining états-unien... Outre-Atlantique, elle représente 95 % des procédures, sans doute pour éviter le passage devant des jurés pas spécialement tendres. En France, on ne plaide pas coupable, tout au plus se reconnaît-on coupable.

Cette proposition de loi vise à rapprocher la CRPC du procès ordinaire. Tentons cependant de comprendre pourquoi les praticiens s'y sont finalement ralliés. Pour des raisons pratiques essentiellement. La CRPC, qui représente 13 % du contentieux pénal, portant surtout sur des délits mineurs, un contentieux sans problème de culpabilité, dont l'exemple typique est l'alcool au volant.

Le texte de la commission, tout en respectant les grands équilibres de la CRPC, procède à des aménagements. L'accusé ne doit pas faire l'objet de pressions pour avouer : d'où l'interdiction de recourir à cette procédure après un défèrement. Nous supprimons aussi la possibilité de convoquer concomitamment la personne mise en cause devant le tribunal correctionnel et à l'entretien avec le procureur de la République pour une CRPC. Si le prévenu n'accepte pas la CRPC et si le juge refuse l'homologation, il faudra une nouvelle convocation.

Enfin, la victime pourra faire parvenir ses observations au procureur de la République dans la première phase de la procédure, car elle peut lui fournir des éléments d'appréciation utiles, l'enquête de police étant souvent très succincte.

La commission a supprimé toutes les dispositions qui auraient conduit à une quasi-disparition de la CRPC. Elle vous invite à voter son texte. (Applaudissements)

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - « Celui qui sait avouer peut oublier ». Le grand artiste surréaliste Francis Picabia ne se doutait pas qu'il exprimait ainsi l'esprit de la CRPC. Les travaux de Françoise Tulkens sur la justice imposée ou consensuelle nous incitent à réfléchir. Passer d'une peine imposée à une logique de contractualisation, voilà l'enjeu.

La proposition de loi du RDSE nous invite à jeter un regard critique sur la CRPC et à l'améliorer. La France fut l'un des derniers pays d'Europe à introduire le « plaider-coupable », longtemps étranger aux cultures juridiques continentales, où perdure « un rapport sacré à la loi, où la confrontation de l'individu à la loi est essentielle » comme le souligne le professeur de droit Papadopoulos.

Le Sénat réfléchit au sujet depuis longtemps. Je pense à l'étude de législation comparée, et aux rapports de 2003 et 2005 de M. Zocchetto. Nombreux étaient ceux qui s'interrogeaient sur les risques de pressions à l'encontre des justiciables, notamment les plus vulnérables. D'autres redoutaient une forme de marchandage.

Le choix du législateur français est finalement bien éloigné du « plaider-coupable » à l'américaine, et se rapproche plutôt d'une forme de contrat d'adhésion.

Le risque de voir les puissants protégés par le parquet a été écarté. La CRPC illustre le rôle déterminant du procureur dans la justice pénale : d'où l'importance de revoir son statut, de manière dépassionnée.

Le Gouvernement a demandé à la Chancellerie un bilan provisoire de la CRPC. Les résultats sont rassurants. Votre commission partage notre analyse. Comme le disait George Bernard Shaw : « Le progrès est impossible sans changement, et ceux qui ne peuvent pas changer leur esprit ne peuvent rien changer ».

La montée en charge de la CRPC fut progressive ; elle représente désormais 12 à 13 % des inscriptions au casier judiciaire.

Un autre rapport à la justice pénale peut s'instaurer grâce à la discussion entre le prévenu et les magistrats.

Les faits étant reconnus, le débat ne porte pas sur la culpabilité. Le contentieux routier représente 58 % des affaires concernées, la plupart sans victimes. La CRPC aboutit à des condamnations moins sévères ; les échecs - qui représentent 13 % des affaires - sont dus le plus souvent au défaut de présentation.

Les principales organisations professionnelles de magistrats et d'avocats conviennent que la CRPC n'est pas le plaider-coupable américain. La transplantation ne se fait jamais sans adaptation : l'exemple du jury anglais, introduit en France en 1791, en témoigne.

Selon la Chancellerie, le traitement d'un dossier de CRPC par le greffe prend 70 minutes contre 180 minutes pour un dossier de jugement. Cette procédure contribue donc au désengorgement des juridictions.

Cela n'autorise pas son développement sans limite. Nous gardons en mémoire les mots de Mme Delmas-Marty : « le risque existe que les procédures négociées ne représentent autre chose, à l'heure de la dérégulation, que l'introduction d'une économie de marché dans l'administration de la justice pénale ». Seul le procès dans certains cas est en mesure de jouer son rôle de pacification sociale. Il permet une mise à distance des parties par le rite, si important pour le juriste Antoine Garapon, une reconnaissance publique de l'infraction, une mesure publique de sa gravité, mais aussi une reconnaissance publique de la victime, qui peut ainsi se reconstruire.

La commission a supprimé l'article premier qui restreignait la CRPC aux délits passibles de moins de trois ans d'emprisonnement, et l'excluait dans les cas de récidive. Le Gouvernement approuve ce choix : le quantum de la peine n'est pas le critère le plus approprié, d'autant que les sanctions n'ont fait que s'aggraver ces dernières années avec la multiplication des circonstances aggravantes : un vol dans un distributeur de boissons, commis par deux personnes dans le RER peut valoir dix ans de prison ! De même pour la récidive : dans le contentieux routier, s'il n'y a pas de victimes, la CRPC est utile. Faisons confiance au discernement des magistrats. La CRPC peut être pertinente, car elle autorise un dialogue plus direct et responsabilise mieux le condamné.

Le texte de votre commission améliore substantiellement le droit positif. Il garantit les droits de la défense, énoncés par la CEDH. Le juge voit son rôle d'homologation renforcé : la nouvelle rédaction consacre la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel en 2004.

La CRPC ne pourra intervenir à la suite d'un défèrement : une personne fragilisée par une garde à vue ne peut pas toujours se prononcer en connaissance de cause.

Lorsque le prévenu est simultanément convoqué pour une CRPC et devant le tribunal correctionnel, imposer un délai de dix jours est une bonne chose afin d'éviter toute pression. Le Gouvernement proposera d'imposer au parquet de déposer au greffe sa proposition de peine dix jours à l'avance, afin de favoriser une discussion éclairée et la venue même des intéressés à l'audience. Nous sommes attachés à cet amendement, sans avoir réussi, semble-t-il, à vous convaincre jusqu'ici...

Votre commission souhaite enfin que la victime puisse adresser ses observations au procureur de la République et que le juge puisse refuser l'homologation s'il estime une audience au tribunal justifiée par la situation de la victime.

Le Gouvernement soutient cette proposition de loi qui renforce les droits des personnes. (Applaudissements à gauche et au banc de la commission)

M. Yves Détraigne .  - La proposition de loi du RDSE vise, selon son intitulé, à « réformer » la CRPC, sa rédaction initiale la faisait plutôt disparaître...

Pour sa part, le groupe UDI-UC croit à la pertinence et à l'efficacité de ce type de procédure. Malgré les interrogations légitimes qu'elle a soulevées, la CRPC a rencontré un franc succès : 65 000 affaires pénales en 2012, soit 13 % des poursuites. Ce taux n'a cessé d'augmenter depuis 2005.

Son champ a été étendu en 2011 à tous les délits.

L'objectif est louable : alléger les audiences correctionnelles des affaires simples, pour prononcer des peines plus efficaces.

Les juridictions ont su trouver un usage adapté de cette procédure : c'est ainsi que 58 % des contentieux routiers sont réglés. Elle désengorge nos juridictions tout en apportant une réponse efficace à des délits avérés.

Les exclusions prévues à l'article premier auraient été très préjudiciables ; nous nous félicitons de sa suppression.

Faut-il donner au juge la possibilité de diminuer la peine ? Cela déséquilibrerait les relations entre siège et parquet.

La présence du procureur de la République à l'audience ne nous paraît pas non plus nécessaire : que pourra-t-il dire de plus ?

Il est souhaitable, en revanche, que la victime puisse adresser ses observations au procureur, afin que celui-ci puisse proposer une peine plus adaptée.

Nous voterons donc le texte ainsi amélioré.

Mme Cécile Cukierman .  - La gauche s'était opposée fermement à l'instauration de la CRPC en 2004. Nous avons nous-mêmes déposé une proposition de loi pour la supprimer.

Cette procédure, comme le souligne l'exposé des motifs de la proposition de loi, laisse de trop larges pouvoirs au procureur, dont l'indépendance est contestée, et va à l'encontre du principe de séparation des autorités de poursuite et de jugement. Le prévenu et l'avocat n'ont qu'une très faible marge de manoeuvre.

Si l'article 495-8-4 du code de procédure pénale semble être un rempart, l'avocat, dans la pratique, constitue plutôt un alibi. La profession dénonce le peu de temps dont elle dispose pour préparer la défense des prévenus. On comprend donc l'intérêt d'un procès, lequel implique une publicité des débats contrairement à la CRPC - d'ailleurs, certains prévenus ont intérêt à ne pas voir leurs actes délictuels rendus publics.

Enfin, la CRPC, à l'utilisation variable selon l'engorgement des tribunaux, aboutit à une inégalité de traitement entre justiciables.

La commission des lois a mené un travail intéressant. Elle a voulu atténuer les pressions pesant sur les personnes mises en cause en rendant caduque la convocation concomitante à l'audience correctionnelle si le prévenu s'est présenté devant le procureur, et en interdisant la CRPC en cas de défèrement. De fait, si la garde à vue a été réformée, ce n'est pas suffisant : la privation de liberté demeure et fait obstacle à un choix éclairé.

Ensuite, le texte a précisé le pouvoir d'homologation du président du tribunal, suivant en cela les réserves d'interprétation du Conseil constitutionnel dans sa décision du 2 mars 2004. Reste que la CRPC, qui déplace la décision du siège au parquet, est trop souvent utilisée à seule fin de gérer le flux au sein des juridictions, et non en fonction de la nature des faits ou de la personnalité du prévenu ; les syndicats de magistrats auditionnés l'ont souligné. D'autres solutions existent : augmenter le budget de la justice, et dépénaliser certains contentieux comme le contentieux routier. En attendant, le groupe CRC votera ce texte. (Applaudissements à gauche et au centre)

Mme Virginie Klès .  - Après avoir failli débattre de la mise à mort de la CRPC, ou peu s'en faut, nous discutons d'un texte lui apportant d'utiles ajustements. Créée en 2004, cette procédure a été d'emblée critiquée. Pour les élus de gauche, il semblait que la présomption d'innocence était bafouée par la reconnaissance préalable de culpabilité, que le principe du contradictoire était mis à mal, de même que celui de la publicité des débats.

Finalement, la sagesse de la justice et des magistrats a inscrit cette procédure dans notre droit de manière très raisonnée. Et notre rapporteur a changé son fusil d'épaule pour améliorer par petites touches la CRPC, je lui rends hommage. Le champ d'application de la procédure - qui concerne 65 000 affaires par an, 10 % ou 15 % des décisions n'étant pas homologuées par le juge - ne changera pas ; finalement, le seuil de peine ne changera pas - et s'il en est ainsi, c'est que l'échelle des peines et devenue incohérente ; il faudra la toiletter.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Voire plus !

Mme Virginie Klès.  - Les droits de la défense ont été améliorés : l'avocat pourra assister son client lors de l'entretien avec le procureur de la République et s'entretenir avec lui hors la présence de ce dernier.

La pression pesant sur le prévenu sera allégée du fait de la modification du jeu des convocations. En revanche, monsieur le ministre, demander au procureur de la République de déposer la proposition de peine au greffe dix jours avant l'audience la renforcera.

Les droits des victimes n'ont pas été oubliés : elles pourront adresser leurs observations au procureur de la République dès la première phase de la procédure. La commission a en outre préféré ne pas donner au juge la possibilité de revoir la peine à la baisse ; à cet égard, un équilibre a été atteint.

Je rends hommage au rapporteur, qui a su convaincre tous ceux qui étaient vent debout contre la CRPC que cette procédure était utile. Le groupe socialiste votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Hélène Lipietz .  - S'agit-il d'un renoncement ? Comme d'autres, j'ai eu le plaisir de convaincre mon groupe de l'intérêt de ce texte. Ce n'était pas évident tant la procédure répondant au nom barbare de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité et au charmant diminutif de CRPC paraît étrangère à notre tradition juridique - certains y voyaient un clone du plaider-coupable américain.

Nous nous sommes ralliés, d'audition en audition, aux arguments des magistrats qui ont eu la sagesse de circonscrire le champ d'application de cette procédure. Nous approuvons le travail de la commission, dont le texte corrige certains défauts de la procédure. En revanche, était-ce le bon véhicule pour revoir la place des victimes dans notre droit ? Dans le droit pénal français, c'est le ministère public qui poursuit. Il y a là toute une philosophie : l'État s'interpose entre les citoyens pour éviter qu'ils se fassent justice eux-mêmes. La loi du talion était déjà une tentative de borner la vengeance privée... La réponse doit être proportionnée ; disant cela, je pense à toutes les victimes que j'ai défendues, qui veulent que leur voix soit entendue et leur place reconnue.

Cela étant dit, le groupe écologiste votera le texte. (Applaudissements à gauche et au centre)

M. Jean-Jacques Hyest .  - Le ministre, que j'ai toujours plaisir à entendre, a changé de ligne depuis 2004. Comme quoi, on peut évoluer... J'avais été impressionné en 2004 par les diatribes sur ce que l'on appelait un emprunt au système américain, contraire à notre tradition... Cet argument ne tient pas : nous sommes loin du plea bargaining, la CEDH l'a confirmé. D'ailleurs, le Conseil constitutionnel, s'il a émis des réserves auxquelles nous devons être attentifs, n'a pas censuré la loi du 9 mars 2004. Les magistrats, qui lui étaient extrêmement hostiles, y sont désormais attachés. La CRPC s'est adaptée à notre droit : elle est cantonnée au contentieux de masse ; elle a même été étendue à tous les délits en 2011 par un amendement de M. Détraigne, sous réserve de ceux visés aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal punis d'une peine de plus de cinq ans d'emprisonnement. En réalité, ce n'est pas le quantum de la peine qui importe, mais la nature du contentieux.

J'ajoute, madame Klès, que nous avions pesé au trébuchet le quantum des peines lors de la grande réforme de notre droit pénal. Les gouvernements successifs se sont acharnés, ensuite, à défaire ce travail. Il faudra un jour y faire le ménage...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Un grand ménage !

M. Jean-Jacques Hyest.  - La CRPC, cela a été dit, représente 15 % du contentieux pénal depuis 2009 ; elle n'est pas homologuée dans 12 % des cas seulement. Il n'y a pas lieu de la restreindre. Des garanties sérieuses sont apportées, au rang desquelles la présence de l'avocat, la publicité de l'audience d'homologation et l'examen des éléments du dossier par le président du TGI. Et il est bon d'inscrire dans la loi les réserves du Conseil constitutionnel sur le pouvoir d'homologation du juge, ainsi qu'un renforcement du droit des victimes.

Si nous n'aurions pas voté le texte initial, nous ne ferons pas obstacle à la version raisonnable que propose la commission des lois. Elle améliore l'administration de la justice - elle n'est pas seulement comptable, n'est-ce pas monsieur le ministre, après tout, le droit à un procès équitable, c'est aussi le droit à ce que les procédures ne s'éternisent pas.

Pour finir, tout cela nous ramène au sempiternel débat sur le statut du parquet et la réforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Qu'on prévoie l'avis conforme du CSM, et seulement cela, et un consensus pourra être trouvé au Parlement... (Applaudissements à droite)

M. Jacques Mézard .  - J'ai toujours plaisir à dialoguer avec vous, monsieur le ministre. Mais une fois de plus, aucun ministre en charge du dossier n'est là pour débattre avec le groupe du RDSE... Nous avons malheureusement pris l'habitude de cette absence de considération...

Certains intervenants n'ont pas changé d'avis depuis dix ans. M. Hyest en est, moi aussi : j'émets toujours les mêmes réserves à l'égard de la CRPC. Le ministre, comme sur l'interdiction du cumul des mandats, prêche avec le zèle du nouveau converti...

Pourquoi sommes-nous contre cette procédure ? Son utilité consiste à évacuer les dossiers quatre ou cinq fois plus vite que ne peut le faire le tribunal correctionnel. Et puis, nous sommes un pays de droit latin... La CRPC, c'est la distribution des peines. « Reconnaissez votre culpabilité, acceptez la CRPC, et cela se passera bien. Sinon, vous irez devant le tribunal correctionnel et la sanction risque d'être plus lourde ». Voilà le discours qu'on tient aux prévenus ; cette réalité, je l'ai vécue sur le terrain. Dans la pratique, les tribunaux, il est vrai, ont circonscrit le recours à cette procédure aux seuls cas où la culpabilité ne fait pas doute. Mais il suffit d'une volonté politique, et la CRPC sera utilisée différemment qu'elle ne l'est aujourd'hui ; il y aura alors danger. Ce n'est pas le cas, dont acte. Et nos magistrats sont respectueux de la République et des droits de la défense.

Le rapporteur, et il a eu raison, s'est employé à rogner les ailes de ma proposition de loi.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Le RDSE est pluraliste !

M. Jacques Mézard.  - Ce qui n'est pas le cas de tous les groupes...

Il fallait renforcer les droits de la défense, mais nous aurions dû nous pencher sur notre échelle des peines, qui est devenue totalement incompréhensible aux yeux des Français. Ces dernières années, certaines infractions économiques, semble-t-il, ont été sciemment écartées des tribunaux. Ce n'est pas un progrès pour notre démocratie.

Le groupe RDSE, avec ce texte, a prouvé son attachement aux libertés publiques et sa grande vigilance en attendant l'ambitieux projet de loi que nous présentera la garde des sceaux dans quelque temps - si toutefois elle daigne venir au Sénat. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et socialiste)

M. Philippe Kaltenbach .  - Beaucoup ont su faire évoluer leur position, magistrats, avocats, élus, si ce n'est M. Mézard sans doute, car la CRPC a démontré son utilité dans de nombreux contentieux. Avec 65 000 procédures, elle représente 13 % du contentieux ; en cela, elle contribue à désengorger nos tribunaux.

Le rapporteur a modifié sa position après avoir écouté les uns et les autres. Il propose d'améliorer la CRPC, de mieux l'encadrer, sans remettre en cause son équilibre. Il est bon de renforcer les droits des victimes ; je ne comprends pas l'interprétation de Mme Lipietz, il ne s'agit pas de revenir à la loi du talion. La victime pourra désormais adresser ses observations au procureur de la République dans la première phase. Je proposerai d'aller plus loin, malgré l'avis défavorable de la commission, en prévoyant que la victime puisse être entendue par le procureur dans la première phase. Donner à la victime la possibilité d'être écoutée, entendue, reconnue sera toujours un progrès. Tel est le sens de l'amendement que je vous soumettrai. Le groupe socialiste apportera évidemment son soutien à ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur .  - Merci à tous de leurs interventions. Quelques observations. On ne s'y retrouve plus aujourd'hui dans l'échelle des peines ; raison pour laquelle il eût été inutile de tenter de limiter l'usage de la CRPC par leur quantum... Si cette procédure a réussi, c'est qu'elle a été cantonnée à certaines catégories de délits. Notre système, signe de bonne santé, s'est autorégulé. En outre, avec la judiciarisation de notre vie sociale, la frontière est devenue floue entre les délits classiques et ceux qui ont une fonction de régulation sociale, ce qui nous renvoie aux pouvoirs confiés au Ciel dans la Chine classique. La CRPC est utile, appliquée à un champ donné ; l'étendre serait, en revanche, dangereux.

M. Alain Vidalies, ministre délégué .  - Léon Blum disait qu'en politique, on n'a qu'un choix...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Se répéter ou se contredire !

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - En effet. Mais il y a des exceptions... En 2004, des objections de principe ont été opposées à l'instauration de la CRPC ; elles peuvent subsister pour certaines et avec elles un devoir de vigilance. Mais il faut aussi faire preuve de réalisme. D'ailleurs, les craintes alors exprimées se sont révélées infondées : la CRPC est bien utilisée, et elle fait désormais l'objet d'un large consensus au sein de votre assemblée.

Monsieur Mézard, la vérité est que la garde des sceaux a passé son lundi au Sénat pour parler de la géolocalisation, son mardi pour débattre du Contrôleur des lieux de privation de liberté... Elle n'a pu être présente ce matin ; cette séance avait d'ailleurs été programmée à un autre moment. Rassurez-vous, vous aurez beaucoup d'autres occasions de débattre avec elle...

Nous avons une divergence d'interprétation sur l'amendement que présente le Gouvernement. Pour lui, le dépôt de la proposition de peine au greffe par le parquet ne va pas à l'encontre du renforcement des droits des justiciables. Il faudra aussi s'intéresser à la répartition géographique de l'usage de la CRPC, en droit pénal, ce ne peut pas être au petit bonheur la chance.

Le management de la justice, comme on dit aujourd'hui, est aussi une question de rapidité. Les justiciables eux-mêmes le demandent. Vient un moment où il faut sanctionner. En vérité, il y a une forme d'humanité dans cette procédure qui est vécue, non pas comme une échappatoire, mais comme une réponse juste à une infraction donnée.

Nous ferons vivre ce texte, en l'inscrivant dans l'ordre du jour réservé au Gouvernement s'il le faut ; le Gouvernement prend toute sa part dans ce débat.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier demeure supprimé.

L'article premier bis est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 495-7 du code de procédure pénale, il est inséré un article 495-7-1 ainsi rédigé :

« Art. 495-7-1. - La convocation établie en application de l'article précédent indique que la personne pourra, au moins dix jours avant sa comparution devant le Procureur de la République, consulter par l'intermédiaire de son avocat le dossier de la procédure, dans lequel figurera la proposition de peine envisagée. Elle précise également que la personne doit se faire assister d'un avocat et qu'elle peut à cet effet demander la désignation d'un avocat commis d'office. »

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Nous proposons que le dossier de la procédure comprenne désormais la proposition de peine que le procureur de la République envisage de faire au prévenu, et ce au moins dix jours avant la date de comparution. On peut soutenir que cela atténue les droits de la défense en bloquant le dialogue ou, à l'inverse, que cela les renforce puisque le prévenu et son avocat pourront mieux préparer l'audience.

Un prévenu, quand il reçoit sa convocation, se précipite sur Internet pour lire le code pénal ; vu la peine encourue, il pense n'avoir plus qu'à fuir, à liquider ses avoirs, que sais-je à rédiger son testament. (Sourires) Dix ans pour s'en être pris à un distributeur de canettes de coca dans le métro ! Ce rapport à la procédure est extrêmement anxiogène, expliquer à l'intéressé, affolé, qu'il ne s'agit que d'un quantum est souvent l'essentiel du travail de l'avocat. Finalement, faire figurer la proposition de peine dans le dossier de procédure revient à appliquer le principe d'individualisation de la peine.

Là où cela se pratique déjà, les choses se passent bien.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - Je suis mortifié de devoir donner un avis défavorable à une proposition du Gouvernement...

Que le quantum soit plus élevé que la sanction réellement encourue, cela vaut pour toutes les procédures... La cheville ouvrière de la CRPC, c'est le procureur de la République. Il doit pouvoir proposer la peine la plus appropriée. D'où la nécessité, pour lui, de recueillir les observations de la victime. Pensez par exemple aux affaires de harcèlement. D'où l'importance aussi de rencontrer le prévenu. Avec cet amendement, le procureur s'engagerait sur une peine avant de disposer de tous les éléments nécessaires. Pour le coup, on entre dans une logique de marchandage : « j'ai gagné deux ans ! ».

Laissons au procureur la responsabilité de ces décisions.

M. Jean-Jacques Hyest.  - J'admire l'habileté du ministre pour justifier ce qui... Comment le procureur pourrait-il décider de la peine avant même d'avoir vu le prévenu ? Franchement, cela priverait la procédure de son efficacité et d'une partie de sa justification. Ou alors, il faudrait deux audiences, mais cela ferait perdre à cette procédure l'essentiel de son intérêt.

Je ne voterai donc pas l'amendement. Il faudrait que je puisse le sous-amender pour retirer cette mention, en gardant l'idée que le prévenu doit tout de même être informé de ses droits.

M. le président.  - C'est impossible, les explications de vote ayant commencé. La seule possibilité serait que le Gouvernement accepte de rectifier son amendement.

Mme Virginie Klès.  - Rassurer le prévenu pour qu'il se présente à la convocation, c'est précisément le rôle de l'avocat. Quant à la victime, elle ne doit pas avoir le sentiment, vu la force de l'écrit, que les choses sont déjà tranchées. Avec cet amendement, on casse la logique de la CRPC.

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi.  - Le droit à se faire assister d'un avocat est déjà rappelé par la convocation. À cet égard, l'amendement n'apporte rien. En revanche, il parait inopportun que le procureur de la République se prononce d'emblée sur la peine, car il doit disposer d'éléments sur la personnalité du prévenu.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Certes, la rencontre est importante. Mais l'amendement vise à rassurer les prévenus. Le débat n'est pas clos. Ayant entendu vos arguments, je retire l'amendement.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Merci pour cette écoute.

L'amendement n°12 est retiré.

L'article 2 est adopté.

ARTICLE 3

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, première phrase

Remplacer le mot :

celles-ci

par les mots :

ces peines

Mme Hélène Lipietz.  - La rédaction actuelle est ambiguë.

L'amendement n°3 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, seconde phrase

Supprimer le mot :

ordinaire

Mme Hélène Lipietz.  - On ne peut modifier le statut de la victime au sein de notre droit pénal au détour de ce texte. Vous ne m'avez pas comprise, monsieur Kaltenbach. Pour moi, la loi du talion a constitué un progrès en assignant une limite à la peine, afin d'éteindre le désir de vengeance. Je ne crois pas que les victimes recherchent toujours la vengeance. Elles sont plutôt en quête de reconnaissance et de compréhension de ce qui leur est arrivé.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement devenu rédactionnel après qu'il a été longuement débattu en commission et rectifié.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Sagesse.

L'amendement n°4 rectifié est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La dernière phrase du second alinéa de l'article 495-9 du code de procédure pénale est complétée par les mots : « à compter de la comparution devant le procureur ».

Mme Hélène Lipietz.  - Précisons à partir de quel moment court le délai mentionné à l'article 495-9 du code de procédure pénale. Le sous-amendement du Gouvernement corrige utilement une erreur rédactionnelle.

M. le président.  - Sous-amendement n°13 à l'amendement n°6 de Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, présenté par le Gouvernement.

Amendement n° 6, alinéa 3

Remplacer les mots :

dernière phrase du second

par les mots :

seconde phrase du premier

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Ce délai est prévu non par le second alinéa du texte mais par le premier. Avis favorable à l'amendement ainsi sous-amendé.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - Cet excellent amendement est ainsi rendu encore plus excellent. (Sourires)

Le sous-amendement n°13 est adopté.

L'amendement n°6, modifié, est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Kaltenbach.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase de l'article 495-13 du code de procédure pénale, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Elle est entendue, à sa demande, accompagnée le cas échéant de son avocat, par le procureur de la République avant que celui-ci ne propose à l'auteur des faits d'exécuter une ou plusieurs peines encourues. »

M. Philippe Kaltenbach.  - Cet amendement traduit l'une des propositions du rapport que j'ai rédigé avec M. Béchu. Les procédures rapides de jugement, si elles accélèrent les délais de traitement des affaires, présentent le risque d'écarter la victime du procès pénal.

Je propose d'aménager la procédure de CRPC afin d'autoriser la victime à être entendue par le procureur de la République lors de la première phase de la procédure, si elle en fait la demande. En revanche, il n'est sans doute pas opportun qu'elle assiste à l'intégralité de l'entretien entre le procureur de la République, l'auteur des faits et son avocat. D'ailleurs, l'amendement ne précise pas si la victime doit être entendue en même temps que l'auteur des faits ou séparément : il convient de laisser au procureur de la République le soin d'en apprécier l'opportunité.

En outre, cet amendement donne au procureur de la République la connaissance d'éléments qui n'auraient pas été relevés dans l'enquête de police. Il y a peu de risques que les victimes se précipitent, s'agissant d'affaires de faible gravité. J'insiste donc, malgré mon peu de succès en commission.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - La victime peut être présente lors de l'audience d'homologation. Elle pourra adresser ses observations au procureur. Ne transformons pas la rencontre entre le procureur et le prévenu en une confrontation de celui-ci avec la victime. Aider les victimes, très bien, mais le but d'un procès est de juger. Et qui juge-t-on ? Le prévenu. N'oublions pas qu'il s'agit de délits mineurs. La CRPC leur apporte une réponse rapide, en respectant les droits des parties.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Nos concitoyens seraient bien surpris en lisant une étude de droit comparé sur le droit des victimes. Contrairement à ce qu'ils croient, la France est loin d'être arriérée en la matière.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Ailleurs, il n'y a pas de partie civile !

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - En effet. Dans tous les pays, c'est la société qui poursuit, mais la France admet en outre que la victime peut se constituer partie civile. Il faudrait sans doute éclairer les médias là-dessus.

L'amendement serait disproportionné, vu la nature des infractions. Il mettrait en danger la procédure elle-même. Avis défavorable.

Mme Hélène Lipietz.  - Sans misérabilisme, je suis consciente de la nécessité de revoir la place des victimes dans notre procédure pénale. Mais la réflexion doit être globale. Avec de tels amendements, il y aurait trois sortes de victimes : les unes auraient la chance de pouvoir exprimer leur ressenti lors d'une audience publique ; d'autres pourraient aller le dire au procureur ; d'autres enfin, seraient confrontées à un classement sans suite, sans pouvoir s'exprimer à aucun moment. Dans le cadre de cette proposition de loi, je ne voterai donc pas l'amendement.

M. Stéphane Mazars, auteur de la proposition de loi.  - Le texte donne déjà à la victime le droit d'adresser des observations au procureur. Elle a un rôle à jouer à l'audience, où elle peut faire valoir des droits à réparation. L'amendement alourdirait la procédure, et s'éloigne de son esprit même.

Mme Virginie Klès.  - En effet, le texte donne à la victime un droit à se faire entendre. Il est aberrant d'obliger le procureur à l'entendre ; il lui revient de le décider s'il le souhaite.

M. Yves Détraigne.  - Nous sommes là pour améliorer la procédure de CRPC, non pour l'alourdir.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

L'article 3 bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

Après l'article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa de l'article 495-14 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Lorsque la personne n'a pas accepté la ou les peines proposées ou lorsque le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui n'a pas homologué la proposition du procureur de la République, le dossier est expurgé de toutes les pièces relevant spécifiquement de la procédure mentionnée aux articles 495-8 à 495-13 avant d'être transmis à la juridiction d'instruction ou de jugement, et ni le ministère public ni les parties ne peuvent faire état devant cette juridiction des déclarations faites ou des documents remis au cours de cette procédure. »

Mme Hélène Lipietz.  - Un prévenu peut craindre que son refus de se soumettre à une CRPC n'influence la décision du tribunal. Je croyais le code de procédure pénale assez protecteur mais, assistant à une audience, j'ai entendu le président du tribunal faire état de l'échec d'une CRPC. D'où cet amendement.

Je sais bien que, dans les petits tribunaux, tout se sait... Mais pour éviter toute pression, il faudrait aussi que le dossier ne mentionne pas la proposition de CRPC.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - En l'état actuel du droit, le procès-verbal ne peut être transmis, et il ne peut être fait état de l'échec d'une CRPC devant le tribunal. Vous êtes donc satisfaite. D'ailleurs, le verbe « expurger » est bizarre en droit pénal... Comment voulez-vous que les choses ne se sachent pas dans un tribunal ? Avis défavorable.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - L'article 495-14 répond déjà aux préoccupations de Mme Lipietz. Avec son amendement, l'existence même de la CRPC ne figurerait pas au dossier. Or la transparence est un fondement de notre droit pénal. La CRPC n'est pas une procédure cachée. Imaginez qu'une victime apprenne après coup que cette procédure a été tentée ! Avis défavorable.

Mme Hélène Lipietz.  - Mon amendement reprend l'article 495-14. Lorsque la CRPC réussit, la chose est publique. Je n'ai fait que prévoir l'expurgation des pièces relatives à la CRPC.

Mme Virginie Klès.  - Si l'on ne dispose plus des pièces, on pourra dire n'importe quoi sans vérification possible... Si la loi n'est pas respectée, charge à l'avocat de faire valoir les droits de son client.

M. Stéphane Mazars.  - Il faut, en effet, préserver les pièces montrant pourquoi la procédure a échoué. Le reste n'a aucun intérêt.

Mme Hélène Lipietz.  - Je m'incline.

L'amendement n°14 est retiré.

ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, première phrase

Supprimer les mots :

devant lui

L'amendement rédactionnel n°7, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

lui faire remettre

par les mots :

y joindre

L'amendement rédactionnel n°8 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, deuxième phrase

Supprimer les mots :

à la convocation

L'amendement rédactionnel n°9, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2, dernière phrase

Après les mots :

au moins dix jours

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

après la date de comparution devant le procureur.

L'amendement rédactionnel n°11 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

L'article 5 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Jacques Hyest .  - Nous étions partis d'une réforme de la CRPC. Nous avons finalement procédé à quelques aménagements utiles en tenant compte des réserves d'interprétation du Conseil constitutionnel et de la pratique. La CRPC n'est pas la seule alternative au procès : il y a aussi la composition pénale. Chacun reconnaît qu'elle a sa place dans notre système judiciaire. Elle fait gagner du temps, elle diminue la pression, elle responsabilise le prévenu.

Grâce au Sénat, un bilan a été fait au bout de dix ans, à la suite de quoi on a modifié la loi. Bien souvent, on procède à rebours...

Le groupe UMP votera ce texte.

Mme Cécile Cukierman .  - Nous aussi voterons cette proposition de loi, telle que modifiée par nos débats, malgré nos réserves de principe à l'encontre de la CRPC. Comme l'a dit M. Hyest, la justice doit être rendue rapidement, mais la CRPC ne doit pas servir à la gestion des flux.

Mme Hélène Lipietz .  - Le texte nous a obligés à réfléchir, à surmonter certains préjugés, bien que je craigne encore les pressions exercées sur les prévenus. Merci d'avoir accepté mes amendements rédactionnels, qui m'ont été inspirés par le professeur Jacques-Henri Robert. Je tenais à lui rendre hommage : c'est lui qui m'a donné le goût du droit pénal.

Mme Virginie Klès .  - La CRPC est utilisée à bon escient et nous veillerons à ce qu'elle le demeure. Le groupe socialiste votera ce texte.

La proposition de loi est adoptée à l'unanimité.

(Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

Débat sur l'avenir de la production d'énergie

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat sur la production énergétique en France : avenir de la filière du nucléaire et nouvelles filières de production d'énergie, à la demande du groupe RDSE.

Rappel au Règlement

M. Ladislas Poniatowski .  - Compte tenu de l'organisation des débats, l'opposition ne pourra s'exprimer, surtout si le ministre profite de sa liberté de s'exprimer quand il le souhaite... (M. Alain Vidalies, ministre, s'en défend) Quel exemple donnons-nous ? Le Sénat a fait l'objet d'articles plutôt désagréables ces dernières semaines. À moins que les orateurs de la majorité n'acceptent de nous faire place ?

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Nous nous sommes trouvés dans la même situation. L'ordre du jour des niches est fixé librement par les groupes. Quant à l'ordre des tours de parole, il est fixé par une règle qui s'applique à tous. Le groupe UMP parlera quand ce débat sera réinscrit à l'ordre du jour, lors d'une prochaine niche.

Le président Bel va réunir les membres du Bureau et de la Conférence des présidents pour réfléchir à une évolution des règles.

M. Jean Bizet.  - Ce débat est tronqué !

M. Jacques Mézard.  - Je comprends parfaitement les observations de M. Poniatowski ; je ne crois pas que nous ayons de grandes divergences de vues sur l'énergie avec l'UMP.

Pour sa part, le groupe RDSE est prêt à renoncer à son intervention en troisième position, il ne peut pas faire plus. Ce matin, on a appris que Fessenheim serait fermée en 2016, ce débat tombe à pic.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Philippe Martin, retenu à l'Assemblée nationale. J'en avais averti à l'avance le Sénat. Quant à l'organisation de vos travaux, le Gouvernement n'y peut rien : il sera lui-même privé de la possibilité de s'exprimer faute de temps mais l'aurait-il eue, qu'il ne l'aurait pas utilisée...

Orateurs inscrits

M. Stéphane Mazars, au nom du groupe RDSE .  - Mon groupe veille à susciter, à chaque fois qu'il le peut, un débat sur la production énergétique en France. C'est la troisième fois en un an.

Parce que l'énergie participe au bien-être des citoyens, la question ne peut être laissée aux seuls experts. Chacun a conscience de la raréfaction des ressources, notre facture énergétique s'élève à 70 milliards d'euros, soit le montant de notre déficit extérieur. Les trois quarts sont dus aux énergies fossiles. Nous devons tendre à un nouveau modèle plus économe, après les travaux du Groupe international d'experts sur le climat (GIEC). Dans ces circonstances, assurer notre souveraineté énergétique est plus que jamais nécessaire, en s'appuyant sur les deux filières du nucléaire et des énergies renouvelables (EnR) - la transition énergétique, voilà l'enjeu.

Ce qui est certain est que nous ne pouvons pas nous priver de l'avantage compétitif de l'énergie nucléaire. Nous devons le préserver pour nos entreprises et par respect de nos engagements de baisse de réduction des gaz à effet de serre.

Globalement, nous avons respecté le paquet énergie-climat qui fixe pour objectifs en 2020 : 20 % de réduction d'émission de gaz à effet de serre, 20 % d'EnR et 20 % d'économies d'énergies.

La Cour des comptes montre toutefois, dans un récent rapport, que nous n'atteindrons pas l'objectif en 2020. La part des EnR est passée de 9,6 % en 2005 à 13,1 % en 2012. Et les magistrats de proposer des pistes.

Dans les futures décisions et lors du prochain projet de loi sur la transition énergétique, veillons à ne pas répéter les erreurs du passé. Je pense, en particulier, à la politique tarifaire incohérente sur le photovoltaïque.

Dans cette transition, les collectivités territoriales sont les mieux à même de monter des projets opérationnels, au plus près du terrain, en liant traitement des déchets et réseaux de chaleur. Comment faire ? Les normes ont un rôle à jouer, dans le secteur du bâtiment. Le retard pris dans la publication de certains décrets est inacceptable. Autres outils, la tarification - inspirons-nous de l'exemple allemand sur le mix énergétique - et la fiscalité - sur le prix du gazole ou encore sur le photovoltaïque où la politique a été malheureusement erratique.

Le chantier de la transition énergétique est majeur ; nous devons faire preuve de volontarisme. Le débat national sur la transition énergétique a eu le mérite de dégager un consensus ; la préparation de la prochaine Conférence internationale sur le climat en 2015 à Paris doit être une occasion à saisir pour faire de la France un pays exemplaire. (Applaudissements sur les bancs du RDSE)

Mme Cécile Cukierman .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Mireille Schurch, qui a dû nous quitter.

Sur ce débat, il n'est pas inutile de clarifier la position de chacun. En 2011, le Sénat de gauche votait une proposition de résolution proposée par le groupe CRC. Celle-ci affirmait que « les activités de production, de transport et de commercialisation doivent être entièrement publiques et placées sous l'autorité d'un pôle public associant tous les acteurs ». Trois ans après, rien n'a été fait pour abroger les lois de dérégulation prises auparavant.

Parler de la production énergétique, c'est aussi parler des réseaux de transport ou encore de distribution.

C'est surtout dire que l'énergie n'est pas un bien comme les autres ; le mythe de la concurrence libre et non faussée a fait long feu. Compte tenu des travaux du GIEC sur le réchauffement climatique, nous ne pouvons pas nous passer d'un nucléaire sécurisé ; l'électricité produite par les EnR ne lui est pas substituable, en raison des difficultés de stockage. L'hydraulique joue un rôle important, nous nous élevons contre l'ouverture à la concurrence pour les concessions hydrauliques. Développons une filière technique pour le photovoltaïque et l'éolien au lieu d'importer des panneaux de Chine, ce qui ne diminue pas nos émissions de gaz à effet de serre. Cela créera des emplois.

Si nous ne pouvons pas nous passer de l'énergie nucléaire, elle comporte des risques incommensurables : l'accident et les déchets. Renforçons la sécurité et la participation du public.

Il nous faut donc changer de cap pour élaborer un vrai projet national et européen sur l'énergie, un projet politique et non comptable au service des peuples et non des marchés.

M. Roland Courteau .  - Lors du dernier congrès mondial sur l'énergie, un expert estimait que le monde devait investir 30 000 milliards d'euros en vingt ans pour subvenir aux besoins énergétiques d'une population en expansion. L'Ademe estimait que la transition énergétique pourrait créer 825 000 emplois d'ici 2050. Les retombées économiques seront au rendez-vous. La France a des atouts : de grandes entreprises, un territoire relativement vaste, des ressources naturelles appréciables en ce qui concerne la biomasse et les énergies marines. Pour en tirer parti, il faut faire en sorte que le tissu d'entreprises de taille intermédiaire (ETI) bénéficie de relations équitables avec les grands groupes et puisse s'appuyer sur une stratégie nationale.

Dans ce secteur dont le marché ne peut assurer à lui seul la régulation, l'État doit impulser, mettre en place des coopérations. Ces dernières, limitées sur le nucléaire avec l'Allemagne, sont plus prometteuses pour les EnR.

La cause serait perdue pour le photovoltaïque, à cause de la division du travail international, qui verrait l'Europe confinée à l'installation des panneaux tandis que l'Asie fournirait les modules. Je ne le crois pas : des projets sont à faire sur les panneaux, Thomson annonce un futur module composé à 95 % de composants européens. Nous y gagnerions en souveraineté énergétique et en emplois.

L'électricité nucléaire pas plus que les EnR ne peuvent répondre à elles seules aux besoins. La réponse idéale passe par le stockage.

Les stations de pompage n'ont pas trouvé leur modèle, mais a-t-on exploré toutes les pistes ?

La France dispose du potentiel technologique pour créer une filière de l'hydrogène, l'OPECST l'a rappelé dans un récent rapport.

L'Allemagne et la Corée l'exploitent : la première expérimente la méthanation, à ne pas confondre avec la méthanisation.

Les filières d'EnR ne se développeront que si elles disposent d'un encadrement adéquat. Or le cadre réglementaire est perçu comme trop instable. L'accompagnement doit donc faire l'objet d'une attention particulière.

Les entreprises allemandes bénéficient de conditions favorables de refinancement par la banque KfW. Faisons de même : la BPI doit devenir la banque de la transition énergétique.

Pour finir, le président de la République a parlé d'« Airbus de la transition énergétique ». Prenons cette expression au sens littéral : l'Airbus devra lui aussi faire sa transition et peut-être, un jour, voler avec du carburant provenant à 100 % d'éléments renouvelables. C'est cela aussi la transition énergétique : réussir à faire évoluer l'existant ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Ladislas Poniatowski .  - Merci à Jacques Mézard, et tout particulièrement à Jean-Claude Requier : il se trouve que nous séchons tous les deux une réunion de la FNCCR ce matin.

On se perd souvent dans les dédales techniques pour oublier le seul impératif qui vaille : réduire notre consommation d'énergies fossiles. Sans anticiper sur la proposition de résolution que le groupe UMP défendra le 26 février, abordons la question essentielle : quel mix énergétique ? Difficile d'y répondre en une heure.

Les EnR forment un ensemble de production très disparate : certaines sont coûteuses, d'autres non ; certaines émettent des gaz à effet de serre, d'autres moins. Commençons par le biogaz : il ne doit pas concurrencer les biocarburants. Surtout, il émet de nombreux polluants. Pour mémoire, il représente 1 % de notre production pour 6 TWh.

La géothermie a connu des progrès significatifs et pourrait être développée notamment en Alsace et en région parisienne. Mais les forages profonds, les plus efficaces, sont coûteux et provoquent des risques sismiques.

L'éolien et le solaire, eux, sont renouvelables mais coûteux : entre 6 et 12,5 centimes par KWh pour le premier, entre 12 et 25 centimes pour le second.

Cela dit, ces énergies sont intéressantes car le potentiel est énorme et les nouvelles technologies réduisent les coûts. Mais pour produire 15 % d'électricité d'origine éolienne, il faudrait installer 20 000 éoliennes sur le territoire. Les Français y sont-ils prêts ?

Que reste-t-il ? Le nucléaire. J'entends les arguments contre ; à moyen terme, c'est pourtant une nécessité. Ceux qui font fi du coût réduit de l'énergie nucléaire, des emplois qu'elle crée, de son incidence positive sur notre balance commerciale et de son rôle de vitrine technologique se trompent. Le président de la République, pour paraître écolo-compatible et peut-être faire plaisir à un voisin, a annoncé la fermeture de Fessenheim en 2016. Vous l'avez compris, le groupe UMP y est hostile. Cette décision appartient aux experts, comme l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), non aux politiques. Faisons-leur confiance ! Quant à réduire la part du nucléaire de 75 à 50 % d'ici 2030, nous y sommes encore plus hostiles : c'est technologiquement et économiquement impossible. Les Français ne veulent pas voir doubler leur facture d'électricité.

Ne renonçons pas au nucléaire, pas plus qu'aux EnR. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Ronan Dantec .  - Merci aux collègues encore présents pour ce débat.

M. Jean Bizet.  - Il n'y a pas de débat !

M. Ronan Dantec.  - Les écologistes se réjouissent toujours de discuter d'énergie. Nous soutenons les objectifs fixés par le président de la République, nous allons enfin sortir du tout nucléaire, de cette absurdité économique et écologique manifeste. Le prix du MWh de l'EPR installé en Angleterre sera de 100 euros contre 80 euros pour l'éolien terrestre, et 90 euros pour le photovoltaïque. Et je ne dis rien du MWh de Flamanville dont le coût du chantier est passé de 3 à 8,5 milliards, et ce n'est pas fini, pas plus qu'en Finlande !

Le nucléaire concentre encore la majeure partie des crédits destinés à la recherche sur les énergies, autant de retard pris pour les EnR. Finissons-en avec le leurre de cette énergie à bas coût pour remettre en ordre nos investissements et les diriger vers les EnR comme le font les Allemands.

Je ne reviens pas sur le gaz de schiste, le président d'Exxon a dit qu'il y laissait sa chemise et les Polonais déchantent.

Nous attendons avec impatience des précisions sur le futur géant franco-allemand de la transition énergétique : dans quel domaine ? Le photovoltaïque.

Dans le débat...

M. Jean Bizet.  - Il n'y en a pas !

M. Ronan Dantec.  - ... l'hydrogène mérite qu'on s'y arrête. Il est l'un des rares sujets qui peut faire consensus entre nous. Développons cette filière. Hier, l'Europe a présenté le paquet climat-énergie pour 2030 ; il est décevant.

Que la France relève ces ambitions et devienne exemplaire dans la perspective de la Conférence internationale sur l'environnement de 2015 à Paris.

M. Jean-Claude Requier .  - Je renonce à intervenir pour laisser ma place à M. Deneux.

M. Marcel Deneux .  - Je regrette la mauvaise organisation de ce débat, si important pour l'avenir. La meilleure énergie est celle qu'on ne consomme pas. Disons-le et redisons-le, la pédagogie, c'est notre responsabilité politique.

Nous n'avons pas atteint nos objectifs sur l'éolien et le photovoltaïque en 2013, faisons un effort.

Le Gouvernement a bien fait de lancer un appel d'offres sur les compteurs intelligents. Trouvons pour chaque territoire le bon mix énergétique en fonction des sommes que nous pouvons lui consacrer. Pour l'heure, ne commettons pas l'erreur de l'Allemagne qu'on cite souvent en exemple : conservons le nucléaire, nous en avons besoin.

Le gaz de schiste ? La France a toujours une peur d'avance. Ce n'est pas digne de notre pays, ne nous privons pas de la possibilité de mener des recherches.

On annonce l'adoption d'une loi de programmation pour la transition énergétique d'ici la fin de l'année. Je doute que ce soit possible. Prenons le temps de négocier ce virage.

Rappel au Règlement

M. Jean Bizet .  - Je veux dénoncer ce débat tronqué. Il n'a échappé à personne que le groupe écologiste a allongé le débat sur la CRPC en déposant huit amendements avec, sans doute, la complicité de la commission des lois. C'est lamentable.

M. Ronan Dantec .  - Ces propos sont inacceptables et je ne sais ce que dit le Règlement du Sénat en pareil cas. Les amendements que Mme Lipietz avait déposés ont tous été adoptés, preuve qu'ils amélioraient le texte de la commission. Prétendre qu'en les défendant elle a voulu allonger le débat est absurde... et lamentable !

Commission spéciale (Démission et candidature)

M. le président.  - J'ai reçu avis de la démission de M. Philippe Adnot, comme membre de la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel.

J'informe le Sénat que la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'elle propose pour siéger à la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel, pour le remplacer.

Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du Règlement.

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Jean-Pierre Bel

La séance reprend à 15 heures.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Décentralisation

M. Jean-Pierre Raffarin .  - Aux yeux du Sénat, assemblée des territoires quoi qu'en dise le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, la décentralisation reste une grande ambition politique. Ce n'est pas un dossier technique. Aussi avons-nous mis en place une mission commune d'information, que j'ai eu l'honneur de présider et dont M. Krattinger était le rapporteur.

Quels sont les principes que nous défendons ? Il faut d'abord soutenir la commune, premier espace républicain ; et qui la soutient doit défendre l'intercommunalité, qui ne peut être que collégiale et non hiérarchique. (Marques d'approbation à droite) Ensuite, pour défendre la ruralité et les 15 millions de personnes qui y vivent, il faut défendre le département, en charge de la cohésion sociale et territoriale. Enfin, puisqu'il faut faire des économies, il faut éviter doublons et concurrence entre départements et régions. Celles-ci doivent être plus grandes et chargées de la stratégie, économie, universités...

Quelle place le Gouvernement réserve-t-il au Sénat et à ses idées dans sa réflexion ? (Applaudissements au centre et à droite)

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - M. le Premier ministre, en déplacement à Metz, m'a chargé de vous répondre.

Vos propos rejoignent ceux du président de la République, déterminé à poursuivre la simplification de l'organisation administrative de notre territoire. Un nouveau projet de loi clarifiera les compétences pour lutter contre les enchevêtrements et les trop nombreux doublons. Le rôle économique des régions sera renforcé par le transfert de nouvelles compétences d'État : aides aux entreprises ou soutien à l'innovation notamment.

Le Gouvernement a pris la pleine mesure du rôle des départements dans la cohésion sociale et territoriale. Leurs compétences à cet égard seront enrichies et précisées. La disparition des départements sur tout le territoire, que préconise M. Copé, serait un non-sens. (Applaudissements à gauche)

M. Alain Gournac.  - Ce n'est pas nous !

M. Alain Vidalies, ministre délégué.  - Reste qu'il faut permettre aux collectivités territoriales de s'adapter aux spécificités de chaque territoire. C'est pourquoi le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale a créé la Conférence territoriale de l'action publique, au sein de laquelle les représentants des collectivités pourront affiner l'exercice de leurs compétences respectives. La taille des régions peut être revue ; si certaines ont la taille suffisante pour exercer les nouvelles compétences, d'autres pourraient être amenées à se regrouper ou à mutualiser leurs services. L'État apportera des incitations financières aux regroupements.

Le Gouvernement se félicite que le Sénat l'ait devancé, et salue la qualité du travail entrepris sous votre égide, monsieur le Premier ministre Raffarin, et sous celle de M. Krattinger. Nous poursuivrons la réflexion, avec vous. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Réduction des dépenses publiques

M. Aymeri de Montesquiou .  - Nous l'avons dit inlassablement : trop d'impôt tue l'impôt. Les recettes fiscales de 2013 en témoignent. Le président de la République vient de procéder à un aggiornamento et pris conscience du découragement croissant des entreprises depuis vingt mois ; il a annoncé une baisse de la fiscalité sur les entreprises et les ménages et la réduction du déficit dès 2015 à 3 % du PIB. Nous nous y sommes engagés envers Bruxelles et il y va de la crédibilité de notre signature sur les marchés.

Il est exclu d'augmenter l'investissement public. Il faut donc réduire les dépenses de fonctionnement. Le nombre d'agents publics par habitants est en France le plus élevé d'Europe, mais vous n'envisagez sans doute pas de baisser leurs rémunérations ou de revenir sur les 35 heures, malheureusement uniques au monde... Paraphrasant Paul Quilès, je vous dirai : il ne faut pas seulement dire qu'on va baisser les dépenses, il faut dire lesquelles !

Monsieur le ministre, quelle baisse du nombre des agents publics envisagez-vous ? Et ne me répondez pas que vous allez créer un nouveau haut comité consultatif... (Applaudissements au centre et à droite)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  - Sans doute les déficits diminueront-ils moins vite qu'ils n'ont augmenté par le passé, mais ils n'augmentent pas ! En 2012, lorsque nous sommes arrivés, le déficit public était à 5,3 % du PIB ; en 2013, ils sont tombés à 4,1 %. En l'espace de vingt mois, nous avons diminué de 10 milliards celui des comptes sociaux, qui avait spectaculairement augmenté sous le précédent quinquennat. (Marques d'approbation sur les bancs socialistes)

Comme j'ai senti un peu d'angoisse dans votre question, je veux vous rassurer pour que vous quittiez cet hémicycle plus serein que lorsque vous y êtes entré... (Sourires) Bien entendu, nous allons poursuivre l'effort. Entre 2007 et 2012, la dépense publique a augmenté de 170 milliards.

M. Aymeri de Montesquiou.  - Ce n'est pas la question !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Mais c'est ma réponse ! Soit de 2 % par an. En 2014, ce sera 0,4 %. Nous envisageons des économies de 50 milliards d'euros sur la période 2015-2017. Là où la RGPP avait permis 10 milliards d'économies en trois ans, nous en avons fait 15 en un an... Nous tiendrons nos engagements auprès de l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Aides à la presse en ligne

M. David Assouline .  - La presse subit de plein fouet la crise et les mutations technologiques. Tout est bouleversé. L'ancien meurt et le nouveau peine à naître. L'enjeu c'est la sauvegarde des titres et des emplois et plus globalement la survie d'une information de qualité, pluraliste, libre et indépendante, vitale pour notre démocratie.

La presse régionale est elle aussi, désormais, en grand danger. Pourtant les aides à la presse sont très importantes ; mais leur répartition est contestable. Que compte faire le Gouvernement ? Quand mettra-t-il fin à l'injustice qui résulte de l'application à la presse papier d'un taux de TVA de 2,1 % tandis que la presse en ligne subit le taux normal ? Cette différence freine la modernisation de tout le secteur et la migration des abonnés vers le numérique.

Sur ma proposition le Sénat a voté la fin de cette injustice. Je sais que Mme Filippetti se mobilise au niveau européen. Sans attendre, que compte faire le Gouvernement pour rendre effective la neutralité technologique ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  - Je connais votre engagement pour la neutralité de la fiscalité en fonction du support. La TVA applicable à la presse papier est de 2,1 %, la presse numérique n'existant pas encore au moment de l'adoption de la directive TVA. Or cette dernière s'est développée et son importance n'est pas moindre pour notre démocratie. L'engagement a été pris de lui étendre le taux réduit.

Le combat est partagé par bien d'autres États de l'Union, et c'est l'un des objectifs énoncés dans l'accord de coalition en Allemagne. Des consultations sont en cours pour élaborer la nouvelle directive TVA. Le Gouvernement prendra une initiative législative dans les semaines qui viennent et prendra, par instruction, des dispositions pour que l'alignement des taux entre rapidement dans les faits. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

OGM

M. Joël Labbé .  - Les écologistes sont tous satisfaits d'avoir vu l'Assemblée nationale adopter conforme notre proposition de loi encadrant l'usage des pesticides. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

Les États membres de l'Union européenne doivent bientôt se prononcer sur l'autorisation du maïs OGM 1507. En l'absence de majorité qualifiée, Bruxelles pourrait valider l'autorisation alors que le Parlement européen a voté une résolution en sens contraire. Nous comptons sur le Gouvernement pour y faire obstacle et promouvoir une sécurisation de la procédure d'autorisation.

Quant au maïs Mon 810, l'arrêté de mars 2012 le prohibant a été invalidé par le Conseil d'État. Le 1er août 2013, le Gouvernement a confirmé son engagement de maintenir le moratoire sur les semences OGM. Or la période des semis est proche... Le socle du projet de loi sur l'avenir agricole est l'agro-écologie ; qu'entend faire le Gouvernement pour préserver durablement notre territoire des OGM ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt .  - Vous soulevez d'abord la question urgente du maïs OGM 1507. La position de la France est claire, elle est hostile à son autorisation. L'Autorité européenne de sécurité des aliments a demandé à l'entreprise des études sur son impact environnemental, elle les attend encore. Le débat aura lieu le 11 février au Conseil européen des affaires générales.

Vous soulevez aussi la question plus globale des règles régissant les choix des États à l'échelle européenne. La France, se fondant sur la clause de sauvegarde, a interdit le maïs Mon 810. Or cette clause est contestée et contestable. Il faut donc définir un cadre juridique commun et solide qui permette aux États de faire des choix objectifs. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)

Pouvoirs de la finance

M. Éric Bocquet .  - Nous vivons un temps « où sous nos yeux la finance a pris le contrôle de l'économie, de la société et même de nos vies » disait il y a deux ans au Bourget un candidat à l'élection présidentielle...

M. Alain Gournac.  - Qui ?

M. Éric Bocquet.  - L'Autorité des marchés financiers - dont le rôle est de réguler les acteurs de la place financière française et, si nécessaire, de contrôler, d'enquêter et de sanctionner - a procédé au renouvellement de six membres de sa commission des sanctions. Une représentante de la banque UBS a été nommée. On connaît les procédures engagées contre cette banque pour démarchage illicite et blanchiment de fonds, ainsi que les sanctions qui lui ont été infligées en 2012 pour laxisme dans ses pratiques commerciales. Télescopage saisissant avec les règles de l'AMF...

Quels critères ont présidé au choix de la représentante d'UBS à l'AMF ? Qu'entendez-vous faire pour nous prémunir du contrôle par la finance de l'économie, de la société et même de nos vies ? (Applaudissements sur les bancs des groupes CRC et écologiste)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget].  - Je sais et salue votre combat contre la finance devenue folle. Votre détermination n'a d'égale que la nôtre. Faut-il rappeler les 60 mesures prises depuis 2012 pour lutter contre la fraude fiscale, sur le transfert des bénéfices, les peines applicables à la fraude fiscale via des sociétés écrans, le combat mené à l'échelle européenne pour l'échange automatique d'informations ?

M. Éric Bocquet.  - Vous ne répondez pas à la question !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - C'est ainsi que nous avons obtenu des résultats inédits. Nous pouvons escompter cette année en 2014 plus de 2 milliards d'euros de recettes au titre de la lutte contre la fraude fiscale. À la suite de ma circulaire de juin, nous avons déjà traité 11 000 dossiers, pour 1 milliard de recettes.

En ce qui concerne votre question... (exclamations à droite) la banque UBS fait l'objet de procédures judiciaires. Mes fonctions m'interdisent de faire des commentaires. (Rires et exclamations à droite ; protestations sur les bancs CRC ; applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

Financement de la politique familiale

M. Jean-Pierre Chevènement .  - Dans sa dernière conférence de presse, le président de la République a décidé de supprimer d'ici 2017, les cotisations familiales, qui pèsent sur les salaires à hauteur de 30 milliards d'euros. Le rapport Gallois prévoyait de relever la CSG pour compenser cette perte de recettes par les CAF. Le président de la République a dessiné une tout autre voie : la baisse de 50 milliards d'euros des dépenses publiques. Un comité stratégique des finances publiques s'est tenu ce matin. Comment le Gouvernement entend-il maintenir les ressources des CAF ? Garantira-t-il leurs ressources en les indexant sur la progression de la masse salariale ? À défaut, notre politique familiale serait mise en danger, alors que le taux de fécondité vient de passer sous le seuil de deux enfants par femme.

Pouvez-vous nous en dire plus sur les pistes d'économies à venir ? Celles-ci nécessitent de donner du temps au temps, pour citer M. Mitterrand. Pouvez-vous me rassurer sur l'avenir des allocations familiales et le pouvoir d'achat des familles ? (Applaudissements sur quelques bancs)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, le déficit de la branche famille était de 2,5 milliards. Dès l'an dernier, le Gouvernement a pris des mesures pour redresser cette branche. Des efforts de gestion ont été demandés aux CAF. La réforme du quotient familial, si décriée, poursuivait le même but.

Nous ne remettons pas en cause les prestations, bien au contraire : 275 000 places de crèches seront créées...

M. Philippe Dallier.  - Ce sont les collectivités territoriales qui les financent !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Avec le plan « grande pauvreté », les prestations familiales iront vers ceux qui en ont le plus besoin. Les pistes d'économies ? Sur la branche retraite et la branche famille, 4 milliards d'euros d'économie sont attendus. La maitrise des dépenses de l'État et de l'assurance maladie rapportera 20 milliards ; le solde viendra de réformes structurelles qui permettront de faire des économies sans que le service public en souffre et sans remettre en cause notre système de protection sociale. (Applaudissements sur plusieurs bancs socialistes)

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Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

Ordre du jour du lundi 27 janvier 2014

Séance publique

À 16 heures et le soir

Présidence : Mme Bariza Khiari, vice-présidente

Secrétaires : Mme Odette Herviaux - Mme Catherine Procaccia

- Deuxième lecture du projet de loi relatif à la consommation (n° 244, 2013-2014)

Rapport de MM. Martial Bourquin et Alain Fauconnier, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 282, 2013-2014)

Avis de Mme Nicole Bonnefoy, fait au nom de la commission des lois (n° 300, 2013-2014)

Texte de la commission (n° 283, 2013-2014)

Analyse des scrutins publics

Scrutin n° 123 sur l'amendement n°39, présenté par le Gouvernement, tendant à rétablir l'article 3 du projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :347

Suffrages exprimés :347

Pour :1

Contre :346

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (131)

Contre : 131

Groupe socialiste (127)

Pour : 1 - M. Gilbert Roger

Contre : 126

Groupe UDI-UC (32)

Contre : 32

Groupe CRC (20)

Contre : 20

Groupe du RDSE (19)

Contre : 19

Groupe écologiste (12)

Contre : 12

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 6