SÉANCE

du mardi 2 octobre 2012

2e séance de la session ordinaire 2012-2013

présidence de M. Jean-Claude Carle,vice-président

Secrétaires : Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, M. Alain Dufaut.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à vingt questions orales.

Hydroélectricité

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx .  - J'ai attiré l'attention du ministre du redressement productif sur la situation des producteurs autonomes d'hydroélectricité si les contrats dits « H07 » censés remplacer les contrats « H87 », arrivant à échéance en octobre 2012, ne sont pas mis en place rapidement.

L'arrêté attendu a été publié le 10 août 2012. Cela étant, la continuité temporelle entre les anciens et les nouveaux contrats est essentielle afin que les producteurs puissent continuer à écouler leur production sans l'interrompre.

Il serait anormal de faire peser les conséquences du retard avec lequel le décret a été pris sur les producteurs qui souhaitent rester sous obligation d'achat.

Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie .  - L'hydroélectricité est importante pour la vitalité des territoires ruraux et le développement des énergies renouvelable. Il y a là des sources d'emplois non délocalisables, liées à l'histoire économique de nos montagnes et nos vallées. Les 1 700 micro-installations représentent 61 % des ouvrages hydroélectriques installés sur les rivières françaises. J'ai été sensibilisée par les élus à l'urgence de ce renouvellement des contrats, les « H97 » arrivant à l'échéance de quinze ans au mois d'octobre de cette année.

L'article 3 de la loi « Nome », à l'initiative du Sénat d'ailleurs, fait exception au principe selon lequel une installation ne peut bénéficier qu'une seule fois d'une obligation d'achat. Il a fallu trouver un bon équilibre afin que les conditions économiques restent raisonnables. L'arrêté que j'ai signé le 10 août est paru au Journal officiel le 5 septembre.

Afin de ne pas pénaliser les centrales ayant investi dans la période récente, l'arrêté a prévu des aménagements spécifiques. Ainsi, la situation de chaque installation est prise en compte.

Le préfet pourra réaliser des contrôles permettant aux services de l'État de constituer un base de données fiable sur la situation de ces 1 080 centrales. Un premier projet de contrat type a été élaboré par EDF. Une réunion de concertation entre les fédérations et la direction de l'énergie s'est tenue le 20 septembre. La possibilité de mettre en oeuvre les contrats avant leur signature est en cours d'analyse afin de garantir les intérêts des petits producteurs, tout en s'assurant du respect de leurs obligations d'investissement. Je donnerai des instructions aux DREAL pour une application homogène sur l'ensemble du territoire. Voilà qui devrait vous rassurer.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Merci pour ces propos effectivement rassurants.

Exposition aux ondes radioélectriques à Carmaux

M. Jean-Marc Pastor .  - Les antennes relais d'opérateurs de téléphonie mobile installées dans mon département suscitent les inquiétudes de la population. Il est demandé aux opérateurs de baisser la puissance de leurs antennes. Des études sont en cours sur les risques pathologiques induits par ces ondes radioélectriques. Or la ville de Carmaux a été assignée au tribunal administratif par un opérateur !

Les riverains s'inquiètent de la multiplication des antennes et souhaitent limiter la puissance d'exposition aux ondes à un niveau raisonnable.

Je vous demande si vous envisagez d'actualiser la réglementation en France et d'abaisser les seuils d'exposition.

Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie .  - C'est une question sensible, pour les élus comme pour les citoyens, qui donne lieu à de nombreux contentieux. Lors de la conférence environnementale, les enjeux de santé ont été érigés au rang de priorité du Gouvernement. Le principe de précaution fait l'objet de jurisprudences contradictoires. Pour être crédibles, la concertation avec les élus doit être assurée en amont.

En matière de recherche, des travaux d'expertise sont encore nécessaires. Le Premier ministre s'est engagé à assurer l'indépendance des travaux scientifiques. Mission a été confiée à l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) de faire la synthèse régulière de tous les travaux scientifiques publiés en ce domaine. Dans un rapport de 2009, elle a indiqué qu'il fallait appliquer le principe de précaution pour les enfants et que la baisse du niveau d'émission pouvait avoir pour effet de relever le niveau d'exposition de la tête pour les utilisateurs de téléphones. J'attends un nouveau rapport qui sera rendu début 2013. L'Anses dispose de 2 millions d'euros par an pour mener des recherches sur les ondes électromagnétique, un budget reconduit dans le projet de loi de finances pour 2013.

Les expérimentations ont mesuré que 99,5 % des niveaux d'exposition sont inférieurs à 5 voltmètres et très inférieurs aux valeurs limites réglementaires. Il n'en faut pas moins identifier les lieux géographiques atypiques où l'exposition, bien qu'inférieure à ces valeurs limites, doit être réduite.

Le fonds public pour les mesures du champ électromagnétique, créé par la loi Grenelle I, sera enfin abondé par l'article 26 du projet de loi de finances pour 2013 qui prévoit d'affecter les contributions additionnelles de l'Ifer à l'Agence des fréquences. L'ensemble des dispositions réglementaires nécessaires devrait être publié avant la fin de l'année.

Le Gouvernement tirera en juin 2013 les conséquences de l'ensemble des études disponibles et pourra proposer de nouvelles dispositions, adaptées notamment aux points atypiques où les expositions sont les plus élevées.

M. Jean-Marc Pastor.  - Le souci d'une couverture totale et parfaite et l'interrogation très forte, qui posent un problème d'acceptation sociétale, coexistent. Nous sommes soumis au principe de précaution. Nous serons attentifs aux travaux menés par l'Anses et à vos propositions. Rendez-vous en juin 2013.

Crise du vignoble bordelais

M. Philippe Madrelle .  - Le vignoble bordelais n'échappe pas à la crise mondiale. Seuls les premiers grands crus classés, comme tous les produits de luxe, se portent bien. Ces grands crus ne représentent que quelques millions de bouteilles sur les 728 millions produites. La montée en puissance de l'achat asiatique est loin de concerner l'ensemble des producteurs.

Le conseil général de la Gironde a mis en place deux plans triennaux de soutien à la filière viticole. Certains viticulteurs sont au RSA. Nombre d'entre eux sont en grande précarité. Des exploitations sont étranglées faute de financements adaptés. Si les viticulteurs ne rechignent pas à payer des cotisations volontaires obligatoires, ils sont sensibles aux grandes inégalités existant au sein du même secteur. Pour établir un barème plus équitable, il faudrait que toutes les interprofessions enregistrent les transactions non seulement en vrac mais aussi en bouteilles. Nous comprenons le souhait des viticulteurs qui veulent plus de transparence.

Le projet de libéralisation des droits de plantation arrêté en 2008 serait catastrophique s'il était appliqué. Je sais pouvoir compter sur votre détermination pour revenir sur cette néfaste mesure, alors que le climat actuel n'est pas serein vu qu'on s'attend à une petite récolte, en Gironde et ailleurs.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt .  - Oui, la viticulture souffre de la crise. Vous l'avez indiqué, la récolte sera historiquement basse. Ce sera pareil partout dans le monde, donc nous ne devrions pas perdre de parts de marché. Les interprofessions ont la liberté de fixer leurs règles. L'État n'intervient que pour assurer le caractère obligatoire de la contribution volontaire ; il peut néanmoins inciter les parties à engager le dialogue pour en assurer une répartition plus équitable.

Même à Bordeaux, grande région viticole, si riche d'histoire, il y a encore des progrès à faire en termes de valorisation commerciale. Il faudra avoir une discussion globale avec l'ensemble des acteurs de la viticulture.

Il y a un sujet européen majeur, celui des droits de plantation. Nous menons la bataille avec d'autres pays. Le vin n'est pas un produit comme les autres ; il faut organiser sa production. Nous avons obtenu la signature d'une plate-forme commune par une dizaine de pays. Il y a une autre bataille à mener, à propos de l'appellation château : j'ai dit tout le mal que j'en pensais.

La viticulture est un atout majeur : donnons lui les moyens de rester le fleuron de notre pays.

M. Philippe Madrelle.  - Merci, monsieur le ministre. Nous comptons sur votre détermination.

Artificialisation des terres agricoles

M. Antoine Lefèvre .  - J'attire votre attention sur l'artificialisation des espaces agricoles, qui ne cesse d'augmenter. La France perd 26 mètres carrés de terres agricoles par seconde, soit l'équivalent de la surface d'un département tous les cinq ans, alors que la demande alimentaire mondiale ne cesse d'augmenter.

Avec la périurbanisation, certains acquéreurs n'hésitent pas à spéculer sur le changement d'usage des terres. C'est pourquoi nombre d'agriculteurs et de maires ruraux avaient soutenu la loi majorant les droits à construire. La terre est devenue une valeur refuge, avec un prix moyen à l'hectare de 5 430 euros, en hausse de 40 % depuis 1997.

Les 14 et 15 septembre derniers, lors de la conférence environnementale, la FNSEA s'est montrée volontariste sur la préservation des terres agricoles. La prochaine loi sur l'urbanisme abordera-t-elle ce problème ?

L'Assemblée permanente des chambres d'agriculture a lancé un cri d'alarme. Il faudra produire plus pour répondre à une demande alimentaire mondiale en croissance et donc avoir une gestion durable des sols, sans oublier la production d'agrocarburants. L'augmentation de la taxe sur le changement de destination des espaces agricoles de 10 à 15 % serait dissuasive ; les commissions départementales de classement des terres ne devraient pas donner un simple avis consultatif.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt .  - C'est un sujet qui a déjà fait couler beaucoup d'encre. Nous ne pouvons plus accepter cette disparition programmée de notre capacité à produire des biens alimentaires. Que de terres gaspillées ! On a cru que notre espace pouvait être consommé sans limite. Il est temps de dire stop.

C'était l'objet de la conférence environnementale, nous travaillons sur les pistes que vous avez mentionnées. Dès l'an prochain, le Parlement se saisira de cette question majeure.

Dans les zones commerciales, les parkings s'étendent de manière insensée pour faire face à quelques heures de pointe par semaine, en induisant des problèmes de pollution. Ma détermination à aboutir est totale.

M. Antoine Lefèvre.  - Merci, monsieur le ministre, Je serai à vos côtés et à ceux de vos services pour vous accompagner dans cette lutte contre l'artificialisation des terres.

Logement social

M. Yannick Botrel .  - Des projets d'urbanisme et de construction de logements sociaux et adaptés sont remis en cause dans les Côtes d'Armor en raison des ponctions opérées sur les budgets des opérateurs locaux et du manque de crédits d'État, ce qui entraîne des tensions sur le marché de l'habitat.

En Côte d'Armor, seuls les secteurs côtiers sont considérés comme tendus. Ce zonage, sur critères purement techniques, ne garantit pas l'équilibre des territoires. Il écarte, à terme, la possibilité de construire des logements sociaux et adaptés dans les territoires ruraux où la demande est pourtant forte.

Quelles mesures mettez-vous en oeuvre pour enrayer ce phénomène ?

Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement .  - Cette question sera à l'ordre du jour du projet de loi de finances pour 2013, où les crédits du logement social feront l'objet d'une mobilisation sans précédent. Nous allons identifier les secteurs les plus tendus, en incluant ceux où la demande sociale est très forte. Un effort sera fourni en faveur des publics spécifiques nécessitant des logements adaptés : 10 000 seront répartis sur l'ensemble du territoire en 2013. Le préfet de la région Bretagne effectuera un zonage plus précis pour répondre aux besoins afin de sortir d'une vision purement administrée. A cette question cruciale, il faut apporter une réponse nuancée et différenciée selon les territoires. J'y veille au sein du Gouvernement.

M. Yannick Botrel.  - Merci pour votre réponse. Personne ne peut contester que des territoires sont touchés par une plus forte demande que d'autres. Les zones rurales comptent de nombreuses personnes âgées isolées ; dans des communes situées entre deux bassins d'emploi, des personnes à faibles revenus doivent pouvoir se loger.

Quel avenir pour le Grand Paris ?

M. Philippe Dominati .  - Paris et la région capitale ont connu Hausmann, la création des départements du temps du général de Gaulle, l'élection d'un maire grâce à Valéry Giscard d'Estaing et le projet de Nicolas Sarkozy du Grand Paris. Celui-ci repose sur trois piliers : une gouvernance, un périmètre, un budget.

Pour l'instant, ce projet demeure essentiellement bureaucratique : une société d'État, un système de transports, des opérations liées à la recherche. Il appartient au président de la République de poursuivre l'impulsion de son prédécesseur et de résoudre les problèmes institutionnels et financiers.

Quelles sont les intentions du Gouvernement ? Votre sensibilité politique à tous les pouvoirs : l'État, la région, la ville. Il y a urgence financière : les Parisiens paient plus que les autres, en particulier à cause de la taxe spéciale d'équipement que vous avez combattue comme moi. L'État veut régenter la vie des Parisiens en décidant à leur place. Quid de l'évolution du réseau de transport ? A trois sociétés d'État, on en a rajouté une quatrième, la société du Grand Paris, sans un sou ! Nous avons lancé la réforme consistant à donner les pouvoirs du Stif à la région. Il faut sortir du silence sur ce projet !

Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement .  - En réalité, vous posez deux questions : celle de la gouvernance et celle du réseau de transport. Quel est le rôle de l'État ? Nous rompons avec les pratiques passées. Nous venons de remettre en ordre les liens entre les CDT et le Sdrif afin que l'État ne prenne pas la main sur les collectivités locales, avec la loi qui vient d'être votée au Sénat.

Le sous-investissement chronique dramatique de ces dernières années dans les transports en commun doit être réparé.

Le réseau de transport du Grand Paris express sera porté par les collectivités et l'État. Il fait l'objet d'une mission d'évaluation de son séquençage et de son financement. Son budget avait été sous-évalué. Il s'agit de desservir les populations qui en ont le plus besoin. Le financement de ce projet sera garanti par l'État et l'ensemble des acteurs. Vous pouvez être rassuré.

M. Philippe Dominati.  - Pas vraiment. Vous n'avez pas encore les réponses. Et j'aurais aimé voir le ministre du budget, assis à vos côtés, confirmer que le financement sera là. Malheureusement, la société du Grand Paris n'a ni le capital ni le financement adéquats pour développer ce système de transport. Pourquoi quatre sociétés d'État ? Il faut de la performance. Nous avons connu la bagarre entre SNCF et RATP avec les projets Météor et Éole ; aucun n'a été réalisé sauf un tronçon, avec vingt ans de retard ! Va-t-on recommencer ?

Les Parisiens paient des impôts pour les autres, sans obtenir de réponses aux problèmes de Paris intra-muros. L'État n'investit plus dans Paris.

Finances de Saint-Laurent du Maroni et de Roura

M. Georges Patient .  - Les communes de Saint-Laurent du Maroni et de Roura connaissent un fort déficit structurel depuis des années. Malheureusement, elles sont exclues du dispositif de restructuration mis en place par l'État au profit des communes en difficulté en Guyane. Elles ont connu une augmentation exponentielle de leur population, une incapacité des services fiscaux à actualiser les bases fiscales communales et une perte des recettes liées à l'octroi de mer, spécifique à la Guyane.

L'article L. 2335-2 du code général des collectivités territoriales prévoit des subventions exceptionnelles aux communes. Le directeur général de l'Agence financière de développement a souligné que Saint-Laurent du Maroni y serait éligible.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  - Les plans de restructuration mis en oeuvre par M. Lurel n'interviennent que lorsque les collectivités ne sont pas surendettées. Cet outil a été institué pour faire face à des difficultés conjoncturelles, et non structurelles.

Saint-Laurent du Maroni est affectée par une démographie dynamique et une faiblesse de ses recettes de fonctionnement. Le recensement des bases fiscales a permis de les accroître de plus de 31 % : je salue l'implication des élus locaux. Les négociations ont été menées par les services de l'État pour définir un échéancier de paiement des dettes.

La commune est bénéficiaire, en 2012, d'une nouvelle recette, en provenance du fonds de péréquation des ressources des communes, qui devrait monter en charges afin de réduire le déficit structurel de la commune. Cette solution est bien préférable.

M. Georges Patient.  - Permettez-moi d'insister sur les causes du déficit structurel de la commune de Saint-Laurent du Maroni, relevant du processus entrant dans le champ de compétences régaliennes de l'État. La révision des bases fiscales a été rendue possible grâce à la mise à disposition de personnel communal. La revendication des communes de Guyane quant à la restitution de la part de l'octroi de mer qui leur est prélevée chaque année est légitime. Elles subissent de ce fait une perte de 27 millions d'euros. Il est temps de le leur rendre.

Publication des comptes des entreprises

M. Christophe Béchu .  - La transparence a des vertus. Elle aurait évité des scandales passés, comme ceux d'Enron. Nous comprenons l'obligation légale de publier les comptes des entreprises. Mais, dans la situation de compétitivité de nos entreprises, nous devrions instaurer une réciprocité au sein de l'Europe. Certains concurrents ont accès à des données sans que les mêmes informations soient disponibles pour nos entreprises.

Les textes européens sont très disparates dans leurs modalités : disparité dans les délais, dans les mécanismes de relance lorsque les comptes ne sont pas publiés, dans les seules d'entreprises concernées et, enfin, dans les sanctions.

Ma question est simple : y a-t-il là un sujet ? Si oui, il faut avancer dans l'harmonisation pour restaurer des marges de compétitivité.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  - Si la question n'est pas nouvelle, elle est effectivement cruciale. Le précédent gouvernement s'en était saisi sans lui apporter de réponse. Notre gouvernement est déterminé.

La publication des comptes est un outil indispensable à la vie économique, élevé au rang de principe dès 1968 par l'Union européenne. Il y a débat sur l'application de ce principe à toutes les entreprises en France où l'on est allé au-delà des exigences européennes.

Ce débat a été relancé par une directive de mars 2012 exonérant les micro-sociétés de cette obligation.

Le chemin de crête est étroit : les entreprises françaises gagneraient-elles réellement à la fin de la publication des comptes ?

Ce problème devrait être traité dans le cadre de la mission sur la compétitivité de nos entreprises confiée par le Premier ministre à deux parlementaires, qui débouchera sans doute sur une saisine du Parlement en 2013. La France doit-elle être exemplaire si personne ne le lui demande ?

Mme Sophie Primas.  - Très bien !

M. Christophe Béchu.  - Merci. Je laisse donc au ministre le soin d'avancer sans plus attendre et de remplir la mission que nous attendons de lui.

Délocalisation des travailleurs du bâtiment

M. Francis Grignon .  - Les règles communautaires sur le détachement des travailleurs sont détournées dans le secteur du BTP par les entreprises allemandes. Celles-ci recourent à de la main-d'oeuvre provenant de Pologne, de Hongrie, de Roumanie et de Bulgarie, en jouant sur la confusion entre intérimaires et travailleurs détachés pour payer leurs travailleurs moins cher. Notre région, l'Alsace, en souffre. Et le BTP n'est pas le seul secteur concerné : les maraîchers alsaciens sont en butte aux mêmes difficultés. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargé de la formation professionnelle et de l'apprentissage .  - Vous évoquez des problèmes de dumping social dans des régions transfrontalières. Le code du travail encadre strictement les conditions d'intervention d'une entreprise étrangère en France en application de la directive du 16 décembre 1996. En matière de rémunérations, les entreprises établies hors de France doivent appliquer en France le salaire minimal sans déduire les frais de transport et de logement. J'y insiste car de nombreux contrôles ont mis en évidence des pratiques frauduleuses.

Le Gouvernement n'est pas inactif : le plan de coordination de lutte contre la fraude, de 2012, vise le BTP parmi cinq secteurs d'activité prioritaires. En 2010, la dernière année connue, les contrôles avaient augmenté, concernant 4 500 entreprises du BTP, dont 15 % étaient en infraction. En outre, les actions préventives sont mises en place avec la profession depuis 2005.

Je sais le président de séance sensible aux questions transfrontalières. Le Gouvernement compte sur vous tous pour l'accompagner dans la lutte renforcée contre la fraude, au niveau national comme européen. La commission nationale de lutte contre le travail illégal se réunira dès cet automne pour dresser un bilan et déterminer les priorités du plan national d'action pour l'année qui vient.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Francis Grignon.  - Merci de vous être déplacé pour me répondre. J'ai pu apprécier la qualité de vos interventions à la commission de l'économie où vous siégiez il y a quelques mois.

Il y a quelques années, j'ai commis un rapport sur le phénomène du plombier polonais et de la fameuse directive Bolkestein.

M. Roland Courteau.  - Eh oui !

M. Francis Grignon.  - Ne laissons pas faire n'importe quoi ! Merci.

M. le président.  - Vous connaissez bien, monsieur le ministre, les questions transfrontalières.

Violences faites aux femmes

M. Roland Courteau .  - Trop longtemps taboues, les violences faites aux femmes sont désormais durement sanctionnées par la loi du 9 juillet 2010. Soit dit en passant, contrairement à ce que soutenait la précédente majorité, la création d'un observatoire ne serait pas inutile.

Pour faire reculer ce fléau, la prévention est essentielle. La journée du 25 novembre, créée par un amendement sénatorial à la loi de 2010, doit être organisée de manière à sensibiliser les Français à ces violences particulières. De même, les séances d'informations régulières, voulues par le législateur, sont à programmer à l'école. Que comptez-vous faire en ce sens ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement .  - Je connais votre engagement dans ce combat. Dès mon arrivée au ministère, je me suis saisie du sujet lors de la discussion sur le projet de loi relatif au harcèlement sexuel.

Un observatoire ? Il est indispensable car les 17 000 faits répertoriés ne représentent qu'une partie de ces violences de genre. En outre, la lutte contre ces violences ne doit pas dépendre du bon vouloir existant dans les territoires.

L'observatoire sera mis en place dans le courant de l'automne. Nous avons demandé à l'Institut national des études démographiques une réactualisation des chiffres.

Récemment, j'étais en Languedoc-Roussillon pour discuter de l'application de la loi de 2010 : les ordonnances de protection sont trop peu utilisées, les places en hébergement d'urgence manquent, le suivi des auteurs de violence laisse à désirer. Oui, la loi -et vous êtes bien placé pour le savoir- est perfectible.

Mise en réseau, orientation des victimes et prévention sont les trois pistes à suivre. Avec M. Peillon, nous ferons en sorte que l'égalité entre filles et garçons soit mise au coeur du pacte républicain à l'école. Car elle s'apprend. Des modules pour l'égalité seront inclus dans la nouvelle formation initiale et continue des enseignants et du personnel de direction et d'orientation.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre.  - Une expérimentation sera lancée prochainement dans cinq académies pour les 6-10 ans à partir d'activités ludiques. L'obligation d'éducation au respect entre les sexes, posée par la loi de 2010, sera enfin respectée.

La journée nationale du 25 novembre doit être mise à profit pour une formation des professionnels. Dans huit cas sur dix, le silence sur ces violences n'est pas celui des victimes mais celui de la société. Les victimes parlent et nous ne savons pas les écouter, les entendre. Il faut combler cette lacune collective d'écoute.

M. Roland Courteau.  - Je salue la richesse de votre réponse et des pistes proposées. Enfin, le législateur est écouté ! Les violences faites aux femmes sont un fléau. Le combattre est un des préalables à l'égalité entre les sexes.

Sécurité civile dans le Var

M. Pierre-Yves Collombat .  - Merci, madame le porte-parole du Gouvernement, de venir me répondre en ce matin pluvieux. La dernière fois, c'était le ministre de l'outre-mer qui m'avait donné la réplique. Je finirai bien par avoir le ministre de l'intérieur !

Depuis des années, j'obtiens des réponses dilatoires sur le maintien d'un hélicoptère de la sécurité civile sur la base du Cannet-des-Maures, permettant de secourir les victimes dans un vaste territoire aux reliefs difficiles. Le 26 juillet, j'ai interrogé le nouveau gouvernement. La réponse m'est venue le 18 août par la bouche du ministre : l'hélicoptère sera maintenu. Pour les zones rurales, le changement, c'est bien maintenant ! (Sourires) Je m'en réjouis.

Toutefois, pourrons-nous espérer ne plus devoir nous contenter d'un hélicoptère de type Écureuil ? Il nous faudrait un EC145 ou tout autre type d'appareil permettant un véritable Smur aérien ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement .  - J'ai d'autant plus de plaisir à suppléer le ministre de l'intérieur que c'est pour vous apporter une bonne nouvelle. Le 18 août, mon collègue Manuel Valls a confirmé le maintien d'un hélicoptère sur la base du Cannet-des-Maures. Les retours d'expériences sont intéressants, en ce domaine comme dans les autres. L'appareil a servi, en 2011, au transport sanitaire de 600 personnes.

Vieillissants, les quatre hélicoptères Écureuil de la sécurité civile seront mis en vente au cours des années 2012 et 2013 ; l'appareil du Luc sera donc remplacé par un EC-145.

Il s'agit toutefois d'un redéploiement : les moyens aériens de la sécurité civile répondront toujours au principe d'adaptabilité du service public. Si les risques évoluent, l'implantation doit également évoluer. Le principe d'équité territorial doit primer.

M. Pierre-Yves Collombat.  - In cauda venenum. En l'occurrence, la cauda est un peu longue et gâche mon plaisir. Le besoin existe, pourquoi tergiverser ?

Sécheresse et réhydratation des sols argileux.

Mme Sophie Primas .  - Quand se succèdent des périodes de sécheresse et de réhydratation, les sols argileux subissent des mouvements de terrain qui affectent gravement les infrastructures et les habitations. Le cas se présente dans de nombreuses communes des Yvelines. Les travaux préconisés pour réparer les dommages causés au patrimoine immobilier sont très onéreux.

Ne faut-il pas revoir les méthodes d'analyse scientifique ? M. Guéant avait sollicité Météo-France et le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) afin d'aboutir à une meilleure prise en compte de ces phénomènes liés dans la procédure de reconnaissance de catastrophe naturelle. Il faudrait également s'intéresser à la succession des épisodes de sécheresse et de réhydratation, propice aux mouvements de terrain. Où en est la réflexion du Gouvernement ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement .  - M. le ministre de l'intérieur et moi-même saisissons cette occasion pour rendre hommage aux victimes.

Des outils perfectionnés sont utilisés pour la procédure de reconnaissance de catastrophe naturelle, dont le modèle SIM : Safran Isba Modcou, du nom des trois modèles qui en forment la base. Si les premiers résultats sont bons, ils peuvent être améliorés, en particulier pour les sols argileux. M. Valls a obtenu l'accord de Mme la ministre de l'écologie, dont dépend le BRGM, pour la création d'un groupe de travail sur la méthodologie à utiliser pour évaluer les conséquences de la sécheresse.

Enfin, les conclusions du programme de recherches qui étudie le lien entre sécheresse et sol sont attendues pour la fin 2013. Notre détermination, vous le voyez, est totale.

Mme Sophie Primas.  - La détresse des personnes sinistrées est réelle. De nombreux sinistrés sont en grande difficulté, les assurances n'ayant pas joué en raison de l'absence de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

Ne faudrait-il pas se pencher sur la responsabilité des assureurs, ainsi que sur celle des constructeurs au-delà de l'obligation décennale ?

Roms autour de Genève

M. Pierre Hérisson .  - Le Comité d'experts sur les questions Roms au Conseil de l'Europe (Cahrom), où je représente la France depuis 2011, traite la question de minorités Roms sur leur territoire. Trop souvent, on fait la confusion entre Roms et gens du voyage, qui sont pour la plupart de nationalité française. La France est une République qui ne connaît pas la notion de « minorité ethnique ».

Un certain nombre de Roms passent la nuit dans les villes françaises de la périphérie de Genève, où ils vont mendier pendant la journée. La population de Haute-Savoie augmente beaucoup plus que ce que disent les statistiques officielles, si bien que se creuse un déséquilibre dans les effectifs des forces de l'ordre qui nous sont affectées. Dans ces conditions, les Roms jouent à cache-cache avec les forces de l'ordre, qui ne parviennent pas à lutter efficacement contre l'insécurité et les cambriolages. Ne faut-il pas envisager une réorganisation des forces de l'ordre afin de faire face à ce fléau ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement .  - Permettez-moi de renverser votre présentation : il ne faut pas lutter contre la délinquance parce qu'elle proviendrait d'un type de population ; il faut lutter contre la délinquance en soi ! De plus, les personnes dont vous parlez sont issues de pays de l'Union et bénéficient donc de la liberté de circulation.

La Haute-Savoie dispose de 946 gendarmes, appuyés par 200 réservistes ainsi que de 74 fonctionnaires de la police aux frontières, de 374 à la direction départementale de sécurité publique et de 255 à l'antenne de police judiciaire. Des actions sont menées régulièrement en coopération avec la Suisse : contrôles thématiques liés à des événements, patrouilles mixtes aux frontières entre les gardes-frontières helvétiques et les effectifs de la police aux frontières. Vous voyez que tous les moyens sont engagés.

M. Pierre Hérisson.  - Colonel dans la réserve citoyenne de la gendarmerie, je connais ces chiffres. Hélas, même si les moyens sont importants et s'ils ont été renforcés ces cinq dernières années, les résultats ne sont pas au rendez-vous. La population en a assez !

Il suffit de se rendre tôt le matin à la porte de France, au terminus du tramway qui mène au centre de Genève, pour mesurer le phénomène : des réseaux exploitent la misère. Des femmes jeunes, portant des enfants en bas âge emmaillotés, reçoivent des cartes précises de Genève leur indiquant où elles devront mendier.

Les opérations coup de poing ne sont pas en cause mais l'accent doit porter sur le démantèlement des réseaux. De fait, nous avons affaire non à un problème de misère mais à de la criminalité. Les têtes de réseau déposent les fonds récoltés chaque jour à la banque au vu et au su de tous pour les envoyer en Roumanie. Le sujet n'est pas politique, je vous l'assure.

Vie chère en Nouvelle-Calédonie

M. Hilarion Vendegou .  - La situation en Nouvelle-Calédonie est inquiétante. La vie chère ne peut plus durer. Quelles mesures envisagez-vous pour y mettre fin ?

M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer .  - Cette question a été longuement débattue ici même la semaine dernière avec le projet de loi de régulation économique outre-mer. A cette occasion, nous avons aussi évoqué le cas des collectivités territoriales relevant de l'article 74 de la Constitution, dont la Nouvelle-Calédonie.

Un rapport de l'Autorité de la concurrence vient d'être rendu ; il comporte des préconisations à l'adresse des autorités de Nouvelle-Calédonie, afin d'y développer la concurrence, notamment la suppression des droits de douane à l'importation de produits issus de pays situés hors de l'Union européenne.

La Nouvelle-Calédonie est compétente en matière de lutte contre la vie chère. L'État l'est pour la tarification bancaire. Il nous a été suggéré d'interdire les frais de tenue bancaires, abolis dans l'Hexagone mais non outre-mer. Nous devrions régler cette question à l'Assemblée, la semaine prochaine, quand y sera discuté le projet de loi de régulation économique outre-mer. Ce qui se fait dans les collectivités territoriales de l'article 74 a inspiré le Gouvernement pour ce projet de loi, en particulier pour instaurer un bouclier qualité-prix qui, selon l'engagement du président de la République, ferait l'objet d'une négociation annuelle.

Voilà ce qui se fait. Ce qui se fera dépendra des compétences du gouvernement Néo-calédonien, qui pourra transposer des mesures de ce projet de loi pour améliorer la concurrence.

M. Hilarion Vendegou.  - Je suis très attentif à votre suivi de ces mesures économiques.

Taxe sur les salaires de la MDPH de la Manche

M. Philippe Bas .  - La maison départementale des personnes handicapées (MDPH) de la Manche est redevable de la taxe sur les salaires pour son personnel, selon les services fiscaux, au titre de 2008 à 2011 pour un montant de 216 000 euros.

Or il s'agit d'un GIP créé à l'initiative du législateur, dont les agents n'ont d'autre mission que celle de service public qui leur incombe. Le principe même de cet assujettissement est surprenant. Dans l'hypothèse où le Gouvernement ne réexaminerait pas cette position, il me paraît indispensable que l'État contribue, par une subvention supplémentaire, au versement de cet impôt, au titre de sa participation au fonctionnement de cette maison.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Le préfet de la Manche a récemment attiré mon attention sur la situation que vous évoquez, à laquelle mes services ont déjà apporté des réponses. Les MDPH sont soumises à la taxe sur les salaires en application du premier alinéa de l'article 231 du code général des impôts. Elles n'y sont pas soumises pour le personnel mis à disposition par l'État ou les conseils généraux. Les exonérer exposerait à de nombreuses demandes reconventionnelles de la part de l'ensemble des GIP. La sécurité sociale a besoin de ressources.

Dès 2006, et vous êtes bien placé pour le savoir, monsieur Bas, l'État s'est engagé à apporter aux MDPH les moyens antérieurement attribués aux Cotorep. Il a versé globalement 651 millions d'euros entre 2006 et 2011, ce qui représente un effort significatif. Les dettes relatives aux exercices 2006 à 2010 ont été honorées ; l'État ne saurait engager de frais supplémentaires liés aux recrutements opérés par les MDPH.

M. Philippe Bas.  - Votre réponse ne tient pas compte des particularités de la MDPH de la Manche. Je laisse de côté la gestion de l'interprétation extensive par Bercy de la loi en vigueur.

Cette maison est située à Saint-Lô ; les fonctionnaires de l'État partent à la première occasion pour Cherbourg. Le département a bien dû remplacer ces fonctionnaires partis ; il ne s'agit pas de recrutements supplémentaires. La situation n'est aucunement liée à une décision de la MDPH. J'insiste pour que l'État réexamine sa position. La réponse que vous me faites n'est pas plus satisfaisante que celle du préfet.

Administration de médicaments par les assistants maternels

M. Bernard Cazeau .  - L'aide à la prise des médicaments assurée par les assistants maternels pour les enfants dont ils ont la garde pose un problème d'interprétation juridique. Un avis du Conseil d'État du 9 mars 1989 puis une circulaire du 4 juin 1999 en admettent la licéité, confirmée par une décision du tribunal de grande instance de Nancy, en 2006.

Le doute a été semé par la réponse du Gouvernement à une question orale posée par le député Philippe Vigier le 30 mars 2011. Elle sous-entend que les assistants maternels accueillant des enfants à leur domicile ne peuvent aider à la prise d'un quelconque traitement, hors situation de péril imminent et constant. Cette discordance appelle une mise au point.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Vous avez raison. Cette réponse à la question orale du 30 mars 2011 a soulevé beaucoup d'interrogations. Elle a été interprétée comme interdisant implicitement aux assistants maternels d'administrer des médicaments, donc d'accueillir un enfant malade. Une circulaire récente de la DGS a précisé que l'administration de médicaments est considérée comme un acte de la vie courante lorsque le médecin l'a prescrit par une ordonnance. Le décret du 15 mars 2012 fixant les critères d'agrément prend en compte la capacité du candidat à connaître les règles relatives à l'administration des médicaments.

La réglementation est donc claire et protège la sécurité des enfants et des assistants maternels.

M. Bernard Cazeau.  - Merci de cette réponse rassurante pour les formateurs comme pour les assistants maternels. L'ambiguïté est levée.

Délocalisation de l'Intermarché de Lectoure

M. Aymeri de Montesquiou .  - Je suis très heureux de votre présence, monsieur le ministre. Intermarché a décidé, sans dialogue social, de délocaliser sa base, pourtant bénéficiaire, de Lectoure, dans le Gers, vers Monbartier, dans le Tarn-et-Garonne. Lectoure est le symbole de la ruralité. Les 315 salariés d'Intermarché forment le dixième de sa population : quel désastre que cette délocalisation pour le canton, sa population, ses salariés ! Pouvez-vous l'ignorer ? Non, ce serait inacceptable. Cette catastrophe sociale va à l'encontre de la justice sociale.

Le marché proposé aux salariés est le suivant : déménagez ou faites 150 kilomètres par jour, ce qui coûterait 10 000 euros par an à des smicards ! C'est contraire à l'article 122-12 du code du travail. La région a participé au financement de la zone industrielle qui accueille cette implantation. Intermarché engrange des bénéfices.

Monsieur le ministre, allez-vous laissez faire cette délocalisation contraire à la loi et à la morale sociale, de surcroît chez un ministre du Gouvernement ?

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif .  - Merci de votre engagement en faveur du Gers et de la belle ville de Lectoure. Mon ministère a été informé par le maire, qui a été reçu à mon cabinet le 12 juin. Les dirigeants d'Intermarché ont été reçus le 9 juillet en présence du président du conseil général. Intermarché a été aidé par les collectivités locales en 1993 lors de son implantation. Le groupe a expliqué sa décision pour la recherche d'une implantation « optimale » pour assurer l'approvisionnement de ses magasins.

Le groupe dit avoir souhaité anticiper les conséquences de cette délocalisation qui ne se concrétiserait que dans trois ans. Le ministère du redressement productif a exprimé son désaccord et a rappelé l'entreprise à ses responsabilités à l'égard des salariés et des collectivités locales. Les textes prévoient le remboursement des aides publiques. Le ministère a demandé à Intermarché de reconsidérer son projet. Des mesures seront prises. Intermarché devra réparer le préjudice s'il persiste dans son projet. Nous en reparlerons.

M. Aymeri de Montesquiou.  - J'ai été abasourdi, dans un premier temps, que vous repreniez l'argumentation d'Intermarché.

M. Arnaud Montebourg, ministre.  - Je l'exposais. Je la désapprouve.

M. Aymeri de Montesquiou.  - La ville vient de finir de rembourser les emprunts nécessités par cette implantation et on la priverait d'une base qui emploie le dixième de sa population ? Intermarché doit appliquer la loi. Son projet est contraire au code du travail. J'attends de vous beaucoup de pugnacité. Sans cela, ce sera un désastre économique et social, des écoles vont fermer ! Pesez de tout votre poids pour mettre vos déclarations, vos propos en conformité avec vos actes !

M. Arnaud Montebourg, ministre.  - Il est hors de question de faire une exception pour Intermarché. La loi sera appliquée dans toute sa rigueur. Vous demandez de la pugnacité, vous l'aurez !

Fret ferroviaire

Mme Marie-France Beaufils .  - Le fret ferroviaire SNCF est en chute constante. J'ai interpellé à plusieurs reprises les ministres des gouvernements successifs. Malgré les discours, les Grenelles, la part du ferroviaire dans le transport de marchandises en France continue de se réduire. Le prix du pétrole a triplé depuis 2000. Il va doubler d'ici à 2025. Le transport pèse lourd dans l'émission de gaz à effets de serre. Le manque de propositions viables alternatives explique souvent le choix de la route par les chargeurs.

La création des autoroutes ferroviaires ne résoudrait pas le problème. C'est une réponse économique et financière globale, laquelle suppose un fort engagement politique, qui doit être construite avec le secteur. Des solutions ont fait leur preuve chez nos voisins. Le CAS a émis récemment des préconisations, parmi lesquelles le développement des plate-formes multimodales. J'attirais l'attention, ici même en 2007, de M. Bussereau sur le rôle stratégique de Saint-Pierre-des-Corps. En 2010 vint une réponse encourageante, puis rien.

Mettons-nous autour de la table. Une politique volontariste est indispensable pour un nouveau rebond du fret. Quelles mesures comptez-vous prendre ?

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Oui, les déclarations furent nombreuses, dans le cadre du Grenelle. On s'engagea à porter la part du fret de 14 à 25 % à l'horizon 2022. Les annonces du précédent gouvernement n'ont pas été suivies d'effets. Le Gouvernement actuel est déterminé à donner une juste part au fret ferroviaire. Je ne ferai pas d'annonces merveilleuses mais je tiens à prendre à bras-le-corps ce dossier, de façon pragamatique, afin de lever les blocages, en fixant des objectifs réalistes, conformes à l'ambition du Gouvernement.

La demande locale doit être prise en compte. Les autoroutes ferroviaires peuvent être un axe de développement. Encore faut-il qu'il y ait des corridors aménagés. Nous y travaillons afin qu'ils soient connectés avec notre façade portuaire, qui doit jouer un rôle moteur.

L'opérateur ferroviaire historique se retire du transport du fret. De nouveaux opérateurs apparaissent sur le marché. Tant que nous n'aurons pas réglé le problème de l'écart de coût entre la route et le rail, la compétitivité du fret ferroviaire sera insuffisante. Il s'agit de canaliser l'ensemble des modes de transport et non pas de les opposer les uns aux autres. L'écotaxe « poids lourds » y contribuera.

Mme Marie-France Beaufils.  - Oui, regardons comment nous pourrions améliorer les réponses régionales. Quelles réponses apporte-t-on aux utilisateurs du fret ? Sous couvert d'équilibre des comptes, on propose des prix trop élevés, jusqu'à deux ou trois fois supérieurs aux tarifs antérieurs. La taxe « poids lourds », c'est l'Arlésienne ! J'espère qu'elle sera efficace. Il faut du concret. Je prendrai contact avec votre cabinet à cette fin.

Route centre Europe-Atlantique

M. Jean-Patrick Courtois .  - La mise à deux fois deux voies de toute la route centre Europe-Atlantique est attendue par tous les habitants et acteurs économique de l'Allier et de la Saône-et-Loire. Des élus, dont je fais partie, militent pour la mise en concession avec franchise de péage, ce qui permettrait d'assurer un financement pérenne. Aujourd'hui, le flou est complet. Nous avons appris par la presse le lancement d'un avis d'attribution de marché.

Quel mode de financement ? Quel calendrier pour les travaux ? Ce week-end, on déplorait encore deux morts sur cette route très accidentogène.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - L'actualité du week-end nous a émus. J'ai conscience des difficultés que vous rappelez sur cet itinéraire emblématique, où surviennent de trop nombreux accidents graves.

Les investissements nécessaires s'élèvent à 950 millions, voire 1 milliard d'euros. Le précédent gouvernement avait proposé de recourir à la mise en concession de l'axe. Cela pose question quant à l'évolution du coût pour les usagers mais aussi, vu l'absence d'alternative, de la légalité au regard de la liberté de circulation. Des propositions de financement ont été faites, dont la mise en place de l'écotaxe « poids lourds ». C'est l'intérêt de cette écotaxe que de moderniser nos infrastructures. D'autres solutions ont été envisagées.

La commission du débat public a fait état des nombreuses divergences de vues et tensions locales suscitées par ce dossier. Conformément à ses recommandations, je mènerai une analyse approfondie, expertisant les solutions alternatives. Je l'ai confié cet été au conseil général de l'environnement et du développement durable, qui rendra ses conclusions dans quelques semaines. Les légitimes attentes des élus doivent être prises en compte.

Aucune procédure de mise en concession n'a été lancée. L'avis auquel vous vous référez ne portait que sur l'ouverture au pilotage technique du projet.

Je suis particulièrement mobilisé, avec mes services, pour que les délais de l'expertise soient tenus. Je n'exclus aucune solution de financement. Et, puisque le nouveau gouvernement a hérité de la responsabilité de la mise en place de l'écotaxe « poids lourds », celle-ci financera des mesures concrètes immédiates.

M. Jean-Patrick Courtois.  - Nous pouvons nous accorder sur le coût des travaux. Les deux départements sont d'accord sur la concession. J'insiste sur la nécessité de développer les modes de transport alternatifs. Nous avons fait des calculs financiers. La charge pour le département serait considérable. Les deux fois deux voies ont des coûts d'entretien très élevés.

J'ai été maire d'une commune où il n'y a pas de voie alternative, d'où notre proposition d'ouvrir des secteurs libres d'accès. Je suis prêt, avec René Beaumont, à travailler avec le conseil pour déterminer les solutions les moins mauvaises possibles.

Déviation de Livron-Loriol

M. Didier Guillaume .  - Beaucoup de Français connaissent la Drôme, berceau de la Résistance dans le Vercors, avec le palais du facteur Cheval, le château de Grignan, l'olive de Nyons, la clairette de Die, le Crozes-Hermitage... et les bouchons sur la route nationale 7 chère à Charles Trénet. Dans certains secteurs comme celui de Livron et Loriol, le trafic est très dense et les accidents nombreux.

On a donc décidé, il y a douze ans, de construire une déviation. Les terrains sont acquis, le tracé est fixé. D'étude en étude, après la réalisation d'un rond-point qui ne débouche sur rien, ce projet est-il arrêté ? Il a déjà été inscrit au CPER 2000-2006. D'année en année, le temps passe. Ne réaliser qu'un tronçon central risque de le transformer en souricière. Seuls 18 millions d'euros seraient disponibles, en plus des 12 millions déjà dépensés. Qui paiera les 65 millions qui manquent ? Les habitants seront-ils sacrifiés sur l'autel des promesses non tenues de la précédente majorité ? Oui ou non la déviation de Loriol-Livron se fera-t-elle ? Avec quel financement ?

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Merci pour cette entrée en matière qui fait rêver et nous invite à venir dans votre beau territoire, à condition de n'y pas créer de bouchons supplémentaires sur la mythique route nationale 7. Il est vrai que cette route joue un rôle très important de desserte locale. Si le trafic reste constant ces dernières années, il atteint, en 2011, 15 000 véhicules par jour, ce qui est considérable.

L'opération a connu des débuts de réalisation. Un suivi est nécessaire. Il y va de la crédibilité de l'État mais je ne puis être engagé par des promesses démultipliées par d'autres. Réaliser le schéma national des infrastructures territoriales devrait coûter 245 milliards quand l'État ne peut financer que 2 milliards par an. Les promesses faites ont manqué de sérieux et de réalisme. Nous devons réexaminer ce schéma afin d'évaluer la faisabilité des projets qui y sont inscrits.

Nous héritons de finances publiques particulièrement contraintes, vous le savez. Pour autant, nous ne saurions sacrifier les habitants de Loriol. Des crédits de 300 millions sont inscrits par la région Rhône-Alpes pour la modernisation des routes. Cela étant, l'enveloppe de 18 millions est notoirement insuffisante. Aussi, dans une démarche réaliste et pragmatique, nous faudra-t-il, avec l'implication des collectivités territoriales, que je souhaite forte, renégocier les crédits du prochain PDMI.

M. Didier Guillaume.  - Merci pour cette réponse qui ne me satisfait pas du tout. J'en reste sans voix. On nous a bien baladés ! Au nom de la Drôme, je vous demande un calendrier précis et des annonces concrètes.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué.  - La situation sur votre territoire justifie votre ire. Ce que je retiens de ce dossier est l'importance de respecter la parole donnée. Je m'appliquerai à ne pas suivre l'exemple de mes prédécesseurs.

La séance est suspendue à midi trente sept.

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

La séance reprend à 14 h 30.