Loi de finances pour 2010 (Deuxième partie - Suite)

Articles non joints (Suite)

L'article 50 quater est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°II-102, présenté par MM. Lambert et Charasse. (« Redoutable coalition ! », s'exclame M. le rapporteur général)

Après l'article 50 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l'article L. 1211-3 du code général des collectivités territoriales est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Lorsqu'un décret à caractère financier concernant les collectivités territoriales crée ou modifie une norme à caractère obligatoire, la consultation du comité des finances locales porte également sur l'impact financier de la norme. La consultation de la commission consultative d'évaluation des normes mentionnée à l'article L. 1211-4-2 est alors réputée satisfaite. »

M. Alain Lambert.  - M. Charasse et moi-même siégeons à la commission consultative d'évaluation des normes ; c'est pourquoi nous avons cosigné cet amendement de simplification.

Cette commission est consultée sur les mesures réglementaires qui ont une incidence sur les finances des collectivités territoriales. Il arrive fréquemment que les mêmes textes soient soumis au comité des finances locales. Afin d'alléger la procédure, nous proposons qu'ils ne soient plus déférés qu'à ce seul comité.

M. Michel Charasse.  - Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Il arrive que la commission consultative d'évaluation des normes soit appelée à donner son avis sur les effets financiers d'un projet de décret et le comité des finances locales consulté sur le même décret. Le présent amendement a pour objet d'éviter cette redondance ; la commission y est très favorable et remercie MM. Lambert et Charasse de leur initiative conjointe.

M. Eric Woerth, ministre.  - Même avis.

M. Jean-Jacques Jégou.  - C'est un excellent amendement !

L'amendement n°II-102 est adopté et devient un article additionnel.

Article 50 quinquies

Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 31 décembre 2010, un rapport relatif aux modalités rapides de transposition de la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de ressources renouvelables modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE.

Ce rapport détaille comment la France entend respecter le 2 de l'article 21 de cette directive, selon lequel, aux fins de démontrer le respect des obligations nationales imposées aux opérateurs en matière d'énergie renouvelable et de l'objectif en matière d'utilisation d'énergie provenant de sources renouvelables pour tous les modes de transport, la contribution apportée par les biocarburants produits à partir de déchets, de résidus, de matières cellulosiques d'origine non alimentaire et de matières ligno-cellulosiques est considérée comme équivalente à deux fois celle des autres biocarburants.

M. le président.  - Amendement n°II-168, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - En cette fin d'examen des articles non rattachés, la commission propose dans un souci de simplification de supprimer l'article 50 quinquies. En effet, le Sénat a inséré dans la première partie du projet de loi de finances un article 12 terdecies qui prévoit la double comptabilisation des biocarburants de deuxième génération afin d'atteindre les objectifs d'incorporation prévus à l'article 266 quindecies du code des douanes. Nous sommes donc allés plus loin que les députés, qui avaient seulement prévu la remise d'un rapport sur le sujet. (On le confirme et on en remercie M. le rapporteur général à droite) L'article 50 quinquies est donc devenu sans objet.

L'amendement n°II-168, accepté par le Gouvernement, est adopté et l'article 50 quinquies supprimé.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°II-123 rectifié bis, présenté par M. de Montgolfier.

Après l'article 50 quinquies, insérer un article ainsi rédigé :

I. - Le II de l'article 156 bis du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque, dans la situation mentionnée au deuxième alinéa, les associés qui sont à l'origine de la constitution de la société agréée sont des personnes morales de droit public ou des sociétés d'économie mixte, les dispositions du premier alinéa du 3° du I de l'article 156 peuvent s'appliquer aux revenus de l'année d'acquisition des parts sociales par des personnes physiques à raison des charges foncières supportées par la société entre la date de la déclaration d'ouverture de chantier prévue à l'article R. 424-16 du code de l'urbanisme et celle de l'acquisition de leurs parts par les personnes concernées, sous réserve :

- que les parts sociales aient été acquises au plus tard le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de la déclaration d'ouverture de chantier précitée ;

- et que ces charges aient été intégralement remboursées à la société agréée, à proportion de leurs parts, par les associés personnes physiques. »

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Albéric de Montgolfier.  - Afin de faciliter l'association des personnes physiques au financement des projets de rénovation de monuments historiques détenus par les collectivités publiques, je propose que celles qui ont acquis des parts dans une société associée à un tel projet puissent déduire de leurs revenus les dépenses de rénovation, même antérieures à leur souscription.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - C'est un excellent amendement, qui facilite l'association des personnes physiques au financement des projets de rénovation de monuments historiques détenus par les collectivités publiques. Il devrait favoriser la commercialisation de parts de SCI en garantissant aux futurs investisseurs le bénéfice du régime « monuments historiques », et contribuer ainsi à la préservation du patrimoine. (Mme Nicole Bricq estime l'argument spécieux)

Sa portée est rigoureusement encadrée, ce qui ne vous étonnera pas de la part d'un des membres les plus actifs de la commission des finances. (On en félicite M. de Montgolfier à droite) La dérogation est subordonnée au remboursement par les acquéreurs de la dépense avancée par les associés initiaux et à la réalisation de l'intégralité des acquisitions au plus tard le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de la déclaration d'ouverture de chantier. Avis très favorable.

M. Eric Woerth, ministre.  - Avis favorable. (Marques de satisfaction à droite ; récriminations à gauche) L'amendement permettra d'associer des personnes privées à la rénovation de bâtiments historiques...

M. Charles Revet.  - C'est une très bonne chose !

Mme Nicole Bricq.  - Il y a des fondations pour cela !

M. Eric Woerth, ministre.  - ...en leur accordant le bénéfice d'un régime fiscal privilégié : la déduction au titre des monuments historiques est la seule qui n'ait pas été plafonnée.

Mme Nicole Bricq.  - On s'en souvient !

M. Eric Woerth, ministre.  - Cela devrait favoriser la rénovation des monuments. Je lève le gage.

L'amendement n°II-123 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

Mme Nicole Bricq.  - Une niche de plus !

M. le président.  - Amendement n°II-389 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.

Après l'article 50 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le quatrième alinéa du II de l'article 302 bis K du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« A compter de l'année 2011, ces tarifs sont revalorisés chaque année dans une proportion égale au taux prévisionnel de croissance de l'indice des prix à la consommation hors tabac associé au projet de loi de finances de l'année. »

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Cet amendement tend à indexer les tarifs de la taxe de l'aviation civile sur l'indice des prix, afin que nous n'ayons pas à y revenir chaque année. (M. Charles Revet approuve)

L'amendement n°II-389 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°II-131 rectifié ter, présenté par MM. Collin, Charasse, Mézard, Plancade et Tropeano et Mme Escoffier.

Après l'article 50, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le IV de l'article 1609 quatervicies du code général des impôts est ainsi modifié :

Dans le tableau constituant le sixième alinéa, les tarifs : « 9,5 euros », « 9 euros » et « 11 euros », sont remplacés respectivement par les tarifs : « 10 euros », « 9,50 euros » et « 11,50 euros » ;

2° Au septième alinéa, après les mots : « tonne de fret » sont insérés les mots : « et de courrier» ;

3° À la dernière phrase du neuvième alinéa, les mots : « de l'évolution prévisible des coûts et des autres recettes de l'exploitant » sont remplacés par les mots : « et de l'évolution prévisionnelle des données relatives au trafic, aux coûts et aux autres produits de l'exploitant » ;

4° Après le neuvième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

 « Ces données font l'objet d'une déclaration par les exploitants d'aérodromes selon des modalités fixées par un arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l'aviation civile, qui précise la proportion de prise en charge des coûts qui ne sont pas directement ou totalement imputables aux missions définies au présent IV.

« Ces données peuvent faire l'objet de contrôles sur l'année en cours et les deux années antérieures, diligentés par les services de la direction générale de l'aviation civile. Les exploitants d'aérodromes sont tenus de présenter les pièces justificatives et toutes les informations relatives aux données mentionnées à l'alinéa précédent. En cas de contrôle sur place, la direction générale de l'aviation civile en informe préalablement l'exploitant par l'envoi d'un avis qui précise l'identité des personnes qui en sont chargées et la période visée par le contrôle. L'exploitant peut se faire assister par un conseil de son choix. A l'issue du contrôle, un rapport est adressé à l'exploitant concerné qui dispose d'un délai de deux mois pour faire part de ses observations. »

II. - Au premier alinéa du IV bis du même article, l'année : « 2008 » est remplacée par l'année : « 2010 » et le montant : « 1 euro » est remplacé par le montant : « 1,25 euro ».

M. Michel Charasse.  - Dans les aéroports, le service de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs, la lutte contre le péril animalier, les mesures de sûreté et les contrôles environnementaux sont confiés aux exploitants par l'article L. 213-3 du code de l'aviation civile. Ces derniers perçoivent la taxe d'aéroport, due par les transporteurs aériens pour chaque passager ou tonne de fret embarqué au départ des aéroports français, et depuis 2008 par une majoration du tarif de la taxe, dont le produit est réparti entre les aéroports qui ont besoin d'un complément de financement.

Le coût des dépenses de sûreté et de sécurité n'a cessé de croître depuis 2001, appauvrissant sensiblement les aéroports moyens et petits. Tous doivent faire face à la diminution des recettes liée à la baisse du trafic aérien en 2009. L'insuffisance de financement cumulée s'élève aujourd'hui à plus de 100 millions d'euros, contre 48 millions l'an dernier, et se montera à plus de 160 millions en 2010 si rien n'est fait. Il est vrai que la crise conjoncturelle a contribué à cette dégradation.

Nous proposons donc de modifier l'article 1609 quatervicies afin de renforcer la base légale, parfois contestée par les gestionnaires d'aéroports, du système déclaratif permettant de fixer les tarifs, mais aussi de relever le taux plafond de la taxe pour chacune des classes d'aéroports et celui de la majoration.

Le déficit devrait ainsi être stabilisé en 2010, puis résorbé à partir de 2011 quand le trafic recommencera, nous l'espérons, à croître plus rapidement.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Cet amendement, dû pour l'essentiel à M. Collin qui est rapporteur spécial des crédits de l'aviation civile, (M. Michel Charasse en convient) nous paraît équilibré. Compte tenu de l'augmentation des besoins et de la baisse du trafic en 2009, en particulier dans les petits aéroports, le relèvement des plafonds de la taxe est indispensable. Sans mesure corrective, l'insuffisance de financement serait de plus de 160 millions d'euros en 2010. L'augmentation proposée est raisonnable et n'a pas vocation à compenser intégralement l'insuffisance de financement puisqu'une reprise progressive du trafic est attendue. La démarche est proche de celle qui a présidé au relèvement de la taxe d'aviation civile en première partie du PLF. L'impact sur le coût des billets devrait être minime. Enfin le nouveau dispositif de contrôle et d'encadrement de l'évaluation des coûts devrait éviter que des exploitants d'aéroports ne se livrent à des déclarations fantaisistes ou trop optimistes et n'augmentent la taxe de façon disproportionnée. Avis favorable.

M. Eric Woerth, ministre.  - La baisse du trafic aérien a diminué les recettes des gestionnaires d'aéroports, alors même que leurs dépenses sont en partie incompressibles.

Il en résulte une charge importante pour les aéroports, notamment pour les plus petits.

Il convient de ne pas réévaluer de façon brutale les tarifs de la taxe pour ne pas freiner la reprise du transport aérien. Avec cet amendement, vous êtes parvenu à un bon équilibre. Avis favorable.

L'amendement n°II-131rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°II-170 rectifié, présenté par MM. Charasse, Collin, Alfonsi, Barbier, Mézard, Plancade, Tropeano et Vendasi.

Après l'article 50 quinquiès, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La rémunération du président-directeur-général du groupe EDF ne peut être supérieure de plus de 20 % à la rémunération maximale allouée, hors filiales, aux présidents des entreprises publiques SNCF, RATP et La Poste, au gouverneur de la Banque de France et au directeur général de la Caisse des Dépôts et Consignations.

M. Michel Charasse.  - Il convient d'aider le Gouvernement à faire face à des revendications salariales qui peuvent poser problème à un certain nombre de parlementaires et de responsables publics. Je suggère donc de limiter à plus 20 % au maximum la rémunération du président d'EDF par rapport à la rémunération maximale accordée par l'État aux présidents des entreprises publiques que je cite dans mon amendement. Il faut en effet mettre un terme à cette situation alors que notre pays connaît une crise sans précédent : ce n'est plus tolérable.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Ah ah ! ! ! (On confirme les exclamations du rapporteur général à droite) Comme toujours, notre collègue a le talent de poser des questions intéressantes au moment où l'assistance est très disponible (On s'amuse sur les mêmes bancs) Ce problème est susceptible d'intéresser l'opinion publique. La commission s'en remet à l'avis du Gouvernement (Nouveaux rires à droite)

M. Bruno Sido.  - Quel courage !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Il ne s'agit pas d'une clause de style ! Dans le passé et dans la vieille République, c'était le ministre du budget qui fixait les salaires dans la fonction publique.

M. Michel Charasse.  - Absolument !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Cela faisait partie de son coeur de métier. Nous ne sommes plus dans les mêmes conditions : le monde et les marchés sont ouverts. Désormais, on peut présider une entreprise et présider le conseil de surveillance d'une autre... Les repères habituels doivent donc être relativisés mais dans le secteur public, il serait normal qu'il y ait une harmonisation. C'est là toute l'utilité de la proposition de M. Charasse. Il procède par comparaison avec d'autres entreprises publiques.

En revanche, je suppose qu'il ne souhaite pas que la rémunération du président d'EDF excède de 20 % la somme des rémunérations de tous les présidents qu'il cite ! (Rires à droite) Il faudrait une légère rectification de l'amendement pour indiquer qu'il s'agit bien d'une moyenne.

Au-delà des termes, nous comprenons bien l'inspiration de l'auteur de l'amendement que nous ne pouvons que partager. M. le ministre va certainement nous faire des commentaires avisés.

M. Eric Woerth, ministre.  - Dans la vieille République, c'était bien le ministre du budget qui fixait la rémunération mais dans la nouvelle République, c'est-à-dire depuis la division de Bercy en deux ministères, le ministre du budget fixe les situations individuelles des fonctionnaires et la ministre de l'économie fixe les rémunérations, avec le ministre de l'énergie pour EDF, des entreprises publiques. (Rires à droite)

Il faut assumer les questions de rémunérations : dans une démocratie transparente, elles peuvent faire l'objet de débats et même choquer l'opinion publique, mais il faut assumer ces débats et essayer d'expliquer les choses. La fixation de la rémunération du président d'EDF obéit à des règles claires : un comité des nominations et des rémunérations d'EDF propose une rémunération aux ministres de l'économie et de l'énergie. Ces deux ministres approuvent ou non cette rémunération et, ensuite, le conseil d'administration en décide définitivement.

Faut-il plafonner la rémunération ? C'est extrêmement discutable. Comment fixer une règle objective ? Vous proposez 20 % : pourquoi par 15, 18, 22 ou 30 % ? D'ailleurs, la rémunération du président d'EDF en 2008 excédait de plus de 20 % la plus élevée des rémunérations des PDG de la SNCF, la RATP ou La Poste. La comparaison avec ces entreprises a de sérieuses limites puisque EDF est une entreprise cotée dont le chiffre d'affaires est beaucoup plus important que les trois autres entreprises en question. La comparaison devrait plutôt être faite entre les entreprises de taille comparable en Europe. Dans ce cas-là, le nouveau président d'EDF se situe dans la fourchette basse des rémunérations en vigueur. (Murmures improbateurs à gauche) Je serais donc ravi que vous puissiez retirer cet amendement.

M. François Marc.  - Le groupe socialiste votera cet amendement car il s'inspire de nos préoccupations : il y a quelques mois, nous avons présenté une proposition de loi visant à réformer le statut des dirigeants de société et à encadrer leurs rémunérations. Nous avions rappelé qu'il y avait aujourd'hui un fossé considérable entre les rémunérations des salariés et celles des dirigeants. En 2006, la moyenne des rémunérations des patrons du CAC 40 représentait 380 Smic, avec une rémunération moyenne de l'ordre de 4,4 millions par an. Ces patrons étaient parmi les mieux payés d'Europe, et je ne parle même pas des rémunérations accessoires.

Nous avions souhaité une harmonisation à l'échelle européenne. Cet amendement va dans le même sens : comment expliquer à nos concitoyens que ce fossé des rémunérations va se creuser encore plus, que des patrons vont pouvoir être à la tête de plusieurs entreprises et cumuler les rémunérations ? Cet amendement a le mérite d'attirer notre attention sur ce sujet sensible.

présidence de M. Gérard Larcher

M. Michel Charasse.  - Je vais rectifier mon amendement pour le rendre plus clair, en insérant après les mots : « hors filiales », les termes « à chacun des présidents ».

Compte tenu des propos de M. le ministre, je modifie également le taux de 20 % pour le porter à 25 % afin de le rendre plus proche de la situation de M. Gadonneix il y a encore peu.

Au-delà du cas particulier qui se pose aujourd'hui, car nous ne faisons pas de loi intuitu personae, je propose de revenir à une règle cohérente qui existait il y a quelques années, peut-être sous la vieille République dont a parlé M. le rapporteur général : nous disposions alors d'une grille, certes imparfaite, mais qui présentait un minimum de cohérence. Si maintenant, les 36 membres du Gouvernement se préoccupent de fixer les rémunérations, le cafouillage sera complet ! Imaginez qu'il y ait autant de ministres qui décident de fixer la rémunération des salaires et la grille de la fonction publique : ce serait un beau bazar ! Je suis plutôt satisfait d'avoir suscité ce débat. (Sourires)

M. le président.  - Il s'agit donc de l'amendement n°II-170 rectifié bis et qui se lit ainsi :

Après l'article 50 quinquiès, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La rémunération du président-directeur-général du groupe EDF ne peut être supérieure de plus de 25 % à la rémunération maximale allouée, hors filiales, à chacun des présidents des entreprises publiques SNCF, RATP et La Poste, au gouverneur de la Banque de France et au directeur général de la Caisse des Dépôts et Consignations.

M. Serge Dassault.  - Si vous voulez de bons présidents, il faut bien les payer, sinon ils ne viennent pas, ils vont ailleurs. Et il ne nous restera plus que des cloches ! Ne fixez pas de limites et discutez avec eux, mais avant de les nommer ! Si vous embauchez un président et que vous revenez ensuite sur son salaire, ce n'est pas bien !

M. Michel Charasse.  - C'est vrai pour le privé, mais dans ce cas précis, il s'agit de l'argent du contribuable !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Je souhaite en revenir au droit et à l'information du public. Il existe un document d'information très clair : c'est le « jaune » budgétaire. Or, dans celui-ci figurent les rémunérations des présidents et directeurs généraux des sociétés du secteur public, c'est-à-dire celles contrôlées par l'État ou celles dans lesquelles l'État conserve une participation importante : cela va de Renault à Areva en passant par Air France et France Télécom... En réalité, la catégorie que vise notre collègue Michel Charasse ne devrait pas être seulement celle qu'il cite mais englober un ensemble beaucoup plus vaste. La rédaction de cet amendement n'est donc pas adéquate : nous ne sommes pas en état cet après-midi de faire un travail de commission.

M. Charles Revet.  - C'est vrai !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Je suggère que nous regardions les choses plus globalement et que la commission des finances fasse des auditions (on ironise à gauche) puis des propositions de méthode.

Je ne sais pas si la règle arithmétique de l'amendement Charasse est susceptible de s'appliquer. Dans la situation antérieure, le président d'EDF n'était pas le mieux payé de la liste, et de loin ! Il y a certainement une autre règle à trouver. Il serait préférable de retirer l'amendement et d'y travailler plus largement. (Applaudissements à droite)

M. Adrien Gouteyron.  - Très bien !

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Il faut que le Gouvernement clarifie les principes de gouvernance de ces entreprises. Y a-t-il un véritable « marché » des présidents d'entreprises du CAC 40 ? La composition des conseils d'administration, où l'on retrouve toujours les mêmes personnes, fait peser un soupçon d'endogamie.

M. Charles Revet.  - C'est un circuit fermé !

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Le concept de marché ne me paraît pas pertinent en l'espèce -et cela vaut aussi pour les traders ou les footballeurs. A partir d'un certain niveau de rémunération, les besoins légitimes sont couverts. Les cas de cumul de mandats devraient également faire l'objet d'un minimum de codification. La crise, économique, financière et de confiance, résulte d'abus, de dérives, de manquements à la déontologie. L'État doit être garant du respect de principes qui ne donnent pas prise aux critiques et aux polémiques.

La commission des finances peut organiser des auditions, mais c'est au Gouvernement de mettre sur la table les principes fondamentaux qu'il entend faire respecter. (Applaudissements et « très bien » sur de nombreux bancs à droite)

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Très bien.

M. Eric Woerth, ministre.  - Les candidats à la présidence de ces entreprises sont désormais auditionnés par le Parlement. La rémunération de M. Proglio n'a rien d'anormal par rapport à la moyenne européenne dans son secteur, et se situe plutôt dans le bas de la fourchette. N'allons pas inventer des règles complexes, sur le modèle de la fonction publique, auxquelles il faudra prévoir 36 000 exceptions... Mieux vaut en rester à une procédure claire et transparente : au conseil d'administration de décider, après agrément du ministre.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - L'article 13 de la Constitution ne s'applique pas encore : la loi organique n'a pas été soumise au Sénat. La commission compétente devra avoir pleine connaissance des conditions de rémunération et des éventuels cas de cumul ; il nous faudra acquérir une certaine culture pour que ces auditions répondent réellement à l'objectif visé.

Mme Nicole Bricq.  - Jusqu'ici, M. Proglio était membre de pas moins de cinq conseils d'administration différents. Le code de bonne conduite du Medef fixe le maximum à trois...

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - C'est la loi sur les sociétés qui fait le droit, pas le Medef.

Mme Nicole Bricq.  - La commission des finances de l'Assemblée nationale a auditionné M. Proglio, tout comme la commission de l'économie du Sénat. Il faut voter cet amendement : s'il est imparfait, la CMP y remédiera.

M. Michel Charasse.  - Je suis perplexe. Notre rédaction est en effet imparfaite : il manque des entreprises importantes, comme France Télécom. Nous voulons un système cohérent, sur le modèle de ce qui existait auparavant, avec une grille pour le secteur public comme pour la fonction publique, et avec une autorité unique. Monsieur Dassault, la situation est différente pour les présidents d'entreprises du secteur privé : ici, il s'agit de l'argent du contribuable !

Sans renoncer à l'idée et à la démarche, je retire l'amendement ; je le redéposerai avec le collectif, dans une autre rédaction qui réponde aux critiques techniques. Dans le secteur public, le chiffre d'affaires ne fait pas tout : le président d'EDF est dans une situation plus confortable que ceux de la SNCF ou de la RATP qui doivent régulièrement faire face à des grèves dures.

L'amendement n°II-170 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-216, présenté par MM. Charasse, Collin, Barbier, Mézard, Plancade et Tropeano.

Après l'article 50 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I- Au troisième alinéa de l'article L. 5212-24 du code général des collectivités territoriales, les mots : «  la part du financement assurée, hors subventions, par le bénéficiaire du fonds de concours » sont remplacés par les mots : « les trois quarts du coût hors taxe de l'opération concernée ».

II- Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Michel Charasse.  - Avec le concours du rapporteur général, nous avons tenté de remettre de l'ordre dans les rapports entre syndicats départementaux d'électrification et communes. Aux termes de l'article 14 de la loi du 20 avril 2009, le fonds de concours versé par la commune ne peut être supérieur à celui versé par le syndicat : si ce dernier subventionne une opération à 40 %, la commune peut apporter un concours de 40 %, éligible au FCTVA en tant que dépense d'investissement, mais la différence est comptabilisée comme dépense de fonctionnement. Cet amendement permet que l'ensemble des dépenses d'investissement soient éligibles au FCTVA.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Le sujet est complexe. Le droit actuel est récent et résulte de l'article 14 de la loi de finances rectificative du 20 avril 2009, introduit à l'initiative de M. de Courson.

L'objectif de l'amendement est de permettre aux communes d'augmenter la part de financement sur laquelle il est possible de récupérer la TVA.

Est-il normal qu'un syndicat d'électricité finance moins de la moitié d'une opération ? Ne risque-t-on pas de favoriser une dilution des interventions des syndicats d'électricité ?

M. Michel Charasse.  - C'est déjà le cas !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Qu'en pense le Gouvernement ?

M. Eric Woerth, ministre.  - Le versement de fonds de concours aux syndicats d'électricité est déjà une dérogation ! Nous cherchons plutôt à clarifier les compétences qu'à les compliquer. Cependant je comprends ce que peuvent être les difficultés qu'évoque M. Charasse ; il est possible que le plafonnement des fonds de concours puisse apparaître trop rigide... Sagesse.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - On le vote !

M. Eric Woerth, ministre.  - Je lève le gage.

L'amendement n°II-216 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-226, présenté par M. J.L. Dupont et les membres du groupe UC.

Après l'article 50 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

A compter du 1er janvier 2010, les lois de finances ainsi que l'ensemble des documents préparatoires y afférents relatifs aux relations financières entre l'État et les collectivités territoriales présentent un tableau récapitulatif qui distingue les dépenses engagées librement par les collectivités territoriales de celles qui résultent d'une obligation législative telle que des transferts de charges ou de compétences.

Ce tableau retrace l'évolution de ces dépenses et présente l'ensemble des concours financiers apportés par l'État aux collectivités territoriales. Il évalue le respect de l'obligation instituée par l'article 72-2 de la Constitution et par la loi organique du 22 juillet 2004 de compenser tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales par l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice et d'accompagner toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales de ressources déterminées par la loi.

M. Daniel Dubois.  - Le Gouvernement demande aux collectivités territoriales de l'accompagner dans la lutte contre la crise alors qu'elles vont disposer de ressources limitées et se voient imposer sans cesse des normes. C'est ainsi que, comme l'a dit M. Charasse, la cathédrale de Clermont-Ferrand risque d'être fermée aux fidèles parce qu'elle ne serait pas conforme aux normes. Mais la plupart des normes relèvent du règlement et non de la loi, si bien que le législateur ne peut agir sur elles. Elles sont décidées par le pouvoir réglementaire et l'État les impose aux collectivités territoriales qui doivent payer en conséquence !

On nous parle de bonne gouvernance. Dans le monde de l'entreprise, on tient pour acquis que qui commande paie. Ce bon principe devrait s'appliquer aussi aux relations entre l'État et les collectivités territoriales. Pour le moins, vous pourriez nous fournir un tableau récapitulatif des dépenses nouvelles ainsi imposées aux collectivités.

M. Jean-Louis Carrère.  - Votez contre le budget !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Incontestablement, voici là une belle initiative pédagogique de transparence ! Les contraintes de cet ordre ne sont pas toujours très claires. Elles le sont pour le revenu minimum d'insertion, le RSA ou l'APA. Mais quand il ne s'agit pas d'obligations légales, la frontière est parfois difficile à tracer de façon incontestable avec ce qui peut n'être que des prescriptions administratives, voire de simples pratiques.

Le Gouvernement pourrait mieux utiliser les annexes aux lois de finances, le jaune sur « l'effort financier en faveur des collectivités locales » ; ce serait déjà un progrès. Il serait bon d'élaborer un plan comptable collectivité par type de collectivité, afin de mieux séparer dépenses obligatoires et non obligatoires. Dans les années qui viennent, les évolutions des dotations risquent de nous être comptées.

Mme Nicole Bricq.  - Ah bon ?

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Il n'y a pas de miracle ; nous ne vivons pas sur une île déserte ; la crise n'est pas réservée aux autres ; l'opinion publique a besoin de la part de ses élus de réponses responsables et rationnelles ! (Exclamations sur les bancs socialistes ; applaudissements à droite)

Sur l'amendement, nous nous en remettons à l'avis du Gouvernement. (Rires à droite)

M. Eric Woerth, ministre.  - L'idée est excellente mais il est très difficile de faire une partition exacte entre dépenses contraintes et dépenses librement engagées par les collectivités territoriales. Les choses ne sont parfaitement claires que pour les prestations sociales. S'agissant des compétences transférées, les pratiques varient énormément d'une région l'autre. Pour les élèves du second cycle, l'écart va du simple au double entre la Lorraine et la région Midi-Pyrénées. Les normes ne sont pas fixées sans consultation. Pour les sapeurs-pompiers, par exemple, le décret a fait l'objet d'un consensus, et nous avons les travaux de la commission Doligé, et ceux de la commission d'évaluation des normes de M. Lambert

Je veux bien engager une réflexion sur le sujet mais nous ne sommes pas prêts à faire ce type de rapport. Retrait ?

M. Daniel Dubois.  - Je ne retire pas cet amendement qui m'est inspiré par la réalité du terrain.

Oui, je suis de ceux qui considèrent que les collectivités territoriales doivent accompagner l'effort de l'État contre la crise, mais ce ne peut être continuellement un marché de dupes ! L'État doit prendre ses responsabilités par rapport aux dépenses qu'il impose.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Il s'agit d'un document d'information : il ne serait peut-être pas dommageable de voter cet amendement, M. Dubois et son groupe y seraient sensibles.

M. Eric Woerth, ministre.  - On peut voter tous les rapports du monde mais soyons sérieux ! L'État n'impose pas tant de charges que cela ! (Exclamations sur les bancs socialistes) Outre que le Parlement vote les transferts de compétences, les transferts de recettes ont été évalués très largement au-delà des besoins. Regardez pour le revenu minimum d'insertion ou même pour les TOS. (Exclamations scandalisées à gauche) Ce qui est scandaleux, c'est de se livrer à la caricature sans le moindre effort d'objectivité !

C'est trop facile de rendre toujours l'État responsable : les choses sont nettement plus compliquées.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Daniel Dubois met le doigt sur une vraie contradiction. Il nous arrive de voter des textes sans avoir bien mesuré s'ils sont ou non financièrement soutenables. (M. Charles Revet approuve) Je pense à la loi de 2005 sur le handicap, tissée de belles intentions, mais dont nous n'avions pas mesuré le prix ; au statut des sapeurs-pompiers, qui a donné lieu à la création d'un comité, présidé par notre excellent collègue Doligé. Mais sommes-nous capables de dire non à des revendications parfois corporatistes ? Dans nos collectivités, nous pouvons prendre l'initiative de sérier les dépenses selon qu'elles découlent d'une obligation qui nous est faite par la loi ou de compétences que nous souhaitons développer. On verra que, même dans le premier cas, il reste une marge d'appréciation. Demain, nous serons tous dans l'obligation de faire preuve de beaucoup de rigueur, et c'est seulement alors que la dépense publique refluera.

Pour l'heure, que le Sénat vote cet amendement marquerait notre détermination à mettre en cohérence nos votes et nos actes, nos intentions et nos capacités financières. (Applaudissements au centre.)

M. François Marc.  - Voilà des mois que nous entendons un discours de culpabilisation des élus, accusés d'être trop dépensiers. Il nous paraît donc bon de rechercher la transparence en matière d'information financière et c'est pourquoi nous regardons avec sympathie l'amendement de M. Dubois.

Le président Arthuis a eu raison de souligner que nous n'avons pas toujours mesuré les conséquences d'un transfert de compétences, au point que la situation est devenue inadmissible.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Passons donc au vote.

M. François Marc.  - En 2008, dernière année pour laquelle on dispose de chiffres complets, les départements, qui se sont vu confier la responsabilité de l'APA, de la PCH et du RMI ont dépensé 11,406 milliards, et n'ont reçu de l'État que 7,58 milliards, soit 3,8 milliards de moins. Il est vrai qu'il était convenu que l'APA serait prise en charge à 50-50, mais cela laisse tout de même 3 milliards de manque à gagner pour les départements.

Cet exemple illustre bien la situation. La réforme des finances locales introduite dans ce projet de loi de finances ne prend pas en compte cette incapacité de l'État à faire face à ses engagements.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Votons donc l'amendement.

M. François Marc.  - Cette analyse aurait dû être le point de départ de toute réforme des finances locales. Cela n'a pas été le cas. Nous le déplorons.

Ce budget 2010 aggrave encore le désengagement de l'État, puisque l'enveloppe de la compensation recule de 5,7 %. Et le processus risque de s'aggraver : les propos que nous a tenus le rapporteur général ne sont pas faits pour rassurer. La clause de revoyure ne suffira pas à régler la question du passif. Il faudra trouver au plus vite des mesures de compensation. Cet amendement va dans le bon sens. (Applaudissements à gauche.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - J'appelle les orateurs à la sobriété : nous sommes convenus de voter sur l'ensemble avant la suspension du dîner.

M. Michel Charasse.  - Bien que nous ne soyons pas une assemblée d'horlogers, je comprends votre souci : je serai bref.

La sensibilité des élus sur la question des charges n'a cessé de s'aiguiser, depuis les premières lois de décentralisation. Cela étant, la position du ministre est, elle aussi, très compréhensible. Il faut avoir exercé de telles responsabilités pour le mesurer. Il ne conteste pas le fond, me semble-t-il, mais se pose la question de la faisabilité, autrement dit du risque de polémique susceptible de suivre la publication d'un tableau qui n'aurait pas été établi de façon suffisamment contradictoire.

Nos collègues, dont je voterai l'amendement, demandent en somme une étude d'impact complémentaire. Pour siéger au comité d'évaluation des charges, je puis vous assurer qu'il y a fort à parier qu'elle donnerait lieu, quant à l'évaluation des charges, à contestation, et c'est pourquoi je propose de compléter le premier alinéa de l'amendement en précisant que le récapitulatif est « établi après avis de la Cour des comptes et de la Commission d'évaluation des charges.

M. Daniel Dubois.  - Nous souscrivons à cette proposition.

M. le président.  - Ce sera donc l'amendement n°II-226 rectifié.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Auquel la commission est favorable.

L'amendement n°II-226 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-309, présenté par M. Arthuis.

Après l'article 50 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est institué en 2010 une contribution de cent cinquante millions d'euros pour la réhabilitation du logement social et le soutien aux travaux publics à la charge des caisses de congés payés du bâtiment et des travaux publics, mentionnées à l'article L. 3141-30 du code du travail, assise à due proportion des excédents réalisés sur le résultat financier de chacune des caisses précitées.

Le versement de cette contribution se fait en deux fois, la première avant le 1er mars 2010 et la seconde avant le 1er septembre 2010.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Début 2009, messieurs les ministres, nous avons été saisis d'un projet de loi de finances rectificative portant plan de relance. Alors que nous cherchions les moyens de stimuler notre économie, j'avais déposé un amendement tendant à prélever 100 millions sur les crédits du bâtiment et des travaux publics pour les porter au financement de la construction et de la rénovation de logements sociaux. Devant les protestations très vives des gestionnaires du BTP, j'avais été conduit à le retirer, à la suite de quoi une mission d'information sénatoriale avait été diligentée sur la gestion des caisses de congés payés du bâtiment, qui disposent d'un volant d'actif de 5 à 6 milliards -montant même sur lequel nous avions pensé opérer le prélèvement. Les responsables, dès la fin de l'hiver, avaient alors déclaré leur intention de mettre 100 millions à disposition du mouvement HLM, puis parlé d'ajouter 50 millions fin avril. Rien ne s'est passé depuis. Devant cette inertie, j'ai déposé à nouveau l'amendement, ce qui a eu pour effet de lever sans délai l'inertie : une convention a aussitôt été passée entre le mouvement HLM et la caisse des congés payés du bâtiment. Mais cette caisse étant placée sous la responsabilité du ministère, la direction du Trésor a tardé à répondre ; même inertie de la part de la direction générale du travail. Enfin, par lettre en date du 7 décembre, la direction du Trésor a signifié son accord pour mettre à disposition 150 millions à 1 % ; le 8 décembre, le ministère du travail validait ce dispositif. C'est ainsi que notre diligence a permis d'activer enfin ce dossier...

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Il va de soi que le président Arthuis, auquel je rends hommage pour sa pugnacité, a exprimé l'avis de la commission.

Grâce à son travail la clarté a été faite sur les caisses de congés payés du bâtiment, certes indispensables, mais qui utilisent des cotisations versées par les entreprises pour satisfaire des besoins collectifs. L'État est le garant naturel du système. Selon un principe constant de la commission et du Gouvernement, il s'est agi de réveiller les « trésoreries dormantes ».

Aujourd'hui, les professionnels se sont engagés dans un dispositif conventionnel qui semble atteindre au moins une partie de l'objectif. La commission aimerait avoir l'assurance que le Gouvernement le soutient.

M. Eric Woerth, ministre.  - Vous avez proposé l'an dernier un amendement semblable, qui vient de recevoir une issue positive, quoique tardive. Placé sous la responsabilité du ministère du travail, le réseau des caisses de congés payés s'est engagé à suivre la trésorerie de plus près et à réduire les réserves, passées de 750 millions en mars 2009 à moins de 600 millions aujourd'hui. Ainsi, 150 millions ont été rendus aux entreprises du bâtiment.

En outre, le Gouvernement a mobilisé 150 millions d'euros afin qu'un prêt bonifié au taux de 1 % permette aux HLM de réhabiliter des logements, en partenariat avec les collectivités territoriales. Les administrations concernées viennent de valider le protocole, qui sera signé prochainement.

L'application du taux réduit pendant quinze ans équivaut à une subvention de 75 millions d'euros, proche des 100 millions que vous aviez réclamés l'an dernier, en sus du plan de relance dans le bâtiment, doté de financements exceptionnels pour 2 milliards.

Votre action a donc mis en mouvement des caisses dont la situation est de nouveau acceptable. Ce réseau sera mis sous surveillance. Il reste néanmoins à régler un aspect juridique, les fonds en cause paraissant être de nature privée.

Dans l'immédiat, je souhaite le retrait de l'amendement.

M. Thierry Repentin.  - Je remercie mes collègues de la commission des finances pour avoir lancé un processus sur le point d'aboutir un an jour pour jour après avoir été lancé. La suggestion de prélèvement a créé un engouement spontané de cet organisme pour trouver avec le monde HLM les voies et moyens permettant de lui prêter 150 millions d'euros afin d'isoler les logements les plus énergivores.

Nous avons perdu beaucoup de temps car les ministères de tutelle étaient très réservés. Le Trésor a donné son accord hier, la veille de notre débat sur les derniers articles de la loi de finances. Ce n'est pas un hasard.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - La crainte de la foudre...

M. Thierry Repentin.  - Depuis hier, les parapheurs tournent, ce qui permettra au mouvement HLM d'engager bientôt des travaux qu'il n'aurait pu mener à bien seul. Au demeurant, ce surcroît d'activité sera utile pour les entreprises du bâtiment. Les collectivités territoriales aussi recevront 2 milliards d'euros à taux bonifiés pour conduire des travaux.

J'invite le président de la commission des finances à garder au chaud son amendement, car un nouvel accord serait bienvenu l'année prochaine ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Les contrôles ont fait apparaître que l'exercice de la tutelle était empreint de confiance et pour tout dire distant. Les cotisations pour congés payés proviennent certes des entreprises, mais elles se déduisent des bénéfices imposables, monsieur le ministre, si bien que l'État participe indirectement à la constitution des réserves en cause. Voilà qui légitime son intervention.

Je me réjouis que les négociations aient abouti.

L'amendement sera retiré, mais « gardé au chaud » comme l'a dit M. Repentin, en vue du collectif de la semaine prochaine, car je veux m'assurer que les négociations avancent à un rythme soutenu. Il servira aussi l'année prochaine. La gestion des caisses est à peu près rigoureuse, mais leurs bilans sont approximatifs.

L'amendement n°II-309 est retiré.

M. Gérard Longuet.  - Je suis fier d'appartenir à la commission des finances, pour la façon dont elle exerce le mandat de contrôle qui est constitutionnellement le sien. On dit que la crainte du Seigneur est le début de la sagesse. (Exclamations à gauche) Vous avez exprimé avec force une menace, comme vous l'aviez fait l'égard de ceux qui bénéficient d'une TVA réduite, mais restent indifférents à l'effort de la collectivité envers eux.

Je remercie le président de la commission pour le retrait de son amendement. Restons dans le domaine religieux: « à tout pécheur, miséricorde ». (Exclamations à gauche)

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - L'Europe a des racines chrétiennes !

M. Gérard Longuet.  - Les torts sont sans doute partagés dans cette affaire, mais j'espère que cet épisode ne connaîtra pas d'autres péripéties, car le dispositif est utile aux entreprises qui construisent des logements.

M. Jean-Louis Carrère.  - Amen. C'est le bal des chanoines !

Seconde délibération

M. Éric Woerth, ministre.  - Le Gouvernement demande au Sénat une seconde délibération sur les articles 35, 51 bis, 59 ter A et, par coordination, sur les articles 34, 39 et 40.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Pour prendre connaissance de ces amendements, la commission demande une suspension de séance.

M. le président.  - Je vais consulter le Sénat sur le principe de cette seconde délibération.

La seconde délibération est ordonnée.

La séance, suspendue à 17 h 45, reprend à 18 heures.

M. le président.  - Le Sénat a décidé de procéder à une seconde délibération des articles 35 et état B, 39 et 40, ainsi que, par coordination, de l'article d'équilibre 34 et état A. Le Gouvernement a présenté trente amendements numérotés B1 à B30. En application de l'article 43, alinéa 6 du Règlement, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d'amendements et sur les sous-amendements s'y appliquant.

M. Eric Woerth, ministre.  - La seconde délibération est articulée autour de cinq grands points. Premièrement, il s'agit d'ajuster le crédit de certaines missions pour tenir compte des dernières données sur les transferts aux collectivités locales : les crédits du budget général sont minorés de 15 millions mais ceux de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » sont majorés de 9 millions. Le plafond des autorisations d'emploi de l'État et de celui de ses opérateurs sont adaptés en conséquence ; l'amendement présenté à l'article 34, quant à lui, le met en cohérence avec l'article 39.

Deuxièmement, le Gouvernement vous propose d'ouvrir 30 millions de crédit en sus des 100 millions déjà affectés aux centres de vaccination contre la grippe.

Troisièmement, le Gouvernement souhaite revenir sur quatre amendements : l'amendement n°II-275 instituant une taxe sur les profits cosmétiques au profit de l'Afssaps, le Gouvernement ne souhaitant pas créer une nouvelle taxe et l'agence disposant des moyens nécessaires ; l'amendement n°II-5 transférant 10 millions du Fonds français pour l'environnement mondial au ministère des affaires étrangères car il ne faut pas sembler réduire les crédits de ce fonds au moment où s'engage le sommet de Copenhague ; l'amendement n°II-90 qui réduit de 2 millions les crédits de l'Agence française pour l'enseignement français à l'étranger, laquelle doit conserver l'intégralité de ses moyens ; l'amendement n°II-3, plafonnant la gratuité de la scolarité dans les lycées français de l'étranger, parce qu'un moratoire a été arrêté et que l'on étudiera une réforme au vu de l'audit.

Quatrièmement, nous abondons, sur proposition de votre commission, les crédits de certaines missions de 58 millions.

Cinquièmement, je vous propose de réduire la provision pour dépenses accidentelles et imprévisibles de 72 millions et la charge de la dette de 30 millions afin de ne pas détériorer l'équilibre du budget. Au total, le déficit prévisionnel reste inchangé par rapport à celui de fin de première partie, soit 117 554 millions

En application de l'article 44-3 de la Constitution et de l'article 42, alinéa 7 du Règlement du Sénat, le Gouvernement souhaite, compte tenu du grand nombre d'amendements soumis à votre Haute assemblée, qu'il soit procédé à un seul vote sur les articles faisant l'objet de cette seconde délibération.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - La commission des finances, après avoir examiné avec soin chacun de ces amendements (sourires à droite), a émis un avis globalement favorable.

Les amendements et articles soumis à seconde délibération et à coordination sont adoptés.

Vote sur l'ensemble

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - (Applaudissements au centre et à droite) Nous voici presque au terme du marathon budgétaire. L'exercice s'annonçait cette année particulièrement délicat et je me réjouis que nous puissions conclure à l'heure. Étrange budget qui, à côté de dispositions classiques -fiscalité et missions-, proposait de supprimer la taxe professionnelle et, de fait, c'est bien ce texte dans le texte qui a été au coeur de nos trois semaines de débat.

Une réforme d'une telle ampleur imposait un effort préalable de pédagogie. La matière, ample et complexe, touche au coeur des ressources de nos collectivités. Le Sénat, qui est la maison des collectivités territoriales, se devait de donner toute sa mesure à la discussion souhaitée par le Président de la République et le Gouvernement, et il revenait à la commission des finances de l'organiser pour que chacun en comprenne les enjeux et que les solutions retenues soient lisibles et acceptables. Vaste tâche à laquelle elle s'est attachée dès septembre. Nous sommes parvenus à la remplir très convenablement grâce à de nombreuses réunions de concertation et en ouvrant nos échanges, notamment à la délégation à la décentralisation et à la mission Belot. Ces réunions préparatoires ont permis de comprendre le texte proposé par le Gouvernement, celui adopté par l'Assemblée nationale, d'aplanir les difficultés, de partager nos interrogations d'élus de terrain, et d'atteindre le résultat le plus consensuel possible.

En décidant de scinder le texte et de renvoyer en seconde partie et, finalement, au premier semestre 2010, les questions relatives à la répartition des ressources, nous avons apaisé les craintes souvent légitimes des élus locaux et nous nous sommes donné le temps de réfléchir sans mettre en cause le principe de la suppression de la taxe professionnelle. L'allègement de prélèvements obligatoires est bien là pour les entreprises, 7 milliards en régime de croisière. Mais nous avons sécurisé de façon satisfaisante les ressources des collectivités territoriales. C'est un vrai défi que nous avons relevé de façon aussi satisfaisante que possible. (M. René-Pierre Signé en doute)

La préservtion du lien entreprises-territoire, c'est le retour vers le bloc communal de 26,5 % de la cotisation sur la valeur ajoutée...

M. René-Pierre Signé.  - C'est insuffisant !

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - C'est aussi le dégrèvement pour les entreprises exonérées de cotisation, qui écarte les déconvenues sur les compensations non actualisées.

Et ceci est une vraie révolution. (M. Adrien Gouteyron approuve) Faut-il pour autant crier victoire ? Dans ce travail à trois, Gouvernement, Assemblée nationale et Sénat -je ne dis pas coproduction, parce qu'au final c'est le Parlement et lui seul qui vote la loi- il n'y a ni vainqueur ni vaincu. Nous ne crierons victoire que lorsque la France aura retrouvé son potentiel de croissance, sa capacité à créer des emplois et à équilibrer ses comptes.

M. Jean-Louis Carrère.  - Ce n'est pas pour demain !

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Dans un dialogue constructif avec le Gouvernement, nous nous sommes fixés plusieurs rendez-vous pour affiner le dispositif ; je ne doute pas que M. le ministre des relations avec le Parlement veillera à ce qu'ils soient respectés, en juin puis lors de la loi de finances pour 2011. Je veux cependant redire mon scepticisme sur l'assiette « valeur ajoutée », qui réintroduit les salaires dans la base imposable, et sur le coût de la mesure pour les finances publiques en ces temps de déficits abyssaux.

Le déficit prévisionnel atteindra fin 2010 plus de 117 milliards d'euros, et la dette 84 % du PIB. Si je m'apprête à voter ce projet de loi de finances, je regrette qu'il n'ait pas pris la mesure des défis qui nous attendent sur le chemin du redressement de nos comptes publics. J'espère que le premier semestre 2010 nous permettra d'avancer. Nous avons tout au long du débat rappelé nos orientations et parfois lancé des coups de semonce vers certains acteurs économiques, tels les restaurateurs.

J'adresse mes très chaleureux remerciements à notre rapporteur général (applaudissements à droite) qui, comme à son habitude, a mis son talent et la force de ses convictions au service du Sénat. Qu'il en soit remercié, de même que les 46 rapporteurs spéciaux et les 66 rapporteurs pour avis et vous tous, mes chers collègues, qui avez enrichi nos débats de vos analyses et de votre grande expérience d'hommes et de femmes de terrain. Oui, le Sénat a bien assumé sa mission. Je salue les membres du Gouvernement qui, pour le plus grand nombre, sont venus débattre avec nous et engager avec les élus de tous bords un dialogue républicain. J'aurais une mention particulière pour Mme la ministre de l'économie et M. le ministre du budget, dont je salue la très grande disponibilité et la très grande compréhension. Le consensus autour du dispositif de remplacement de la taxe professionnelle leur doit beaucoup. Et c'est bien ainsi. Nous n'avons fait qu'exprimer les inquiétudes suscitées par une réforme majeure, dont le succès dépend désormais de notre aptitude à la rendre lisible. Nous avons voté un texte complexe, mais dont la logique, la charpente et le contenu pourront, j'en suis persuadé, être expliqués à nos concitoyens.

Je remercie les services du Gouvernement, la Présidence et les secrétaires du Sénat, ainsi que les services de notre Haute assemblée. (Applaudissements à droite) Grâce à eux, le Sénat est bien l'assemblée du débat éclairé. (Applaudissements à droite)

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.  - L'année 2009 a été difficile, 2010 le sera aussi. Sera-t-elle pour la France et l'Europe celle de la sortie de crise ? A quelle croissance potentielle pouvons-nous prétendre ? Comment parviendrons-nous à adapter la gestion de nos finances publiques et notre système de prélèvements obligatoires de sorte que notre pays retrouve la dynamique et la compétitivité dont il a besoin ? Autant de sujets auxquels nous allons jour après jour travailler. L'année 2010 sera émaillée de rendez-vous financiers ; nous allons rapidement nous retrouver pour parler dépenses d'avenir, croissance, régulation financière, nécessaire maîtrise des risques du système financier.

Quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, quel que soit le vote que nous allons émettre ce soir, je crois que nous pouvons être fiers du bicamérisme et du Sénat. (Applaudissements à droite) Dans des circonstances difficiles, nous nous sommes saisis du sujet le plus ingrat qui soit pour nous, celui de la fiscalité locale et de l'autonomie des territoires...

M. René-Pierre Signé.  - Il n'y en a plus !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Nous nous sommes efforcés, pendant des semaines, de trouver une voie équitable, traduisant la connaissance que nous avons de la réalité de la gestion locale.

M. Jean-Louis Carrère.  - Une recentralisation !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - La suppression de la taxe professionnelle -je préfère parler de réforme de la taxe professionnelle- a été pour le Sénat un défi extrêmement complexe à relever. Nous avons avancé pas à pas, choisi d'abord de bien distinguer les étapes du raisonnement, bref nous avons appliqué -et Mme  a ministre a bien voulu nous suivre- la bonne vieille méthode cartésienne.

En première partie, nous avons précisé les modalités de la territorialisation du nouvel impôt. Nous avons donné un sens au barème de la cotisation sur la valeur ajoutée. Nous avons raisonné à droit constant en matière d'exonérations et de zonage. Nous avons resserré le dispositif anti-abus pour les opérations de restructuration. Nous avons traité l'iniquité dont pouvaient à juste titre se plaindre les BNC de moins de cinq salariés, soit l'essentiel des professions libérales. Nous avons préservé l'assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties, en concentrant sur la nouvelle cotisation foncière l'abattement sur les bases du foncier industriel. Nous avons réorganisé l'imposition forfaitaire des entreprises de réseaux. Nous avons amélioré la compensation relais en obtenant -même si nous aurions souhaité mieux- que soient pris en compte les taux de 2009 dans la limite de ceux de 2008 majorés de 1 % , et qu'ils s'appliquent aux bases de 2010. Enfin, nous avons préservé -c'était une question de principe- plusieurs dispositifs exceptionnels de déliaison de taux, sans toutefois nous résigner pour l'avenir. Ce qu'une loi a fait, une autre peut le défaire. Ainsi va la République.

M. René-Pierre Signé.  - Vous avez oublié la péréquation !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - En deuxième partie, nous avons prévu des rendez-vous législatifs. Comme l'a très judicieusement dit M. Jean- Pierre Raffarin, nous entrons dans une période probatoire. Si nous avons élaboré une réforme complète et opérationnelle, nous aurons besoin de simulations pour évaluer ce qui va réellement se passer, tant du côté des entreprises que des collectivités territoriales. Nous avons retenu deux systèmes différents pour la répartition de la valeur ajoutée, un pour les communes et les intercommunalités -c'est la voie microéconomique- et un pour les départements et les régions -c'est la voie de la péréquation.

Si l'on applique les dispositions votées par le Sénat, on verra qu'elles sont très fortement péréquatrices.

S'agissant de la mise en oeuvre de ce nouvel impôt que sera la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, nous avons opéré une dissociation entre les deux versants : les entreprises seront bien assujetties au barème voulu par le Gouvernement, commençant à 500 000 euros et dont le taux le plus élevé est fixé à 1,5 %. Mais du côté des collectivités territoriales, le produit fiscal sera la résultante de la valeur ajoutée territoriale, de la somme des valeurs ajoutées de toutes les entreprises du territoire à partir de 150 000 euros de chiffre d'affaires, multiplié par un taux uniforme nationale de 1,5 %.

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est simple !

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Mais oui !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Entre les deux, l'État joue tout son rôle. D'abord, vis-à-vis des entreprises, il nous invite à voter une nouvelle tranche du plan de relance en leur apportant 11 milliard d'aides en trésorerie en 2010. Du côté des collectivités territoriales, l'État joue son rôle protecteur, car oui, mes chers collègues, cette réforme est protectrice ! (Vives exclamations socialistes) La réforme assure la nécessaire association des territoires à la dynamique des entreprises, grâce à la base valeur ajoutée ! (Le brouhaha se poursuit à gauche tandis qu'on applaudit à droite) Cette réforme est très différente de ce qu'elle était en entrant dans cette maison. (Exclamations ironiques à gauche) En ce qui concerne les communes et les intercommunalités, un produit fiscal va être remplacé par d'autres produits fiscaux. (Même mouvement) Si nous avons voulu le système des dégrèvements, c'est parce qu'ils évoluent comme la matière économique, alors que les compensations évoluent comme on leur demande de le faire ! (M. Jean-LouisCarrère s'exclame) C'est une différence fondamentale ! Espérons que notre pays bénéficie d'une croissance qui assure des marges de manoeuvre tant pour l'État que pour les collectivités territoriales.

En outre, cette réforme ne préjuge pas de celle des institutions territoriales : elle a été conçue à compétences inchangées. Nous aurons ensuite un débat sur les institutions qui aboutira sans doute à une clarification des compétences et de l'exercice des responsabilités. Mais il s'agit là d'une autre affaire (on en doute à gauche) et il faudra peut-être ensuite revenir sur les aspects fiscaux et financiers pour tenir compte des évolutions des compétences que déciderait le législateur.

M. Roland du Luart.  - Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - J'en viens à nos apports : nous avons supprimé le ticket modérateur qui provenait du dernier avatar de réforme de la taxe professionnelle. Nous avons considéré qu'il fallait examiner la péréquation jusqu'en 2015, c'est-à-dire jusqu'à l'échéance du mandat des actuels conseillers municipaux. Au-delà, nous entrerons dans le nouveau système de compétences que la loi sur les institutions territoriales mettra en place. Nous avons esquissé la transformation du dispositif de garantie en un mécanisme de péréquation.

Enfin, le problème de la taxe professionnelle a été le plus considérable, le plus structurant et, malgré nos différentes approches, il a été le plus fédérateur pour notre assemblée. Au-delà de ce texte, bien d'autres choses ont été faites : nous nous sommes préoccupés des chambres de commerce et d'industrie : elles sont des acteurs essentiels de la présence et du développement économique territoriaux : nous aurons sans doute un débat institutionnel mais, là aussi, nous avons voulu donner de la visibilité financière au-delà du projet de loi qui nous est annoncé.

La taxe carbone n'existe plus, puisque nous l'avons rebaptisée contribution carbone. (Applaudissements à droite, exclamations à gauche) Le Sénat, qui est une maison très attachée à la francophonie et au rayonnement de la langue française, veut que les choses soient correctement dénommées.

M. Adrien Gouteyron.  - Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - D'ailleurs, je ne me souviens plus que de la contribution foncière des entreprises et de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises. J'ai déjà oublié les dénominations précédentes. (Sourires)

Bien des rendez-vous ont été pris, bien des sujets ont été traités, beaucoup de choses restent à faire. Nous nous reverrons très bientôt pour examiner le collectif budgétaire qui permettra de traiter certaines des questions que nous avons posées au cours de ces débats.

A mon tour, je veux remercier tous ceux qui ont participé à nos échanges : le président Arthuis d'abord, car la commission des finances a été un lieu de débats, de choix et de prises de responsabilité. Merci aussi à Mme la ministre, à messieurs les ministres et à leurs services. Je tiens à remercier M. Longuet qui a pris une part essentielle aux choix qui ont été faits (applaudissements à droite) ainsi que M. About (mêmes applaudissements), qui a apporté son éclairage sur bien des sujets. Merci aussi aux membres des groupes de l'opposition (on feint de s'en féliciter à gauche) qui ont été très présents et avec lesquels les débats se sont déroulés de façon courtoise, dans le respect de nos différences. Enfin, merci à M. le Président et aux vice-présidents qui nous ont permis de débattre sereinement. (Applaudissements à droite et sur divers bancs au centre)

M. Thierry Foucaud.  - (Applaudissements sur les bancs CRC) « Je serai le Président du pouvoir d'achat », c'est ainsi qu'en 2007 le candidat Nicolas Sarkozy a fait campagne électorale pour tenter de séduire l'électorat populaire.

M. Guy Fischer.  - Il a menti !

M. Thierry Foucaud.  - Deux ans et demi après et suite à l'explosion de la bulle financière des marchés boursiers, où en est-on ? Où sont passées les promesses d'hier ? La France compte tant de chômeurs qu'il faut, tous les mois, truquer les statistiques en inventant de nouvelles catégories de sans emploi pour masquer le mal profond qui ronge le pays ! Et l'on transforme 4 millions de chômeurs en 2,6 millions, avec ces artifices ! La valeur travail qu'on prétendait réhabiliter s'est muée en inquiétude devant la précarité et le stress. Le travail est devenu, dans bien des cas, une maladie qui se décline en suicides de salariés victimes des cadences, de la productivité et de règles de management libéral dépassées.

Le pouvoir d'achat des fonctionnaires est régulièrement ponctionné, celui des salariés du privé souffre du chômage technique, et les ménages puisent de plus en plus dans leur épargne pour faire face au quotidien.

La baisse des impôts : pour qui ? Pas pour les salariés, pas pour les consommateurs ou les familles qui voient, chaque jour ou presque, apparaître une nouvelle taxe qui s'ajoute aux autres : taxe carbone, péages urbains, taxe sur les achats de poisson, hausse continue des taxes sur l'essence, flambée des impôts locaux du fait des transferts sans compensation aux collectivités locales, hausse déguisée de l'impôt sur le revenu pour les salariés modestes et moyens. Voilà le bilan de deux ans et demi de sarkozysme !

Ce bilan ne serait pas complet s'il n'incluait pas les allégements de l'ISF, de la fiscalité du patrimoine, de l'imposition des plus hauts revenus, sans parler du renforcement du bouclier fiscal.

M. Guy Fischer.  - Scandaleux !

M. Thierry Foucaud.  - Toutes ces mesures n'ont profité qu'à une poignée de privilégiés qui savaient que le discours du printemps 2007 n'était que de façade. Cette loi de finances en est une démonstration remarquable et quasi caricaturale : suppression de la taxe professionnelle réclamée depuis trente ans par le Medef et création de la taxe carbone ! Avec ses amendements, le Sénat, donne 11,5 milliards au patronat et prélève 4,5 milliards sur les autres !

Le Sénat continue de mettre en cause la demi-part des mères célibataires et il permet à quelques contribuables âgés et aisés de faire des donations à leurs petits et arrière-petits-enfants !

M. Guy Fischer.  - C'est une honte !

Mme Annie David.  - C'est indécent !

M. Thierry Foucaud.  - Avec la taxation des accidents du travail, l'initiative parlementaire se réduit à de mauvais coups contre le monde du travail ! On alourdit l'impôt sur le revenu des ménages salariés et on poursuit les cadeaux fiscaux aux détenteurs de patrimoine, aux spéculateurs immobiliers, tandis que le contrôle fiscal se relâche à l'encontre des plus grandes entreprises et des plus fortunés.

Pour faire bonne mesure, on supprime au passage plus de 36 000 emplois de fonctionnaires, laissant sur le carreau autant de jeunes à la recherche d'un emploi stable. On réduit les dépenses au nom d'une orthodoxie libérale totalement inadaptée.

Pendant ce temps là, les déficits grimpent, la dette augmente, et la reprise n'est pas au rendez vous. Deux ans et demi de sarkozysme, c'est 150 milliards de déficits publics et 1 200 milliards de dette publique ! Pour cette année, nous aurons le triste privilège de compter 500 000 chômeurs de plus en France. D'ailleurs, la majorité n'a jamais prononcé ce mot durant toute la discussion budgétaire.

M. Gérard Longuet.  - Nous préférons parler d'emplois !

M. Thierry Foucaud.  - Nous savons que la récession, ce sont les salariés qui en paient le prix fort, et que les outils dont le Gouvernement se sert pour la relance sont dangereux ou inefficaces comme cette réforme du crédit d'impôt recherche qui n'a qu'augmenté le volume de la dépense fiscale en faveur des entreprises.

La taxation des accidents du travail rendra imposable l'indemnité dont va bénéficier un policier blessé en mission, placé en incapacité temporaire de travail. Que la majorité sarkozyste puisse ainsi oublier les défenseurs de la loi et de l'ordre nous surprend ! Oui, cette disposition est obscène : elle est une insulte faite au monde du travail ! (M. Guy Fischer applaudit) J'ai honte !

La suppression de la taxe professionnelle est la première manifestation d'une réforme des collectivités locales autoritaire et dirigiste.

Le Gouvernement, pas plus que la majorité, n'aime la démocratie de proximité. Il n'apprécie pas le dévouement désintéressé des élus locaux, creuset de l'identité française -celle d'une France généreuse et solidaire, opposée aux valeurs des patrons de l'économie mondialisée- que MM. Sarkozy et Besson voudraient enfermer dans une conception étriquée, sectaire et politicienne. La loi de finances pour 2010 tourne le dos à cet idéal républicain et confirme le bilan calamiteux du Président de la République.

Les lois de circonstance n'engendrent que confusion et inefficacité : celles qui répondent à un fait divers débouchent sur la hausse de la délinquance, celles qui concernent le pouvoir d'achat entraînent la paupérisation des salariés. Il est temps de changer de politique, et -pourquoi pas ?- de changer le capitalisme, comme y invitait fièrement M. Sarkozy !

Une autre voie est possible. En se mobilisant contre la privatisation de La Poste, la France profonde -y compris des personnes qui se disaient proches de la majorité actuelle- a manifesté son attachement au service public postal. Les élus locaux savent que la réforme des finances locales aggravera les charges des ménages, conduira les collectivités à l'asphyxie et mettra en danger l'existence même des communes. (M. Guy Fischer le confirme) Les salariés de France Télécom se mobilisent lorsqu'un de leurs collègues, victime du stress, met fin à ses jours. De nouveau, le monde du travail s'oppose frontalement au patronat, car la valeur même du travail est en jeu ! Les agents des musées, attachés au service public culturel, sont en lutte contre la marchandisation de leur métier, comme les salariés de RFI contre le démantèlement de leur station et ceux de l'AFP contre la réforme du statut de l'agence. Les hospitaliers, des aides-soignants aux chefs de services, sont vent debout contre la réforme de l'hôpital qui vise à détruire l'équipement sanitaire du pays. Les chauffeurs routiers sont près de déclencher un mouvement social de grande ampleur. Les agriculteurs, enfin libérés de la pression des alliés du Medef, exigent une juste rémunération de leur travail. Nous avons assisté en 2009 à bien des manifestations, malgré la criminalisation de l'action revendicative dans la France de Nicolas Sarkozy : voyez SFR qui veut faire interdire des syndicats sous prétexte qu'ils agissent contre le système économique en vigueur ! Ces mobilisations sont pour nous des signes d'espoir.

Tout au long de la discussion budgétaire, nous avons tenté d'esquisser les contours d'une nouvelle politique, qui rende toute son efficacité sociale à l'impôt, décourage la spéculation financière, fasse justement contribuer les entreprises au bien commun et réoriente la dépense publique pour répondre aux besoins de la population. La plupart de nos propositions ont été repoussées, mais ce sont autant de contributions pour penser l'avenir, cet avenir que nous attendons d'une patiente ardeur...

M. Dominique Braye.  - Vous attendrez longtemps !

M. Thierry Foucaud.  - ...pour qu'enfin l'action publique soit inspirée par le souci de la justice et de l'égalité, pour qu'enfin soient proposées au peuple de France les réformes qu'il attend !

C'est donc en parfaite connaissance de cause que le groupe CRC-SPG votera contre ce projet de loi. (Exclamations à droite, applaudissements à gauche)

Mme Nicole Bricq.  - (Applaudissements à gauche. Mme Anne-Marie Escoffier applaudit aussi) Alors qu'il aurait fallu se mobiliser pour sortir de la crise, le Gouvernement a choisi de porter le fer contre les collectivités locales. Celles-ci ont pourtant grandement contribué à rendre la crise moins insupportable, jouant le rôle d'amortisseur social et continuant à investir alors que l'investissement privé était en panne. Pout tout remerciement, le Gouvernement a décidé de supprimer leur principal impôt économique. Cela les contraindra, soit à réduire leur voilure, soit à augmenter leurs impôts et à aggraver ainsi les charges des classes moyennes. Cette réforme, il est vrai, vise à honorer une promesse de compagne du candidat UMP à la présidentielle : l'allègement général de la fiscalité des entreprises... Les collectivités sont également sommées de contribuer à la réduction de l'endettement public, alors qu'elles ont déjà réduit récemment leur propre dette.

La suppression de la taxe professionnelle est le premier acte d'une mauvaise pièce, qui trouvera son dénouement avec la réforme territoriale. Certains ici, qui avaient prétendu mener la « fronde » contre le projet du Gouvernement, ont finalement donné raison à celui-ci.

M. Jean-Louis Carrère.  - L'élastique de la fronde s'est cassé !

Mme Nicole Bricq.  - Il est dommage que M. Raffarin ne soit pas là, car j'aime dire en face ce que je pense. Après avoir pris la tête de cette fronde, il a voté ce texte et ainsi entériné, comme ses collègues de la majorité, la perte d'autonomie fiscale des collectivités. (Applaudissements à gauche) L'État aura la mainmise sur les finances locales : le livre ouvert par les grandes lois de décentralisation de 1981 se ferme. (Applaudissements renouvelés à gauche ; protestations à droite)

M. Jean-Louis Carrère.  - La droite était déjà contre à l'époque !

Mme Nicole Bricq.  - Le Gouvernement peut remercier M. Raffarin : s'il eut la partie si facile, c'est parce que ce dernier, lorsqu'il était Premier ministre, avait déjà transféré aux collectivités des dépenses dynamiques avec des recettes atones ! (Mêmes mouvements)

M. Adrien Gouteyron.  - Et l'APA ?

Mme Nicole Bricq.  - C'est parce que le Gouvernement qu'il conduisait avait refusé d'inscrire dans la Constitution le principe d'autonomie fiscale des collectivités, plutôt que celui d'autonomie financière ! Toutes les clauses de revoyure du monde ne suffiront pas à faire oublier cette faute originelle. Bien au contraire les rendez-vous, espacés dans le temps, laisseront les élus dans l'incertitude...

Les collectivités, accusées d'être dépensières...

M. Dominique Braye.  - C'est vrai des régions !

Mme Nicole Bricq.  - ...sont les boucs émissaires du Gouvernement et de son chef véritable, le Président de la République, qui malgré la crise n'ont pas renoncé à leurs choix fiscaux initiaux : abaissement du bouclier fiscal, allégement des droits de succession, dépenses fiscales improductives... La liste n'est pas close, si l'on en juge par la baisse de la TVA sur la restauration, onéreuse et sans contrepartie !

M. Guy Fischer.  - Scandaleuse !

Mme Nicole Bricq.  - En revanche, le Gouvernement et la majorité se sont mis en chasse des plus faibles. Il est plus facile de s'en prendre aux accidentés du travail (huées à gauche), de supprimer la demi-part des personnes ayant élevé seules un enfant (même mouvement), de réduire le nombre des serviteurs de l'État et du public, de diminuer les crédits de la Halde -rétablis à l'initiative de notre groupe- que d'instaurer une taxation assurantielle du système financier ou de s'attaquer aux rémunérations exorbitantes !

Au nom de la vertu budgétaire, le Gouvernement assimile toute dépense à une niche. Nous le répétons : l'évaluation des dépenses fiscales doit être fondée sur des critères d'efficacité économique et environnementale et de solidarité sociale.

Quant à l'instauration d'une « fiscalité carbone », l'Histoire retiendra la manière dont le Gouvernement a dénaturé une réforme consensuelle pour créer un impôt de plus, impropre à contribuer à la transition énergétique. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Nous n'avons pas entendu vos propositions...

Mme Nicole Bricq.  - Le groupe socialiste a formulé les siennes dès le mois d'avril, monsieur le rapporteur général ; nous avons travaillé en étroite collaboration avec notre collègue Mme Keller.

Des temps difficiles s'annoncent. A la question que nous posions au début du débat budgétaire -qui paierait ?- la majorité a répondu : les ménages des classes moyennes, ceux qu'elle désignait il y a peu comme « la France qui se lève tôt ». Quand les effets du plan de relance se seront dissipés, la France se retrouvera sur le sable, avec un déficit creusé, une production ralentie, un chômage aggravé, des recettes fiscales diminuées et des dépenses alourdies par la charge de la dette. Il faut d'ailleurs y ajouter l'emprunt en préparation, qui jette un doute sur la sincérité de cette loi de finances.

Vous êtes incapables de répartir justement l'effort qui sera inévitablement demandé à la Nation.

Plutôt que de vous autocélébrer, préparez-vous aux débats devant et avec l'opinion. Le groupe socialiste et les Verts, en votant contre votre budget et demain en défendant un projet de société décentralisée, réunissant ses acteurs dans un nouveau contrat social, appuyée sur une fiscalité juste et efficace, seront au rendez-vous essentiel : celui des urnes. (Applaudissements prolongés à gauche ; l'oratrice, en regagnant sa place, est félicitée par ses amis)

présidence de M. Bernard Frimat,vice-président

M. Yvon Collin.  - Malgré de réelles améliorations, voter ce projet de budget pose de sérieuses difficultés. Les déficits ont atteint un niveau insoutenable. En 2010, la dépense publique frôlera les 56 % de la richesse nationale, l'un des taux les plus élevés de tous les pays développés. La reprise économique annoncée à partir de 2011 ne pourra résorber un déficit structurel évalué à 50 milliards. Le taux de croissance des dépenses de l'État, officiellement de 1,2 %, atteint en réalité 2,7 % si l'on tient compte de la réforme de la taxe professionnelle, qui coûtera 4,2 milliards en année pleine, de la hausse des remboursements et des dégrèvements au profit des collectivités, pour 1,1 milliard, et de la hausse des dépenses fiscales hors plan de relance, évaluée à 1,5 milliard.

Vous nous proposez un budget en trompe-l'oeil. La Commission européenne vient de demander à la France de ramener, dès 2013, son déficit public sous la barre de 3 % ; c'est hors de portée, dans une conjoncture qui ne permet pas de relever les impôts.

Plusieurs amendements vous ont invités à en finir avec les niches fiscales.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Très bien !

M. Yvon Collin.  - Elles n'ont plus aucun sens et ne font qu'ajouter de l'injustice fiscale à l'injustice sociale.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Très bien !

M. Yvon Collin.  - Il faut savoir reconnaître ses erreurs et ses échecs. Pourquoi vous entêter ?

En dépit de l'excellent travail accompli par le Sénat sous l'égide de sa commission des finances...

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Merci.

M. Yvon Collin.  - ...je regrette la précipitation dans laquelle la réforme de la taxe professionnelle a été menée. Même si la solution de la commission des finances n'est pas totalement satisfaisante, je me félicite que le Sénat ait retenu notre proposition d'autoriser les collectivités territoriales, dès l'an prochain, à percevoir par douzième les taxes et cotisations instituées en remplacement de la taxe professionnelle, et de repousser au 15 avril la date limite de vote des budgets. La plupart de nos autres amendements ont été retirés en séance après les engagements du Gouvernement et de la commission de les inclure dans les simulations en 2010.

Avec la réforme du financement des collectivités locales, l'État risque de se couper des élus locaux, pourtant responsables de 75 % des investissements et sollicités pour mettre en oeuvre le plan de relance. Les maires ne mesurent pas le temps qu'ils consacrent au bien-être de leurs concitoyens et au développement de leurs territoires !

Nous sommes loin des principes républicains chers à ma famille politique : participation de tous aux charges publiques et progressivité de l'impôt. En maintenant le bouclier fiscal, le Gouvernement conforte les privilèges quand de nombreux Français souffrent de la crise. Nous avions proposé de supprimer la fiscalisation des indemnités journalières pour les personnes victimes d'accidents du travail, introduite à l'Assemblée nationale, qui touchera surtout les revenus les plus faibles et les professions les plus exposées. Le Sénat en a décidé autrement. Il est illusoire de s'attaquer à un dispositif fiscal sans remettre en cause l'ensemble de notre fiscalité, avec ses 469 niches ! Le ministre a lancé une étude sur les principales niches : très bien. Bilan l'an prochain.

La plupart des membres du RDSE ont voté contre la première partie de ce budget. Nous avons voté contre la plupart des missions, nous sommes abstenus sur certaines et en avons approuvé quelques-unes, conformément à nos convictions et à notre esprit de liberté.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Très bien !

M. Yvon Collin.  - Sur l'ensemble du projet de loi de finances, la grande majorité de mon groupe votera contre. Trois voteront pour, et un s'abstiendra. Je remercie encore la commission des finances pour son travail. (Applaudissements à gauche)

M. Gérard Longuet.  - (Applaudissements et « bravo » sur les bancs UMP) Nous venons de vivre ensemble trois semaines d'intense vie parlementaire ; nous pouvons être fiers de la manière dont nous avons exercé notre mandat.

M. Adrien Gouteyron.  - C'est vrai.

M. Gérard Longuet.  - Dans le sentiment de la responsabilité parlementaire, dans le dialogue avec l'exécutif, nous avons construit ensemble les dispositions législatives dont le pays a besoin.

Deux chiffres : la décroissance de l'activité en 2009 a atteint 2 % ; c'est moins que dans les grands pays européens, mais représente une perte de recettes de 20 % pour nos finances publiques. Ce serait être incivique que de méconnaître l'évidence : il manque 55 milliards d'euros de recettes en raison d'une crise internationale, à laquelle cependant la France a mieux résisté que la moyenne de ses partenaires.

M. René-Pierre Signé.  - Pas sûr !

M. Gérard Longuet.  - Ce budget est un budget de sang-froid : dépenses « zéro volume », poursuite de l'effort de relance, auquel ont participé plusieurs amendements UMP. Sang-froid pour que la France soit plus forte au moment de la reprise. Sang-froid dans la volonté de réformer le pays pour donner plus de chances à nos entreprises, en respectant la responsabilité des collectivités locales et leurs moyens d'intervention.

A l'initiative du groupe UMP, le FCTVA sera mobilisé sur l'ensemble de la ligne 2009 et le remboursement prolongé tout au long de l'année 2010. C'est une contribution importante au soutien de l'activité sur le terrain.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Très bien !

M. Gérard Longuet.  - Quelle solution à la lancinante question de la dette, que nous supportons pour l'instant grâce à des taux d'intérêt très bas ? L'inflation n'est pas dans notre éthique, la hausse des impôts n'est pas dans notre programme. Ne reste que la volonté de porter la croissance à 2 %, ce qui est déjà une performance, et la poursuite de la maîtrise des dépenses. Il faudra un grand rendez-vous de la dépense fiscale, à l'image du rendez-vous de réflexion sur la dette souhaité par le Président de la République.

Je n'aurai pas la cruauté de rappeler à nos collègues socialistes et communistes que plus de la moitié du déficit structurel de notre pays correspond au financement des 35 heures... (Applaudissements nourris à droite ; huées et exclamations à gauche)

M. Dominique Braye.  - Il fallait le dire !

M. Gérard Longuet.  - Le budget de l'État ne peut porter à lui seul toute la faillite des politiques précédentes ! (Vives exclamations à gauche)

M. Dominique Braye.  - Ça vous gêne ! (Vifs applaudissements sur les bancs UMP)

M. Gérard Longuet.  - Votre président de groupe peut-il s'exprimer ? (Sourires) Grâce à la taxe carbone, nous pouvons partir pour Copenhague en toute sérénité d'âme. (On s'esclaffe, à gauche) Il faudra vérifier inlassablement si c'est la meilleure formule pour soutenir l'effort vertueux de diminution de l'empreinte carbone de nos compatriotes.

A la demande de notre rapporteur général, nous avons réformé le financement des chambres de commerce et d'industrie, au moment où elles ont le courage de préconiser une importante réforme de structure. Le Parlement soutiendra leur effort.

A propos de la réforme de la taxe professionnelle, je commencerai par remercier tous ceux qui y ont oeuvré, sans hésiter à dépasser le seuil fatidique des 35 heures. Je remercie aussi nos collègues qui étaient présents ces jours et ces nuits-là. Ils étaient certes un peu moins nombreux que cet après-midi, amis ce n'est pas plus mal, vu la technicité de nos débats.

Pour une fois, j'ai voté un amendement communiste -certes adopté à l'unanimité !- celui sur l'Ifer. J'y vois la preuve que nous pouvons trouver des convergences. Les socialistes, quant à eux, se sont montrés d'une grande discrétion : ils n'ont pas défendu le moindre amendement constructif sur la réforme de la taxe professionnelle, preuve soit d'une grande pudeur (rires sur les bancs UMP), soit d'une totale incapacité à résoudre les problèmes de nos collectivités. (Applaudissements sur les bancs UMP) Alors qu'il y a d'extrêmes inégalités en la matière sur le territoire, les socialistes n'ont rien de positif à dire pour résoudre ce problème national ! (Exclamations à gauche ; applaudissements sur les bancs UMP)

Que Mme Bricq me pardonne d'être parfois un peu nerveux : c'est une jeunesse qui n'en finit pas de se calmer ! (Exclamations à gauche, où l'on entend « Occident ! ») Mais tout de même, cinq sénateurs socialistes présents en séance et cinq explications de vote, c'est soit une tentative de pallier l'absence d'amendement, soit l'expression de la totalité de leur diversité. (Rires et applaudissements à droite)

Les présidents About et Collin ont su rendre possible le travail collectif. Avec mes amis de l'UMP -tous mes amis ne sont pas membres de l'UMP, mais tous les membres de l'UMP sont mes amis !- nous avons pris collectivement nos responsabilités sur un sujet qui est au coeur des compétences du Sénat, celui de la réforme de nos collectivités territoriales. Nous avons franchi le premier obstacle ; c'était le plus difficile.

La présentation que Mme Lagarde avait faite de la réforme devant la commission des finances avait suscité inquiétude et impatience à l'intérieur et à l'extérieur du groupe. S'y est ajouté un intérêt et les contributions de l'UMP ont aidé le rapporteur général à concevoir son amendement. Le texte adopté est donc une contribution collective du Parlement. Celui-ci démontre ainsi qu'il est parfaitement en mesure de faire la loi dès lors que la confiance est là. Nous avons ensemble, majorité et Gouvernement, respecté le devoir d'analyse ; nous avons écouté nos collègues quand ils s'exprimaient et constaté le silence de ceux qui n'avaient rien à dire, et nous avons eu le courage de prendre une décision dans un secteur difficile et porteur d'espérance : le rôle des collectivités territoriales, la charge des entreprises, la responsabilité du Gouvernement.

L'UMP votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs UMP)

présidence de M. Gérard Larcher

M. Nicolas About.  - La discussion de ce projet de loi de finances a été marquée par la réforme de la taxe professionnelle. La transformation de cet impôt en contribution économique territoriale est l'innovation majeure que notre vote permettra de mettre en oeuvre.

Cette innovation, nous l'avons soutenue dans son principe dès son annonce par le Président de la République parce qu'il faut endiguer les phénomènes de délocalisation et de perte de compétitivité que nous constatons aujourd'hui.

En supprimant un impôt qui pesait sur les investissements avant qu'ils n'aient produit le moindre euro de richesse, en allégeant de 7 milliards la fiscalité des trois millions d'entreprises concernées, la transformation de la taxe professionnelle contribuera indéniablement au redressement de la compétitivité de l'économie française.

Non, la taxe professionnelle n'était pas la cause de tous les maux que connaissent nos entreprises. Non, cette réforme n'est pas un remède miracle contre toutes les difficultés de notre économie. Mais, oui, cette réforme est urgente, utile et nécessaire, car elle active un des derniers leviers de notre fiscalité au service de notre compétitivité.

Lorsque le Sénat a reçu le texte transmis par l'Assemblée, nos préoccupations étaient nombreuses et sérieuses. Mais, à l'initiative de la commission des finances dont je salue la ténacité, la créativité et la force de proposition, le Sénat a accompli un travail remarquable.

Le rapporteur général a cité Descartes. De fait, l'aboutissement de nos travaux doit beaucoup à la méthode que nous avons adoptée. Je pense au découplage des deux volets, qui était indispensable. Je pense surtout à l'instauration de rendez-vous législatifs pour mesurer, préciser, corriger les effets de la réforme.

D'un point de vue tant méthodologique que politique, le complément apporté par l'Union centriste à côté de nos amis de l'UMP est essentiel.

L'adoption de notre amendement permettra de réviser la répartition des ressources non seulement en 2010 mais aussi en 2011, lors de la première année de pleine application, et après la réforme des compétences des collectivités territoriales. Ce dernier rendez-vous sera l'occasion de réformer la dotation globale de fonctionnement afin de conforter sa vocation péréquatrice.

La commission des finances a proposé de conjuguer l'allègement de fiscalité en faveur des entreprises avec la préservation de l'autonomie financière des collectivités territoriales. Plusieurs amendements améliorent encore ce texte, comme ceux de M. Badré prévoyant des conditions financières spécifiques aux fusions d'EPCI ou exonérant d'Ifer les stations radioélectriques qui comblent des zones blanches.

Hier, il y avait des craintes légitimes que nous partagions. Aujourd'hui, ceux qui ont suivi nos travaux savent que ces craintes ne sont plus fondées. Je lis que cette réforme porterait un coup fatal à l'autonomie financière des collectivités. C'est faux ! La cotisation sur la valeur ajoutée, la cotisation foncière des entreprises, les impositions forfaitaires, les nouveaux impôts, les impôts transférés, tout cela fournira un panier de ressources financières diversifiées et dynamiques aux collectivités territoriales.

Je lis que la transformation de la taxe professionnelle en CET plongerait les élus locaux dans l'insécurité financière la plus totale. C'est faux ! Nous connaissons les ressources des collectivités en 2010, nous savons ce qu'elles percevront à partir de 2011 ; nous avons institué une garantie de ressources individuelle et pérenne pour chaque collectivité.

On y voit relativement clair même si ce n'est pas sans quelque inquiétude : l'autonomie financière des collectivités est préservée mais l'autonomie fiscale de certaines d'entre elles est largement entamée. Cette évolution doit aller de pair avec une autonomie des dépenses. Le débat ouvert il y quelques heures par notre collègue Daniel Dubois l'a illustré : nous voulons des avancées concrètes vers une vraie autonomie des dépenses, nous avons des propositions à formuler. L'adoption de notre amendement à l'unanimité nous incite à penser que notre volonté est partagée. Là encore, rendez-vous est pris.

La contribution carbone a, elle aussi, suscité à la fois notre adhésion sur son principe et des inquiétudes quant à sa mise en oeuvre. Nous tenions à ce que sa vocation incitative soit respectée, notamment pour les collectivités, Le Premier ministre s'est engagé à ce qu'un fonds placé auprès de l'Ademe restitue aux collectivités les montants acquittés au titre de la contribution carbone. Nous espérons qu'il sera opérationnel dès la mise en place de la contribution carbone

Nous tenions aussi à ce que la contribution carbone n'aggrave pas les inégalités entre villes et campagnes. Des dispositions spéciales sont prévues à cet effet, nous veillerons à ce qu'elles soient suffisantes et nous les renforcerons si nécessaire.

L'attachement de notre groupe à la défense d'un monde rural vivant amène à saluer les efforts de notre collègue Françoise Férat en faveur de l'enseignement agricole, qui doit relever les défis de demain.

Je salue également la contribution de notre collègue Jean-Jacques Jégou, qui, en adressant un signal fort aux restaurateurs, a rappelé que le rôle du Parlement, c'est aussi d'aider le Gouvernement dans ses négociations pour veiller à la pleine application des mesures que nous votons. (Vives exclamations à gauche) Il est bien normal de rendre des comptes sur une mesure qui coûte 3 milliards à la collectivité nationale : les engagements pris ne sont pas tenus, le coup de semonce était sans frais, mais sera suivi d'effets à défaut d'avancées rapides.

M. René-Pierre Signé.  - On vous y attend.

M. Nicolas About.  - En matière d'indemnités journalières versées aux victimes d'accidents du travail, nous aurions souhaité qu'on applique un traitement différencié à des situations distinctes, afin de protéger les personnes les plus vulnérables et de ramener les autres dans l'imposition de droit commun. Le taux forfaitaire d'imposition de 50 % nous semble à la fois trop sévère pour certains et trop favorable pour d'autres. Nous espérons que la CMP, ou l'avenir, permettra d'instaurer un dispositif plus équitable.

Enfin, le président Arthuis a proposé hier une réforme globale de notre fiscalité, cette fameuse trilogie que nous soutenons depuis maintenant plusieurs années.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Très bien !

M. Nicolas About.  - Il s'agit de supprimer la mauvaise réponse à un mauvais impôt, pour une fiscalité plus claire et plus équitable.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Très bien !

M. Nicolas About.  - Cette réforme est logique, nous espérons que nos collègues nous rejoindront dans la conviction que la suppression du bouclier fiscal doit aller de pair avec la suppression de cette singularité française qu'est l'ISF.

Je salue le travail considérable accompli par la commission des finances, son président, son rapporteur général et ses services. Grâce à leurs propositions et à l'attitude positive du Gouvernement et de tous les groupes parlementaires, le Sénat a élaboré un texte équilibré et tourné vers l'avenir, à même d'accompagner la sortie de crise et la relance en 2010. Le groupe Union centriste dans sa grande majorité votera en faveur de son adoption. (Applaudissements à droite, au centre et au banc des commissions)

M. Philippe Adnot.  - Je voterai ce texte, car je ne fais pas la confusion entre la réforme fiscale, que j'ai combattue, et les mesures positives que j'ai approuvées, notamment celles qui tiennent à l'enseignement supérieur et à la recherche.

La taxe professionnelle, ainsi que l'a rappelé le rapporteur général, n'a pas été supprimée. On est seulement passé d'une contribution sur les immobilisations à une contribution sur la valeur ajoutée. Je pense que c'est une réforme qui devra être très rapidement réformée... (rires à gauche)

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - On la réformera chaque année !

M. Philippe Adnot.  - ...car elle porte en germe bien des difficultés dont la moindre n'est pas la perte d'autonomie fiscale des départements et des régions -j'excepte les communes, qui tirent leur épingle du jeu. (Applaudissements à droite)

M. Eric Woerth, ministre.  - Je voudrais insister sur quelques points d'autant plus marquants de ce budget que nous serons appelés à y revenir. Je pense au premier chef aux relations entre l'État et les collectivités locales, dont nos débats ont montré que c'est une préoccupation de chacun : nous devons aller plus loin dans la clarification. A ce stade, le prolongement du remboursement anticipé du FCTVA mérite d'être noté...

Ce projet de loi de finances suit plusieurs fils directeurs, la reprise demeurant, au-delà de la relance, ainsi que l'a rappelé M. Longuet, au premier rang de ses priorités. L'effort en faveur de la compétitivité, de l'enseignement supérieur et de la recherche, de la croissance durable montre assez que nous ne nous sommes pas contentés d'accompagner la reprise.

Ce budget a également porté l'ambition d'une profonde réforme fiscale, et ceux qui disent le contraire ne le font sans doute pas en toute bonne foi. Réforme de la taxe professionnelle, taxe carbone et réduction des niches fiscales nous ont occupés de longues heures, et nous pouvons être fiers du résultat. Les rendez-vous qui nous attendent, ainsi que l'a rappelé M. Longuet, seront majeurs. La dépense fiscale est un enjeu central : nous devons mieux la contenir.

En matière de maîtrise des dépenses, notre stratégie est claire : c'est en procédant à des réformes structurelles que nous agirons efficacement, en gardant présent à l'esprit que le défi est double : maîtrise de la dépense publique mais aussi de celle des régimes sociaux, ainsi que l'ont justement rappelé MM. Marini et Vasselle.

Notre trilogie, monsieur le président Arthuis, est celle-ci : combattre la crise, accompagner la reprise par l'investissement, assainir les finances publiques.

Après des débats très denses, ce n'est qu'un au revoir, puisque dans quelques jours, vous engagerez l'examen d'un collectif très important, qui porte beaucoup de mesures nouvelles : résorption de la dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale, lutte contre les paradis fiscaux.

Merci à la commission des finances, ainsi qu'à son président, pour la qualité de son travail, la précision de ses analyses et son sens du dialogue. Merci à M. Marini pour sa capacité à appréhender dans son ensemble un texte complexe et pour sa contribution à la réforme de la taxe professionnelle. Nous avons cheminé pour le bien du pays. Merci aux présidents de groupe, de la majorité comme de l'opposition. Merci enfin au Président Larcher, aux vice-présidents et aux services du Sénat pour leur constance au cours de ces débats exceptionnels. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.  - Qu'il me suffise, pour évoquer le fil de nos débats, de convoquer trois grands auteurs. Descartes, pour la démarche intelligente qui nous a permis d'aborder un sujet que nous redoutions tout d'abord, celui de la taxe professionnelle, en cheminant de la première partie, où nous avons posé les principes, à la deuxième, au cours de laquelle nous avons construit l'avenir sur les bases rénovées, auxquelles le Sénat a apporté sa pierre. Qu'en soient remerciés le président Arthuis et le rapporteur général, M. Marini. (Applaudissements à droite et au centre)

C'est sous le signe du grand Escoffier et de la grande cuisine que je placerai la méthode avec laquelle vous avez reconstruit la péréquation : elle nous a tous convaincus.

Quand à la taxe carbone, c'est sous le ciel étoilé de Kant que je veux la placer (on s'amuse à gauche, où l'on estime le parallèle osé) car elle est l'impératif catégorique (on s'esclaffe à gauche) qui met la France en capacité de convaincre le reste du monde, à Copenhague, qu'il doit être suivi. (Applaudissements à droite, au centre et au banc des commissions) Je remercie le Sénat et son rapporteur général qui nous ont aidés à distinguer entre taxe carbone et contribution carbone, avec un mécanisme de fixation des prix qui assure que les dépenses des ménages seront compensées dans leur intégralité. (On approuve à droite)

Je salue l'intelligente gestion du temps que vous avez su imposer, avec le mécanisme de dégrèvement auquel je me suis ralliée, et qui inscrit le mécanisme de la compensation dans une dynamique, avec aussi la clause de revoyure qui doit nous assurer que nous ferons du bon travail. (Applaudissements à droite et au centre)

J'ai moi aussi une trilogie. Celle des trois « R ». Relance, d'abord, avec un financement intelligent, ciblé sur les investissements, que nous poursuivrons sur l'exercice 2010. Réforme, ensuite, avec la modification en profondeur de la fiscalité locale, propice à l'investissement du secteur privé, dont nous avons tant besoin pour les entreprises, auxquelles la taxe professionnelle opposait un obstacle, pour l'emploi et la croissance de demain. Restauration, enfin. (Sarcasmes à gauche, où l'on évoque tantôt le taux de TVA à 5,5 %, tantôt le roi Louis XVIII) Restauration des grands équilibres... (les rires et les lazzis, à gauche, couvrent la voix de l'oratrice) qui doit nous aider à revenir à nos engagements de stabilité à 3 %. Le débat démocratique et le dialogue entre les partis de la majorité vous étonnent ? (Mme la ministre se tourne vers les bancs de la gauche) Tant pis. Il n'en a pas toujours été de même au cours des réformes passées de la taxe professionnelle...

Je souhaite enfin remercier les présidents des groupes de la majorité, ainsi que le président et le rapporteur de la commission des finances. Merci ! (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre)

M. le président.  - Je vous remercie, madame la ministre, ainsi que M. Woerth. Je remercie aussi le président Arthuis et le rapporteur général Marini. Deux cent quarante-sept collègues ont pris la parole dans ce débat.

M. Charles Revet.  - Très bien !

M. le président.  - Mille amendements ont été examinés, dont le quart a été adopté.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - En progrès !

M. le président.  - Le travail a été collectif, celui de la commission mais aussi celui du Sénat et j'en remercie chacun. Nous avons tenté de respecter le rythme et sauvé tous les dimanches sauf un. Merci à tous. (Applaudissements à droite et au centre)

Le Sénat va maintenant procéder au vote sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2010.

En application de l'article 59 du Règlement, le projet de loi de finances pour 2010 est mis aux voix par scrutin public à la tribune.

Le scrutin est ouvert à 19 h 45. Il est procédé à l'appel nominal.

Le scrutin est clos à 20 h 35.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 331
Majorité absolue des suffrages exprimés 166
Pour l'adoption 178
Contre 153

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à droite et au banc des commissions)

La séance est suspendue à 20 h 40.

présidence de M. Bernard Frimat,vice-président

La séance reprend à 22 h 30.