SÉANCE

du vendredi 29 mai 2009

109e séance de la session ordinaire 2008-2009

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

Secrétaires : M. Marc Massion, M. Bernard Saugey.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Hôpital, patients, santé et territoires (Urgence - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires.

Discussion des articles (Suite)

Article 15 (Suite)

M. le président.  - Dans la discussion des articles, nous en étions parvenus, au sein de l'article 15, aux votes sur les amendements nos474 à 181.

L'amendement n°474 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°857 rectifié.

M. le président.  - Je mets maintenant aux voix l'amendement n°183 rectifié.

M. Hervé Maurey.  - Je remercie la ministre d'avoir bien voulu, hier soir, reconnaître la sincérité de ceux qui s'inquiètent de la démographie médicale. Je maintiens qu'en revanche, certains, ici, manquent de courage sur ce problème et je ne suis pas convaincu que le contrat de solidarité soit l'alpha et l'oméga de cette démographie médicale. J'ai été outré par la réponse caricaturale du rapporteur : personne n'a parlé hier soir de nationaliser la médecine ; nous proposons seulement pour les médecins le même dispositif que celui actuellement mis en place pour les infirmières. Je suis outré qu'il ait parlé de « trous » pour désigner les déserts médicaux. Quel mépris pour la France rurale ! Je suis navré de constater qu'il existe encore ici des sujets tabous, des vaches sacrées, des professions intouchables. Hier soir, j'ai été scandalisé...

A la demande du Gouvernement, l'amendement n°183 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 328
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 39
Contre 289

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Je vais mettre aux voix l'amendement n°2 rectifié ter.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le débat d'hier soir m'a donné l'impression que nous étions revenus à des temps anciens, où il y avait d'un côté les partisans de la liberté et de l'autre, ceux de la coercition. Ce n'est pas avec ce schématisme qu'on règlera le problème... La liberté d'installation ne parvient pas à réaliser le bien commun. Car le droit à la santé, le droit d'être soigné est une liberté tout aussi essentielle. Pourquoi la liberté deviendrait-elle coercition dès lors qu'elle s'exerce dans le cadre de la loi ? Le rapporteur a osé parler d'« idéologie socialisante » et de « trous »...

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.  - Il voulait dire « déserts médicaux ».

M. Jean-Pierre Sueur.  - Dans nos communes, quelle que soit leur taille, il y a des habitants ! Et des grands électeurs qui n'apprécieront pas... Cela m'a choqué parce que nous sommes les représentants de toutes les communes.

Vous nous dites, madame la ministre, que vous conduirez des études, que leurs analyses très fines seront transmises aux futurs médecins qui, prenant grâce à elles conscience de la situation, modifieront leurs comportements. Je veux bien, mais permettez-moi d'évoquer le cas d'un canton dont les trois médecins prendront leur retraite dans les trois ans qui viennent. Je veux bien que vous y envoyiez tous les experts de votre ministère, une délégation de l'Igas, que vous y veniez vous-même, il est clair que si nous ne trouvons pas très vite une solution, il n'y aura plus de médecins dans ce canton.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - Je n'entends pas les obliger à y venir.

M. Jean-Pierre Sueur.  - La question des règles se pose donc comme un impératif. Mais il est temps de dépasser le vieux clivage, contre lequel je me suis engagé en politique, entre libéralisme pur et étatisme pur : je crois possible de concilier liberté et règles communes ; je crois même que quand il n'y a pas de règles, on porte atteinte à la liberté. Pour moi, la bonne solution, c'est le contrat. Nous en parlions hier : l'État finance les études en contrepartie de quoi l'étudiant s'engage sur son installation. On nous réplique que cela coûte cher, voire qu'on paierait les études des riches. Mais l'on peut imaginer un financement sur critères sociaux. Cela se fait, et se fera. M. Maurey nous proposait qu'une fois le schéma mis en place, des contrats de solidarité soient proposés. C'est là le terme adéquat, car il s'agit bien de la solidarité des médecins envers ceux qui n'ont pas accès aux soins. Il n'y a là rien de coercitif. Vous-même, madame la ministre, qui poussez les haut cris au simple mot de coercition, vous êtes prête à en user dans trois ans, nous le verrons avec l'amendement n°230.

M. Claude Biwer.  - Nous débattons d'un problème que je vis journellement dans ma région. Pour le résoudre, nous avons un besoin fort de nous organiser puisqu'on ne modifie pas le numerus clausus, ce qui aurait apporté une solution. Si nous avons déposé cet amendement, c'est pour faire évoluer notre pensée et notre action. Il nous reste du chemin à parcourir. Nous n'y parviendrons pas, monsieur Sueur, en nous en tenant, comme vous le faites, à une position comme la vôtre qui vous fait dire, en substance, « il peut y avoir consensus si vous êtes de mon avis ».

Que l'on souhaite vivre dans un lieu et travailler dans un autre est une chose qui peut se comprendre. Bien des gens le font, y compris dans le monde rural où l'on voit des agriculteurs demeurer en ville. Je me rends moi-même plus vite dans mon chef-lieu d'arrondissement que dans l'arrondissement voisin de celui où j'habite à Paris.

Ce débat témoigne de notre volonté unanime de réfléchir, à partir de ce que nous vivons sur le terrain, pour trouver un début de solution. La France a le privilège de bénéficier d'un bon niveau médical, ne l'entamons pas. Je retire mon amendement.

L'amendement n°2 rectifié ter est retiré.

M. François Autain.  - Notre amendement n°477 va donner au groupe socialiste la possibilité de voter une proposition allant dans le même sens que celle de M. Biwer, car nous ne le retirerons pas. Je reste dubitatif sur la question de l'applicabilité des contrats, et les réponses de Mme la ministre à mes questions ne sont pas faites pour me faire changer d'avis. Si donc un médecin n'a pas la chance d'habiter loin d'une zone sous-médicalisée, il n'a aucune chance d'être sollicité ?

M. Nicolas About, président de la commission.  - Bien sûr.

M. François Autain.  - Il y a là une source d'inégalité.

Vous avez beaucoup critiqué les mesures que nous proposions, au motif que nous sacrifierions la solidarité intergénérationnelle. J'observe que vous n'y êtes pas toujours sensibles vous-mêmes, qui avez créé la Cades pour financer le déficit de la sécurité sociale : c'est bien en faire porter le poids par les générations futures. Nous avons de la chance : le rapporteur ne nous a pas accusés, comme d'autres, d'idéologie communisante... Reste que je suis consterné par l'inertie du Gouvernement et de la majorité face au scandale des déserts médicaux.

M. Bernard Cazeau.  - Nous suivons M. Autain sur beaucoup de points. Nous sommes favorables à des contrats de solidarité, mais il reste bien des points d'interrogation, en particulier sur les questions de mise en place. Comment se fera le choix, par exemple ? Reste que nous sommes persuadés qu'il faut contractualiser : ce sera l'une des premières tâches des directeurs des ARS. Vous voulez reporter à 2012 ; nous pensons qu'il faut aller plus vite. Les effets des mesures que vous prenez ici seront différés : on ne sort pas du jour au lendemain de dix ans d'inertie dans le numérus clausus -dans laquelle nous avons tous une part de responsabilité. Nous voterons l'amendement Autain pour montrer notre volonté de contractualiser dans les délais les plus brefs.

L'amendement n°477 n'est pas adopté.

M. Marc Laménie.  - En déposant l'amendement n°858 rectifié, nous voulions insister sur la notion de démographie médicale, mais au vu des informations que nous a données le rapporteur, nous le retirons, ainsi que l'amendement n°859.

L'amendement n°858 rectifié est retiré, ainsi que l'amendement n°859.

M. François Autain.  - L'amendement n°180 rectifié n'a pas lieu d'être ; il est satisfait puisque le schéma régional ne sera pas opposable : il s'agit d'un simple état des lieux.

L'amendement n°180 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°480 n'est pas adopté.

L'amendement n°626 rectifié est retiré.

M. le président.  - Je mets aux voix les amendements identiques nos179 et 230 rectifié.

M. Alain Vasselle.  - Cette disposition n'est pas conforme au choix de la commission.

Le Gouvernement ne souhaite ni s'en tenir aux seules incitations ni s'engager vers des mesures coercitives. Il me paraît s'orienter vers des mesures dissuasives, sous forme de pénalité imposée aux jeunes médecins qui refuseraient de s'installer dans les zones sous-denses après les trois années d'évaluation.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Ce n'est pas du tout ça !

M. Alain Vasselle.  - Avant de balayer d'un revers de la main les dispositions incitatives au motif qu'elles seraient inefficaces, il faudrait évaluer l'effet...

M. Bernard Cazeau.  - Il est insignifiant !

M. Alain Vasselle.  - ...de ce qui a été adopté au fil de lois de financement successives, sans politique globale. Dernièrement, notre assemblée a voté ma proposition en faveur des maisons de santé, malgré la frilosité du Gouvernement sur cette question. Bien sûr, cela ne suffira pas à régler le problème car il faut un ensemble.

J'observe d'autre part que nous traitons de la même façon le stock et le flux : si les jeunes médecins ne peuvent plus s'installer là où ils envisageaient de le faire parce que de nouvelles mesures ont été adoptées, ce serait une rupture du contrat moral passé avec eux quand ils avaient entamé leurs études dix ans plus tôt.

Aujourd'hui, les internes ne connaissent guère les incitations existantes, si bien que le projet de loi charge l'ARS de diffuser l'information. Pourquoi ne pas attendre les résultats avant d'adopter des dispositions plus contraignantes ?

La proposition de M. Sueur aurait pu être prise en compte. Que font les conseils généraux lorsqu'ils manquent d'assistantes sociales ? Ils signent avec des étudiants des contrats qui financent leurs études, le bénéficiaire s'engageant à travailler pendant cinq ans dans le département. Pourquoi ne pas s'en inspirer pour les étudiants en médecine ? On me dit que cela coûterait cher, mais la désertification médicale est également source de coûts pour nos concitoyens -mécontents à juste titre- et pour l'assurance maladie, notamment via l'accroissement des dépenses hospitalières puisque les dispensaires ont disparu.

Enfin, il faut concilier la liberté d'installation des médecins avec l'organisation du service public sur l'ensemble du territoire : plutôt que de contraindre les médecins libéraux, assurons partout un service public de proximité !

Voilà pourquoi je ne voterai pas ces amendements.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - En effet, les jeunes médecins ne connaissent pas les incitations en vigueur, déployées en ordre dispersé. D'où le guichet unique à l'ARS.

Monsieur Sueur, le zonage permet d'orienter les aides attirant les jeunes médecins vers certaines parties du territoire. Il ne constitue évidemment pas une solution en soi.

Il faut être clair : qu'est-ce qu'une mesure coercitive ? Il y en a trois sortes. Tout d'abord, l'obligation d'exercer en zone sous-dense. Elle est exclue ! Vient ensuite l'autorisation administrative d'exercer ici ou là. Il n'en est pas question ! La dernière est le déconventionnement en zone sur-dense, ce qui frapperait en réalité la clientèle. En aucun cas, nous n'adopterions une disposition aussi injuste.

Le Gouvernement s'en tient donc à des mesures incitatives, dont l'évaluation ne serait pas renvoyée aux calendes grecques car nous voulons pouvoir instituer si besoin, dans trois ans, un contrat santé-solidarité, c'est-à-dire une mesure incitative plus musclée. Mais il ne s'agit aucunement de contraindre un médecin à s'installer là où il ne veut pas aller !

Ce contrat s'appliquerait exclusivement dans les zones sur-denses, soit 3 % du territoire, où sont regroupés 10 % des médecins généralistes. On leur proposerait de participer aux urgences, d'assurer une présence médicale dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ou d'exercer une demi-journée dans un cabinet secondaire situé en zone sous-dense. La cartographie médicale évoquant une peau de léopard, les zones sur-denses sont mitoyennes de zones sur-denses. Les praticiens ne se verraient donc pas imposer de trajet considérable. Faire acquitter une redevance par les médecins qui refuseraient ces contrats n'est que justice.

M. Vasselle a raison de dire que, jusqu'ici, nous avons adopté successivement des mesures incitatives diverses. Soyons confiants pour l'avenir, sans travestir le contrat santé-solidarité.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Dans le secteur où je suis élu, les spécialistes abondent mais pas les généralistes, ce qui gêne la prise en charge de l'urgence. Nous manquons de médecins de premier recours.

Dans le dispositif proposé, je suis gêné par l'identité de la sanction applicable à ceux qui refusent de signer le contrat et à ceux qui ne respectent pas leurs obligations.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Le plafond seul est identique !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Très bien !

Enfin, les conditions d'application doivent être définies « par décret en Conseil d'État », non « en Conseil d'État », qui ne dispose pas d'un pouvoir normatif. Essayons d'adopter une législation convenable et ne votons pas n'importe quoi !

M. Nicolas About, président de la commission.  - En effet.

J'attire d'autre part votre attention sur le fait que le dispositif concernera tous les médecins de premier recours, généralistes ou non.

Il serait bon que nous sachions avant la réunion de la CMP quel sera le contenu de ce décret. L'impact de cette mesure pourra être faible ou considérable, selon que l'on imposera aux médecins une garde d'une après-midi par mois ou d'un jour par semaine. Le travail professionnel pourrait s'en trouver gravement désorganisé. Ne jouons pas au sapeur Camember qui comble un trou en en creusant un autre ailleurs ! D'une manière plus générale, il est indispensable que lorsqu'un projet de loi prévoit la publication d'un décret sur un sujet sensible, nous en connaissions la teneur avant de voter.

M. Gilbert Barbier.  - On joue sur les mots : imposer une amende aux médecins installés en zones sur-denses qui refuseraient de signer un contrat de solidarité, c'est bel et bien une mesure de coercition. Cette amende n'est peut-être pas très élevée, mais tout de même ! Comme M. About l'a souligné, on ne sait pas quelle sera la durée des gardes imposées.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Il faut fixer des plafonds.

M. Gilbert Barbier.  - Mme la ministre prétend que l'on n'enverra pas les médecins à plus de 6 ou 7 kilomètres de leur lieu de travail ; mais dans les campagnes, la distance risque d'être beaucoup plus grande, de l'ordre de 70 ou 80 kilomètres ! Tout cela est bien flou. Les médecins femmes qui travaillent à mi-temps seront-elles soumises à cette obligation ? Le Gouvernement veut fixer une règle très générale sans préciser ses modalités d'application.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Elles feront l'objet de discussions avec les médecins.

M. Gilbert Barbier.  - Obligera-t-on des professionnels installés depuis plus de vingt ans sur un territoire à se rendre périodiquement à l'autre bout du département ? Malgré l'intérêt que présente cette mesure, je ne pourrai pas la voter.

Les amendements identiques nos179 et 230 rectifié sont adoptés.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Ces amendements viennent d'être adoptés grâce aux voix de la gauche !

L'amendement n°784 rectifié bis devient sans objet.

M. Alain Vasselle.  - Le président About a raison d'insister sur la nécessité pour les parlementaires de connaître le contenu des décrets d'application d'un texte avant de le voter lorsque ces décrets portent sur des sujets sensibles. C'était le sens d'une proposition de loi déposée par M. Haenel et moi-même, qui fut reprise en partie dans le cadre de la dernière révision constitutionnelle.

Je voudrais aussi attirer l'attention du Gouvernement sur les difficultés qui peuvent se rencontrer dans les quartiers urbains difficiles, où il n'y a pas assez de médecins pour assurer la permanence des soins ni assez de généralistes. Parfois on y envoie les pompiers, mais ils se font agresser par des bandes de jeunes. Certains professionnels de santé ne veulent plus travailler dans ces quartiers, et l'instauration du contrat de solidarité n'y changera rien. Il serait donc souhaitable que Mme la ministre collabore avec sa collègue chargée de l'intérieur pour assurer la sécurité des médecins auxquels on imposera des gardes quasi obligatoires.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Ils ne seront pas envoyés seuls ! Je créerai des maisons médicales.

M. Alain Vasselle.  - Cette mesure n'entrera pas en vigueur avant trois ans et je souhaite que l'on tire parti de ce délai pour faire en sorte qu'elle soit appliquée dans les meilleures conditions.

M. Hervé Maurey.  - Un mot pour rappeler l'objet de l'amendement n°181 : en fixant le plafond de la contribution à 2 859 euros, on se contente d'une mesure symbolique étant donné le revenu moyen des médecins. Tout en laissant au Gouvernement le soin d'en fixer le montant par décret, il faut prévoir que cette somme constituera non un maximum mais un minimum.

M. Serge Lagauche.  - Ne considérons pas les médecins comme des êtres inanimés que l'on envoie ici où là selon les nécessités du moment, monsieur Vasselle ! Dans mon département, une large concertation a permis de créer les services d'accueil médical initial (Sami) les samedis et dimanches. Les collectivités territoriales et la sécurité sociale ont accepté de participer aux frais et d'envoyer du personnel, ce qui garantit à tous une certaine sécurité. A quelques exceptions près, tous les médecins du département ont accepté de leur plein gré de participer aux Sami car ils sont conscients de leurs devoirs et soucieux des difficultés rencontrées par les habitants. Les gardes n'existent plus, mais il est possible d'adapter l'ancien système.

L'amendement n°181 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°475, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter le texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 1434-6-1 du code de la santé publique par un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Ce zonage est établi en fonction de critères qui prennent en compte :

« 1° la densité et le niveau d'activité, et l'âge des professionnels de santé ;

« 2° la part de la population qui est âgée de plus de 75 ans ;

« 3° la part des professionnels de santé qui exerce dans une maison de santé ou un centre de santé ;

« 4° l'éloignement des centres hospitaliers ;

« 5° la part des professionnels de santé qui sont autorisés à facturer des dépassements d'honoraires.

« Ce zonage est soumis pour avis à la conférence régionale de santé. ».

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Le rapport de la mission d'information sur l'offre de soins sur l'ensemble du territoire déposé à l'Assemblée nationale le 30 septembre dernier commence ainsi : « Force est de constater que les Français ne sont pas égaux dans l'accès aux soins. Pire : si aucune mesure n'est prise à court terme, ces difficultés s'aggraveront du fait de la pénurie de professionnels de santé qui résulte d'une gestion très restrictive des numerus clausus dans les années 1980 et 1990 ». Nous ne pouvons que souscrire à ce constat. Nous avons tenté en vain, par nos amendements, de remédier à ce problème.

Le même rapport a souligné la difficulté de tracer les zones éligibles à une aide financière. Les critères retenus, comme le nombre de généralistes par habitant et l'activité mesurée par les honoraires, ne sont pas toujours pertinents puisqu'ils ne permettent pas de tenir compte des écarts de temps de travail ni des modes d'exercice particulier. Les honoraires d'un médecin salarié à temps partiel ne donnent pas une idée juste de sa charge de travail ! Des critères complémentaires doivent donc être fixés : c'est l'objet de cet amendement.

M. le président.  - Amendement n°726 rectifié, présenté par M. Cazeau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article L. 1434-6-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. ... ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Les zones de mise en oeuvre des mesures prévues pour l'installation des professionnels de santé libéraux, des maisons de santé et des centres de santé sont établies en fonction de critères qui prennent en compte :

« 1° la densité, le niveau d'activité et l'âge des professionnels de santé ;

« 2° la part de la population qui est âgée de plus de 75 ans ;

« 3° la part des professionnels de santé qui exerce dans une maison de santé ou un centre de santé ;

« 4° l'éloignement des centres hospitaliers ;

« 5° la part des professionnels de santé qui sont autorisés à facturer des dépassements d'honoraires.

« Ce zonage est soumis pour avis à la conférence régionale de la santé et de l'autonomie.

« L'application du présent article se fera dans des conditions définies en Conseil d'État. »

M. Bernard Cazeau.  - Cet amendement est presque identique au précédent : il convient en effet de fixer de nouveaux critères de délimitation des zones d'aides à l'installation. La Cour des comptes avait déjà mis en évidence, dans un rapport de 2007, l'hétérogénéité des paramètres retenus ; le recensement des zones sous-médicalisées, qui devait être achevé à la date du 1er janvier 2007, a pris du retard.

Il conviendrait de s'interroger sur la superposition des zonages existants : zones sous-médicalisées, zones de revitalisation rurale, zones franches urbaines. D'où notre proposition de fixer des critères, soumis pour avis à la conférence régionale de santé et de l'autonomie.

M. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - A l'article 26, le zonage a été longuement débattu : il entre dans les missions des ARS qui élaborent les Sros. Point n'est besoin de le répéter à l'article 15. Retrait, sinon défavorable.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - L'avis est défavorable, mais permettez-moi de répondre au fond sur le problème des zonages que l'amendement soulève.

Certains territoires connaissant de réelles difficultés d'accès aux soins, l'État et les collectivités territoriales ont créé des mesures pour améliorer la répartition des professionnels de santé, M. Vasselle en a parlé, qui s'appliquent sur des zones diverses -zones urbaines sensibles, zones franches urbaines, zones de revitalisation rurale, les zones créées par les missions régionales de santé depuis 2005- selon des modalités différentes. Les aides de l'État sont, par exemple, de nature fiscale et conventionnelle. Forts de cette expérience, nous savons qu'un zonage, pour être efficace, doit être fixé selon certains principes. Lesquels ? Tout d'abord, le respect de l'équité nationale et la maîtrise des dépenses de l'assurance maladie. Ensuite, leur adaptation aux spécificités locales. Enfin, un haut niveau de concertation, je ne me lasserai jamais de le répéter. Ces mesures sont élaborées dans le cadre du Sros ambulatoire qui, à partir d'une analyse des besoins, détermine des zones différenciées et leur inscription dans un territoire de santé de proximité. Ainsi, ces mesures sont connues de tous. Il existe également des critères de marges de manoeuvre entre les régions, tel le pourcentage de population concernée par rapport aux différents types de zones en niveau de dotation. Je tiens la liste de ces critères à disposition de ceux qui le souhaitent.

L'amendement n°475 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°726 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°476, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article L. 1434-6 du code de la santé publique, tel qu'il résulte de l'article 26 de la présente loi, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

Art. L. ... - Un décret en Conseil d'État détermine les règles d'accessibilité aux soins mentionnés à l'article L. 1411-11. Ces règles prennent en compte :

« 1° la distance et la durée d'accès aux professionnels de santé qui dispensent ces soins ;

« 2° les délais dans lesquels ces professionnels sont en mesure de recevoir les patients en consultation, hors cas d'urgence médicale ;

« 3° le nombre de professionnels de santé libéraux autorisés à facturer des dépassements d'honoraires.

« Sauf circonstances exceptionnelles, ces règles doivent permettre que la durée d'accès à un médecin mentionné à l'article L. 4130-1 n'excède pas trente minutes de trajet automobile dans les conditions normales de circulation du territoire concerné. »

Mme Isabelle Pasquet.  - Nous souhaitons préciser les règles d'accessibilité aux soins de premier recours en reprenant les trois critères fixés par la mission d'information sur l'offre de soins, soit l'éloignement des professionnels de santé, les files d'attente, les dépassements d'honoraires. Le rapport de cette mission ayant été adopté à l'unanimité, nous ne doutons pas que le même sort sera réservé à notre amendement !

M. le président.  - Amendement identique n°727 rectifié, présenté par M. Cazeau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. Jacky Le Menn.  - Fixer les règles d'accessibilité aux soins de premier recours sera un excellent filet de sécurité pour les territoires désertés par les professionnels médicaux. Nous avons retenu les trois critères fixés par la mission d'information, y compris le pourcentage de praticiens autorisés à pratiquer des dépassements d'honoraires car, malgré notre opposition de principe à cette pratique, nous préférons l'encadrer de manière graduelle. Ainsi, le délai d'accès au service public de la santé, comme à celui de La Poste et des cabines téléphoniques, sera précisé dans la loi. Sauf circonstance exceptionnelle, nous recommandons que le Sros vise à ce que les médecins généralistes de premier recours soient accessibles en 30 minutes au plus.

M. Alain Milon, rapporteur.  - A l'article 14, vous avez convenu que la proximité devait s'apprécier en termes de distance et de temps de parcours. Inutile de le répéter. Avis défavorable.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques n°476 et n°727 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°725 rectifié, présenté par M. Cazeau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article L. 1431-2 du code de la santé publique il est inséré un article L. ... ainsi rédigé :

« Art. L. ... - L'agence régionale de santé favorise la coordination entre les professionnels de santé et les établissements et les services médico-sociaux. Elle contribue à l'élaboration d'outils facilitant cette collaboration. »

M. Yves Daudigny.  - Avant d'organiser ou de contrôler, les ARS doivent accompagner, faciliter les coopérations. Pour ce faire, elles doivent constituer des outils fédérateurs et démocratiques pour qu'un dialogue constructif puisse s'établir avec les acteurs de la santé, les usagers et les élus.

M. Alain Milon, rapporteur.  - L'article 26, que nous avons déjà examiné, vous donne satisfaction. Retrait, sinon défavorable.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je voulais donner un avis de sagesse à cet amendement, car j'y avais été favorable à l'Assemblée nationale. Mais le travail fait en commission le satisfait. Retrait ?

M. Yves Daudigny.  - Merci, je m'incline.

L'amendement n°725 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°182 rectifié bis, présenté par MM. Maurey, Zocchetto, Amoudry, J. Boyer, Détraigne, Dubois, J.L. Dupont et A. Giraud, Mme N. Goulet, MM. Merceron et Soulage et Mme Payet.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article L. 4131-7 du code de la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ...  - A partir de 2017, à l'issue de leur formation initiale, soit la fin du troisième cycle, les médecins désireux d'exercer leurs fonctions à titre libéral ou salarié sont tenus de s'installer durant une période minimum de trois ans dans un territoire où le schéma visé à l'article L. 1434-6 du code de la santé publique indique que l'offre de soins de premier recours ne suffit pas à répondre aux besoins de santé de la population. Ce dispositif s'applique également aux médecins titulaires de diplômes étrangers dans les conditions fixées par décret pris en Conseil d'État. »

M. Hervé Maurey.  - Voici un amendement important quoique politiquement incorrect. Il prouve à M. Autain qu'il y a dans la majorité des gens qui se soucient des déserts médicaux.

M. François Autain.  - Pas assez !

M. Hervé Maurey.  - Vous n'avez pas ce monopole !

Les jeunes médecins exerceraient pendant trois ans dans les zones sous-médicalisées si les mesures incitatives ne produisaient pas leurs effets d'ici 2017. Selon le rapport de MM. Paul et Bernier, il n'est pas possible de corriger l'implantation des médecins par des mesures purement incitatives et sans que la liberté d'installation soit encadrée. L'Académie de médecine considère que le choix de devenir médecin implique un engagement de servir et elle rappelle que la formation de chaque étudiant représente plus de 200 000 euros : il ne serait pas anormal, que comme au sortir de certaines grandes écoles, de consacrer quelques années au début de sa carrière à la société. On voit que tous les médecins ne sont pas aveuglés par l'égoïsme...

M. Biwer juge la date de 2017 un peu tardive, mais j'ai voulu éviter que la mesure ait un effet rétroactif et s'applique à des étudiants déjà engagés dans un cursus long et difficile. Cela nous permettra en outre de mesurer l'efficacité des mesures incitatives.

M. le président.  - Sous-amendement n°1221 à l'amendement n° 182 rectifié de M. Maurey, présenté par M. Biwer.

Au début du dernier alinéa de l'amendement n° 182 rect.bis, remplacer le millésime :

2017

par le millésime :

2012

M. Claude Biwer.  - M. Maurey vient de présenter notre proposition. Nous avions presque le même amendement, alors j'ai transformé le mien en sous-amendement. Au fond, nous avons tous contracté par nos études une plus ou moins grande dette envers la société et, après tout, on ne m'a pas demandé mon avis avant de m'envoyer deux ans et demi en Algérie ! En l'occurrence, on dit aux médecins : « nos territoires ont besoin de vous », et puisque nul n'est censé ignorer la loi, autant qu'elle s'applique dès qu'elle est promulguée. En effet, pourquoi 2017 et pas 2010 ?

M. Gilbert Barbier.  - Ou 2009 !

M. Claude Biwer.  - J'en prends acte. On peut d'ailleurs répondre aux besoins de nos territoires sans obliger les médecins qui y exerceront à habiter à la campagne.

M. Jean-Pierre Sueur.  - C'est de l'idéologie...

M. Bernard Cazeau.  - ...socialiste !

M. François Autain.  - Communisante !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Un avis de spécialiste...

M. Alain Milon, rapporteur.  - Je me suis déjà exprimé hier soir. Il est vrai que ce n'est pas la première fois que l'on reproche aux médecins d'avoir suivi des études de médecine. Elles coûtent 200 000 euros ? Si vous n'en voulez pas, n'en formons plus. Et on peut faire la même chose pour les directeurs d'hôpitaux, les agrégés de mathématiques... Arrêtons plutôt de dire qu'un médecin coûte 200 000 euros alors qu'il commence à travailler à l'hôpital dès la quatrième année.

Mme Isabelle Debré.  - Très bien !

M. Alain Milon, rapporteur.  - S'il y a des secteurs géographiques qui souffrent du manque de médecins, pourquoi ne pas faire comme pour les territoires qui connaissent un fort chômage, et créer des zones franches plutôt que d'obliger les médecins à y aller ? Excusez-moi de dire ce que je pense, mais vous proposez le travail obligatoire...

M. François Autain.  - Le STO !

M. Alain Milon, rapporteur.  - Je ne l'ai pas dit mais je l'ai pensé...

Avis défavorable à l'amendement et au sous-amendement, qui est pire.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Vous proposez l'une des mesures coercitives dont je crois fondamentalement qu'elles seront inefficaces. Je ne la trouve pas moralement indéfendable -cela existe ailleurs-, mais elle exacerbera les difficultés en compliquant les conditions d'exercice.

M. François Autain.  - On n'en sait rien, essayons !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Elle attisera la concurrence entre les modes d'exercice et entre les territoires dans l'espace européen. Finalement, nous ne ferons par cette mesure désastreuse que dissuader les médecins de s'installer dans ces zones. Je préfère des mesures opérationnelles et pragmatiques.

M. Gilbert Barbier.  - La mesure est irréaliste : comment feront ceux qui suivront une spécialité, reviendront-ils en faculté après les trois ans ou seront-ils dispensés ? Cela ne rendra pas service à la population : changer de médecin tous les trois ans pour prendre un débutant, ce n'est pas terrible. La médecine exige de la continuité et la connaissance de la clientèle. Ce genre de proposition dessert la qualité des soins dans les zones concernées. Des mesures incitatives auront des effets plus pérennes.

M. Claude Biwer.  - Nous ne voulons pas exiger quoi que ce soit, nous souhaitons seulement recevoir les soins dont nous avons besoin. Notre objectif second est d'inciter les médecins à rester : nous ne les renvoyons pas après trois ans, nous voulons qu'ils profitent de la qualité de la vie en exerçant parmi nous, même s'ils habitent en ville. Cependant, après les explications concrètes de la ministre, je retire le sous-amendement.

Le sous-amendement n°1221 est retiré.

M. Hervé Maurey.  - Je remercie la ministre qui a fait l'effort de m'apporter une réponse. Nous sommes tous deux de bonne foi, mais je n'arrive pas à croire que les mesures qu'elle propose suffiront. Le rapporteur a été dans l'outrance. Je n'ai jamais reproché le coût des études de médecine, mais cité un rapport de l'Académie de médecine ; en revanche, l'exemple qu'il a pris est bon puisque les directeurs d'hôpitaux vont là où on les affecte à l'issue de leur scolarité.

J'ai été choqué de la comparaison avec le STO, qui est une insulte à ceux qui ont subi cette déportation et au monde ancien combattant. Il est vrai que lorsque l'on parle des zones rurales comme de trous, on peut pousser la provocation jusque-là.

Nous allons émettre un vote très important en disant si nous voulons de cette mesure qui ne s'appliquerait en tout état de cause qu'en 2017, si les mesures incitatives n'ont pas montré leur efficacité.

Veut-on vraiment se soucier des zones rurales ? Le Sénat ne représente-t-il pas, ne défend-il pas les territoires ? Souhaite-t-on défendre les médecins ou les territoires ? Les patients ou les médecins ? L'égal accès aux soins, qui est une valeur constitutionnelle, ou la liberté d'installation, qui n'en est pas une ? Le scrutin public dira le vote de chacun, auquel je ne doute pas que les élus locaux seront attentifs. (M. François Autain applaudit)

M. François Autain.  - Je soutiendrai l'amendement, qui ressemble d'ailleurs étrangement à l'un des nôtres.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Circonstance qui devrait inquiéter M. Maurey !

M. François Autain.  - Je constate que ces idées progressent...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Les mauvaises herbes ont la vie dure !

M. François Autain.  - ...et j'espère qu'elles seront bientôt majoritaires.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Quand la gauche sera au pouvoir...

M. François Autain.  - M. Maurey n'est pas de gauche, que je sache... Nous avons besoin de mesures efficaces, ce que ne sont pas celles que propose le Gouvernement.

M. Dominique Leclerc.  - Contrairement à ce que certains pensent, la médecine est un art, on ne s'installe pas médecin que pour gagner de l'argent.

Mme Isabelle Debré.  - Bien sûr !

M. Dominique Leclerc.  - Si après quinze ou vingt ans de formation à l'hôpital public, un certain nombre de jeunes s'installent en libéral, c'est d'abord parce qu'ils ne trouvent pas de poste à l'hôpital. D'autres font des remplacements ici ou là. Mais l'essentiel, c'est la responsabilité médicale ; si elle est collective à l'hôpital, elle est individuelle en libéral, et ce poids pèse très lourd pour les jeunes médecins. Nous devons en tenir compte. Si on y ajoute des mesures coercitives, on ne trouvera plus, demain, de praticiens pour répondre aux besoins de la population.

Je salue les propos sages et modérés de MM. About, Milon et Barbier. Cessons d'infantiliser les médecins et les patients, cessons d'empiler obligations et normes les unes sur les autres. (M. Alain Vasselle applaudit)

M. Jean Desessard.  - Notre débat me fait penser à ce film canadien, La grande séduction, où l'on voit les habitants d'un petit village prêts à tout pour retenir leur médecin... (Sourires)

Je voterai l'amendement, nous avons besoin de mesures fortes. Bien d'autres professions ont des contraintes de ce type, ne serait-ce que dans la fonction publique -songez à certaines infirmières. Dites plutôt, ce serait plus honnête, que les médecins sont si puissants qu'on ne peut rien leur refuser ! L'amendement de M. Maurey donne du temps, le temps de voir si les mesures incitatives, que nous sommes nombreux ici à trouver insuffisantes, produisent quand même des résultats. Il faut une impulsion. Et puis chacun sait que je plaide pour la responsabilité collective environnementale : nous aurons tous, demain, dans toutes les professions, à nous contraindre.

M. Dominique Leclerc.  - Quelle vision de la société !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ce n'est pas le profit qui guide les médecins lorsqu'ils s'installent.

M. François Autain.  - Qui a dit ça ?

M. Nicolas About, président de la commission.  - Si c'était le cas, ils se précipiteraient tous dans ces secteurs où l'on gagne en moyenne 2 000 euros de plus par mois qu'ailleurs... Je suis généraliste, je me suis installé dans un petit village de 1 300 habitants, je m'y suis senti très bien. Mais l'État a décidé un jour d'y créer une ville nouvelle, et le petit village est devenu agglomération de 150 000 habitants... C'était un désert médical, il y a maintenant trop de médecins. Alors j'ai décidé de venir vous rejoindre. (Rires)

M. Jean Desessard.  - Ce n'est pas un désert médical, ici ! (Sourires)

M. Nicolas About, président de la commission.  - Je veux vraiment convaincre M. Maurey de retirer son amendement, après son succès d'hier.

M. François Autain.  - Sinon, ça ferait désordre !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Il y a, je crois, d'autres choses à faire. La profession se féminise, on voit de plus en plus de jeunes médecins qui ne s'installent que pour cinq ou six ans ou qui ne travaillent pas à temps complet. Situation parfaitement inconcevable pour mon grand-père, mes oncles, mes aïeux médecins ! Il n'y a jamais eu autant de médecins inscrits à l'Ordre et jamais autant qui pratiquent un temps médical si faible. Plutôt que de contraindre ceux qui travailleront à 100 % de leur temps pendant 40 ans, mieux vaudrait demander à ceux-là de rembourser une partie de leurs études.

Je le redis à M. Maurey : son amendement envoie un mauvais signal à ceux qui remplissent leur mission de médecin sur la durée avec coeur et engagement.

M. Alain Milon, rapporteur.  - C'est à dessein que j'ai pris l'exemple des directeurs d'hôpital ; lorsqu'ils s'engagent, ils savent qu'ils seront fonctionnaires et que leur carrière sera aux mains de leur hiérarchie. Il n'y a pas d'obligations dans le contrat moral qu'un étudiant en médecine passe avec l'État.

M. Jean Desessard.  - Justement !

M. Alain Milon, rapporteur.  - Si on en crée, l'exercice de la médecine change de nature. Veut-on une médecine fonctionnarisée sur tout le territoire ?

M. François Autain.  - Pourquoi pas ?

M. Alain Milon, rapporteur.  - Beaucoup de médecins l'accepteront sans doute, mais ils exerceront alors leur métier comme des fonctionnaires...

Si les mots ont un sens, obliger les médecins à la fin de leurs études à s'installer dans une zone donnée et à y travailler trois ans, c'est du travail obligatoire ! Même si on l'appelle service sanitaire obligatoire... Je souhaite que M. Maurey retire son amendement, tout le monde s'en trouvera bien.

M. François Autain.  - Pas tout le monde !

M. Alain Vasselle.  - Je m'associe à cette sage demande de retrait. M. Maurey a réussi à faire adopter un amendement avec le soutien de Mme la ministre, qui avait elle-même repris une proposition de M. Beaumont ; je pense qu'il a satisfaction.

Cet amendement 182 rectifié bis est manifestement un amendement de repli, or votre amendement n°179 a été adopté ! Son application poserait des problèmes pratiques majeurs. L'exemple concret donné par M. Barbier doit vous conduire à le retirer.

Nous payons aujourd'hui l'absence de politique d'aménagement du territoire. Il y a dix ans, lors de la loi Pasqua, nous évoquions déjà le problème des déserts médicaux ! Les mesurettes incitatives n'ont pas été efficaces : pour avoir manqué alors de courage politique, nous en sommes aujourd'hui réduits à devoir prendre des mesures dissuasives ou coercitives...

M. Alain Houpert.  - L'acte de soigner est un acte difficile. Un médecin, qu'il soit libéral ou fonctionnaire, rentre chez lui avec ses problématiques.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Un ministre aussi !

M. Alain Houpert.  - La plus lourde de ses responsabilité est d'annoncer les mauvaises nouvelles. C'est l'une des professions où il y a le plus de burn out : les médecins n'en peuvent plus. On constitue d'ailleurs des groupes de parole pour aider les aidants que sont les médecins.

Osons l'aménagement du territoire. Mais des mesures coercitives seraient contre-productives : les étudiants iraient se former dans des régions qui ne manquent pas de médecins !

M. Yves Daudigny.  - La question n'est pas d'être pour ou contre les médecins, mais d'assurer la sécurité des Français, quel que soit leur lieu d'habitation, en prenant en compte les évolutions de la société.

Peut-être y aura-t-il un jour une prise de conscience politique et un changement de comportement des médecins : qui aurait cru, il y a quelques années, que les sénateurs eux-mêmes décideraient de réduire leur mandat de neuf à six ans ?

Il faut des mesures immédiatement applicables. C'est pourquoi nous avons soutenu l'amendement du Gouvernement.

La seule solution à terme, c'est la contractualisation.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Absolument.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - C'est l'objet de l'article suivant.

M. Yves Daudigny.  - Ce contrat, passé avec l'étudiant dès le début de ses études, pourrait prévoir un stage de généraliste, une période de travail en zone difficile, mais aussi des évolutions possibles de carrière, des éléments de diversification des tâches, de travail en équipe. Cette forme de contractualisation imposera certes des contraintes mais permettra au futur médecin d'appréhender l'ensemble de sa carrière.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - J'ai été sensible à l'intervention du président About. Cet amendement pousserait les étudiants à s'orienter majoritairement vers la spécialisation pour échapper à la localisation ! Surtout, il changerait la nature du système, en poussant les futurs médecins à devenir salariés.

M. François Autain.  - Ce ne serait pas un drame !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Une telle mesure ne se justifierait que pour les écoles publiques de médecine, Santé Navale et École de Lyon. (M. Nicolas About, président de la commission, applaudit)

M. Jean Desessard.  - On peut élargir !

M. Hervé Maurey.  - Je remercie ceux qui ont pris la peine de me demander de retirer mon amendement, à commencer par mon ami le président About. J'ai toutefois déjà pris en compte une partie de ses objections en prévoyant que la mesure ne s'applique pas avant 2017. (Exclamations amusées sur les bancs CRC). Cela laisse aux mesures incitatives une chance de réussir d'ici là ! Je maintiens donc mon amendement. (M. François Autain approuve) Un scrutin public permettrait que le résultat soit gravé dans le marbre du Journal officiel.

Il n'y a pas de désert médical dans cet hémicycle : la densité de médecins y est plus élevée qu'à Paris ! (Sourires)

M. Nicolas About, président de la commission.  - Nous venons de voter votre précédent amendement qui entraîne des pénalités avant 2017. On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre ! Attendons quelques temps avant d'instaurer une nouvelle contrainte. Il est encore temps de retirer l'amendement... (Sourires)

L'amendement n°182 rectifié bis n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Sueur.  - M. Fourcade a souligné l'ambigüité de la dernière phrase de l'article 15, qui laisse entendre que c'est le Conseil d'État qui délibère, alors qu'il s'agit d'un décret en Conseil d'État. Mme la ministre ne pourrait-elle rectifier cette rédaction par un amendement ?

M. Nicolas About, président de la commission.  - On le fera en commission mixte paritaire.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Il s'agit bien sûr d'un décret en Conseil d'État : nous rattraperons les choses en CMP.

M. Jean Desessard.  - Pourquoi ne pas le faire tout de suite ?

M. le président.  - Amendement n°1360, présenté par le Gouvernement.

Dans le dernier alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 1434-6-1 du code de la santé publique, après les mots :

définies

insérer les mots :

par décret

L'amendement n°1360 est adopté.

M. le président.  - Le moment est venu de statuer sur l'article 15.

M. François Autain.  - Ce contrat de solidarité n'est pas applicable, et ne sera jamais appliqué, mais ce n'est pas son objet : il sert au Gouvernement à donner le change, sans heurter les corporatismes médicaux. Vous perdez sur les deux tableaux : les syndicats de médecins sont contre, et il n'y aura aucune amélioration dans l'immédiat, alors qu'il y a urgence !

Il y a un fossé entre vos ambitions et les moyens mis en oeuvre. Vous renoncez à toute mesure autre qu'incitative, alors que ces dernières ne marchent pas. Le principe de liberté d'installation des médecins est contraire à l'intérêt des patients.

Vous privilégiez ainsi l'intérêt du médecin au détriment de celui du patient, ce qui ne semble pas conforme à cette mission régalienne dont vous vous prévalez souvent et qui devrait vous conduire à user de votre autorité pour faire respecter l'article 11 du Préambule de notre Constitution, qui consacre le droit à la santé pour tous nos concitoyens et, donc, la garantie d'un égal accès aux soins.

La liberté d'installation des médecins n'est pas un principe absolu dans de nombreux pays. En Allemagne, dans chaque Land, une commission paritaire rassemblant des représentants des médecins et des caisses de sécurité sociale délivre les autorisations d'installation qui sont attribuées en fonction des directives d'une instance fédérale. En Suisse, une ordonnance de 2002 a gelé le nombre de professionnels de santé conventionnés et donc, en particulier, le nombre de généralistes et de spécialistes.

Au Québec, les installations de médecins conventionnés sont subordonnées à l'obtention d'un avis de conformité au plan de l'agence régionale de la santé, et les généralistes qui exercent sans cet avis voient leur rémunération réduite, ce qui ressemble à ce que nous avions proposé dans un amendement et que vous avez refusé.

Nous ne voterons pas cet article 15 et nous demandons un scrutin public.

A la demande du groupe CRC-SPG, l'article 15 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 326
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l'adoption 186
Contre 140

Le Sénat a adopté.

M. le président.  - Les articles additionnels après l'article 5 sont réservés jusqu'après l'article 21 nonies.

L'article 15 bis A est adopté.

Article 15 bis

I. - Après l'article L. 632-5 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 632-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 632-6. - Chaque année, un arrêté du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la sécurité sociale détermine le nombre d'étudiants qui, admis à poursuivre des études médicales à l'issue de la première année du premier cycle ou ultérieurement au cours de ces études, peuvent signer avec le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière un contrat d'engagement de service public.

« Ce contrat ouvre droit, en sus des rémunérations auxquelles les étudiants et internes peuvent prétendre du fait de leur formation, à une allocation mensuelle versée par le centre national de gestion jusqu'à la fin de leurs études médicales. En contrepartie de cette allocation, les étudiants s'engagent à exercer leurs fonctions à titre libéral ou salarié, à compter de la fin de leur formation, dans les lieux d'exercice mentionnés au quatrième alinéa. La durée de leur engagement est égale à celle pendant laquelle l'allocation leur a été versée et ne peut être inférieure à deux ans.

« À l'issue des épreuves mentionnées à l'article L. 632-2, les étudiants ayant signé un contrat d'engagement de service public choisissent un poste d'interne sur une liste établie chaque année par arrêté du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de l'enseignement supérieur, en fonction de la situation de la démographie médicale dans les différentes spécialités sur les territoires visés à l'alinéa précédent.

« Au cours de la dernière année de leurs études, les internes ayant signé un contrat d'engagement de service public choisissent leur futur lieu d'exercice sur une liste, établie par le centre national de gestion sur proposition des agences régionales de santé et de l'autonomie, de lieux d'exercice où le schéma visé à l'article L. 1434-6 du code de la santé publique indique que l'offre médicale est insuffisante ou la continuité de l'accès aux soins est menacée, en priorité les zones de revitalisation rurale visées à l'article 1465 A du code général des impôts et les zones urbaines sensibles définies au 3 de l'article 42 de la loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie dans le ressort duquel ils exercent leurs fonctions, peut, à leur demande, à tout moment, changer le lieu de leur exercice. Le directeur général du centre national de gestion peut, à leur demande, à tout moment, et après avis du directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie dans le ressort duquel ils exercent leurs fonctions, leur proposer un lieu d'exercice dans une zone dépendant d'une autre agence régionale de santé et de l'autonomie.

« Les médecins ayant signé un contrat d'engagement de service public avec le centre national de gestion peuvent se dégager de leur obligation d'exercice prévue au deuxième alinéa du présent article, moyennant le paiement d'une indemnité dont le montant égale les sommes perçues au titre de ce contrat.

« Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application du présent article. »

II. - L'article L. 632-6 du code de l'éducation est applicable à l'issue de l'année universitaire 2009-2010.

M. le président.  - Amendement n°89 rectifié, présenté par MM. Jacques Blanc, Paul Blanc et Jarlier, Mme Payet et MM. Amoudry, Hérisson, Laménie, Bailly, Faure, Gouteyron, Thiollière, Carle, Bernard-Reymond, Alduy, Juilhard, Saugey, Bernard Fournier, Béteille, Jean Boyer et Revet.

Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 632-6 du code de l'éducation après le mot :

formation

insérer les mots :

ou à effectuer les remplacements de médecins généralistes ou spécialistes,

M. Marc Laménie.  - En début de carrière, les médecins effectuent des remplacements pendant une dizaine d'années, en moyenne de 29 à 39 ans, avant de s'installer à leur compte définitivement. Nous proposons, sans porter atteinte au principe de liberté d'installation, de les inciter à faire des remplacements prioritairement dans des secteurs sous dotés comme les zones de revitalisation rurale.

M. Alain Milon, rapporteur.  - L'amendement prévoit que les étudiants signataires du contrat d'engagement de service public feraient des remplacements en zone sous-médicalisées à l'issue de leur formation. Or, la contrepartie de l'allocation qui leur est versée au cours de leurs études est de les faire s'installer dans de telles zones, non d'y faire des remplacements. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Lors de la discussion générale, j'avais compris que Jacques Blanc souhaitait que les boursiers soient tenus de faire, dans des zones sous-denses, les remplacements effectués au cours de leurs études. J'y aurais été favorable. Mais le présent amendement propose qu'à la fin de leurs études, ils aient le choix entre s'installer dans ces zones ou y faire seulement des remplacements. Ce serait un dévoiement de l'objectif recherché qui est d'inciter les jeunes médecins à s'installer de façon permanente dans des secteurs défavorisés. Avis défavorable.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Ce serait en effet un dévoiement du système. Peut-être pourrait-on trouver une solution en déduisant la durée des remplacements, effectués en cours d'étude par ces boursiers en zone sous-denses, de la durée de leur engagement. Mais, en l'état, avis défavorable à cet amendement.

M. Marc Laménie.  - Compte tenu des explications de la ministre et du rapporteur, je veux bien retirer l'amendement, mais le nombre de ses signataires atteste que beaucoup d'entre nous sont sensibles à ce problème et entendent défendre le monde rural...

L'amendement n°89 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°628 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Charasse, Marsin, Mézard, Milhau et Vall.

Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 632-6 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :

Ils s'engagent aussi, pendant cette durée, à garantir à tout patient les tarifs fixés par la convention mentionnée aux articles L. 162-5 et L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale.

Mme Françoise Laborde.  - Il s'agit d'assurer une offre de soins accessible dans les zones sous-dotées. Le Gouvernement a proposé un amendement identique, assorti d'une seconde partie sur laquelle nous attendons son exposé.

L'amendement n°731 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°1228, présenté par le Gouvernement.

I. - Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article par l'article L. 632-6 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :

Pendant la durée de cet engagement, qui n'équivaut pas à une première installation à titre libéral, ils pratiquent les tarifs fixés par la convention mentionnée aux articles L. 162-5 et L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale.

II. - Après les mots :

le paiement d'une indemnité

rédiger comme suit la fin du même texte :

égale à la totalité des traitements et indemnités perçus ainsi qu'une fraction des frais d'étude engagés. Les modalités de remboursement et de calcul de cette somme sont fixées par un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Les médecins qui bénéficient d'une bourse en souscrivant un contrat d'engagement de service public devront pratiquer les tarifs opposables pour la durée de ce contrat. Nous leur garantissons, en revanche, un droit de sortie, soit la possibilité, au terme du contrat, de s'installer en secteur 2 s'ils disposent des titres nécessaires. Il est normal que de jeunes médecins qui auront consacré leur début de carrière à cet effort de solidarité se voient ouvrir cette possibilité. Ce serait, sinon, la double peine !

Pour préserver ce nouveau dispositif des effets d'aubaine, nous prévoyons que l'indemnité remboursée soit égale au total des traitements et indemnités perçus, ainsi qu'une fraction des frais de formation, ceci selon un système dégressif, dont les modalités seront fixées par décret : il ne faudrait pas qu'un médecin ayant rendu plusieurs années d'engagement en zone déficitaire soit autant pénalisé qu'un étudiant opportuniste souhaitant pantoufler immédiatement à l'issue de sa formation initiale.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La commission souhaite s'en tenir au texte qu'elle a adopté. Retrait ou rejet de l'amendement n°628 rectifié. Nous souhaitons conserver à la mesure son caractère incitatif. Trop de contrainte serait dissuasive : défavorable à l'amendement n°1228 du Gouvernement.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je pense que Mme Laborde pourra se rallier à ma proposition. Pour le reste, est-il bien normal, monsieur le rapporteur, de s'en tenir, comme vous le souhaitez, à un remboursement « à l'euro l'euro » ? Cela deviendrait beaucoup plus intéressant qu'un prêt étudiant ! Il faut prévoir des modalités qui permettent d'éviter les effets d'aubaine (M. François Autain approuve) Dans les grands corps de l'État, il existe des dispositifs analogues.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Sans doute, mais pour les polytechniciens, ce sont les sociétés qui payent.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Ne perdons pas de vue que le but de la mesure est d'inciter les médecins à s'installer en zone déficitaire.

Mme Françoise Laborde.  - Je retire mon amendement au profit de celui de Mme la ministre, plus complet, auquel nous sommes favorables.

L'amendement n°628 rectifié est retiré.

M. Bernard Cazeau.  - Nous sommes également favorables à l'amendement de Mme la ministre : le texte de la commission ouvrait, il est vrai, un effet d'aubaine. J'aurais aimé qu'elle puisse nous préciser l'importance des crédits qu'elle entend consacrer à cette mesure car le nombre des boursiers comptera beaucoup dans son efficacité.

M. Gilbert Barbier.  - Je reste dubitatif. Certaines formulations me semblent bien floues dans l'amendement du Gouvernement. Pouvez-vous, madame la ministre, nous donner un ordre d'idée sur cette « fraction des frais d'étude engagés » ? 5 %, 10 %, 50 % ? Avouez que ce n'est pas la même chose. Je crains que la mesure n'en devienne très dissuasive. Et que comptera-t-on dans les « traitements et indemnités perçus » ? Ceux qui accèdent à l'internat devront-ils rembourser ce qu'ils ont perçu à ce titre ?

M. Nicolas About, président de la commission.  - Et les externes ? Et les gardes, faudra-t--il les rembourser ?

M. Gilbert Barbier.  - On a évoqué tout à l'heure une compensation de l'ordre de 200 000 euros. Ce serait insupportable !

M. Dominique Leclerc.  - Il est essentiel de ne pas dénaturer le caractère incitatif de ce dispositif. Bien des jeunes ne s'engagent pas dans les études médicales de peur du poids financier qui pèsera sur leur famille. J'aimerais savoir, madame la ministre, quelles mesures vous entendez prendre pour faire connaître ce nouveau dispositif ? Qu'il y ait une contrepartie est normal et n'est pas nouveau, c'est déjà ce qui prévaut pour les militaires.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Mais ils sont payés comme des officiers. La solde d'un lieutenant de l'armée de l'air, ce n'est pas 300 euros !

M. François Autain.  - Nous voterons l'amendement du Gouvernement. Mais pourquoi, madame la ministre, n'être pas revenu aux dispositions adoptées à l'Assemblée nationale, soit une pénalité multipliée par deux...

M. Nicolas About, président de la commission.  - C'est sans doute que ce n'est pas assez ! Faisons-les donc plutôt payer trois fois !

M. François Autain.  - Je note que le président About et M. le rapporteur, chaque fois que l'on parle de médecins, perdent leur sang froid.... Au fait, ne craignez-vous donc pas, madame la ministre, de créer un embryon de service national de santé qui pourrait faire naître dans notre pays une escouade de médecins salariés, fonctionnarisés, et qui, partant, ne penseront plus qu'à se prélasser ? Mais trêve de plaisanterie. Les directeurs généraux des ARS vont nommer les médecins là où existent des besoins. Ceci n'implique-t-il pas un devoir pour la puissance publique : celui d'assurer à ces médecins un revenu satisfaisant ?

Les médecins nommés dans des zones sous-médicalisés percevront peut-être des honoraires qu'ils jugeront insuffisants. A-t-on envisagé un dispositif qui leur procurerait un revenu complémentaire ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Quelle sera la durée de l'engagement ? Identique à celle du versement de l'allocation, par exemple huit ans si celle-ci est perçue dès la deuxième année d'études médicales. Le minimum sera toutefois fixé à deux ans, pour que le médecin puisse prendre racine.

Le centre national de gestion versera la bourse et suivra le parcours des étudiants, qui effectueront leur choix en partant d'une liste établie par l'ARS de leur région de formation.

Les textes d'application préciseront les conditions du versement, les modalités du choix ou de l'éventuel changement de région d'exercice.

Le montant mensuel de l'allocation avoisinera 1 200 euros, versés du PCEM2 jusqu'à la fin de l'internat.

J'ai évoqué à titre indicatif 200 bourses pour l'année 2010-2011, mais on pourrait aller jusqu'à 400. Nous sommes loin des chiffres mentionnés par M. Barbier.

Cette mesure pourra être modulée en fonction de son attractivité et des besoins de la démographie médicale.

Je pense que nul ne conteste ici le principe du remboursement des sommes perçues lorsque l'engagement n'est pas respecté. J'avais initialement envisagé que le rachat de la pantoufle -comment on dit en d'autres lieux- coûte le double des sommes perçues, mais une telle majoration pourrait aller jusqu'à faire rembourser presque 300 000 euros, ce qui serait exorbitant pour un jeune qui s'installe, comme votre commission l'a très justement fait observer.

M. François Autain.  - Ce ne serait pas insupportable pour un radiologue !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Une pénalité est toutefois nécessaire, afin que le dispositif ne se transforme pas en prêt à taux zéro. J'envisage environ 5 % de la bourse...

M. François Autain.  - Sympa.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - ...en me fondant sur le cas des polytechniciens.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ce ne sont pas eux qui payent !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Qui empêcherait les collectivités territoriales de se substituer aux médecins ? Mais c'est une autre histoire, comme dirait Rudyard Kipling...

M. Nicolas About, président de la commission.  - La Cour des comptes le verrait d'un mauvais oeil !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Bien sûr, le montant de l'allocation évoluera en fonction du coût de la vie. On ne peut donc l'inscrire dans la loi.

M. Gilbert Barbier.  - Le texte mentionne une fraction des frais d'études, non un pourcentage des sommes perçues.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Là encore, j'ai repris la terminologie utilisée pour les polytechniciens et les énarques.

M. François Autain.  - Une petite fraction... (M. Jean-Pierre Fourcade évoque sa pantoufle)

M. Nicolas About, président de la commission.  - M. Fourcade sait bien que la pantoufle n'est jamais payée par les polytechniciens. Je le sais aussi : mon père avait fait l'X.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous sommes très favorables à cette mesure. Entre le libéralisme et la coercition, il y a la voie du contrat. C'est la bonne direction. Voilà pourquoi nous avons apporté au Gouvernement un soutien dont il avait bien besoin pour faire adopter le contrat santé-solidarité malgré ses insuffisances.

C'est la même chose ici. Je regrette qu'un de vos collègues du Gouvernement ait supprimé les bourses versées aux étudiants qui se destinaient à l'enseignement. Vous avez raison de faire le contraire.

Au demeurant, la dimension sociale est particulièrement nette ici, car pour nombre de familles, les études médicales sont longues et chères.

De nombreux jeunes s'orientent vers la médecine parce qu'ils ont vocation à l'exercer, et l'envie de la servir sur l'ensemble du territoire. Comme député, j'ai très mal reçu une délégation d'étudiants qui se plaignaient d'être « exilés » à Dunkerque. Je leur ai dit : « C'est une ville magnifique ! Il y a plein de jeunes ! » Et aussi beaucoup de patients. Il n'y a pas de territoire de la République où l'on ne s'honore pas d'exercer la médecine ou toute autre mission d'intérêt général.

Il faut présenter ce dispositif comme un moyen d'accomplir une vocation grâce à un contrat.

J'observe toutefois que le Gouvernement s'oriente vers deux médecins par département.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Chaque année !

M. Jean-Pierre Sueur.  - J'espère que le système connaîtra un grand succès et qu'il y aura bien plus d'allocataires : verser des bourses revient moins cher que de subir le coût humain, social et économique de la désertification. (M. Bernard Cazeau applaudit)

M. Jean-Pierre Fourcade.  - L'Assemblée nationale a voté un remboursement double des sommes perçues. Notre commission souhaite le simple remboursement ; le Gouvernement veut un remboursement majoré : la modicité de la majoration proposée m'incite à le soutenir.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°1228, mis aux voix par assis et levés, n'est pas adopté.

L'amendement n°627 rectifié bis n'est pas soutenu, non plus que l'amendement n°629.

L'article 15 bis est adopté.

Article 15 ter

M. le président.  - Cet article a été supprimé par la commission.

Amendement n°732, présenté par M. Cazeau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article L. 632-1 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 632-1-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 632-1-1 A. - Le deuxième cycle des études médicales comprend un enseignement portant spécifiquement sur la contraception et l'interruption volontaire de grossesse, ainsi que sur la connaissance des inégalités sociales d'accès aux soins. ».

M. Bernard Cazeau.  - Des travaux récents ont démontré l'existence de refus de soins, surtout au détriment des populations fragiles.

Pour que les futurs médecins n'aient pas de préjugés, les étudiants de deuxième cycle des études médicales devraient connaître la situation spécifique des populations en difficulté.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La suppression de l'article est justifiée, car les programmes sont fixés par voie réglementaire. Au demeurant, ces sujets sont enseignés.

Avis défavorable.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Même avis.

Je suis attachée aux droits des femmes à la contraception et l'avortement, mais je serai indéfectiblement défavorable aux amendements précisant le contenu des études médicales, qui relève du domaine réglementaire.

L'amendement n° 732 n'est pas adopté et l'article 15 ter demeure supprimé.

Article 15 quater

(Texte modifié par la commission)

À compter de la rentrée universitaire 2009-2010 et pendant quatre ans, le nombre annuel d'emplois créés dans chacune des catégories suivantes ne peut être inférieur à :

1° Vingt pour les professeurs des universités de médecine générale ;

2° Trente pour les maîtres de conférence des universités de médecine générale ;

3° Cinquante pour les chefs de clinique des universités de médecine générale.

M. le président.  - Amendement n°96 rectifié bis, présenté par MM. Gilles et Leclerc, Mme Goy-Chavent, M. Vasselle et Mlle Joissains.

Au premier alinéa de cet article, après les mots :

emplois créés

insérer les mots :

, sur proposition conjointe des présidents d'université et des directeurs d'unité de formation et de recherche concernés,

M. Dominique Leclerc.  - Cet amendement vise à associer les présidents d'université et les directeurs d'UFR de médecine à la nomination des enseignants de médecine générale.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement et s'en remet à la sagesse du Sénat.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je l'ai déjà dit : le Gouvernement veut promouvoir la médecine générale en créant des emplois et des débouchés en post-internat pour les étudiants. Il faudra évidemment consulter les présidents d'université et les directeurs d'UFR. Mais M. Lerclerc ne se contente pas de leur avis : il veut soumettre ces nominations à leur proposition conjointe. Sous son apparence anodine, cet amendement est pernicieux puisqu'il risque de conduire à une répartition inégale des emplois dans les universités, qui serait contraire au but recherché. J'émets donc un avis défavorable assez ferme.

M. Dominique Leclerc.  - Effectivement, on risquerait ainsi de rendre le problème plus complexe encore. On pourrait d'ailleurs s'étonner que la loi fixe le nombre de professeurs, de maîtres de conférences et de chefs de clinique.

L'amendement n°96 rectifié bis est retiré.

L'article 15 quater est adopté.

Article 16

(Texte modifié par la commission)

I. - L'article L. 6314-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 6314-1. - La mission de service public de permanence des soins est assurée, en collaboration avec les établissements de santé, par les médecins mentionnés à l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, dans le cadre de leur activité libérale, et aux articles L. 162-5-10 et L. 162-32-1 du même code, dans les conditions définies à l'article L. 1435-5 du présent code. Tout autre médecin ayant conservé une pratique clinique a vocation à y concourir selon des modalités fixées contractuellement avec l'agence régionale de santé et de l'autonomie.

« Le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie communique au représentant de l'État dans le département les informations permettant à celui-ci de procéder aux réquisitions éventuellement nécessaires à la mise en oeuvre du premier alinéa.

« La régulation téléphonique des activités de permanence des soins et d'aide médicale urgente est accessible sur l'ensemble du territoire par un numéro de téléphone national. Cette régulation téléphonique est également accessible, pour les appels relevant de la permanence des soins, par les numéros des associations de permanence des soins disposant de plates-formes d'appels interconnectées avec ce numéro national, dès lors que ces plates-formes assurent une régulation médicale des appels. »

I bis . - Dans les régions dont le territoire, pour tout ou partie, est situé en zone de montagne, le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie communique, chaque année, aux comités de massif intéressés institués par l'article 7 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, un rapport sur l'organisation de la permanence des soins au sein des territoires relevant de leur compétence respective. Après en avoir délibéré, chaque comité de massif, pour ce qui le concerne, rend un avis public sur ce rapport annuel.

I ter . - Après l'article L. 6314-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6314-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 6314-1-1. - Si, à l'échéance d'un délai de trois ans suivant la publication de la présente loi, l'agence régionale de santé et de l'autonomie constate que la mission de service public de permanence des soins mentionnée à l'article L. 6314-1 du code de la santé publique n'est pas assurée dans certains territoires de santé, elle propose aux médecins exerçant à titre libéral et aux établissements de santé des territoires concernés un schéma d'organisation de la permanence des soins mobilisant les médecins d'exercice libéral et les établissements. Pour l'établissement de ce schéma, elle tient compte notamment des caractéristiques géographiques et démographiques des zones concernées, ainsi que des conditions dans lesquelles les médecins y exercent. »

II. - Après l'article L. 6314-1 du même code, sont insérés deux articles L. 6314-2 et L. 6314-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 6314-2. - L'activité du médecin libéral participant à la permanence des soins ou assurant la régulation des appels au sein d'un service d'aide médicale urgente hébergé par un établissement public de santé est couverte par le régime de la responsabilité administrative qui s'applique aux agents de cet établissement public. Ce même régime s'applique dans le cas où, après accord exprès de l'établissement public en cause, le médecin libéral assure la régulation des appels depuis son cabinet ou son domicile. Toute clause d'une convention, contraire aux principes énoncés dans le présent alinéa, est nulle. 

« Art. L. 6314-3. - Les modalités d'application de l'article L. 6314-1 sont fixées par décret en Conseil d'État. »

III et IV. - Suppressions maintenues par la commission.......................

V. - L'article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.

VI. - Le I entre en vigueur le 1er janvier 2010.

VII. - Le titre Ier du livre III de la sixième partie du code de la santé publique est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

« CHAPITRE V

« Continuité des soins en médecine ambulatoire

« Art. L. 6315-1. - La continuité des soins aux malades est assurée quelles que soient les circonstances. Lorsque le médecin se dégage de sa mission de soins pour des raisons professionnelles ou personnelles, il doit indiquer à ses patients le confrère auquel ils pourront s'adresser en son absence. Le médecin doit également informer le conseil départemental de l'ordre de ses absences programmées dans les conditions et selon les modalités définies par décret. 

« Le conseil départemental de l'ordre veille au respect de l'obligation de continuité des soins. »

M. Alain Milon, rapporteur.  - L'article 16 concerne la permanence des soins. L'histoire conflictuelle de l'organisation des permanences a abouti à la coexistence dans la partie réglementaire du code de la santé publique de deux dispositions qu'il faut concilier. L'article R. 4127-77, qui appartient au code de déontologie médicale, dispose qu'« il est du devoir du médecin de participer à la permanence des soins dans le cadre des lois et des règlements qui l'organisent » ; c'est sur cet article que se fonde le pouvoir de réquisition des préfets. L'article R. 6315-4, introduit par le décret du 22 décembre 2006, précise que les médecins participent à la permanence des soins sur la base du volontariat. L'article 16 du projet de loi maintient l'équilibre de ces deux principes. Votre commission, soucieuse d'efficacité, ne souhaite revenir ni sur l'un, ni sur l'autre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - La question de la permanence des soins est cruciale. L'article 16 réaffirme qu'il s'agit d'une obligation de service public. Cette mission était jusqu'ici placée sous la responsabilité du préfet de département, financée par l'assurance maladie et organisée, entre autres, par le conseil départemental de l'Ordre des médecins et la mission régionale de santé. Elle relèvera désormais des compétences de l'ARS et sera donc organisée à l'échelon régional même si, en cas de nécessité, elle pourra l'être au niveau départemental.

Le concours des structures hospitalières pourra être exigé dans certaines zones pour prendre en charge les demandes de soins non programmées, notamment en nuit profonde.

L'usager pourra accéder au médecin de garde en appelant le numéro d'appel national -le 15- ou celui des associations de permanence des soins comme SOS Médecins. Ces plates-formes téléphoniques devront être interconnectées avec le centre de régulation du Samu.

Le texte de la commission oblige le directeur de l'ARS, dans les zones de montagne, à communiquer au comité de massif un rapport annuel sur l'organisation de la permanence des soins. Il prévoit également un délai de trois ans avant l'apparition des schémas d'organisation de la permanence des soins.

L'activité de régulation des appels, assurée par les médecins libéraux au sein du Samu, sera désormais soumise au régime de responsabilité administrative s'appliquant aux agents de l'établissement, car elle n'est généralement pas couverte par l'assurance personnelle des médecins.

Les médecins libéraux seront contraints de participer à l'organisation de la continuité des soins en prévenant le conseil départemental de l'ordre de leurs absences. Contrairement à ce que l'on a pu lire dans certains libelles, cette mesure n'interdit nullement aux médecins de s'absenter, mais elle permettra d'assurer une présence médicale minimale pendant les périodes tendues, en fin d'année ou l'été.

Les amendements du Gouvernement sur cet article visent d'abord à préciser que seule la régulation des appels sera couverte par le régime de la responsabilité administrative ; lors des visites et des consultations, les médecins libéraux sont couverts par l'assurance de responsabilité professionnelle qu'ils souscrivent obligatoirement. Ensuite, pour que les ARS puissent garantir la continuité des soins, elles doivent avoir les moyens de s'assurer que les patients d'un médecin seront pris en charge même lorsque celui-ci est absent.

M. Alain Vasselle.  - Le problème de la permanence des soins résulte de dispositions récentes. M. Juppé, lorsqu'il était Premier ministre, s'est heurté au mécontentement des médecins qui l'accusaient d'une gestion comptable de l'assurance-maladie. Après 2002, le ministre de la santé M. Mattéi a accepté de délier les médecins de l'obligation de participer à la permanence des soins, en contrepartie de certains engagements. Depuis lors, nous avons assisté à une dégradation continue. (M. François Autain et Mme Nicole Borvo Cohen-Seat le confirment) Les urgences des hôpitaux publics croulent sous les demandes.

Les syndicats de médecins de toutes sensibilités, aussi bien SML que MG France, s'accordent à dire que cette réforme fut une erreur. Mais ni le Gouvernement ni la commission ne veulent revenir sur le principe du volontariat. Ils proposent donc une solution qui, pardonnez-moi, me semble un peu bâtarde : plutôt que de revenir au statu quo ante, on habille les dispositions actuelles pour en atténuer les inconvénients. On renonce ainsi à s'attaquer de front au problème de la permanence des soins, comme à celui des déserts médicaux.

M. François Autain.  - Je me réjouis de voir M. Vasselle faire remonter les difficultés rencontrées dans l'organisation de la permanence des soins aux concessions faites par M. Mattéi aux médecins. La droite leur en avait fait la promesse avant les élections, car ils avaient été échaudés par le plan Juppé. Elle obtint le résultat escompté : en 2002 les médecins votèrent de nouveau en majorité pour la droite. (Exclamations à droite)

Mme Isabelle Debré.  - C'est un mauvais procès !

M. François Autain.  - La permanence des soins est incompatible avec le volontariat comme le montre la récente enquête menée par l'Ordre national des médecins sur la permanence des soins publiée en janvier 2009. Résultat, la permanence des soins n'est plus assurée dans certains départements et, compte tenu des mesures inefficaces de ce texte, la situation risque de s'aggraver.

Madame la ministre, les médecins ont le devoir d'assurer la permanence des soins, avez-vous déclaré ; mais, dans le texte, il n'est question que d'une faculté. J'ai proposé un amendement visant à rétablir cette obligation. Nous verrons alors si vous êtes cohérente...

Par nos amendements, nous tenterons de revenir sur les importants changements intervenus ces dernières années qui ont compromis le fonctionnement de cette mission de service public.

M. Bernard Cazeau.  - Autant la coercition me semble prématurée pour l'installation, autant elle me semble justifiée pour la permanence des soins. Lorsque la permanence des soins était une obligation, il n'y avait pas de difficultés. Malgré la longueur des trajets du Samu que nous évoquions tout à l'heure, les malades attendaient l'arrivée des secours dans de bonnes conditions car les pompiers ou un médecin étaient toujours présents.

Faisons le bilan de l'action des préfets. Lorsque le système fonctionne, c'est grâce aux médecins qui l'ont pris en charge. Dans mon département, les jeunes médecins ont déclaré au préfet vouloir revenir au système antérieur, mais le préfet met la pagaille avec le paiement des astreintes du samedi après-midi. Tout cela est de mauvais aloi. Au reste, pourquoi payer des astreintes quand les médecins sont déjà rémunérés à l'acte ? Je ne doute pas que M. Vasselle, en sa qualité de rapporteur, pensait à ces 300 à 400 millions dépensés inutilement...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Si l'on supprime le paiement des astreintes, c'en sera terminé de la permanence des soins !

M. Bernard Cazeau.  - Revenons donc à l'obligation d'assurer la permanence de soins à laquelle on se soumettait autrefois en prêtant le serment d'Hippocrate. (M. Alain Vasselle acquiesce) D'ailleurs, je n'ai jamais compris -mais c'était une affaire politique- qu'un gouvernement soit revenu sur ce principe !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Les temps changent...

M. Guy Fischer.  - Ah ça oui !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je me souviens, dans ma famille, de médecins taillables et corvéables à merci...

M. Gilbert Barbier.  - N'exagérons rien...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - ...qui n'étaient pas rémunérés pour les astreintes effectués. La médecine était alors un véritable sacerdoce, qui impliquait toute la famille, l'épouse faisant office gracieusement de secrétaire. Alors le bon vieux temps, non merci ! Les jeunes médecins veulent travailler autrement, ils veulent du temps libre. En fait, nous sommes confrontés à une révolution culturelle, à une révolution des moeurs. Tout ceci n'a rien à voir avec MM. Juppé et Mattei. Et l'ancien système fonctionnait mal, j'en veux pour preuve la grève massive des médecins en 2001. Plus aucun médecin ne voudrait travailler dans ces conditions, et à raison !

Pas moins de 73 % des médecins assurent aujourd'hui la permanence des soins, signe que le système des astreintes fonctionne bien. Certes, il subsiste des difficultés dans certaines zones, raison pour laquelle j'ai mandaté une mission d'appui pour venir en aide aux préfets et aux représentants des médecins, notamment le Conseil de l'Ordre.

Nous allons remettre le système d'aplomb. L'obligation de la permanence des soins est inscrite dans le code de la santé publique, rappelons-le. C'est elle qui fonde au plan juridique le pouvoir de réquisition des préfets. Mais elle s'exprime de manière collective...

Mme Isabelle Debré.  - Et organisée !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Ce système doit reposer sur une rémunération correcte des médecins -il faut rembourser les astreintes car que se passerait-il si aucun malade ne se présente durant les heures de permanence ?- et un système d'astreintes supportable pour la collectivité en termes financiers.

Bref, les fractures au sein de ce système d'obligation collective, nous vous proposons de les régler par une gestion plus rationalisée, par l'imposition d'une obligation de résultats pour autoriser une modulation selon les spécificités locales. En tout cas, croyez-moi, les professions médicales seraient vent debout contre une obligation insupportable, compte tenu des nouvelles conditions de vie, et c'en serait fini de la permanence de soins !

M. François Autain.  - Ah bon !

L'amendement n°178 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°95 rectifié, présenté par M. Gilles, Mme Hermange, MM. Pointereau et Leclerc et Mme Goy-Chavent.

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6314-1 du code de la santé publique, après les mots :

libérale

insérer les mots :

, et sur la base du volontariat

M. Dominique Leclerc.  - La permanence des soins doit être fondée sur le volontariat.

M. le président.  - Amendement identique n°677, présenté par M. Houpert.

M. Alain Houpert.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°860, présenté par MM. P. Blanc et Laménie.

M. Marc Laménie.  - De même.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Retrait, sinon défavorable à ces amendements identiques qui relèvent du règlement.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Même avis. La permanence des soins, en tant que mission de service public, est une obligation collective, je viens de le rappeler, qui est assurée sur la base du volontariat individuel. Là est toute la nuance ! Si cette obligation n'est pas remplie, les préfets ont donc un pouvoir de réquisition, dont ils font d'ailleurs rarement usage. Vos amendements, par leur rédaction ambiguë, pourraient le leur ôter. Enfin, le principe du volontariat individuel est clairement inscrit dans la partie réglementaire du code de la santé publique.

L'amendement n°95 rectifié ter est retiré ainsi que les amendements n°s677 et 860.

M. le président.  - Amendement n°482, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Après la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6314-1 du code de la santé publique, insérer une phrase ainsi rédigée :

Elle répond à l'exigence de continuité du service public et peut donc revêtir un caractère contraignant.

II. - Dans la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6314-1 du code de la santé publique, remplacer les mots :

vocation à

par les mots :

le devoir d'

M. François Autain.  - Nous réintroduisons la notion de continuité de service public, qui implique la permanence des soins. Nous tenons à préciser qu'elle peut revêtir un caractère contraignant : vous venez de le dire, cela va mieux en l'écrivant. La ministre a parlé de devoir ; rappelons-le dans le texte. Un médecin répond à une vocation. Voilà une occasion extraordinaire de montrer qu'il ne s'installe pas à la recherche de son confort, mais pour servir son prochain.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. François Autain.  - Sans nuance ?

M. Alain Milon, rapporteur.  - De toute évidence, la précision n'est pas utile car la contrainte est individuelle. Avis défavorable.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Avis défavorable pour les raisons que j'ai développées à l'instant.

M. François Autain.  - Hélas...

L'amendement n°482 n'est pas adopté.

L'amendement n°733 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°483, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger comme suit le troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6314-1 du code de la santé publique :

Si la permanence des soins n'est pas assurée conformément au premier alinéa de cet article, le directeur général de l'agence régionale de santé demande au représentant de l'État dans le département de procéder aux réquisitions nécessaires.

M. François Autain.  - Le directeur général de l'ARS, qui est chargé de veiller à la continuité des soins et au respect de cette mission, est le plus à même de préconiser les réquisitions. Il n'est pas suffisant d'apporter des éléments d'information. Notre amendement de cohérence et de bon sens accélèrera la procédure.

M. le président.  - Amendement n°736 rectifié, présenté par M. Cazeau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans les première et seconde phrases du troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6314-1 du code de la santé publique, après le mot :

accessible

insérer les mots :

en toute circonstance

M. Yves Daudigny.  - L'égal accès aux soins est un principe constitutionnel dont les changements sociaux intervenus depuis vingt ans accentuent l'importance et compliquent la mise en oeuvre, d'où cet amendement. Que se passe-t-il en effet quand une ligne téléphonique est coupée ? Evitons des procès nuisibles à l'État, et assurons une permanence qu'il faut exiger pour la santé comme on l'a pour la police, pour les pompiers, mais aussi pour le gaz ou l'électricité. Le service téléphonique doit fonctionner en toute circonstance de manière à assurer une permanence de soins rénovée et polyvalente dans les zones rurales comme dans les quartiers difficiles.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°483 car ce renforcement de la rédaction n'apparaît pas souhaitable. Même avis sur l'amendement n°736 rectifié dont la rédaction trop générale serait inapplicable et source de contentieux.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je ne suis pas d'accord pour transférer au directeur général de l'ARS le pouvoir de police du préfet. J'invite M. Autain qui ne cesse de dénoncer le superpréfet sanitaire à être cohérent avec lui-même. Quant à l'amendement n°736 rectifié, il est satisfait dans la partie règlementaire du code de la santé publique par l'article 63-11-2.

M. Yves Daudigny.  - Tout arrive : je suis convaincu... (Sourires)

L'amendement n°736 rectifié est retiré, ainsi que l'amendement n°483.

La séance est suspendue à midi cinquante-cinq.

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

La séance reprend à 15 heures.