COMMISSION MIXTE PARITAIRE

Jeudi 6 juillet 2023

- Présidence de Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales du Sénat -

La réunion est ouverte à 10 h 00.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap ou victimes d'un accident d'une particulière gravité

Mesdames, Messieurs,

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de la Première ministre, la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap ou victimes d'un accident d'une particulière gravité se réunit au Sénat le jeudi 6 juillet 2023.

Elle procède tout d'abord à la désignation de son Bureau, constitué de Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente, de Mme Fadila Khattabi, députée, vice-présidente, de Mme Marie-Pierre Richer, sénatrice, rapporteure pour le Sénat, et de M. Paul Christophe, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. - Mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons a été adoptée à l'Assemblée nationale le 2 mars 2023 et au Sénat le 4 juillet 2023. Malgré ce délai particulièrement resserré, j'aborde cette réunion avec confiance quant à notre capacité à élaborer un texte commun. En effet, seuls quatre articles restent en discussion, et, surtout, aucune différence ne semble résulter d'une divergence d'approche, les rapporteurs ayant - ils nous le confirmeront sans doute - travaillé en bonne intelligence au cours de cette navette.

Mme Fadila Khattabi, députée, vice-présidente. - Je suis confiante également quant à notre capacité à trouver un accord sur ce sujet, particulièrement attendu par les Français.

Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure pour le Sénat. - Nous sommes réunis ce matin afin de parvenir à un accord sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap ou victimes d'un accident d'une particulière gravité.

Nos deux chambres ont examiné le texte avec les mêmes ambitions : garantir une protection accrue pour les familles concernées, et lever les obstacles inutiles qu'elles sont amenées à rencontrer. Nos convergences de vues nous permettront, je crois, d'aboutir à un consensus sur ce texte.

Sur les sept articles que comportait le texte transmis, le Sénat en a adopté conformes trois et n'a porté qu'un amendement rédactionnel à un quatrième. Permettez-moi de rappeler brièvement ce sur quoi nous sommes déjà en parfait accord.

L'article 2 simplifie et flexibilise le recours au télétravail pour les salariés aidants. Le Sénat a jugé que la rédaction retenue par l'Assemblée nationale offrait une flexibilité bienvenue aux parents qui pourraient et souhaiteraient recourir au télétravail, dans un objectif de meilleure conciliation avec leur vie personnelle, sans être excessivement prescriptive pour les employeurs.

L'article 4 vise à supprimer un mécanisme d'écrêtement qui devait éviter les effets d'aubaine liés à la revalorisation des allocations journalières de présence parentale et de proche aidant. Cette précaution adoptée en 2021 se trouve finalement sans objet et serait particulièrement complexe à mettre en oeuvre.

L'article 4 bis prévoit qu'un bailleur ne puisse plus refuser le renouvellement du bail à un locataire bénéficiaire de l'allocation journalière de présence parentale (AJPP) aux ressources modestes, à moins qu'une solution de relogement, correspondant à ses besoins et située à proximité, ne lui soit proposée. Nous nous sommes interrogés sur cette disposition, mais la limitation du droit de propriété des bailleurs reste tout à fait raisonnable et apporte une protection bienvenue aux familles dont le quotidien est bouleversé.

Enfin, l'article 5 permet aux caisses d'allocations familiales (CAF) de mettre en oeuvre des innovations, à titre expérimental, dans le service de l'AJPP afin de mieux accompagner ses allocataires et de les prémunir de difficultés financières.

Sur les trois articles modifiés par le Sénat, les différences de rédaction ne devraient pas soulever de difficultés. En effet, les modifications apportées par le Sénat concourent toutes à enrichir le texte et à lui apporter davantage de cohérence, au service des familles.

Afin de confirmer nos convergences de vues, je peux dire, en toute franchise, que nous avons eu des échanges fréquents et constructifs avec le rapporteur Paul Christophe, que je remercie de nouveau pour son travail et son engagement en faveur des familles touchées par la maladie, un handicap ou un accident grave d'un enfant.

L'article 1er issu de la rédaction des travaux de l'Assemblée nationale offre, sur le modèle de la protection contre le licenciement pour les femmes enceintes, une protection contre le licenciement a priori à tous les salariés en congé de présence parentale (CPP). Le Sénat a jugé que cet article complétait utilement la protection professionnelle offerte aux salariés en CPP. Pour sécuriser le dispositif et garantir qu'il s'applique à tous les parents en CPP, quels que soient leurs choix professionnels, le Sénat a adopté cet article modifié par un amendement tendant à préciser que la protection contre le licenciement était applicable à toute la durée du congé de présence parentale, y compris lors des éventuelles périodes de reprise du contrat de travail entre deux périodes de congés.

L'article 1er bis, introduit en séance à l'Assemblée nationale, vise à allonger la durée minimale de deux congés pour événements familiaux.

Le Sénat a pleinement souscrit à l'allongement du congé pour l'annonce de la survenue d'un handicap ou d'une pathologie grave chez l'enfant, qui répond aux attentes des familles et leur offrira davantage de temps pour assimiler la nouvelle, mais également pour accomplir les démarches prenantes et chronophages auxquelles elles sont confrontées après l'annonce. Il a adopté ces dispositions sans modification.

En revanche, le Sénat a adopté deux amendements visant à conférer davantage de cohérence à l'allongement du congé pour le décès d'un enfant.

D'une part, le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale portait de cinq à douze jours ce congé dans le cas général, sans toutefois répercuter cette hausse sur le congé allongé dans le cas d'un décès d'un enfant de moins de 25 ans, maintenu à sept jours ouvrés. Pour faire cesser cette situation inopportune, le Sénat a porté de sept jours ouvrés à quatorze jours ouvrables le congé allongé pour décès d'un enfant de moins de 25 ans, en conformité avec l'esprit du droit en vigueur.

D'autre part, le Sénat a adopté un amendement visant à rendre applicable aux agents publics l'allongement du congé de décès, qui ne concernait que les salariés dans le texte adopté par l'Assemblée nationale.

L'article 3 supprime le caractère explicite de l'accord du service du contrôle médical de l'Assurance maladie afin de réduire les délais trop longs d'instruction des demandes d'AJPP. Il permet également aux CAF d'accorder une avance sur le versement de cette allocation. Le Sénat a adopté cet article en y ajoutant une possibilité d'accorder des avances sur l'allocation journalière du proche aidant (Ajpa), en cas de situation urgente. Nous avons cependant eu confirmation que les délais de versement de l'Ajpa ne posaient pas les mêmes difficultés que ceux qui s'appliquent à l'AJPP. Le principe d'une avance serait sans objet. Nous vous proposerons donc d'adopter l'article 3 dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Grâce aux travaux de l'Assemblée nationale et du Sénat, ce texte a été enrichi de mesures utiles, qui ont reçu une large approbation dans chacune des deux chambres en première lecture. Il offrira un parcours simplifié aux allocataires de l'AJPP, protégera davantage les parents concernés de certains risques socioprofessionnels et permettra une meilleure adaptation du monde du travail aux caractéristiques de ces salariés. Je ne doute pas, dans ce contexte, que nous parvenions aujourd'hui à un accord afin d'aboutir, comme le souhaitent vivement les familles concernées, à une entrée en vigueur rapide.

M. Paul Christophe, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - En préambule, je voudrais vous faire part du bonheur qui est le mien de voir notre travail commun porter ses fruits. Je me félicite que nous arrivions à progresser, au-delà de ce qui nous sépare, sur le sujet central de la protection et de l'accompagnement des familles qui vivent le drame de la maladie, du handicap ou de l'accident d'un enfant. Avant d'aborder le contenu du texte qui nous réunit aujourd'hui, je tiens à remercier la rapporteure Marie-Pierre Richer pour la qualité de nos échanges tout au long de ce travail législatif. L'objectif consensuel et partagé de cette proposition de loi nous a permis d'aboutir à un texte très équilibré.

Cette proposition de loi succède à une série d'avancées législatives portées par des députés et des sénateurs de tous bords. En novembre 2021, le Parlement adoptait déjà une proposition de loi que j'ai eu l'honneur de rapporter, et dont la rapporteure était, au Sénat, Mme Colette Mélot, visant à améliorer les conditions de présence parentale auprès d'un enfant dont la pathologie nécessite un accompagnement soutenu. Ce texte s'inscrivait dans une volonté d'amélioration du soutien apporté aux familles d'enfants atteints de pathologies graves, amorcée par la loi du 8 mars 2019 portée à l'Assemblée nationale par Mme Nathalie Elimas et, au Sénat, par Mme Jocelyne Guidez.

Le texte que nous vous proposons d'adopter aujourd'hui a pour objet d'améliorer le quotidien des parents d'enfants malades, en réduisant autant que possible les différents obstacles administratifs et financiers rencontrés par les familles, tant dans la conciliation entre la présence parentale et la vie professionnelle que dans leur accès aux droits.

L'Assemblée nationale et le Sénat ont, tour à tour, enrichi les différents dispositifs que je vais brièvement vous présenter, guidés par le souci commun d'apporter des réponses concrètes aux difficultés que rencontrent les familles.

Le premier volet de la proposition de loi est consacré à la protection des salariés dont l'enfant est atteint d'une maladie ou d'un handicap ou a été victime d'un grave accident.

L'article 1er offre aux parents, contraints de réduire leur activité professionnelle afin de prendre soin de leur enfant, une nouvelle garantie, en complément des dispositions qui prohibent déjà toute forme de discrimination à leur égard. Par l'adoption de cet article, nous introduisons une protection spécifique des salariés qui sollicitent un congé de présence parentale en interdisant a priori leur licenciement. Le travail du Sénat, en lien avec le Gouvernement, a permis de préciser utilement que cette protection s'étend à l'ensemble du congé de présence parentale, y compris lorsque celui-ci est fractionné ou pris à temps partiel. Nous vous proposerons donc d'adopter la rédaction du Sénat en l'état.

L'article 1er bis, adopté à l'unanimité en séance publique à l'Assemblée nationale, a été considérablement enrichi au cours de l'examen au Sénat. Il prévoit désormais, dans le prolongement de la loi du 8 juin 2020, rapportée par mon collègue M. Guy Bricout à l'Assemblée nationale et par Mme Élisabeth Doineau au Sénat, de porter à 14 jours la durée minimale du congé pour le décès d'un enfant de moins de 25 ans et à 12 jours quel que soit son âge. Le dispositif a, en outre, été étendu, sur l'initiative du Gouvernement, aux agents publics. Rien ne permettra aux législateurs que nous sommes de venir compenser la perte d'un enfant, mais l'adoption de cette disposition, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat, constitue un réel progrès pour l'accompagnement des familles endeuillées.

S'il ne fait pas partie des dispositions sur lesquelles notre commission mixte paritaire doit se prononcer, je me réjouis tout de même de l'adoption conforme par le Sénat de l'article 2, qui garantira un recours facilité au télétravail pour les salariés aidants d'un enfant, d'un parent ou d'un proche.

La proposition de loi comporte, par ailleurs, diverses dispositions destinées à améliorer le parcours des familles confrontées à la maladie de leur enfant.

L'article 3, qui vise à supprimer la condition de l'avis explicite du service du contrôle médical nécessaire pour autoriser le renouvellement de l'AJPP et du CPP, avait déjà fait l'objet d'une discussion au Parlement puisqu'il avait été adopté dans le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), mais il avait été censuré au motif qu'il ne relevait pas du champ des lois de financement de la sécurité sociale. Après concertation avec la rapporteure, nous proposons d'adopter cet article essentiel, dans sa version issue des travaux de l'Assemblée nationale.

L'article 4, qui supprime le principe d'écrêtement de l'AJPP et de l'Ajpa versées aux non-salariés des professions agricoles non affiliés à l'assurance retraite, à leurs conjoints collaborateurs et associés et aux non-salariés des professions agricoles cessant leurs activités, fait également consensus entre nos deux assemblés. Nous proposons l'adoption de cet article dans sa version issue des travaux du Sénat, qui y a apporté une nécessaire modification rédactionnelle.

Les articles 4 bis et 5, portant respectivement sur la protection des bénéficiaires de l'AJPP locataires et la mise en oeuvre d'innovations, à titre expérimental, dans le service de l'AJPP, afin de mieux accompagner les bénéficiaires et de les prémunir des difficultés financières auxquelles ils peuvent être confrontés, ont été adoptés dans les mêmes termes par nos deux assemblées.

Les convergences que nous avons ainsi dessinées, en bonne intelligence, entre rapporteurs de cette proposition de loi nous laissent anticiper une issue conclusive à cette commission mixte paritaire, dont nous ne pouvons que nous réjouir.

Mme Annie Le Houerou, sénatrice. - Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain soutiendra cette proposition de loi et plaide également en faveur de son application rapide.

Nous regrettons toutefois que plusieurs de nos amendements n'aient pas été retenus en séance, concernant notamment la protection des salariés au regard de l'abandon de poste ou les conditions matérielles de prise en charge du télétravail. Nous avions proposé par ailleurs d'allonger à 10 jours le congé attribué lors de l'annonce d'un diagnostic de longue maladie ou de handicap. Cette annonce bouleverse en effet l'organisation familiale. Les dispositions contenues dans le texte constituent néanmoins un progrès. Nous soutiendrons donc cette proposition de loi, qui répond à une véritable attente des familles.

Nous attendons cependant une loi plus générale sur le statut de l'aidant, qui constituerait une avancée nécessaire. Un beau travail a néanmoins été réalisé sur ce texte, pour lequel je remercie nos deux rapporteurs.

Mme Brigitte Devésa, sénatrice. - Le groupe Union Centriste soutiendra également ce texte. Comme le précisait Mme Jocelyne Guidez, ce texte est un premier pas, mais une stratégie de communication, de sensibilisation et de repérage en direction des aidants serait bienvenue.

Examen des dispositions restant en discussion

Article 1er

L'article 1er est adopté dans la rédaction du Sénat, sous réserve d'une modification rédactionnelle.

Article 1er bis

L'article 1er bis est adopté dans la rédaction du Sénat, sous réserve d'une modification rédactionnelle.

Article 3

L'article 3 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 4

L'article 4 est adopté dans la rédaction du Sénat.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap ou victimes d'un accident d'une particulière gravité.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. - Je suis heureuse de terminer mes treize années de mandat par une commission mixte paritaire conclusive et apaisée.

Mme Fadila Khattabi, députée, vice-présidente. - Je suis également ravie de cette réunion conclusive et tiens à féliciter l'ensemble des sénateurs et députés qui se sont impliqués dans ce travail, à commencer par nos rapporteurs, qui ont tous témoigné d'un bel état d'esprit. Je vous félicite, madame la présidente, pour vos treize années de mandat et pour le travail mené durant les trois ans de nos présidences respectives aux commissions des affaires sociales du Sénat et de l'Assemblée nationale. Cela s'est fait dans un esprit constructif et républicain, que je salue au nom de mes collègues députés.

La réunion est close à 10 h 25.

- Présidence de Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale sur la proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de
« zéro artificialisation nette » au coeur des territoires
-

La réunion est ouverte à 10 heures 10.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer l'accompagnement des élus locaux dans la mise en oeuvre de la lutte contre l'artificialisation des sols

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, et à la demande de la Première ministre, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer l'accompagnement des élus locaux dans la mise en oeuvre de la lutte contre l'artificialisation des sols se réunit au Sénat le jeudi 6 juillet 2023.

Elle procède tout d'abord à la désignation de son Bureau, constitué de Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente, de M. Guillaume Kasbarian, député, vice-président, de M. Jean-Baptiste Blanc, sénateur, rapporteur pour le Sénat, et de MM. Bastien Marchive et Lionel Causse, députés, rapporteurs pour l'Assemblée nationale.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui dans le cadre de la commission mixte paritaire (CMP) chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » (ZAN) au coeur des territoires : seize articles sont encore en discussion, parmi lesquels six ont été supprimés par l'Assemblée nationale.

M. Guillaume Kasbarian, député, vice-président. - Madame la présidente, mes chers collègues, je connais l'importance que les sénateurs accordent à la proposition de loi visant à renforcer l'accompagnement des élus locaux dans la mise en oeuvre de la lutte contre l'artificialisation des sols - titre retenu pour ce texte par l'Assemblée nationale. J'ai d'ailleurs eu l'occasion d'en discuter à plusieurs reprises avec la présidente Valérie Létard, dont je salue la ténacité et l'implication constante. L'Assemblée nationale n'accorde pas moins de valeur à ce sujet, nos deux rapporteurs, Bastien Marchive et Lionel Causse, ayant également des convictions affirmées en la matière.

Nous sommes probablement tous d'accord pour dire qu'il n'est plus possible d'artificialiser entre 20 000 et 30 000 hectares de sols chaque année en France : de ce point de vue, les dispositions sur le « ZAN » figurant dans la loi Climat-résilience sont donc indispensables.

Cependant, il faut reconnaître que ces dispositions ont rapidement soulevé des interrogations, notamment sur les délais accordés aux collectivités territoriales, les contraintes auxquelles elles sont soumises pour adapter leurs documents d'urbanisme et, surtout, sur la nature du lien entre les documents régionaux et les documents communaux ou intercommunaux.

De nombreuses questions se sont également posées sur les modalités d'imputation des projets d'envergure nationale, ou encore sur l'opportunité d'accorder aux communes une surface minimale de consommation d'espace.

La présente proposition de loi vise à trouver des réponses à toutes ces interrogations.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Je tiens à mon tour à saluer le travail considérable et l'engagement des rapporteurs de nos deux assemblées, qui ont fait des efforts colossaux pour prendre en considération les observations qui remontent des territoires, à savoir la nécessité de mettre en oeuvre cette ambition essentielle de sobriété foncière, tout en faisant en sorte que sa mise en oeuvre soit soutenable pour les territoires.

À ce stade, il nous reste à trouver un accord.

La présente proposition de loi, fruit d'un travail transpartisan du Sénat, vise à permettre l'application des objectifs de réduction d'artificialisation des sols, prévus par la loi Climat-résilience, en donnant aux élus les outils dont ils ont besoin pour ce faire. Nos élus attendent ce texte ; ils en ont besoin.

Nous avons réussi à aplanir la plupart de nos divergences, fidèles à l'esprit de consensus qui a toujours guidé le Sénat et que, j'en suis sûre, l'Assemblée nationale partage. Nous réglerons les quelques difficultés restantes.

En revanche, la question de l'incidence des projets d'envergure nationale ou européenne, qui est structurante, primordiale pour l'équilibre de l'application du « ZAN », n'est pas tranchée. Le Sénat propose, pour sa part, de retenir un forfait de 10 000 hectares, qui serait donc soustrait à l'objectif national de réduction de 125 000 hectares ; d'inscrire clairement dans le texte que l'intégralité des éventuels dépassements à ce forfait sortira du décompte final ; qu'aucun éventuel dépassement ne sera reporté sur la décennie suivante ; et que la liste des grands projets ne pourrait être fixée qu'avec l'avis conforme des exécutifs régionaux, tout simplement parce que cela correspond aux principes de la décentralisation et que cela est au coeur des compétences dévolues aux régions.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Le « ZAN » est un sujet qui passionne, et qui est déterminant pour nos territoires. Chacun est bien conscient ici des enjeux que soulève l'application de la loi Climat-résilience, et des contraintes que les objectifs ambitieux qu'elle fixe peuvent poser, notamment aux élus locaux.

L'Assemblée nationale a adopté ce texte de manière très large, transpartisane, tout comme le Sénat. J'espère que cet esprit de consensus continuera à présider à notre réunion de ce jour, qui est l'aboutissement de longs travaux.

Trois grands objectifs ont guidé notre réflexion : le respect des objectifs de la loi Climat-résilience, la sécurisation des projets d'envergure nationale, et un meilleur accompagnement des élus locaux pour décliner ces objectifs.

Nous avons véritablement la volonté d'aboutir à un texte commun, même s'il reste un certain nombre de points à discuter. En revanche, cette volonté ne peut pas prendre le pas sur l'ambition qui est la nôtre, et sur laquelle tout le monde se retrouve aujourd'hui, celle de tendre vers la sobriété foncière et de préserver nos sols du mieux que nous pouvons.

Des points de convergence ont été trouvés, mais le débat reste ouvert sur un certain nombre de mesures importantes.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - Nous avons voté, dans le cadre de la loi Climat-résilience, des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols, qui ne sont plus en phase avec nos priorités nationales, notamment en raison des récents changements géopolitiques survenus aux frontières de l'Europe. Le nouveau cap de l'action publique est désormais le renforcement de la décarbonation.

Les outils mis en place en 2021 ne correspondent plus, au moins dans l'immédiat, à la réalité de nos territoires et soumettent les élus locaux à des injonctions contradictoires.

Depuis la loi Climat-résilience, nous avons adopté la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables (EnR), la loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires, et nous voterons prochainement une loi relative à l'industrie verte. Chacune de ces lois prévoit l'installation de nouvelles infrastructures dans les territoires, bien souvent d'ailleurs sans l'accord des collectivités concernées. Une mobilisation importante du foncier est donc à attendre. Toutes ces lois imposent aux élus locaux de nouveaux objectifs en matière de développement territorial, sans jamais leur donner les moyens concrets d'y faire face.

Nous ne voulons pas endosser la responsabilité des entraves mises à l'accélération de la décarbonation de notre économie ni à sa réindustrialisation par les entreprises responsables de son verdissement, car il y a aujourd'hui une urgence climatique dont nous sommes tous conscients.

C'est bien dans cet état d'esprit que le Sénat a travaillé, dans une optique consistant à accepter le principe du « ZAN », tout en s'opposant à la méthode retenue dans la loi Climat-résilience, que nous avons perçue comme beaucoup trop centralisatrice.

Nous privilégions, pour notre part, une approche « territorialisante » - j'y insiste. Cette approche passe notamment par la garantie pour les collectivités d'un droit de proposition. Dans les régions, les schémas de cohérence territoriale (Scot) disposaient d'un tel droit de proposition ; mais force est de constater qu'il n'a pas vraiment fonctionné, ce qui a renforcé le sentiment d'un retour à la recentralisation et à une logique descendante. Le « ZAN » n'est d'ailleurs pas le seul domaine où cette logique s'est manifestée !

Au Sénat, une mission conjointe de contrôle a donc été mise en place : elle a entraîné le dépôt d'une proposition de loi, examinée par une commission spéciale, ce qui permet de faire valoir le caractère transpartisan de notre démarche.

Ce texte, adopté à une très large majorité au Sénat, vise à rendre le « ZAN » plus acceptable et à prévoir une autre méthode, ascendante.

Pour rendre le « ZAN » plus acceptable, nous voulons une garantie universelle de développement communal, reposant sur un « droit à l'hectare », ainsi qu'une nouvelle gouvernance qui associerait mieux les élus locaux à la gestion du « ZAN », dans le cadre d'une cogestion avec l'État et les régions : elle prendrait la forme d'une conférence régionale de gouvernance du « ZAN ».

Il reste le très problématique sujet des projets d'envergure nationale : le seuil du forfait doit-il être fixé à 25 000 hectares, ou plutôt à 10 000, à 15 000 ou à 20 000 hectares ? Il est difficile de se faire une idée, car les estimations dont nous disposons, concernant les grands projets à venir et leur impact, ne sont pas consolidées.

Quoi qu'il en soit, nous, sénateurs, considérons que les grands projets doivent sortir du « ZAN ». Il s'agit de la seule dérogation que nous demandons, et ce depuis le début, car nous tenons à respecter la trajectoire ambitieuse qui a été définie. Nous veillons seulement à ce que cette trajectoire ne pèse pas sur les territoires.

En réponse au Sénat, l'Assemblée nationale propose un forfait. Nous pourrions cheminer vers cette idée, mais uniquement dès lors que serait envisagé un après-forfait clairement défini et sécurisé. Un accord sur cette partie fondamentale pour l'architecture globale du texte est crucial.

Or l'ultime version qui nous a transmise par nos collègues députés me paraît totalement inacceptable. Malgré un dialogue réel et malgré les efforts fournis, un forfait de 12 500 hectares ne nous paraît pas satisfaisant ; même ramené à 10 000 hectares après estimation, il ne serait pas satisfaisant, car la rédaction est trop complexe, et imparfaite d'un point de vue juridique.

Pour résumer, notre désaccord sur ce sujet porte sur deux points : tout d'abord, le coefficient de péréquation assorti de ce forfait à 12 500 hectares ; ensuite, la mention d'un rapport, qui déterminerait l'incidence du dépassement du forfait, et ouvrirait la possibilité de tenir compte de ces dépassements pour la tranche décennale suivante.

De toute évidence, une telle version manque de clarté et ne peut nous satisfaire. Je le répète, nous voulons exclure les grands projets du décompte de l'artificialisation. Si nous sommes prêts à faire un pas vers l'idée d'un forfait, il nous faut davantage de garanties.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Vous l'aurez compris, nous sommes en mesure de trouver un accord sur la plupart des articles de ce texte. Il reste, en revanche, du chemin à parcourir pour nous entendre sur la question des grands projets, traitée à l'article 4.

M. Lionel Causse, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je tiens à rappeler que la trajectoire que nous suivons existe depuis longtemps : déjà, en 2011, l'Europe a inscrit l'objectif « ZAN » dans sa feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources. Cet objectif nous oblige et doit nous pousser à trouver des solutions pour accompagner les territoires dans cette voie.

C'est d'ailleurs pourquoi, en 2016, le législateur a accordé la compétence « mobilisation du foncier » aux régions, au travers notamment des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet) ; en 2021, la loi Climat-résilience a rappelé l'importance d'atteindre l'objectif « zéro artificialisation nette » d'ici à 2050, et a commencé à décliner un calendrier de mise en oeuvre de cette ambition, en réaffirmant l'intérêt de s'appuyer sur les Sraddet, les enveloppes régionales et les conférences régionales des Scot.

Notre responsabilité est d'accompagner nos territoires, et non de leur dire que l'on peut ne pas respecter tant l'objectif que le calendrier de cette trajectoire. Ce serait une erreur de notre part que de laisser croire aux élus locaux qu'ils peuvent la dédaigner. Il faut protéger nos espaces non artificialisés et, d'une façon générale, répondre aux défis auxquels nous devons faire face en termes d'environnement, de biodiversité ou d'agriculture.

Certains territoires ont déjà intégré l'objectif « ZAN » : je pense à certaines régions dont les Sraddet visent des objectifs encore plus ambitieux que ceux prévus par la loi Climat-résilience, ou à certains territoires dotés de Scot et de plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi) très exigeants. Mais il existe encore de grandes disparités territoriales, et il nous faut parvenir à faire converger les efforts.

Cette proposition de loi sénatoriale a pour objet d'apporter de nouveaux outils aux élus, de traiter un certain nombre de sujets importants, comme les efforts de renaturation menés par les collectivités territoriales sur la décennie en cours, la conférence régionale des Scot, ou la gestion du recul du trait de côte.

Le texte que les députés ont adopté est déjà une forme de compromis trouvé entre l'ensemble des groupes de l'Assemblée nationale. C'est pourquoi nous ne pourrons pas accepter quoi que ce soit qui contribuerait à mettre en cause, tant en termes de calendrier que de consommation effective d'espace, l'objectif « ZAN ».

Je rappelle que la proposition de loi adapte déjà un certain nombre de dispositifs prévus par la loi Climat-résilience : elle permet, par exemple, d'inclure la renaturation sur la période décennale en cours.

Cette proposition de loi contient des avancées, mais nous nous sommes fixé un certain nombre de lignes rouges, notamment à l'article 4, compte tenu des concessions que nous avons déjà accordées.

Je pense que nous sommes en mesure de parvenir à un accord, d'autant que, ne l'oublions pas, il sera toujours possible de rectifier la donne dans quelques années. Si nous touchions davantage aux objectifs fixés dans la loi Climat-résilience, nous enverrions un mauvais signal à tous, en particulier à de nombreux collègues députés, dont beaucoup se sont abstenus parce qu'ils considéraient que nous n'allions pas assez loin.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - Je remercie Lionel Causse pour ce rappel très fidèle des faits et le remercie également pour les échanges que nous avons régulièrement depuis l'adoption de la loi Climat-résilience.

Je tiens simplement à rappeler qu'à l'issue de l'adoption de ce texte par le Sénat le ministre Christophe Béchu nous a demandé - suggestion inédite ! - d'accepter que certains des articles de la proposition de loi puissent être transposés dans le droit sous la forme de décrets, au motif que cela permettrait aux élus locaux de disposer plus rapidement de ces nouveaux outils. Nous l'avons accepté - ce n'est pas rien ! -, si bien que la réunion de ce matin est celle d'une « commission mixte législativo-réglementaire ».

N'oublions pas non plus que les trois décrets pris par Mme Emmanuelle Wargon, avant qu'elle ne quitte ses fonctions, posaient problème, car nous estimons qu'ils revenaient sur ce que nous avions voté, ce qui a d'ailleurs donné lieu à un contentieux, toujours en cours, engagé par l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF).

Il faut garder tous ces éléments à l'esprit : nous ne discutons aujourd'hui que des articles qui restent en discussion.

M. Thibault Bazin. - Je suis député, mais je rejoins pleinement l'état d'esprit des sénateurs.

Notre groupe aurait certes souhaité assouplir davantage la version sénatoriale du texte, qui nous semblait déjà être une forme de compromis : nous aurions pu aller plus loin, car, si nous appliquions telles quelles les dispositions prévues dans la loi Climat-résilience, nous risquerions de geler les capacités de construction dans des régions, de bloquer un certain nombre de grands projets, à l'heure où les projets d'installation d'industrie verte se multiplient et où un certain nombre de besoins industriels, liés à d'autres politiques publiques, s'accentuent. Nous risquerions également de geler la constructibilité dans des villages pourtant vertueux en termes d'artificialisation des sols.

Nous sommes très attachés à parvenir à un accord, car la question des délais et de la mise en oeuvre de cette ambition s'impose à nous.

Messieurs les rapporteurs, il me semble que nous sommes en mesure de tenir une trajectoire vertueuse, tout en tenant mieux compte des réalités locales, ce que visent les articles 4 et 7. La proposition d'un forfait exonéré, bien ajusté, me semble être à cet égard la bonne solution. Il ne faudrait pas pour autant aboutir à un faux-semblant d'accord, qui contribuerait à geler la constructibilité dans des régions appelées à accueillir les grands projets pour notre pays. Pour nous accorder sur un texte commun, j'appelle nos collègues de la majorité de l'Assemblée nationale à concéder quelques assouplissements.

M. Jean-Pierre Corbisez. - Les rapporteurs l'ont dit, il faut mieux accompagner les élus locaux.

Je suis sénateur du département du Pas-de-Calais, qui accueillera bientôt le canal Seine-Nord Europe : il ne faudrait pas que les communes rurales, qui verront leur voirie et leur paysage modifiés de ce fait, aient à compenser l'impact de ce projet.

Si je suis conscient du problème que pose la disparition de 20 000 hectares de terres agricoles chaque année, mais je décèle beaucoup d'incohérences dans le texte de la loi Climat-résilience. Je pense notamment à ces communes qui acceptent des projets à la demande des services de l'État - l'installation d'un centre pénitentiaire, la reconstruction d'un hôtel de police ou d'un commissariat - parfois, il faudrait compenser l'artificialisation ainsi occasionnée ! J'ai à l'esprit l'exemple de ce maire d'une petite commune qui va accueillir la brigade fluviale de la gendarmerie nationale pour surveiller le canal Seine-Nord Europe. Il devra concéder gratuitement un terrain à l'État, se priver des ressources de fiscalité locale qu'il aurait pu attendre dudit terrain - car il est prévu que ce soit un bailleur social qui construise les logements des gendarmes - et, dans le même temps, il devra compenser cette artificialisation des sols, ce qui l'obligera à abandonner son projet de construction de nouveaux lotissements... Ce maire rural va doublement perdre des ressources à cause d'un projet de l'État : on marche sur la tête !

Actuellement, certains d'entre nous sont en campagne électorale : sachez que le « ZAN » est un leitmotiv. Alors, prenons garde aux errements, et prévoyons des contreparties !

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Beaucoup d'élus locaux sont autour de la table ce matin : nous sommes évidemment tous sensibles à cette question. S'il est vrai que nous n'avons pas la même approche de la mise en oeuvre de l'objectif « ZAN », nous sommes tous soucieux de régler les difficultés existantes.

J'observe simplement, pour réagir à l'exemple que vous avez cité, monsieur le sénateur, que si la commune que vous évoquez a encore des marges pour construire, elle n'aura pas à compenser l'impact du projet de l'État. C'est tout l'enjeu de l'article 7 et de la garantie rurale, qui doit permettre aux communes les plus rurales de continuer à construire.

Pour l'article 4, je rappelle que l'objectif est de sécuriser les projets d'envergure nationale, tout en faisant en sorte qu'ils n'affectent pas le droit à construire de ces communes. Les communes qui accueillent de tels projets - EPR, base militaire, centre pénitentiaire -, structurants à l'échelon d'un territoire, et qui dépassent le seul intérêt territorial, ne doivent pas voir leur droit à construire grevé. D'où l'intérêt du forfait que nous proposons, qui vise à garantir que les projets puissent se concrétiser.

Ce forfait est élaboré sur la base d'une estimation. Nous devons nous projeter à horizon 2031. Or, nous n'avons pas la même maîtrise de tous les projets. Le forfait a donc été établi selon une évaluation optimiste, afin de ne pas avoir à refuser des projets - cela sécurise les communes - et de limiter le risque de dépassement.

La contre-proposition visant à abaisser ce forfait de 15 000 hectares à 12 500 hectares nous paraît raisonnable : compte tenu du temps nécessaire pour conduire les grands projets d'envergure nationale, tous les projets inclus dans le forfait ne verront pas tous le jour d'ici à 2031. Cet effort, redonnant mécaniquement 2 500 hectares de droit à construire aux communes, est déjà significatif.

Par ailleurs, dans le forfait de 15 000 hectares que nous avions initialement arrêté, 2 500 hectares se trouvent en région Île-de-France, en outre-mer et en Corse, autant de territoires non soumis à l'objectif de réduction de l'artificialisation imposé par la loi Climat-résilience. Autrement dit, lorsque l'on parle d'un forfait à 12 500 hectares, on parle en fait de 10 000 hectares inclus dans les Sraddet et 2 500 hectares qui ne fragiliseront pas le droit à construire des collectivités.

J'insiste sur le fait que, compte tenu de leur envergure nationale, voire européenne, tous les projets que nous avons énumérés doivent pouvoir se faire, tout comme le droit des communes à construire doit être garanti.

S'agissant du dépassement du forfait, un objectif a été fixé de réduire de 50 % l'artificialisation des sols au cours des dix prochaines années. Sur la dernière décennie, 244 000 hectares ont été artificialisés, ce qui porte cet objectif à 122 000 hectares. Nous souhaitons le maintenir, car il a été fixé voilà à peine deux ans et que nous sommes le plus gros consommateur foncier d'Europe. Aujourd'hui, nous sommes à 8 logements à l'hectare pour nos constructions, soit un terrain moyen de plus de 1 000 mètres carrés. La marge est là. Nous ne voulons pas casser le modèle de la maison individuelle, mais il doit être plus sobre.

L'heure n'est pas à revenir sur des objectifs environnementaux à peine adoptés et les efforts envisagés nous paraissent raisonnables.

Mme Catherine Couturier, députée. - Ce texte est fait pour les générations futures, et j'ose espérer qu'il n'y a autour de cette table aucun climatosceptique. Si c'était le cas, nous n'aurions aucune solution à proposer au sortir de cette réunion.

Pour le groupe LFI, comme pour les autres groupes de la Nupes, il y a certaines lignes rouges à ne pas franchir.

Les articles 4 et 7 sont ceux qui ont fait le plus débat à l'Assemblée nationale. Nous leur avons consacré de longues heures d'échanges.

Nous regardons aussi avec méfiance les décrets, car on peut revenir du jour au lendemain sur des décisions prises.

Mais nous nous sommes surtout battus pour sortir tous les projets écocides de la liste de l'article 4, car nous entendons faire en sorte que cette terre soit vivable dans le futur.

Les élus locaux, je le sais, s'inquiètent du texte de la loi Climat-résilience, surtout parce qu'ils ont besoin d'outils pour pouvoir le mettre en place. J'ai échangé avec le ministre Christophe Béchu, les amendements prévoyant des moyens supplémentaires pour les collectivités territoriales étant tombés sous le coup de l'article 40 de la Constitution. On nous parle du budget... Mais on a bien vu comment se sont passées les discussions des années précédentes.

Ce texte doit être considéré comme un outil permettant aux élus de répondre aux administrés, lesquels, par moments, voient seulement leurs intérêts individuels. Il faut une réglementation pour mieux protéger les élus et, bien sûr, il faut mieux les accompagner.

Nous avons par ailleurs regretté que la question de l'aménagement du territoire, dans sa globalité, n'ait pas été abordée et qu'aucune obligation n'ait été imposée au regard des 175 000 hectares de friches existantes.

Au-delà de cet article 4 et du blocage qu'il engendre, le report des délais à l'article 1er constitue également pour nous une ligne rouge, et il faut maintenir les avancées obtenues à l'article 3 sur la composition de la conférence régionale de gouvernance.

À l'article 7, nous avions formulé une proposition - il faut peut-être retravailler sa rédaction - fondée sur des pourcentages, plutôt que sur une mesure à l'hectare. Nous avons aussi travaillé sur le droit de préemption sur les bâtis vacants ou les biens informels, afin de permettre aux élus de densifier leur coeur de commune.

Mme Cécile Cukierman, sénatrice. - Je me permets, en préalable et dans le respect de mes collègues présents ce matin, d'observer qu'il existe aussi une diversité dans les approches des différents groupes de gauche de l'Assemblée nationale sur ce texte.

Notre réunion, ce matin, n'est pas un pur hasard. Dans sa version initiale, ce texte est le fruit d'un travail transpartisan du Sénat, répondant, non pas à une envie qu'aurait eu celui-ci de détricoter la loi Climat-résilience, mais au fait que cette loi n'est pas applicable et engendre des blocages. En laissant les choses en l'état, nous serons incapables de répondre aux quatre défis du logement, de la réindustrialisation, de la souveraineté alimentaire et de l'adaptation au changement climatique.

La problématique du changement climatique ne peut s'analyser à la seule aune de l'artificialisation des terres. Il serait absurde d'artificialiser très peu les sols, si cela devait engendrer une surabondance de transports ou une dépendance plus forte à des importations, engendrant des problèmes climatiques bien plus importants à l'échelle planétaire. Il faut considérer les défis dans leur globalité. Certes, la France a plus artificialisé que d'autres, mais elle contribue par bien d'autres politiques à répondre aux enjeux climatiques.

Par ailleurs, si on ne tient pas compte de l'enjeu que revêtent les grands projets nationaux et européens, nous aurons demain une France encore plus morcelée qu'aujourd'hui. Les territoires concernés par ces grands projets risquent de ne plus pouvoir se développer, alors même que ceux-ci, au regard des services et des emplois qu'ils draineront, rendront forcément nécessaire la construction de logements.

J'ai écouté avec attention le rapporteur de l'Assemblée nationale, je crois que le meilleur des textes est celui que l'on comprend et qui est applicable. Il serait sain d'éviter les usines à gaz, en présentant des éléments clairs, chiffrés, répondant aux objectifs. Cela fera du bien à la démocratie locale et à la population.

Des points d'équilibre ont été trouvés, soit au Sénat, soit à l'Assemblée nationale, mais, je le redis, si nous sommes là ce matin, c'est parce que le Sénat a pris ses responsabilités. Ne recréons pas, demain, les crispations que nous avons cherché à lever avec ce texte !

M. Éric Kerrouche, sénateur. - Sans nier les perspectives ouvertes par la loi Climat-résilience et son importance au niveau territorial, nous partageons tous l'idée qu'il faut remédier à un certain nombre de points.

Première difficulté, cette loi traite de manière identique des territoires différents. En l'absence de différenciation, son impact territorial diverge selon les lieux. La question des 175 000 hectares de friches, par exemple, concerne beaucoup plus le nord que le sud du pays.

Au-delà, même si cela peut sembler anodin à nos collègues de l'Assemblée nationale, je rappelle que cette initiative sénatoriale est issue d'un travail transpartisan, résultant donc d'une connaissance partagée des territoires et montrant à quel point cette loi engendre des frustrations - les mêmes, d'ailleurs, qui s'expriment dans la présente réunion.

Un cheminement important a été fait - il faut en remercier les sénateurs et les députés. Reste le problème lié aux grands projets. Je vois deux solutions : soit chacun se crispe sur ses positions et nous n'aurons pas d'accord ; soit nous continuons à travailler intelligemment, comme l'attendent les territoires. Une absence d'accord susciterait une incompréhension majeure. À cet égard, le rapporteur du Sénat a déjà souligné l'effort que représente l'acceptation d'un forfait, eu égard à notre position initiale.

Je voudrais insister sur la question de l'avis conforme du président ou de la présidente de région. Jamais les élus locaux ne doivent devenir les greffiers des préfets. Or c'est exactement ce que sous-tend la proposition qui nous est faite. C'est revenir de manière frontale sur la logique de décentralisation mise en oeuvre depuis 1982, qui a supprimé toute tutelle de l'État sur les élus locaux.

M. Christian Redon-Sarrazy, sénateur. - Les élus locaux parlent depuis longtemps du « ZAN », et pas uniquement dans cette période où nous approchons d'une échéance électorale. En 2021, avant même le vote de la loi Climat-résilience, nous avions produit un rapport sur la territorialisation du « ZAN », qui, déjà, abordait les questions dont nous discutons.

On ne peut pas faire le « ZAN » sans les territoires. Les élus locaux sont inquiets, car on les sollicite à chaque crise - « gilets jaunes », pandémie, émeutes -, mais on leur dit : « circulez, y'a rien à voir » chaque fois qu'il s'agit de parler d'urbanisme ou de développement territorial. Je rejoins donc les propos de mon collègue Éric Kerrouche sur l'actuelle reprise en main : si, demain, ce sont les préfets qui décident à la place des régions de la manière dont doivent se faire les projets, je ne pense pas que les élus locaux, dans les communes rurales ou périurbaines, l'apprécieront.

Nous allons donc au-devant de difficultés, car certaines dispositions, notamment autour de la place qui sera faite aux grands projets, risquent d'être difficiles à expliquer à une population en attente de services et d'aménagements.

Mme Christine Engrand, députée. - Je reviens sur ce dernier point. Ma circonscription compte 164 villages ; après avoir dernièrement rencontré une centaine de maires, on ressent inquiétude et colère. Nous avions proposé qu'un maire soit élu président de la commission du « ZAN ». Aujourd'hui, on va redonner le pouvoir aux régions, mais on intègre aussi des techniciens. Il y a une incompréhension de la part de certains élus locaux, qui pensent qu'ils vont disparaître, et ne voient pas l'utilité de continuer leur mandat. Devant les événements des dernières semaines, on en arrive à cette situation ! S'y ajoute le fait qu'on ne donne plus aux maires ni le choix ni le pouvoir de faire ce qu'ils veulent dans leurs villages. Même s'il faut encadrer l'artificialisation, et si nous sommes d'accord sur le chiffre de 15 000 hectares, la difficulté est aujourd'hui de laisser aux maires un peu de liberté.

Dans le Pas-de-Calais, à Wissant, le recul du trait de côte a des conséquences énormes : 170 maisons vont disparaître et il n'y a plus aucun terrain constructible.

Certains maires ont « joué le jeu » de la sobriété foncière, d'autres non, et ce sont souvent ceux qui ont « joué le jeu » qui sont pénalisés. Je défends les élus locaux, que nous sommes en train d'écoeurer. Le sujet de savoir qui sera président de la commission du « ZAN » est pour nous une ligne rouge.

Sur les articles 4 et 7, il faudrait voir comment sont déterminés les grands projets. Des constructions d'usines, en particulier, devraient être sorties du décompte des territoires. Nous serons très attentifs aux décisions qui seront prises aujourd'hui.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Pour revenir sur les propos qui viennent d'être tenus, en particulier par M. Kerrouche, nous partageons tous la volonté d'atteindre un objectif de sobriété foncière, mais, dans le même temps, depuis la promulgation de la loi Climat-résilience en août 2021, trois textes majeurs voulus par le Gouvernement ont été examinés pour répondre à l'ambition nationale et européenne d'accélérer la trajectoire de décarbonation : la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, la loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires, et la loi relative à l'industrie verte qui, pour le moment, a été adoptée par le Sénat. Ces trois textes demandent la mobilisation d'urgence du foncier pour des projets d'intérêt national, ce qui n'apparaissait pas sur les écrans radars au moment de l'examen de la loi Climat-résilience !

Si je me permets ce rappel, c'est pour expliquer pourquoi, aujourd'hui, tous les projets se heurtent, ce qui est source d'inquiétude dans les territoires comme chez les acteurs économiques, ainsi que le ministre Bruno Le Maire l'a lui-même indiqué. Si l'on rapporte l'ambition de la trajectoire de sobriété carbone voulue par l'Union européenne, que tout le monde partage, à la trajectoire intermédiaire du « ZAN » à l'horizon 2031, il devient extrêmement complexe d'atteindre cette dernière sans remettre en question notre capacité à accompagner les ambitions de la trajectoire de décarbonation. Aujourd'hui, nous sommes réunis pour savoir comment arriver à un objectif intermédiaire soutenable, qui ne bloque pas les projets. Cécile Cukierman l'a exposé pour des exemples très concrets de transition industrielle, d'accompagnement de nouvelles mobilités plus douces ou de transports moins carbonés, comme le canal Seine-Nord : ces projets concourent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et suivent une trajectoire qui va effectivement dans le sens de la loi Climat-résilience.

Nous avons le choix de modifier ou non la trajectoire intermédiaire, sans toucher à l'objectif final, pour prendre en compte des éléments qui n'existaient pas au moment de l'adoption de la loi précitée. La solution qui permet de ne pas bloquer ces projets n'augmenterait que de 5 %, pour la première période, l'enveloppe de consommation foncière nationale. Si nous voulons marcher sur deux jambes, faisons attention à la consommation du foncier, certes, mais veillons aussi à ne pas rater la transition énergétique et écologique devant nous : nous devons être au rendez-vous du nucléaire et des énergies renouvelables, pour lesquelles nous aurons besoin de consommer du foncier.

Il y a aussi eu un Conseil national de la refondation (CNR) logement. J'étais à Dunkerque avec le Président de la République : il faudra 18 000 salariés pour accompagner l'installation de l'entreprise Verkor, les deux EPR et toutes les infrastructures autour de ces projets. En plus de la mobilisation du foncier industriel et de production d'énergie nucléaire, il faudra loger ces 18 000 salariés et leurs familles. Croyez-vous vraiment que l'on y arrivera dans l'emprise urbaine actuelle, quasiment totalement consommée par les projets économiques ? Même si 4 000 salariés étaient logés sur place, 14 000 personnes devraient encore s'installer à proximité pour des raisons de mobilité professionnelle. Où les logerons-nous ?

Dès lors, comment expliquer aux élus à la fois que la loi tient la route, que l'objectif est responsable et raisonnable, et qu'il faut absolument répondre à notre ambition de transition ?

En fin de compte, l'équation que l'on tente de tenir avec un forfait de 10 000, de 15 000 ou de 25 000 hectares est fondée sur une estimation faite sans que nous disposions d'une étude d'impact précise. Mais ce que je peux vous dire, c'est que dans le nord de la France, pour une seule région, 4 000 hectares sont déjà mobilisés, dès maintenant, pour les grands projets d'envergure nationale. Les projets sont déjà en marche ! Ils avaient commencé dès avant août 2021, et des espaces ont déjà été artificialisés sur la période 2021-2031. Comment faire, après avoir soustrait ces grands projets, concourent tous à la décarbonation, d'une enveloppe de 8 000 hectares pour une seule région ?

Rien de tel que la force de l'exemple : hier, le président d'un Scot traversé par le canal Seine-Nord, qui va accueillir une plateforme, m'a transmis les chiffres qu'il a reçus à la suite d'une visite du préfet, qui anticipe la fixation à venir des objectifs locaux de réduction de l'artificialisation et doit trouver un équilibre entre le monstrueux besoin de foncier du Dunkerquois et une enveloppe régionale fermée. Dans ce territoire rural, mais en même temps très industrialisé, qui compte deux grandes zones d'activité économique, l'enveloppe de foncier disponible passe ainsi de 404 hectares consommés entre 2011 et 2021 à une proposition, faite par le préfet, de 70 hectares consommables sur la période 2021-2031 : on est loin d'une simple division par deux !

En l'état actuel des choses, en fonction des grands projets, les modalités de comptabilisation de leur emprise seront proposées sans concertation par le préfet. Sans avis conforme des régions, ce dernier décidera seul de l'organisation, des compensations et des répartitions du reste de l'enveloppe entre les territoires. Expliquez-moi alors comment les présidents de région, qui n'auront pas la main sur ces sujets, justifieront la répartition de l'enveloppe auprès des élus !

Aujourd'hui, au sujet de l'article 4, qui ne concerne que 5 % de l'enveloppe de consommation foncière, nous devons absolument envisager comment, sans mépriser pour autant la sobriété foncière, se donner les conditions pour décompter non seulement les usines, mais également les logements, afin de faire venir les salariés.

Notre démarche est la même, elle est partagée par tous : nous devons aller au bout ! Faisons en sorte que ces deux ambitions connexes se retrouvent et se rejoignent, que leurs trajectoires soient raisonnables, responsables, et que l'on n'en profite pas par la même occasion pour déposséder les collectivités de leurs compétences. Voilà notre position. Au Sénat, nous avons proposé de corriger la trajectoire proposée à la marge, pour une seule raison : prendre en considération les textes successifs que nous avons adoptés.

Voilà ce que je tenais à dire pour synthétiser les propos de nos collègues, et vous rappeler les éléments proposés par le Sénat. Ce sujet des grands projets constitue la pierre angulaire.

Derrière tout cela, il n'y a pas de posture politique : il y a juste une ambition partagée, et il y a la vraie vie. Comment faire en sorte que demain, ces mesures soient appliquées par tous les acteurs dans les territoires, élus, acteurs économiques ou institutionnels, représentants de l'État, qui seront tous impactés et qui partagent tous cette ambition ? Il faut réussir !

Par ailleurs, Mme Couturier, nous partageons l'idée qu'il n'y aura pas de réussite du « ZAN » sans moyens. Nous avons adopté la loi Climat-résilience en 2021. Aujourd'hui, le fonds Friches - aujourd'hui inclus dans le fonds Vert - représente 350 millions d'euros. Or lors de son audition, la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) a évalué le coût de la requalification des friches à plus de 2 milliards d'euros. On peut choisir de sanctionner les collectivités qui vont consommer du foncier, mais comment ne pas le faire sans les moyens de requalifier les friches ?

Nous sommes dans une période intermédiaire : nous voulons accueillir très rapidement des industriels pour accompagner la transition, mais les friches ne sont pas immédiatement requalifiables ; acheter une friche, monter un projet de requalification et le réaliser, prend du temps. J'ai été présidente d'un établissement public foncier (EPF), j'ai porté les projets de requalification des cités minières, des anciens bâtiments d'Usinor et de bien d'autres projets industriels : je vous garantis que dépolluer des sites, cela ne se fait pas en deux coups de cuillère à pot ! Beaucoup de ces friches sont polluées, et on ne peut pas y installer n'importe quel bâtiment. Il faudra du temps pour parvenir à une bonne connaissance de l'état de nos friches, des moyens à mobiliser et pour avoir la capacité d'agir. Dans cette période intermédiaire, se pose aussi le sujet de notre capacité en matière d'ingénierie : avons-nous les outils et les moyens d'aller assez vite pour rendre réaliste et réalisable le « ZAN » ? C'est une condition à prendre en considération. Nous prenons du retard, et la trajectoire est difficile à tenir sans raisonnablement mobiliser certains espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) dans un premier temps. Voilà posées les équations de départ et les données du problème.

Mme Aude Luquet, députée. - Notre responsabilité est claire : tous les parlementaires ici présents le savent, nous nous sommes engagés à tenir une trajectoire de décarbonation en adoptant la loi Climat-résilience. Si cette CMP était non conclusive, elle marquerait un échec collectif.

Concernant les grands projets d'envergure nationale, le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés estime qu'il ne peut y avoir d'exonération totale, et qu'on ne peut pas totalement sortir ces hectares de l'enveloppe du foncier disponible. Des propositions ont été faites par les rapporteurs, entre 15 000, 12 500 ou 10 000 hectares et il faut avancer sur ce sujet. Notre groupe considère que nous ne pourrons pas aller en dessous de 10 000 hectares. Il faut une adéquation entre ce texte et les lois déjà adoptées concernant les EnR, l'industrie verte, le nucléaire ou les mobilités. Dans les territoires, il faut aussi que les emplois et les logements soient en phase avec ces nouveaux projets, ce qui n'est pas tout à fait le cas dans bon nombre de communes.

La conférence du « ZAN » est un outil de dialogue qui permet l'accompagnement des élus, même si elle n'est peut-être pas parfaite. Il ne me semble pas très cohérent qu'elle ne comporte que deux députés et deux sénateurs. Il est également regrettable que la mutualisation passe non pas par une conférence des maires, mais par le bureau de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), qui peut aussi poser problème politiquement.

Il faut aboutir, même si c'est compliqué : les maires l'attendent. Il ne s'agit pas de construire une usine à gaz, il s'agit de simplifier et d'accompagner les élus pour construire les territoires de demain en toute simplicité.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Je repose les termes de la proposition de rédaction sénatoriale sur l'article 4, pour que les rapporteurs de l'Assemblée nationale nous précisent la position de l'Assemblée nationale, puis nous suspendrons la réunion pour tenter de trouver une voie de compromis.

Nous proposons un forfait à 10 000 hectares pour les régions couvertes par un Sraddet. Nous voulons qu'une sortie totale du décompte des éventuels dépassements de ce forfait soit clairement inscrite dans le texte pour éviter toute interrogation par la suite. Nous ne voulons pas de report de ces éventuels dépassements sur la décennie suivante - ce qui est le corollaire de la première partie. Nous voulons un avis conforme des exécutifs régionaux sur la liste des grands projets qui feront l'objet de cette comptabilisation spécifique.

Voilà les points qui figurent dans notre proposition de rédaction. Messieurs les rapporteurs de l'Assemblée nationale, pouvez-vous nous rappeler la position de l'Assemblée nationale à ce stade ?

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je salue cette proposition de rédaction plus raisonnable, qui représente un pas important fait en direction de l'Assemblée nationale : au lieu de sortir complètement les grands projets du décompte, le principe d'un forfait est accepté. Il s'agit d'une avancée majeure.

Sur la comptabilisation, je ne voudrais pas que les collectivités dotées du schéma directeur de la région d'Île-de-France (Sdrif), de schémas d'aménagement régionaux (SAR) ou du plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (Padduc) aient le sentiment qu'elles ne sont pas du tout concernées par les projets d'envergure nationale, alors même qu'une enveloppe n'impactant pas l'ensemble leur est prévue. Un forfait de 10 000 hectares pour les communes soumises à un Sraddet me semble acceptable.

L'avis conforme du président de région est un point de discussion important. Nous partageons la volonté que les territoires puissent exprimer leur position lorsque l'État a un projet d'envergure nationale ; la consultation de la conférence régionale du « ZAN » s'inscrit dans cette logique. Que le président de région formule un avis me semble pertinent, car cela permet au ministre, lorsqu'il prend l'arrêté national, de déterminer les choses en ayant connaissance des enjeux territoriaux. En revanche, le caractère conforme de l'avis me semble plus difficile. Peut-être peut-on envisager un avis simple de la part du président de région ? Le ministre pourrait ainsi toujours être éclairé, sans que l'on risque pour autant de voir des projets bloqués à l'initiative du seul président de région. Aujourd'hui, les présidents de région sont raisonnables et ont envie de développer leurs territoires, mais cela ne sera peut-être pas toujours le cas, et ce point pourrait constituer un blocage. Nous pouvons envisager de converger sur cette base.

Si des projets sont ajoutés, plutôt que de parler d'« après-forfait » comme M. Blanc, il est déterminant de voir qu'on ne peut pas revenir vers les communes en leur reprenant du droit à construire. Mécaniquement, dans la manière dont l'Assemblée nationale avait envisagé les choses à l'article 4, un « dépassement possible » serait traité dans la clause de revoyure prévue à l'article 14, qui enjoint au Gouvernement de faire des propositions.

Il est important de préciser les choses : cela ne peut pas impacter le droit à construire des communes, ce qui veut dire que, mécaniquement, un dépassement est possible. En cas de dépassement, dans le cadre des propositions qu'il fera en 2026, le ministre assurera des évaluations et un suivi de ces dépassements. La proposition de rédaction faite par le Sénat me semble cohérente, puisqu'il est précisé que le rapport en question « peut déterminer l'incidence de ce dépassement ». En cas de dépassement, il faut s'interroger sur les conséquences de ce dépassement dans les territoires, sans grever l'avenir. Il est déjà assez difficile de faire de la planification jusqu'à 2031. Ne faisons pas de projections, et n'allons pas plus loin. À ce jour, personne ne peut dire si cette hypothèse du dépassement devra être activée parce que nous ne savons pas avec certitude si l'artificialisation résultant de ces projets sera comptabilisée dans les dix années précédant la promulgation de la loi ; pour certains, oui, pour l'essentiel, non.

Nous pouvons nous retrouver sur ces rédactions, à quelques virgules près : sécuriser les communes et envisager un dépassement, c'est acceptable dans la mesure où l'on enjoint au Gouvernement de s'interroger sur l'impact de ce dépassement.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - Nous avons donc trois points sur lesquels nous devons cheminer à l'article 4 : le forfait, le dépassement, et l'avis conforme.

Les sénateurs commencent à intégrer l'idée d'un forfait. Vous avancez le chiffre de 10 000 hectares, ce qui est bien plus clair que dans votre proposition de rédaction. Nous devrons en discuter lors de la suspension.

Sur le dépassement du forfait, la proposition de rédaction de l'Assemblée nationale peut être examinée. Mais le fait de renvoyer à un rapport n'est pas acceptable. Non parce qu'un rapport serait problématique en soi, mais parce que ce rapport évoque les modalités de prise en compte du dépassement pour la période post-2031...

En revanche, sur le droit de proposition régionale et l'avis conforme, nous avons un énorme sujet de fond sur lequel il faudra trancher. Le sujet est celui de la décentralisation, comme Éric Kerrouche l'a indiqué : veut-on ou non une coconstruction entre l'État et les régions sur le « ZAN » ?

Depuis le début, nous voulons que les élus soient présents autour de la table, que l'État ne décide pas seul du « ZAN ». D'où l'idée de recourir à la conférence de gouvernance du « ZAN » : les élus qui y sont représentés rendent des avis sur les projets nationaux et régionaux. Le président de région peut pour sa part utiliser un droit de proposition pour défendre ce qu'il considère être un grand projet. L'État retient ou non ces propositions, en expliquant les raisons de son choix. Nous en sommes d'accord, puisque les rapporteurs pour l'Assemblée nationale évoquent la nécessité de renforcer le dialogue entre l'État et les collectivités.

Là où le bât blesse, c'est l'avis conforme pour l'établissement de la liste finale des grands projets. Si l'État établit une liste des grands projets dans laquelle ne figure pas un grand projet souhaité de la région, l'avis conforme de la région peut effectivement devenir bloquant, mais on peut supposer que l'on n'en arrivera pas là. Pour nous, cette proposition est de nature à rendre acceptable le « ZAN » par les territoires, en associant réellement les territoires à la décision.

Permettez-moi d'illustrer mon propos : il semblerait que le préfet des Hauts-de-France ne veuille pas inscrire les parkings du Brexit dans la liste des grands projets. Que peut faire le président de la région ? Il peut dire qu'il souhaite l'inverse ; si le ministre n'est pas d'accord, il expose ses raisons. L'avis conforme, c'est la suite de ce « bras de fer », pour obliger l'État à intégrer ce projet dans la liste. Nous n'avons pas trouvé mieux : nous ne pouvons pas prévoir une injonction du président de région au ministre ; seuls les juges administratifs peuvent en prononcer. Mais nous voulons une coconstruction : comment l'État et les régions peuvent-ils dialoguer au mieux pour établir la liste des grands projets ?

Au gré des auditions de notre commission spéciale transpartisane, nous avons été « perturbés », si je puis dire, par la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) qui, chaque semaine, changeait, de son propre chef, la liste de ce qui devait être considéré comme des grands projets nationaux. Voilà comment est née l'idée de la conférence du « ZAN » et d'une implication plus forte des régions. Maintenant, jusqu'où étend-on leur pouvoir ? Jusqu'à cet avis conforme ? En toile de fond, c'est la question de la décentralisation qui est posée.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Soyons clairs : nous penchons pour un avis conforme du président de région après consultation de la conférence régionale du « ZAN », c'est-à-dire de la représentation des élus qui vont devoir mettre en application les documents d'urbanisme.

Nous proposons que cette conférence rassemble des représentants des collectivités locales, des intercommunalités, ainsi que des départements, qui disposeraient d'un avis consultatif, car ils seront fortement impactés dans la réalisation des infrastructures de voirie. Si les départements ne peuvent pas avoir une discussion avec les régions sur les projets déclarés d'intérêt régional au sein de la conférence régionale, des Scot pourraient voir amputer leur enveloppe d'artificialisation en raison de la réalisation d'infrastructures de voirie qui ne les concernent pas directement. La question est aussi celle de la mutualisation. Tout cela est soumis à un avis uniquement consultatif du département au sein de la conférence.

De manière générale d'ailleurs, concernant les grands projets nationaux, la conférence régionale du « ZAN » est une instance consultative qui permet un dialogue préparatoire à la proposition que fera le président de région, et à son avis, afin que sa décision ne soit pas univoque ou unilatérale, mais prenne en compte les réalités de terrain.

La réunion, suspendue à 11 h 40, reprend à 13 h 45.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Cette suspension nous a permis de faire le tour de l'ensemble des sujets qui ont, vous me l'accorderez, des conséquences considérables pour les territoires.

Après avoir échangé avec mes collègues sénateurs sur la proposition de rédaction faite par l'Assemblée nationale, je constate que les désaccords entre nous sont trop profonds, notamment en ce qui concerne le maintien d'un forfait pour les grands projets d'envergure nationale et la forme que devrait prendre l'avis des présidents de région - simple ou conforme ? - au sein de la conférence régionale de gouvernance du « ZAN ».

Une ligne rouge nous sépare : nous sommes prêts à adopter votre proposition d'un forfait à 10 000 hectares, mais nous ne voulons pas céder sur l'idée d'avis conforme, qui garantit aux régions, à leur exécutif, d'être dans la coproduction. Aucun compromis n'a, hélas, pu être trouvé sur ce point fondamental.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je précise qu'à l'article 4 nous proposons de passer d'un forfait national de 15 000 à 10 000 hectares, soit 5 000 hectares de droits à construire donnés directement aux communes.

Prendre le risque de faire échouer cette CMP reviendrait à entériner la loi Climat-résilience dans sa forme actuelle, et à consacrer les difficultés d'application qu'elle a engendrées. C'est la responsabilité que vous prenez en refusant notre compromis. C'est d'autant plus regrettable qu'il s'agit, je le rappelle, du texte qui a été le plus largement adopté - 437 voix contre 4 ! - par l'Assemblée nationale depuis le début de la mandature, et ce malgré une médiatisation qui a encore exacerbé les tensions et les clivages politiques.

J'en appelle aujourd'hui à la sagesse de chacun.

Dans l'intérêt des collectivités locales, nous garantissons aux élus que les projets d'envergure nationale, dont l'incidence foncière peut être considérable, ne leur seront pas imputables et leur rendons 5 000 hectares pour leurs propres projets, par rapport à ce que nous prévoyions initialement ; nous mettons en place, pour les communes, un principe de mutualisation de l'artificialisation induite par les grands projets ; nous écrivons noir sur blanc que les éventuels dépassements de ce forfait sont possibles et ne s'imputeront pas a posteriori sur leurs droits à construire. Bref, nous faisons beaucoup de concessions - et leur liste est longue - à côté desquelles nous risquons tous de passer.

Je tiens à aborder la question de la non-prescriptibilité des Sraddet. Je relève que vous exigez un avis conforme des régions, alors que, dans l'état actuel du droit, les Sraddet sont prescriptifs : on ne peut pas dire, d'un côté, que les régions émettent des règles trop prescriptives pour les collectivités et, de l'autre, estimer qu'elles sont tellement compétentes en la matière qu'elles doivent absolument émettre un avis conforme vis-à-vis de l'État: c'est l'un ou l'autre ! Notre choix est de garantir une forme de liberté aux élus.

Vous considérez que les régions doivent pouvoir s'opposer à l'État quand elles trouvent qu'il abuse ou qu'il ne les écoute pas. Cette préoccupation étant légitime, nous avions fait une première proposition : après que le ministre a envoyé la liste des projets d'envergure nationale aux territoires, et après consultation de la conférence régionale, le président de région aurait la possibilité d'émettre un avis et de l'adresser au ministre, lequel devrait y répondre de manière motivée - autrement dit, cela ouvre une possibilité de contestation devant un juge - dans un délai de deux mois.

Nous proposons aujourd'hui d'ajouter une contrainte supplémentaire : avant même de publier sa réponse, le ministre devrait réunir une conférence nationale, qui rassemblera ni plus ni moins que l'ensemble des présidents de région - et lui-même. Ainsi, nous garantissons à tout président de région la possibilité d'alerter le ministre sur tel ou tel projet. L'exécutif, face à l'éventuelle insatisfaction des présidents de région, devra alors porter seul la responsabilité politique de ses choix.

Cette contre-proposition me semble raisonnable et préférable à l'idée d'un avis conforme : en effet, un président de région qui voudrait bloquer tous les projets sur son territoire - l'installation d'une centrale nucléaire par exemple - en aurait le pouvoir.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - Je rappelle que le Sénat a également voté ce texte à une très large majorité. Il s'agit du fruit d'un travail transpartisan et collaboratif de plusieurs mois, qui pourrait partir en fumée sur ce seul point, l'avis conforme des régions. Il est regrettable de refuser toutes les avancées permises par le Sénat et de buter sur cette mesure. Il faut se rendre compte du niveau de détail qui fait chuter des mois de travail de part et d'autre.

Cela étant, ce désaccord prouve que nous ne partageons pas la même conception de la décentralisation : contrairement à vous, nous sommes en faveur d'une coproduction entre l'État et les régions dans ce domaine.

Je regrette que votre contre-proposition de conférence nationale nous ait été soumise aussi tardivement. Faute de pouvoir l'examiner et y réfléchir sereinement, nous ne reviendrons pas sur notre position.

M. Éric Kerrouche. - Deux conceptions fortement antagonistes des territoires et des libertés s'affrontent.

Vous alertez, M. Marchive, sur l'éventuel pouvoir de blocage dont disposerait un président de région grâce à cet avis conforme, mais je vous ferai remarquer qu'il s'agit là ni plus ni moins que de l'expression de la démocratie locale, de la décision d'un élu représentant son territoire.

D'une certaine façon, vous considérez que seul le ministre - seul l'exécutif donc - pourrait faire preuve de sagesse.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je n'ai pas dit cela.

M. Éric Kerrouche. - C'est ce point fondamental qui nous oppose. Pour notre part, nous faisons confiance aux territoires, alors que, par principe, vous vous en défiez. Vous avez du reste manifesté cette défiance tout au long de ces années.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - C'est un procès d'intention !

M. Éric Kerrouche. - C'est en tout cas ce que nous observons de manière répétée depuis 2017.

Je constate que les avancées permises par ce texte étaient importantes, que les concessions étaient notables de part et d'autre. Vous avez décidé de faire échouer notre commission mixte paritaire sur un détail...

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - C'est vous qui le dites !

M. Éric Kerrouche. -... et ce alors même que ce point est fondamental pour la vision que nous avons des territoires.

M. Guillaume Kasbarian, député, vice-président. - Je veux apporter mon soutien aux rapporteurs de nos deux assemblées, qui travaillent depuis des semaines sur chacun des articles pour aboutir à un accord.

Comme le disait un excellent président de la commission des lois du Sénat, on peut dire qu'un accord est bon quand, à la fin des fins, tout le monde en sort très mécontent. J'ai le sentiment que nous ne sommes donc pas si loin de trouver un très bon accord...

Nous l'avons dit, chacun a fait un pas vers l'autre. Si cette commission mixte paritaire n'est pas conclusive, nous en resterons au droit existant, et ces débats reprendront à la prochaine occasion.

Je souligne que les lignes rouges ont été, dès le départ, et à plusieurs reprises, très clairement définies par les rapporteurs : il n'y a par conséquent aucune raison de ne pas maintenir une ambiance tout à fait cordiale aujourd'hui.

Je note par ailleurs que, si la question de l'avis conforme des présidents de région relève vraiment du détail, il est étrange de faire échouer notre réunion sur ce point.

J'ajoute que j'en ai assez que l'on oppose encore une fois les sénateurs, qui seraient les seuls à être sensibles aux problèmes des élus locaux, et les députés, qui y seraient totalement indifférents. C'est trop facile, et ce n'est pas respectueux d'un certain nombre de députés, ici présents, qui ont été, durant des années, maires ou présidents d'intercommunalités, et qui ont, eux aussi, la décentralisation chevillée au corps. Si l'on pouvait s'épargner ce type d'argument, cela nous permettrait peut-être d'avancer...

Si nous ne parvenions pas à un accord lors de cette CMP, ce ne serait pas grave ; cela n'entamerait pas la confiance que nous avons établie entre les deux assemblées, le travail que nous menons ensemble. En revanche, je le redis, il importe de veiller aux propos que l'on tient : les députés, eux aussi, sont souvent des élus locaux, et ils aiment, tout autant que les sénateurs, les territoires.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Merci d'avoir rappelé l'énorme travail qui a été mené. Ce n'est évidemment agréable pour personne si nous ne parvenons pas à converger vers un texte commun. Néanmoins, pour trouver un compromis, il faut que chacun fasse une partie du chemin.

Le forfait de 10 000 hectares vers lequel nous avons avancé est très éloigné de notre position initiale et de la volonté de nombreux sénateurs de remettre en question le « ZAN », au moins pour tout ou partie des territoires ruraux. Nous avons considérablement cheminé. De manière générale, un chemin important a été parcouru par le Sénat pour permettre d'atteindre les objectifs de la loi Climat-résilience, tout en les adaptant aux réalités.

En contrepartie de notre acceptation du forfait de 10 000 hectares, nous pensions pouvoir obtenir que les présidents de région soient associés à la constitution d'une liste de projets d'envergure nationale. Ils ont en effet tout intérêt à soutenir de tels projets, qui concourent au développement de leurs territoires. Tout le monde a intérêt à avancer sur ces projets. C'est le principe même de la décentralisation : un partenariat étroit entre l'État et les collectivités. C'est tout l'esprit de notre proposition.

Nous entendons les divergences de points de vue, mais gardons notre calme ! Le chemin n'est pas terminé. Une nouvelle lecture aura lieu à l'Assemblée nationale. Tous les enrichissements apportés, dès le départ, par le Sénat à la proposition de loi nourrissent par ailleurs les propositions synthétisées par M. le député Marchive, lesquelles font suite aux nombreux échanges que nous avons eus avec les acteurs des territoires. Ces derniers nous ont malheureusement, eux aussi, annoncé des lignes rouges à ne pas franchir. Régions de France a ainsi alerté directement la Première ministre sur le fait que, si l'on retirait les projets d'envergure nationale, de façon forfaitisée, des enveloppes régionales, il serait impossible de mettre en application l'ensemble des objectifs assignés aux collectivités. Toutes ces questions sont importantes pour nous, c'est ce que nous avons voulu mettre en avant par le biais de nos propositions.

M. Guillaume Kasbarian, député, vice-président. - Je vous demande une suspension de séance, madame la présidente.

La réunion, suspendue à 14 h 05, est reprise à 14 h 55.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Au cours de cette suspension, nous avons échangé avec nos rapporteurs sur trois points. Le premier est d'ordre législatif et vise à clarifier le système du forfait de 10 000 hectares et ses modalités de sortie du compte foncier des collectivités territoriales, y compris pour les éventuels dépassements. Le deuxième point a trait à deux éléments qui feront l'objet de dispositions réglementaires. Il s'agit tout d'abord de la question, qui reste entière, des bâtiments agricoles dans les territoires ruraux, notamment les territoires d'élevage. Une discussion s'était engagée avec le Gouvernement afin de trouver une solution par décret pour l'avenir de ces bâtiments après 2031, et de s'assurer ainsi que les territoires d'élevage ne seront pas mis en difficulté.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - Un amendement de notre collègue Jean-Claude Anglars portant sur ce point, qui avait été adopté, a été supprimé. Le ministre s'est engagé à prendre un nouveau décret sur le sort des bâtiments agricoles après 2031.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Le deuxième élément devant être précisé pour partie par décret a trait à la composition et au fonctionnement d'une commission de conciliation - dont nous inscrivons en revanche la création dans la loi -, chargée de traiter les éventuels différends entre les présidents de région et l'État concernant la liste des projets d'envergure nationale.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - En effet, mes collègues rapporteurs et moi-même avons réfléchi à une solution pour remplacer l'avis conforme de l'exécutif régional concernant la liste des grands projets d'envergure nationale. Il s'agirait d'instituer une commission de conciliation régionale réunissant des représentants de l'État et des régions, dont la composition exacte devrait être fixée par décret. Sous réserve de la constitution d'une telle commission, nous pourrions renoncer à l'avis conforme de l'exécutif régional.

Un accord pourrait donc se dessiner autour de l'engagement de l'exécutif à prendre ces deux décrets - le principe de la commission de conciliation devant être pour sa part entériné par la loi.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous avançons, il est important de le noter. Ces propositions me semblent répondre à la fois à vos attentes, notamment concernant la création d'une commission de conciliation régionale, et au souci, que nous partageons, d'associer les territoires à ce travail - particulièrement en cas de divergence de points de vue.

L'engagement du ministre de présenter rapidement ces projets de décrets, avant le vote du texte, prévu le 13 juillet prochain, me semble par ailleurs satisfaisant. Cette approche a en effet le mérite de la transparence et de la clarté, et répond également à des attentes fortes mais qui n'ont pas forcément vocation à être réglées par voie législative. Le fonctionnement de la commission susmentionnée devra être suffisamment souple pour répondre aux spécificités qui pourront se présenter sur chaque projet.

De nombreux compromis ont été trouvés par ailleurs, qui ont abouti au résultat suivant : un forfait à 10 000 hectares, 2 500 hectares faisant l'objet, comme nous l'avons indiqué, d'une comptabilisation particulière dans les régions non couvertes par un Sraddet, dans la mesure où ils ne sont pas soumis aux objectifs de la loi Climat-résilience dans les mêmes modalités que les territoires dotés d'un Sraddet.

Nous nous retrouvons en outre sur l'idée que cette disposition ne peut pas affecter le droit à construire des communes, ce qui est de nature à répondre à leurs préoccupations. En l'état, le texte paraît suffisamment clair pour être accepté par tous. Un effort conséquent a par ailleurs été mené sur la mention expresse relative au rapport engageant le Gouvernement à ce sujet. Rien n'empêchera par ailleurs ce dernier de traiter de la question du dépassement. Cela me semble être un point d'équilibre entre ceux qui souhaitent que ce dépassement ne compte pas et ceux qui souhaitent qu'on le comptabilise d'une manière ou d'une autre.

EXAMEN DES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION

Article 4

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - La nouvelle proposition de rédaction que nous examinons à l'article 4 se présente de la manière suivante : à l'alinéa 17, « après la première phrase, insérer les phrases suivantes : “Cet avis est rendu dans un délai de deux mois après envoi par le ministre d'une proposition de liste de projets d'envergure nationale ou européenne. Le ministre chargé de l'urbanisme adresse à la région une réponse motivée sur les suites données à cet avis.” ;

« Après l'alinéa 17, insérer un alinéa ainsi rédigé : “Dans le cadre de la procédure prévue au précédent alinéa, la région peut, après avis de la conférence prévue au V, formuler une proposition d'identification de projet d'envergure nationale ou européenne. Le ministre chargé de l'urbanisme adresse à la région une réponse motivée sur les suites qui sont données à cette proposition.” »

Suivent deux autres alinéas rédigés ainsi : « En vue d'atteindre l'objectif fixé à l'article 191, cette consommation est prise en compte dans le cadre d'un forfait national fixé à hauteur de 12 500 hectares pour l'ensemble du pays, dont 10 000 hectares sont mutualisés entre les régions couvertes par un schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires au prorata de leur enveloppe d'artificialisation définie au titre de la période 2021-2031 [...]. Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme précise cette répartition.

« En cas de dépassement du forfait mentionné à l'alinéa précédent, le surcroît de consommation ne peut être imputé sur l'enveloppe des collectivités territoriales ou de leurs groupements. »

La proposition de rédaction tend enfin à insérer deux alinéas ainsi rédigés, après l'alinéa 22 : « Une commission régionale de conciliation sur l'artificialisation des sols est instituée. Elle comprend notamment, à parts égales, des représentants de l'État et de la région concernée.

« Elle peut être saisie à la demande d'une région, en cas de désaccord sur la liste des projets d'envergure nationale ou européenne présentant un intérêt général majeur mentionné au 8° du III du présent article.

« Un décret détermine la composition et les modalités de fonctionnement de la commission régionale de conciliation. »

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Une remarque rédactionnelle, madame la présidente : dans la phrase « Une commission régionale de conciliation sur l'artificialisation des sols est instituée. », il pourrait être intéressant d'ajouter : « dans chaque région ».

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - J'en suis d'accord, on nous a effectivement indiqué que certains projets pouvaient concerner plusieurs périmètres régionaux.

Mme Cécile Cukierman, sénatrice. - Il me semble que le IV de votre proposition de rédaction renvoie à une conférence prévue à un V qui n'existe plus en ces termes...

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Ce V renvoie à la numérotation de l'article 194 de la loi Climat-résilience.

La proposition commune de rédaction n° 4, ainsi modifiée, est adoptée.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 1er

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Avant que nous examinions formellement les autres articles, peut-on considérer que les rédactions ayant cheminé entre les différents membres conviennent ? Je pense particulièrement aux délais, que ce soit pour les Sraddet ou pour les documents de type Scot, plan local d'urbanisme (PLU) et PLUi.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - Mme Couturier ne semble pas d'accord.

Mme Catherine Couturier, députée. - J'ai mentionné, dans mon intervention liminaire, des lignes rouges à ne pas franchir. Je ne suis membre ni du Gouvernement ni de la minorité gouvernementale, et mon groupe prendra sa décision en temps et en heure.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Merci de cette précision.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - S'agissant des délais, l'Assemblée nationale a voté six mois pour les Sraddet et aucun délai pour les autres documents. Le Sénat a, quant à lui, voté un an pour tous les documents. Nous proposons neuf mois pour les Sraddet et six mois pour le reste.

La proposition commune de rédaction n° 1 ter des rapporteurs est adoptée.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2 (supprimé)

L'article 2 est supprimé.

Article 3

M. Lionel Causse, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La question de la conférence régionale du « ZAN » a donné lieu à des débats au sein de l'Assemblée nationale. La proposition de rédaction n° 3 tend à supprimer notamment les références au représentant de la chambre d'agriculture et aux représentants d'associations de protection de l'environnement. En revanche, peut-on avoir confirmation des personnes publiques mentionnées à l'article L. 4251-5 du code général des collectivités territoriales, auxquelles fait référence la phrase complétant l'alinéa 26 ?

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - Les associations environnementales figurent bien dans cette liste.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Voici brièvement la liste des personnes publiques figurant à cet article du code général des collectivités territoriales : le représentant de l'État dans la région ; les conseils départementaux ; les métropoles ; les collectivités territoriales à statut particulier ; les EPCI ; la population ; les autorités compétentes pour l'organisation de la mobilité ; un comité composé de représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements compétents en matière de collecte et de traitement de déchets, d'organismes publics et d'organisations professionnelles concernés, d'éco-organismes et d'associations agréées de protection de l'environnement ; le comité régional en charge de la biodiversité ; les comités de massif en zone de montagne ; le conseil économique, social et environnemental régional ; les chambres d'agriculture, les chambres de commerce et d'industrie et les chambres de métiers et de l'artisanat.

La proposition commune de rédaction n° 3 des rapporteurs est adoptée.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 5 (supprimé)

L'article 5 est supprimé.

Article 6 (supprimé)

L'article 6 est supprimé.

Article 7

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - La proposition commune de rédaction n° 7 tend, sur la base d'un compromis entre les deux assemblées, à rétablir l'universalité de la garantie communale d'un hectare. Je rejoins le président Kasbarian, il faut cesser d'opposer les deux chambres face aux territoires. Nous souhaitons donc associer l'Assemblée nationale à cette création d'un droit universel à un hectare, qui facilite l'acceptation du « ZAN ». Nous pourrions débattre pendant des heures de ses modalités, mais nous sommes d'accord sur son caractère universel.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous nous sommes rendu compte que certaines communes rurales n'étaient ni peu denses ni très peu denses. Pour ne pas les écarter, nous avons voulu supprimer cette notion de densité. Dans la liste figurent aussi des villes, déjà complètement artificialisées pour certaines, qui n'ont procédé à aucune artificialisation sur la dernière décennie. Pour les autres, même si elles ont artificialisé moins de 2 hectares sur la dernière décennie, on peut aisément imaginer, dès lors qu'il s'agit de communes centrales, qu'elles auraient mécaniquement bénéficié d'un droit à construire dans le cadre du SCoT. La garantie reste donc rurale.

La proposition commune de rédaction n° 7 des rapporteurs est adoptée.

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Articles 8 et 9

Les articles 8 et 9 sont supprimés.

Article 10

M. Lionel Causse, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'article 10 concerne les enjeux liés au littoral. Toutes les surfaces perdues par les communes, car gagnées ou susceptibles d'être gagnées par les océans et les mers, seront considérées comme renaturées, ce qui permet d'anticiper les conséquences du recul de trait de côte. Nous revenons, avec cette proposition de rédaction, à la proposition initiale du Sénat, qui concerne toutes les communes, avec ou sans projet partenarial d'aménagement (PPA).

La proposition commune de rédaction n° 10 des rapporteurs est adoptée.

L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 11 (supprimé)

L'article 11 est supprimé.

Article 12

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La rédaction commune que nous avons trouvée sur le sursis à statuer me semble très satisfaisante. Elle répond au mieux aux différentes situations rencontrées sur le plan local. Nous réintégrons également un droit de préemption, considéré comme une extension du droit de préemption urbain afin que celui-ci soit permis en cas de renaturation. Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) ne sont donc pas affectées et les prérogatives de chacun sont respectées !

La proposition commune de rédaction n° 12 des rapporteurs est adoptée.

L'article 12 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 12 bis (supprimé)

L'article 12 bis est supprimé.

Article 13

M. Lionel Causse, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La renaturation pour la période décennale en cours n'avait pas été comprise dans la loi Climat-résilience. Nous permettons une intégration de cette possibilité dès 2021.

La proposition commune de rédaction n° 14 des rapporteurs est adoptée.

L'article 13 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 14

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous proposons une clause de revoyure en 2026, à mi-chemin entre 2021 et 2031, pour faire un bilan de l'état de consommation de la garantie rurale et des projets nationaux. Nous prévoyons également de traiter dans ce rapport la question des impacts de ces projets sur la biodiversité, la ressource en eau, ou sur toute autre considération importante dans le cadre des projets portés localement.

La proposition commune de rédaction n° 15 des rapporteurs est adoptée.

L'article 14 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 15

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Cette proposition commune de rédaction demande un rapport sur les enjeux du « ZAN » liés à la fiscalité.

La proposition commune de rédaction n° 16 des rapporteurs est adoptée.

L'article 15 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Intitulé de la proposition de loi

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - Nous suggérons de rétablir l'intitulé initial de la proposition de loi.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - L'intitulé de cette proposition de loi d'initiative sénatoriale a été modifié à l'Assemblée nationale. Évidemment, notre rapporteur Jean-Baptiste Blanc, à l'initiative du texte, demande de rétablir l'intitulé initial de la proposition de loi.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Le texte initial examiné par le Sénat était très différent de celui que nous nous apprêtons à adopter aujourd'hui ; le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale était également très différent de celui que nous nous apprêtons à adopter aujourd'hui. Je vous propose que nous convenions d'un titre ensemble. Cela me semble logique, compte tenu de l'évolution du texte.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - C'est une bonne idée, qui va dans la logique d'un consensus général : trouvons un titre qui convienne à tout le monde.

M. Bastien Marchive, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'idée de « faciliter » me semble intéressante. L'Assemblée nationale avait choisi les termes « renforcer l'accompagnement ». La mention des élus locaux me semble également intéressante. En revanche, si l'expression « le coeur des territoires » ne me choque pas, la mention du « zéro artificialisation nette » ne correspond pas à une notion juridique ; il s'agit d'un objectif fixé à 2050, et ce texte concerne la période qui s'étend jusqu'en 2031. Peut-être qu'il vaudrait mieux parler de « lutte contre l'artificialisation des sols ».

M. Pascal Lavergne, député. - Excellent !

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour le Sénat. - L'intitulé du texte serait le suivant : « Proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols », et nous pourrions rajouter « au coeur des territoires », même si je ne suis pas sûr que cette précision soit nécessaire.

Je trouve en effet dommage de ne pas faire référence à l'accompagnement des élus locaux, puisqu'en définitive c'est grâce à eux et pour eux que nous adoptons ce texte.

Mme Valérie Létard, sénatrice, présidente. - L'intitulé du texte serait donc : « proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et à renforcer l'accompagnement des élus locaux. »

La proposition de rédaction n° 17, ainsi modifiée, est adoptée.

L'intitulé de la proposition de loi est adopté dans la rédaction des travaux issus de la commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et à renforcer l'accompagnement des élus locaux.

La réunion est close à 15 h 30.

- Présidence de Mme Isabelle Rauch, députée, présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation -

La réunion est ouverte à 11 h 30.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, et à la demande de la Première ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 s'est réunie à l'Assemblée nationale le jeudi 6 juillet 2023.

Elle a procédé à la désignation de son bureau, constitué de Mme Isabelle Rauch, députée, présidente, et de M. Laurent Lafon, sénateur, vice-président, Mme Fabienne Colboc, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale, et Mme Béatrice Gosselin, sénatrice, rapporteure pour le Sénat.

La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.

Mme Isabelle Rauch, députée, présidente. - Mes chers collègues, je vous rappelle que l'esprit de l'article 45 de la Constitution, qui doit guider nos travaux, implique que si nous parvenons à un texte commun, celui-ci doit pouvoir être adopté par les deux assemblées. Il ne servirait à rien que la commission mixte paritaire adopte un texte qui serait ensuite rejeté par l'une ou l'autre chambre. Selon cette logique, je veillerai à ce que la parité entre nos deux assemblées soit maintenue tout au long de nos débats, qu'il s'agisse du nombre de commissaires ou des majorités.

À l'issue de la première lecture, trois des quatre articles du projet de loi demeurent en discussion, mais les divergences sont minimes.

M. Laurent Lafon, sénateur, vice-président. - Nous pouvons être satisfaits du travail accompli par nos deux assemblées. De petites divergences demeurent, plutôt d'ordre rédactionnel, mais nos deux rapporteures vont nous proposer dans quelques instants des versions communes de chacun des articles restant en discussion.

Sans préjuger du vote final, il serait bon que nous puissions dégager un large consensus, sinon une unanimité sur ce texte nécessaire pour réparer les préjudices causés entre 1933 et 1945. Que nous légiférions sur une période aussi éloignée constitue par ailleurs une leçon de modestie. Je tiens à rappeler que le discours du président Chirac qui a enclenché ce processus de restitution date de 1995 : il aura fallu accomplir un long chemin pour arriver au texte que nous élaborons.

Mme Béatrice Gosselin, rapporteure pour le Sénat. - L'adoption à l'unanimité du projet de loi en première lecture dans chacune de nos deux assemblées montre combien son objet fait consensus. Il répond au souhait, que nous avions exprimé au moment de l'examen du premier texte de restitution de biens dont leurs propriétaires ont été spoliés, il y a un an et demi, de nous doter d'un cadre général facilitant la restitution de tels biens lorsqu'ils appartiennent aux collections publiques. Cette restitution fait partie intégrante du travail de mémoire et de justice concernant la Shoah.

Le Sénat est convaincu de la nécessité de lever l'inaliénabilité des biens culturels qui se révèlent avoir fait l'objet de spoliations, par devoir de mémoire vis-à-vis des victimes et pour la légitimité de nos collections. Il a pleinement souscrit à la procédure de restitution proposée par le Gouvernement, qui répond à ses exigences en matière d'objectivité, de transparence et de collégialité. Il a adopté plusieurs amendements visant à en renforcer la transparence et à en faciliter l'application. Il a également veillé à ce que le Parlement soit convenablement informé des restitutions opérées en demandant la transmission d'un rapport permettant de contrôler l'action du Gouvernement.

Le Sénat a aussi eu à coeur de saisir l'occasion de mieux reconnaître la responsabilité propre du régime de Vichy dans les persécutions antisémites. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale ont permis d'approfondir le travail que nous avions amorcé et de sécuriser encore davantage la procédure de restitution. Plusieurs d'entre elles répondent à des préoccupations que nous avions exprimées en séance. Nous nous étions inquiétés des problèmes financiers pouvant faire obstacle aux modalités alternatives de réparation permises par le texte et nous avions appelé de nos voeux l'accélération du travail de recherche de provenance. Nous n'en devrons pas moins nous montrer vigilants sur ces points lors de l'examen de la prochaine loi de finances.

En ce qui concerne la caractérisation des autorités françaises responsables des spoliations antisémites, vous êtes parvenus à un bon compromis en évoquant « l'État français entre le 10 juillet 1940 et le 24 août 1944 ». Cette formule présente le mérite de ne pas revenir en arrière par rapport à la reconnaissance de la responsabilité de l'État français par le président Jacques Chirac, tout en l'enserrant dans des délais distincts de la période 1933-1945 couverte par le texte.

Dans ces conditions, rien ne s'oppose à un accord entre nos deux assemblées au cours de la commission mixte paritaire.

Je tiens à remercier chaleureusement Fabienne Colboc pour nos contacts réguliers ces dernières semaines. La navette parlementaire a permis d'aboutir à un texte satisfaisant. Nous vous soumettons deux propositions visant à en perfectionner la rédaction.

Mme Fabienne Colboc, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Je me réjouis que ce texte historique ait fait l'objet d'un vote unanime en première lecture, au Sénat comme à l'Assemblée nationale. Cela témoigne de notre volonté commune de faciliter les restitutions de biens culturels et de contribuer ainsi dans une certaine mesure au rétablissement de la justice.

Le texte crée un dispositif administratif dérogatoire à l'inaliénabilité, permettant la sortie du domaine public des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations et leur juste restitution. Nous pourrons ainsi nous rapprocher des solutions justes et équitables prévues par les principes de Washington.

Ce dispositif ne constitue pas une fin en soi, mais bien un instrument, qui devra s'accompagner des moyens nécessaires à son déploiement, dont ceux accordés à la recherche de provenance. Il nous reviendra d'évaluer ces moyens lors de la remise par le Gouvernement du rapport prévu à l'article 4, mais également, de façon plus systématique, lors des auditions de la CIVS (Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation) ou des établissements culturels. Le texte représente un jalon de plus sur le chemin de la reconnaissance des crimes antisémites et une invitation à continuer l'indispensable travail de mémoire qui constitue notre dette commune.

Avec ma collègue rapporteure Béatrice Gosselin, nous sommes tombées d'accord pour considérer le texte comme satisfaisant en tous points. Je la remercie des excellentes conditions de notre collaboration, ainsi que tous les sénateurs et tous mes collègues pour leur travail engagé et nos discussions constructives. Nous ne vous soumettons que deux propositions de modification rédactionnelle. Le texte nous semble complet et équilibré. Nous vous invitons donc à l'adopter en l'état, sans le modifier sur le fond.

M. Pierre Ouzoulias, sénateur. - Je félicite l'Assemblée nationale d'avoir trouvé la formule sur laquelle nous avions achoppé au Sénat parce que notre main avait tremblé. Les termes « l'État français entre le 10 juillet 1940 et le 24 août 1944 » permettent à la fois de désigner l'État français comme institution et de caractériser cette institution par une date : il ne s'agit pas de n'importe quel État français, mais bien de celui né de la loi du 10 juillet 1940. Ce régime a une certaine légitimité, car c'est bien l'Assemblée nationale qui, par 569 voix contre 80, donna ce jour-là les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Même si cet État n'était pas une démocratie mais une dictature, il était fondé sur un acte juridique. La République n'a pas été assassinée, elle s'est suicidée.

Le texte est fondamental : il permet, après sa reconnaissance verbale par le président Jacques Chirac, une reconnaissance législative de la spoliation et de sa mise en oeuvre par tout l'appareil d'État du gouvernement de Vichy. Il permettra également à la commission d'indemnisation de fonder son jugement sur des bases législatives plus solides. Je suis donc favorable à la proposition des deux rapporteures.

Mme Annie Genevard, députée. - Le texte nous convient très bien. Nous n'avons aucune observation particulière à faire sur cet aboutissement ni sur les ultimes modifications qui nous sont soumises par nos rapporteures.

La formulation à laquelle nous sommes arrivés, qui borne dans le temps l'implication de l'État français, est raisonnable. Il ne fait débat pour personne que l'État français s'est compromis avec les autorités nazies. C'est Jacques Chirac qui l'a définitivement établi dans son discours fondateur du Vel'd'Hiv, ce qui supposait un grand courage, car la chose était alors débattue. C'est pour honorer ce courage que j'avais souhaité introduire dans le texte le verbe « seconder », employé par Jacques Chirac pour qualifier la manière dont l'État français a relayé, épaulé la « folie criminelle de l'occupant » nazi, laquelle était ainsi présentée comme le fait générateur. Ce terme ne signifiait pas une moindre responsabilité de l'État français. Puisque tout le monde était chiraquien pendant l'examen du texte, ce qui, personnellement, me réjouit, j'aurais souhaité que cette fidélité à Jacques Chirac fût ainsi complète. Cette proposition n'a pas été acceptée ; je n'en tire aucune amertume, mais je tenais à expliquer devant mes collègues sénateurs la raison qui l'avait motivée.

Il se trouve que j'ai fait des études d'histoire de l'art. À l'époque, l'idée courante était que les collections publiques étaient susceptibles de deux qualifications fondamentales : l'inaliénabilité et l'imprescriptibilité, la carapace protectrice des collections publiques.

Qu'il n'y ait aucun malentendu : la restitution aux Juifs des biens dont ils ont été spoliés ne fait aucunement débat, non plus que la levée de l'inaliénabilité. Ces spoliations ont été très nombreuses, sans doute parce que les Juifs avaient à la beauté un rapport particulier, donc possédaient des collections particulièrement abondantes et de grande qualité. La restitution constitue une petite réparation de l'histoire qui ne comblera en aucun cas le préjudice majeur qu'a été la Shoah.

Néanmoins, le texte vient après la loi-cadre sur les oeuvres d'art du Bénin et sera suivi - c'est la ministre de la Culture elle-même qui a ouvert ce débat en l'annonçant devant l'Assemblée nationale - d'autres lois-cadres sur les restes humains et sur les biens africains. Le présent projet de loi constitue une exception qui ne peut pas être discutée. Mais j'invite à ce qu'on réfléchisse bien à ce qui se fera dans le futur. À l'avenir, il faudra établir une doctrine : les restitutions ne doivent pas se faire de façon détournée par des prêts définitifs, comme cela se pratique parfois aujourd'hui pour répondre aux demandes de pays étrangers sans restituer pour de bon.

Enfin, ces restitutions ne doivent pas être le fait du prince : le Parlement doit y être systématiquement associé.

Mme Ersilia Soudais, députée. - Je suis ravie que nos débats n'aient pas été vains. Ce projet de loi permettra aux familles des victimes de tourner une page.

Le groupe La France insoumise-NUPES soutient ce texte et souhaite qu'il soit appliqué rapidement. Cela nécessite des moyens comme des outils de contrôle efficaces. Je remercie Mme Gosselin, rapporteure pour le Sénat, d'avoir appelé à la vigilance lors de l'examen de la loi de finances : le budget alloué à la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés est de 200 000 euros, ce qui reste une goutte d'eau par rapport aux besoins humains, financiers et techniques. Si nous voulons être à la hauteur de ces derniers, ce montant devra augmenter, et j'espère que nous serons aussi unis qu'aujourd'hui pour le demander.

Nous sommes satisfaits que les rapporteures proposent de conserver l'amendement du groupe LIOT aux termes duquel la personne publique peut solliciter le concours de l'État lorsqu'il s'agit de convenir de modalités de réparation autres que la restitution du bien. Ce dispositif demeure peu contraignant. Nous espérons que la discussion budgétaire permettra d'aller plus loin : les musées et les collectivités territoriales, plus que jamais étranglées financièrement, n'ont pas toujours assez de moyens pour proposer des compensations financières. Celles-ci ne doivent pas rester théoriques.

Mme la ministre de la Culture n'a jamais vraiment répondu sur la question des collections privées, nos collègues de la majorité non plus. C'est dommage et il faudra y revenir.

Nous regrettons que le rapport relatif aux spoliations soit remis tous les deux ans et non chaque année : ce délai ne permettra pas un suivi efficace ni d'éventuelles corrections.

Je souligne un point très positif : nous avons tenu bon face aux amendements fallacieux qui proposaient une relecture de l'histoire. Certains éléments fondamentaux sont encore remis en cause dans notre champ politique : au mépris de toute étude historique sérieuse, l'extrême droite a essayé de revisiter ces moments douloureux et de faire passer l'État français pour la victime d'une usurpation d'identité menée par une entité qui aurait pratiqué en son nom des persécutions antisémites. Nous sommes satisfaits que personne ne soit tombé dans son piège, et nous continuerons de lutter contre les tentatives révisionnistes qui visent à déresponsabiliser l'État français. Nous combattrons toujours le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie.

Soyons à la hauteur des enjeux.

Mme Isabelle Rauch, députée, présidente. - S'agissant des collections privées, Mme la ministre a largement répondu : il n'est pas possible de les contraindre à des restitutions. Par ailleurs, la commission mixte paritaire n'est pas le lieu pour refaire l'ensemble du débat.

Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice. - Merci aux rapporteures pour leur excellent travail. Il est très important que nous soyons unanimes sur un tel texte.

Je rends hommage à Corinne Bouchoux, ancienne sénatrice, qui a mené les premiers travaux sur ces sujets. Elle a été notre conscience. Ce texte de loi nous engage, ainsi que le Gouvernement.

C'est vrai, le Parlement va se dessaisir en partie de sa capacité à faire sortir certaines oeuvres de nos collections par des lois de circonstance. Nous conservons notre rôle de contrôle et d'évaluation, et nous devrons faire preuve d'une grande vigilance, notamment au moment de la discussion de la loi de finances, qui devra prévoir des fonds suffisants pour que les musées s'attellent vraiment à la tâche.

Nous devrons mener le même exercice quand le Parlement aura, comme je l'espère, voté la proposition de loi relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques déjà adoptée par le Sénat ; un troisième volet sera le texte sur la restitution des oeuvres. Là encore, nous devrons nous montrer vigilants. Dans le monde dans lequel nous vivons, il est essentiel d'avancer sur ces questions.

Je suis, comme Mme Genevard, hostile aux fausses restitutions. Nous avons aussi vu les réactions qu'a provoquées le dépôt des crânes algériens, effectué avant que le comité d'experts ait terminé son travail. Ce geste a été manqué et ces erreurs ne peuvent être réparées.

Mme Caroline Yadan, députée. - Je remercie nos rapporteures pour leur travail efficace.

Nous allons nous mettre d'accord sur un texte essentiel. Il nous revient de reconnaître la responsabilité de la France, après le discours fondateur de Jacques Chirac déjà évoqué. Nous devons rester vigilants face à l'antisémitisme, qui se présente sous des habits neufs, qu'ils soient ceux du complotisme, de l'islamisme ou de la haine d'Israël.

Mme Isabelle Rauch, députée, présidente. - Nous allons donc passer à l'examen des articles et des rédactions proposées par les rapporteures.

Article 1er

Mme Fabienne Colboc, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Nous proposons de conserver la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, à l'exception d'une modification rédactionnelle à l'alinéa 8, qui vise à assurer la cohérence avec les termes employés dans le code du patrimoine.

La proposition commune de rédaction des rapporteures est adoptée.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2

L'article 2 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 4

Mme Béatrice Gosselin, rapporteure pour le Sénat. - Nous vous proposons de reprendre la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, à l'exception d'un amendement de précision rédactionnelle qui vise, d'une part, à préciser que les moyens nécessaires sont non seulement financiers mais aussi humains - une vraie souplesse sera nécessaire concernant les plafonds d'emploi - et, d'autre part, à remplacer l'anglicisme « dédiés » par le mot « affectés », qui englobe les moyens consacrés à la recherche de provenance par les établissements et les moyens supplémentaires qui seront octroyés par l'État.

La proposition commune de rédaction des rapporteures est adoptée.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire adopte à l'unanimité, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945.

Mme Isabelle Rauch, députée, présidente. - Je me réjouis de cette unanimité, au Sénat, à l'Assemblée puis en commission mixte paritaire, sur un projet de loi hautement symbolique. Je ne doute pas qu'il en sera de même lorsque ces conclusions seront examinées en séance publique.

M. Laurent Lafon, sénateur. - Je me réjouis moi aussi de ce consensus. Il a été fait plusieurs fois référence au triptyque des textes sur les spoliations : le Sénat a déjà adopté, à l'unanimité, la proposition de loi sur la restitution des restes humains, et nous espérons la même unanimité dans la suite de la procédure. Viendra ensuite un troisième texte peut-être plus complexe. La bonne collaboration de nos deux commissions laisse augurer un travail constructif.

Mme Béatrice Gosselin, rapporteure pour le Sénat. - Je me félicite de ce consensus. Nous accomplissons un devoir de justice.

Mme Fabienne Colboc, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Merci à tous de ce travail où chacun a cherché le mot juste. Nous sommes fiers de ce texte important, qui va au-delà des lois de circonstance : bien que le principe d'inaliénabilité soit très ancien, il est possible de changer nos règles et d'adopter une démarche juste et équilibrée selon les principes de Washington.

Le vote en séance dans nos deux assemblées devrait intervenir juste avant la Journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l'État français et d'hommage aux Justes de France, le 16 juillet. C'est un signe fort.

Le travail contre le racisme et l'antisémitisme doit continuer : ce texte est un point de départ.

La réunion est close à 12 h 15.