COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES

Mardi 4 avril 2023

- Présidence de M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale -

La réunion est ouverte à 17 h 30.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de la Première ministre, une commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 s'est réunie au Sénat le mardi 4 avril 2023.

Elle a procédé tout d'abord à la désignation de son Bureau, constitué de M. François-Noël Buffet, sénateur, président, de M. Sacha Houlié, député, vice-président. Elle a également désigné Mme Agnès Canayer, sénateur, rapporteur pour le Sénat et M. Guillaume Vuilletet, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale.

La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous sommes réunis au Sénat cet après-midi pour aboutir à un accord sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions.

À titre liminaire, je souhaite saluer les votes convergents de nos deux assemblées sur ce texte important, qui témoigne de notre volonté commune d'organiser le mieux possible ce moment historique que représenteront les Jeux pour notre pays.

Je souhaite également remercier la rapporteure de la commission des lois du Sénat, Agnès Canayer, pour la qualité des échanges approfondis et constructifs que nous avons eus au cours de ces derniers jours en préparant cette commission mixte paritaire. L'Assemblée nationale a adopté le texte voilà une semaine à peine, ce qui nous a laissé assez peu de temps pour résorber les divergences qui demeuraient entre nos deux assemblées. Je crois pouvoir vous annoncer que ces échanges ont été fructueux : dans le texte que nous vous présentons aujourd'hui, les principaux apports de chaque assemblée sont préservés et des solutions d'équilibre sont proposées là où nos rédactions respectives entraient en dissonance.

Je commencerai par évoquer les articles restant en discussion examinés au fond par la commission des lois, dont j'ai eu l'honneur d'être le rapporteur en première lecture.

Sur l'essentiel de ces articles, nous vous proposons de conserver les rédactions de l'Assemblée nationale - elles avaient parfois, voire souvent, été par avance enrichies par les apports du Sénat au texte initial - en y apportant, lorsque cela est nécessaire, des précisions rédactionnelles.

L'article 7 relatif à l'expérimentation de la vidéoprotection intelligente a bien sûr fait l'objet de nombreux échanges avec Agnès Canayer, portant principalement sur deux points : d'une part, le terme de l'expérimentation, fixé au 30 juin 2025 par le Sénat et ramené au 31 décembre 2024 par l'Assemblée nationale ; d'autre part, la durée de conservation des images comme données d'entraînement des algorithmes - le Sénat avait plafonné cette durée selon les règles du droit commun, soit trente jours pour les caméras de vidéoprotection et sept jours pour les caméras aéroportées, tandis que l'Assemblée nationale avait préféré, à mon initiative, une durée maximale identique à la durée de l'expérimentation.

Nous sommes parvenus à un compromis et vous proposons ainsi de convenir d'une date de fin de l'expérimentation au 31 mars 2025 et de fixer à douze mois la durée maximale de conservation des données d'entraînement, ce qui permet de préserver la pleine opérationnalité du dispositif.

D'un commun accord, nous vous proposons également de supprimer l'article 8 bis et de maintenir la suppression des articles 11 bis et 12 bis, ces trois articles nous paraissant inopportuns : l'article 8 bis autorise la présence d'agents de sécurité des autorités organisatrices de transport (AOT) dans les salles de commandement de l'État et leur donne la faculté d'y visionner les images de vidéoprotection qui y sont transmises ; l'article 11 bis impose le retour des personnels temporairement affectés à des missions de maintien ou de renforcement de la sécurité pendant les Jeux à leur affectation antérieure une fois l'événement achevé ; l'article 12 bis aggrave les sanctions pénales applicables aux auteurs de violences commises dans une enceinte lors du déroulement ou de la retransmission en public d'une manifestation sportive.

Nous avons longuement débattu de l'article 18, qui prévoit, à titre expérimental, l'attribution de nouvelles licences de taxi en vue du développement des transports de personnes utilisatrices de fauteuil roulant en Île-de-France. Nos discussions ont été particulièrement nourries concernant le champ des sociétés bénéficiaires. Le projet de loi initial prévoyait un seuil de dix licences. Face à l'urgence de la situation, l'objectif était clair : cibler prioritairement les entités économiques ayant la capacité d'investir et d'acquérir les véhicules concernés pour qu'ils soient disponibles à temps pour les Jeux.

Si cet objectif est parfaitement compréhensible, j'ai été sensible aux arguments du Sénat : un seuil insuffisamment objectif pourrait entraîner un risque d'inconstitutionnalité. Nous nous sommes donc accordés, avec ma collègue rapporteur, sur une autre solution : nous vous proposons de supprimer ce seuil de dix licences tout en encadrant et en précisant les critères d'attribution, qui devront être définis par décret en Conseil d'État. Ces critères devront notamment prendre en compte la capacité des personnes morales bénéficiaires à assurer l'exploitation de ces autorisations par des véhicules accessibles aux personnes en fauteuil roulant pendant les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et jusqu'à la fin de l'expérimentation, à faciliter les demandes de réservation préalable au bénéfice de ces personnes et à permettre la transmission à l'autorité administrative des informations nécessaires à la réalisation de l'évaluation.

Pour ce qui est des articles délégués au fond à la commission des affaires sociales, nos discussions ont principalement porté sur l'article 17, qui permet au préfet d'autoriser un établissement de vente au détail de biens ou de services à déroger à la règle du repos dominical dans les communes d'implantation des sites de compétition ainsi que dans les communes limitrophes ou situées à proximité de ces sites. À la demande de l'Assemblée nationale, le principe initialement imaginé de l'extension à plusieurs établissements d'une autorisation accordée à un premier établissement demandeur a été maintenu. À la demande du Sénat, le périmètre de l'extension a été élargi au-delà de la seule commune, en cohérence avec le périmètre de déploiement du dispositif.

Pour ce qui est des articles délégués à la commission des affaires culturelles et de l'éducation, nous nous sommes accordés sans difficulté. À l'article 5, l'Assemblée nationale est revenue sur les modifications opérées par le Sénat et a réintroduit l'homologation des peines.

Par ailleurs, à l'initiative de notre collègue Moetai Brotherson, président de la délégation aux outre-mer de l'Assemblée nationale, les députés ont introduit un nouvel article dans le code du sport pour autoriser l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) à enquêter sur le territoire polynésien pour la recherche et la constatation de violations des règles de la lutte contre le dopage. Ces dispositions nous paraissent nécessaires pour la bonne organisation des épreuves en Polynésie française ; elles font consensus.

En outre, nous conservons évidemment la demande de remise d'un rapport d'évaluation introduite par le Sénat à l'article 14 A, demande enrichie par l'Assemblée nationale. Ce rapport, dont la rédaction est confiée à la Cour des comptes, permettra d'éclairer le Parlement sur l'organisation, le coût et l'héritage des Jeux.

Le texte qui nous est soumis aujourd'hui est un texte respectueux des volontés de chaque chambre, l'objectif, partagé sur tous les bancs de nos assemblées, étant de faire de cet événement majeur une réussite. Je vous invite donc, mes chers collègues, à vous y rallier.

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour le Sénat. - Sans répéter ce que vient, à juste titre, de dire notre collègue sur la qualité de nos échanges et le compromis que nous vous proposons, je souhaite vous rappeler l'état d'esprit dans lequel le Sénat a travaillé sur ce texte, dont il a été saisi en premier.

Les jeux Olympiques et Paralympiques représentent un défi pour la France : un défi sportif - l'objectif est évidemment que nos athlètes remportent le plus grand nombre de médailles -, mais surtout un défi organisationnel, car il s'agira d'un événement hors norme, qui devrait rassembler plus de 13 millions de spectateurs et 10 500 athlètes, ces derniers se jaugeant sur 549 épreuves réparties sur 37 sites. Cerise sur le gâteau, la cérémonie d'ouverture à ciel ouvert, une première, justifiera à elle seule le déploiement de moyens de sécurisation exceptionnels.

Le Sénat a abordé ce projet de loi avec pragmatisme et responsabilité. Il s'est attaché à garantir que les outils que sont la vidéoprotection intelligente, les scanners à ondes millimétriques, les tests génétiques dans le cadre de la lutte antidopage ou encore les opérations de criblage soient opérationnels, mais surtout constitutionnels. En effet, la conciliation entre la nécessaire sauvegarde de l'ordre public, dans un contexte de risque certain, et le respect des libertés individuelles imposait qu'un certain nombre de garanties soient renforcées ; c'est ce que le Sénat a fait. Nous nous félicitons d'ailleurs que nombre des garanties qui ont été introduites par le Sénat aient été reprises par l'Assemblée nationale et que les échanges nombreux, constructifs et fructueux que nous avons pu avoir avec mon homologue rapporteur, que ce soit en amont de l'examen du texte ou après son adoption par l'Assemblée nationale, aient permis de faire converger nos points de vue.

Le sujet de débat principal, qui a fait l'objet de nombreux échanges, est évidemment l'article 7 relatif à l'usage de la vidéoprotection intelligente. Notre objectif était d'améliorer la protection des droits des personnes par l'information du public sur l'emploi de traitements algorithmiques, la déclaration des intérêts des tiers choisis pour développer les traitements ou encore la formation spécifique des personnes habilitées à avoir accès aux signalements et aux résultats des traitements. Nous sommes ravis que l'Assemblée nationale ait conservé ces acquis.

Après des échanges une nouvelle fois très nombreux, nous avons pu aboutir à un accord sur les sujets qui restaient en discussion, à commencer par la durée de l'expérimentation : pour que celle-ci puisse remplir son office, il faut une véritable évaluation et il importe que le Parlement ait le temps, sur la base de cette évaluation, de se prononcer pour ou contre sa pérennisation. C'est la raison pour laquelle le compromis que nous avons trouvé entre la date du 30 juin 2025 voulue par le Sénat et celle qui était proposée par l'Assemblée nationale nous semble être un bon compromis, la date retenue étant le 31 mars 2025. Le rapport d'évaluation devra quant à lui être rendu le 31 décembre 2024.

De même, sur la durée de conservation des images utilisées comme données d'apprentissage des algorithmes, nous n'avions pas tout à fait la même approche : nous pensions que l'entraînement devait se faire sur des flux d'images quand les députés trouvaient préférable qu'il se fasse sur un stock d'images. Là encore, un délai d'un an nous paraît une bonne solution. Nous vous proposons également la réécriture des dispositions relatives à la priorité donnée aux entreprises respectant les exigences de protection fixées par l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) en matière de cybersécurité, en en conservant bien évidement le principe.

Il nous semblait par ailleurs important de maintenir l'inscription dans le « dur » du code du sport de la possibilité de procéder à des tests génétiques dans le cadre de la lutte contre le dopage ; cette disposition a été retenue par l'Assemblée nationale et la navette a permis de la renforcer - nous nous en félicitons.

Le Sénat acte le fait que la Polynésie française n'est pas en mesure, dans l'immédiat, d'introduire une nouvelle loi du pays relative à la lutte contre le dopage : nous concédons en conséquence l'homologation des peines prévues par les lois du pays actuellement en vigueur.

Je dirai quelques mots sur les articles 12 à 13 bis, dont notre commission des lois avait délégué l'examen à la commission de la culture. Nous nous réjouissons que le principe d'une billetterie électronique ait été conservé par l'Assemblée nationale - c'est la traduction du rapport d'information du Sénat sur les événements survenus au Stade de France. Nous avons admis que les premières infractions pénales commises de manière isolée pouvaient être moins réprimées, tout en maintenant la nécessité d'une réponse pénale qui soit à la hauteur des troubles que causent les intrusions dans les stades et sur les terrains de sport. J'ajoute que nous avons accepté les dispositions introduites par l'Assemblée nationale sur l'articulation entre la mesure administrative d'interdiction de stade et la peine complémentaire.

Concernant l'article 17 relatif au repos dominical, qui était délégué au fond à la commission des affaires sociales, nous avons concédé, après échange, que la procédure prévue par l'Assemblée nationale, certes plus complexe, réduisait les risques de contentieux et, sous réserve d'une modification, pouvait répondre à l'objectif de pragmatisme et de proximité recherché par le Sénat. Nous nous sommes également entendus pour fixer les dates de début et de fin de la dérogation au 15 juin et au 30 septembre 2024.

À l'article 18, un petit désaccord demeurait : fallait-il étendre le champ de l'expérimentation aux taxis accessibles aux personnes à mobilité réduite (PMR) ou le restreindre aux véhicules accessibles aux utilisateurs de fauteuil roulant (UFR) ? Nous avons entendu les explications de nos collègues députés et nous sommes ralliés à leur position. Nous avons acté également l'effort consenti sur la suppression du seuil de dix autorisations de stationnement exploitées, qui nous paraissait inconstitutionnel.

La rédaction que nous vous proposons aujourd'hui est un bon compromis ; nous resterons vigilants afin que ces jeux Olympiques et Paralympiques soient une véritable fête du sport et du dépassement de soi, conformément à l'esprit olympique.

M. Ugo Bernalicis, député. - Je ne saurais dire s'il s'agit d'un bon compromis ; j'étais de toute façon, avec mon groupe, totalement opposé au texte : compromis ou compromission, nous avons tranché...

Il est néanmoins des éléments dont la discussion à l'Assemblée nationale a démontré l'importance, quoiqu'ils puissent paraître anecdotiques du point de vue du Sénat : je pense à l'article 1er bis qui prévoyait la mise en place d'une campagne de prévention des violences sexistes et sexuelles, notamment par voie d'affichage sur les sites du village des athlètes et du village des médias. Loin de moi l'idée qu'il s'agirait d'une disposition géniale, susceptible, en la matière, de régler tous les problèmes : c'est une petite mesure, mais elle va dans le bon sens et, parmi les députés, elle faisait consensus. La suppression de cet article, qui ne pose aucune difficulté, à l'occasion du « compromis » trouvé entre l'Assemblée nationale et le Sénat ne peut que m'interpeller.

C'est avec gourmandise, en revanche, que je note que des amendements de suppression que j'avais déposés finissent par prospérer ici même par voie de compromis - je pense aux mesures relatives à l'alourdissement de certaines peines. Dont acte !

J'en viens à l'article 7, en vous épargnant le laïus sur « les JO, grande fête sportive ».

Si la date du 31 décembre 2024 a été retenue par l'Assemblée nationale, ce n'est pas en vertu de je ne sais quel compromis : c'est que le texte s'intitule « projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions ». Soit on l'intitule « projet de loi portant diverses autres dispositions » et on assume d'oublier les JO, soit il faut circonscrire le texte à l'événement auquel il s'attache !

Nous étions d'ailleurs un certain nombre à trouver que l'échéance du 31 décembre était déjà trop lointaine pour un événement qui se finira en septembre... La logique consistant à retenir la date du 31 mars 2025 au motif qu'elle serait un bon « compromis » entre le 31 décembre 2024 et le 30 juin 2025 est donc fallacieuse : ce qui importe, compte tenu du caractère exorbitant des autorisations accordées en matière de surveillance algorithmique, c'est de les circonscrire à la période de l'événement qui donne au texte sa justification. Je n'ai pas besoin de vous rappeler, mes chers collègues, quel contrôle social permet, dans d'autres pays du monde, le recours poussé à l'extrême à des dispositifs de ce type... Nul « compromis », donc, dans ce recul sur la date, mais un coup de force de la droite sénatoriale profitant de sa surreprésentation en commission mixte paritaire. J'y suis donc défavorable.

Je demande d'ailleurs, monsieur le président, qu'un vote distinct soit organisé sur cet alinéa, car il se pourrait qu'au sein d'un même article les majorités diffèrent en fonction des dispositions.

Je ne m'attarderai pas sur les raisons qui motivent notre opposition générale au texte ; elles sont connues et ont été exposées à l'Assemblée nationale.

Je dirai un mot sur l'éventuelle inconstitutionnalité du seuil proposé concernant les exploitants de taxis : je me demande bien qui irait soulever, en la matière, quelque motif d'inconstitutionnalité que ce soit... La précaution est prise, tant mieux : pourquoi pas ! Nous allons bien sûr saisir le Conseil constitutionnel, mais peut-être n'allons-nous pas le faire sur tous les articles...

Mais c'est surtout la date retenue pour la fin de l'expérimentation de l'article 7 que je souhaitais évoquer aujourd'hui, sachant que la ramener au 31 décembre 2024 était déjà, selon nous, un maigre lot de consolation...

Mme Sandra Regol, députée. - Je note que l'article 1er bis n'a pas été jugé « inopportun » par le rapporteur, mais qu'il a été supprimé. Lors de l'examen de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), un article analogue avait été supprimé en commission mixte paritaire. Aussi, je m'interroge : lorsque des articles consensuels et minimaux défendent l'importance des campagnes de prévention contre les violences sexuelles et sexistes et le fait qu'il convient de se doter de moyens pour lutter contre ces violences, ceux-ci sont systématiquement supprimés. Or, dans tous les métiers, ou lors des rassemblements, ces violences se multiplient. Chers collègues sénateurs et sénatrices, je ne comprends donc pas pourquoi, cette fois encore, les violences faites aux femmes passent à la trappe. J'en suis extrêmement choquée.

Au paragraphe V de l'article 7, je m'étonne de la suppression d'une précision permettant de s'assurer que les données ne puissent pas être utilisées dans des pays extérieurs à l'Union européenne, c'est-à-dire la référence aux règles de l'article 19.6 du référentiel d'exigences « SecNumCloud ». La possibilité d'utiliser ailleurs et pour d'autres fins ces images et ces algorithmes fait partie des points sur lesquels, à juste titre, nous sommes alertés par des collectifs, des associations, parmi lesquelles on trouve même des associations de sportifs et de supporters.

M. Sacha Houlié, député, vice-président. - C'est l'amendement du Rassemblement national (RN) que vous défendez.

M. Ugo Bernalicis, député. - Non, il était aussi signé par M. Latombe !

Mme Sandra Regol, députée. - Quel est le rapport ? De telles réflexions ne nous permettent pas de discuter du fond du texte, et nous sommes en CMP pour avancer.

Je m'étonne également que l'on revienne, au paragraphe I de l'article 7, sur des dates longuement discutées, pour pas grand-chose de plus. Par ailleurs, cela représente un danger renforcé par le paragraphe VIII du même article, qui permet la conservation d'images extrêmement sensibles, à titre exceptionnel, pour une durée de douze mois, là où la loi impose aujourd'hui de ne pas dépasser trente jours. Nous prenons collectivement des risques colossaux sur le respect des libertés individuelles.

Enfin, je ne comprends pas la modification à la marge de l'article 17, étendant de quinze jours supplémentaires la dérogation permettant le travail le dimanche, sans réelles compensations pour les personnes. Ce n'est qu'une mesure d'affichage : je suis étonnée de telles mesures ayant une si faible portée.

M. Jérôme Durain, sénateur. - Il nous est proposé de nous rallier au compromis trouvé entre les deux rapporteurs à la faveur de cette CMP. Je réitère la position du groupe Socialiste, écologiste et républicain : nous sommes attachés à la réussite de ces jeux Olympiques et Paralympiques, que l'on espère être un grand moment pour nos athlètes et le pays. Malheureusement, au vu du texte proposé, les doutes que nous avons émis lors de l'examen du texte par le Sénat ne sont pas levés. Évidemment, l'essentiel des inquiétudes tourne autour de l'article 7. Je souscris aux inquiétudes de nos collègues députés sur l'article 1er bis : nous ne voyons pas en quoi cet article posait problème, et il aurait été avantageux de le maintenir.

Concernant l'article 7, nous avons toujours considéré que ce texte sur les Jeux ne constituait pas le bon véhicule législatif pour introduire de tels dispositifs dans le droit commun. Il s'agit certes d'une expérimentation, mais nous avons tous à l'esprit ce que ces deviennent les expérimentations... Tous les encadrements que nous avons proposés ne suffisent pas à lever les risques engendrés par la mise en oeuvre dans le droit d'un certain nombre d'éléments liés à la vidéosurveillance algorithmique. La réduction de la durée de l'expérimentation proposée était de bon aloi, et la rallonger de trois mois n'est pas utile. Enfin, l'absence d'identification civile ne signifie pas l'absence d'identification comportementale ou catégorielle. Les doutes, les craintes et les inquiétudes qui se sont manifestés dans la société et dans le débat public autour de cette technologie nous semblent fondés. Les quelques éléments de satisfaction, comme la suppression de l'article 8 bis prévoyant la présence inopportune des agents des autorités organisatrices exerçant des missions relatives à la sûreté des transports parmi les agents autorisés à visionner les images de vidéosurveillance, ou la suppression de l'article 12 bis, ne sont pas de nature à changer notre abstention finale.

M. Philippe Latombe, député. - Au paragraphe V de l'article 7, il est proposé de modifier la rédaction en mentionnant les « règles de sécurité définies par l'Anssi » à la place du référentiel appliqué par l'Anssi. Les députés ayant déposé l'amendement adopté par l'Assemblée nationale visant à introduire ce référentiel voulaient prendre en compte l'immunité aux règles extraterritoriales, et non seulement la cybersécurité. Cette immunité intégrait aussi, de fait, la localisation des données en Europe, car l'article 7 est totalement soumis au règlement général sur la protection des données (RGPD). Cela ne pose donc pas de problèmes. Mais si nous concluons un accord d'adéquation avec les États-Unis, nous risquons d'en rencontrer. Pour cette raison, nous avions mentionné précisément l'ensemble des règles de l'article 19.6 du référentiel « SecNumCloud ». Peut-être pouvons-nous rédiger autrement cet alinéa, car nous voulions prendre en compte l'immunité aux règles extraterritoriales, et non pas seulement la cybersécurité, afin de rassurer l'ensemble des associations et des parties prenantes de la société civile sur le fait que ces données resteraient dans l'Union européenne, et que les opérateurs choisis par le ministère de l'intérieur après appel d'offres respecteraient bien les valeurs européennes. Certes, cet amendement avait fait polémique, car il avait été déposé par un collègue du RN, président du groupe d'études : économie, sécurité et souveraineté numériques, mais il avait été cosigné ou amendé par quasiment tous les groupes, hormis La France insoumise et le groupe écologiste. Il était fondé sur des éléments très techniques, et j'aimerais que l'on revienne sur cette modification.

J'ai ensuite un vrai point d'alerte concernant la date de fin de l'expérimentation. Nous avions trouvé un compromis à l'Assemblée nationale pour obtenir un vote large. Mardi dernier, 400 voix se sont prononcées favorablement, dans une assemblée fractionnée, certains groupes indiquant suivre le texte modulo l'article 7 ! La date du 31 décembre 2024 était un compromis politique qui avait permis de faire passer l'article 7 en bornant l'expérimentation dans le temps. Or je crains que le fait de repousser cette date au 31 mars 2025 ne fasse changer d'avis certains de nos collègues. Je souhaite que nous ayons une vraie discussion sur cette question : peut-être peut-on différencier la date de la fin de l'expérimentation, le 31 décembre, de celle de la remise du rapport, le 31 mars.

Pour le reste, je me rallie aux positions de mes collègues : même s'il aurait été souhaitable de maintenir l'article 1er bis, ce n'est pas sa suppression qui emportera mon vote sur le texte.

M. Jordan Guitton, député. - Tout d'abord, je ne comprends toujours pas - je n'en suis qu'à ma troisième CMP - pourquoi nous ne recevons pas quelques heures plus tôt le document présentant les compromis retenus dans les propositions de modification...

De manière globale, le Rassemblement national a voté ce texte à l'Assemblée nationale, car nous considérons qu'il faut doter notre pays de moyens supplémentaires pour accueillir et organiser du mieux possible les jeux Olympiques et Paralympiques.

Concernant l'article 7, je ne comprends pas pourquoi il faut repousser la fin de l'expérimentation. Des éléments techniques avaient été avancés, la date du 31 décembre correspondant à des besoins d'expérimenter les caméras jusqu'à la fin 2024. Le texte semble finalement surtout porter sur les « autres dispositions » de son intitulé...

À la rigueur, nous pouvions être d'accord sur une expérimentation technique, mais, concrètement, que l'on nous dise vraiment les choses : le but est-il bien d'expérimenter des caméras algorithmiques pour d'autres événements que les jeux Olympiques, comme les marchés de Noël, ou d'autres événements de grande envergure qui auront lieu à la fin de l'année 2024 ? Qu'est-ce qui justifie ce report au 31 mars 2025 ? Nous avions trouvé un consensus, et l'idée de M. Latombe de distinguer la date du rapport de celle de la fin de l'expérimentation me semble très bonne. Nous pouvons tomber d'accord sur certains éléments.

À l'article 12, l'ajout de l'article L. 332-5-1 nous semblait à la hauteur de l'enjeu : une amende de 3 750 euros paraît suffisamment dissuasive et répressive. À considérer les événements qui se sont produits au Stade de France, cela nous permettrait de répondre à l'enjeu des jeux Olympiques. Il ne faudrait pas que les amendes soient trop minimes, avec un montant à peine plus élevé que le prix de certains billets...

À l'article 18, le seuil pour les compagnies de taxi a été retiré. Cela suffira-t-il pour permettre aux petites compagnies indépendantes de taxi, notamment parisiennes, d'accueillir des personnes en situation de handicap ? Nous pouvons nous accorder sur ce point, et cela ne fera pas basculer notre vote.

Je rappelle que l'Assemblée nationale était consensuelle pour reconnaître que la date proposée à l'article 7 ne convenait pas. Nous gagnerions tous à limiter cette expérimentation dans le temps et aux jeux Olympiques, quitte à étendre l'expérimentation des caméras algorithmiques dans un texte dédié, qui définisse clairement la manière dont les données sont stockées et utilisées, ainsi que les garde-fous prévus. Il n'est pas tolérable d'utiliser ce véhicule législatif pour expérimenter ces caméras pendant presque neuf mois supplémentaires - j'espère que nous pourrons y revenir.

M. Jean-Jacques Lozach, sénateur. - À l'évidence, l'article 7 focalise de nombreux débats, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. Les modifications introduites par l'Assemblée nationale ne sont pas de nature à perturber ou à modifier profondément notre appréciation de cet article, et notre vote du texte, notamment pour ce qui concerne les modifications du délai d'expérimentation et de la clause de revoyure.

Nous étions attachés à la suppression de l'article 12 bis : il était important d'écarter le durcissement injustifié d'un certain nombre de peines condamnant les entrées illicites dans les enceintes sportives, ou bien encore les interdictions administratives de stade (IAS). Même s'il est regrettable que le problème de la sécurité ne soit abordé que sous l'angle répressif dans ce texte, la suppression de l'article est justifiée.

De nombreux sénateurs, en suivant les débats à l'Assemblée nationale, se sont interrogés sur l'application de l'article 45 de la Constitution. À l'évidence, de nombreux amendements adoptés par l'Assemblée nationale auraient été jugés irrecevables au Sénat : c'est une nouvelle démonstration du fait que le Règlement du Sénat est bien plus rigide.

Enfin, de manière positive, un grand nombre d'éléments des avis du Conseil d'État et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) ont été pris en compte dans le débat parlementaire. Même si, en lisant dans la presse les commentaires sur ce texte et plus globalement sur l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques, on se rend compte que si certaines craintes et inquiétudes ne sont pas dissipées concernant la sécurité, les mobilités ou le financement, ce texte contribue globalement à rendre optimales les conditions d'organisation, et au succès de cet événement planétaire.

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour le Sénat. - Nous vous proposons de supprimer l'article 1er bis, car il nous semble déjà satisfait : le Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) s'est engagé dans le label Terrain d'égalité, qui sera contrôlé par l'Agence française de normalisation (Afnor), ce qui nous semble plus réaliste et plus efficace. Ce label a un cahier des charges prévoyant des campagnes de sensibilisation aux violences sexistes et sexuelles bien plus larges que celles qui étaient prévues à l'article 1er bis, avec en sus un dispositif de signalement et d'écoute opérationnel. Nous ne voyons pas l'utilité d'inscrire dans la loi des mesures déjà satisfaites par ailleurs.

Concernant l'article 7, nous voulons engager une véritable expérimentation de la pratique de la vidéoprotection intelligente. Si nous proposons le mois de décembre pour la remise du rapport, c'est que le délai de trois mois, après la fin des jeux Olympiques et Paralympiques, est nécessaire pour qu'un vrai travail d'évaluation soit mené, afin de laisser ensuite le temps au Parlement de se prononcer. C'est le principe même des expérimentations : il faut les tester, les évaluer, et décider. Comme pour chaque expérimentation, il faut donc laisser au Parlement le temps de se réunir pour décider s'il souhaite ou non prolonger l'expérimentation. Il nous paraît curieux, voire contre-productif, de fixer la date de fin de l'expérimentation le même jour que la date de remise du rapport d'évaluation de l'expérimentation. C'est pourquoi la date du 31 mars nous semble être un compromis : un rapport d'évaluation serait rendu le 31 décembre, ce qui laisse un temps d'étude nécessaire pour prendre en compte l'ensemble des paramètres, le Parlement disposant pour se prononcer d'un délai de trois mois, qui nous semble raisonnable et répondre à l'enjeu de procéder à une véritable évaluation.

Concernant le paragraphe V de l'article 7 et l'amendement adopté par l'Assemblée nationale, j'entends votre argument sur l'extraterritorialité, mais il nous a semblé que la référence au label « SecNumCloud » n'était pas appropriée. En effet, aucune entreprise française n'a ce label. Aussi, il nous semble important de retenir les règles et les critères fixés par l'Anssi, comme nous l'avons acté lors de nos échanges. Nous soumettons donc à votre appréciation cette proposition de modification.

Enfin, à l'article 17, le Sénat avait voté des dérogations au repos dominical entre le 1er juin et le 30 septembre 2024. Nous avons accepté que ces dérogations débutent le 15 juin, mais il nous semble que le 30 septembre est une bonne date pour les clore. Les commerçants qui le souhaitent pourront ainsi profiter encore de la dynamique des Jeux. Cela nous semble être un bon compromis.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Mme la rapporteure a bien résumé l'argumentation qu'elle a développée pour parvenir à ces compromis. La suppression de l'article 1er bis n'enlève toutefois rien au bien-fondé de l'amendement déposé à l'Assemblée nationale, dont la teneur est prise en compte.

Concernant l'article 7, il importait de parvenir à un compromis. J'entends la demande du Sénat de laisser au Parlement, après la remise du rapport, le temps de se prononcer. Cette demande s'inscrit bien dans le cadre de l'article 37-1 de la Constitution ouvrant droit à des dispositions à caractère expérimental. Nous ne sommes pas là en train de préparer le terrain pour une décision qui serait déjà prise. C'est pour cette raison que la proposition que nous vous faisons semble satisfaisante.

Parallèlement, des dispositions ont évolué dans un sens plus protecteur ; je pense à la conservation des données. Certes, elles ne satisfont pas ceux qui sont opposés au texte, mais nous n'arriverons pas à les convaincre, car ils sont, par principe, opposés à l'utilisation de l'intelligence artificielle dans l'analyse des images. Toutefois, le fait de limiter à douze mois la conservation des données a son importance. Cette avancée fait aussi partie du compromis que nous avons réussi à obtenir.

EXAMEN DES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION

Article 1er

L'article 1er est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 1er bis (supprimé)

L'article 1er bis est supprimé.

Article 2 bis

L'article 2 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 3

L'article 3 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 4

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 4 bis A

L'article 4 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 5

L'article 5 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 6

L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 7

Mme Sandra Regol, députée. - Parmi les modifications apportées au paragraphe I de l'article 7, j'attire votre attention sur un point qui me semble dangereux : la suppression de la référence directe aux manifestations. Pour que s'applique cette vidéosurveillance algorithmique, il fallait au moins un lien avec les manifestations concernées.

Je profite de l'occasion pour répondre à Mme la rapporteure concernant l'article 1er bis, le label n'est pas très contraignant. Nous aurions envoyé un signal positif en l'intégrant.

M. Philippe Latombe, député. - Je réitère mon alerte sur l'article 7. Étant co-rapporteur d'une mission d'information sur les enjeux de l'utilisation d'images de sécurité dans le domaine public dans une finalité de lutte contre l'insécurité, je suis sensible au sujet de la vidéoprotection augmentée. Le compromis que nous avions obtenu avec la date du 30 décembre 2024 a permis de voter le texte à une large majorité, avec l'adhésion notamment d'un certain nombre de collègues du groupe Les Républicains et du groupe Libertés, Indépendant, Outre-mer et Territoires. Je ne m'opposerai pas au compromis des rapporteurs, mais, en fixant la date du 31 mars 2025, je ne sais pas si le texte issu des travaux de la CMP sera adopté par l'Assemblée nationale.

J'entends la remarque sur la cybersécurité, mais, à nos yeux, les garanties ne sont pas suffisantes. En cas d'accord d'adéquation, les données pourront parfaitement être localisées dans des pays comme les États-Unis ou Israël, sans que l'Anssi puisse intervenir.

M. Ugo Bernalicis, député. - Sans revenir sur le fond, je souhaiterais des votes distincts sur les différents éléments de cet article. On peut, en effet, être en accord avec certaines modifications et en désaccord avec d'autres, par exemple la date. On doit se prononcer sur l'arrêté préfectoral, le référentiel d'exigences et la durée de conservation des images durant douze mois.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La référence aux manifestations est mentionnée au début de l'article. La suppression opérée ne modifie donc rien.

M. Ugo Bernalicis, député. - Certes, mais quand il y a un arrêté, on peut le contester, s'y opposer ; c'est plus compliqué quand il n'y en a pas...

M. François-Noël Buffet, président. - L'usage est de voter article par article sur la rédaction proposée par les rapporteurs.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Pour en revenir à l'arrêté préfectoral, les alinéas 24 et suivants ont trait à la décision d'autorisation. Le cadre est donc clairement défini.

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 7 bis

L'article 7 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 7 ter

L'article 7 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 8

L'article 8 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 8 bis (supprimé)

L'article 8 bis est supprimé.

Article 9

L'article 9 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 10

L'article 10 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 11

L'article 11 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 11 bis (supprimé)

L'article 11 bis est supprimé.

Article 12

L'article 12 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 12 bis (supprimé)

L'article 12 bis est supprimé.

Article 13

L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 13 bis

L'article 13 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 14 A

L'article 14 A est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 14

L'article 14 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 14 bis

L'article 14 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 16

L'article 16 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 17

L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 18

L'article 18 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 18 bis A

L'article 18 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 18 bis

L'article 18 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 19

L'article 19 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions.

En conséquence, la commission mixte paritaire vous demande d'adopter le projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

La réunion est close à 18 h 30.

Jeudi 6 avril 2023

- Présidence de Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales -

La réunion est ouverte à 9 h 00.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé

Mesdames, Messieurs,

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de la Première ministre, la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé se réunit au Sénat le jeudi 6 avril 2023.

Elle procède tout d'abord à la désignation de son Bureau, constitué de Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente, de Mme Fadila Khattabi, députée, vice-présidente, de Mme Corinne Imbert, sénatrice, rapporteure pour le Sénat, et de Mme Stéphanie Rist, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. - Je souhaite la bienvenue à nos collègues de l'Assemblée nationale pour cette commission mixte paritaire (CMP).

Mme Fadila Khattabi, députée, vice-présidente. - La nuit fut longue ; quelques points restent en discussion. J'espère que nous pourrons aboutir sur le sujet de l'accès aux soins, particulièrement sensible pour nos concitoyens. Il sera peut-être nécessaire de suspendre la réunion pour parvenir à un compromis.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. - Nous verrons, après les interventions de chacun, quels points restent encore en discussion.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour le Sénat. - Le Sénat a déploré le calendrier d'examen de la proposition de loi qui nous réunit ce matin et les tensions que celle-ci a suscitées entre les professionnels de santé. Inscrit à l'ordre du jour de nos travaux le 14 février dernier, ce texte a contribué à détériorer le climat de négociation, déjà difficile, de la nouvelle convention médicale, avec l'issue que nous connaissons désormais. Attendu des professionnels paramédicaux, il a, au contraire, suscité la colère de nombreux médecins.

Je regrette que ce texte n'ait pas pu faire l'objet d'un débat plus serein, tant les sujets qu'il aborde sont essentiels pour l'organisation de notre système de soins et la valorisation des professions de santé. Convaincu de leur importance, le Sénat a d'ailleurs tâché de retenir, lors de son examen, une approche équilibrée et constructive.

Aussi avons-nous adopté les mesures les mieux à même de faciliter le parcours du patient et de valoriser les compétences des professionnels de santé. En revanche, notre chambre a choisi d'amender ce texte chaque fois que cela lui paraissait nécessaire pour réduire les tensions parmi les professions de santé, pour garantir la sécurité des soins et pour préserver le rôle du médecin dans le suivi du patient.

À l'issue de la première lecture, seize articles demeurent en discussion ce matin. En effet, sur les dix-neuf articles que comptait le texte adopté par l'Assemblée nationale, le Sénat en a supprimé trois et adopté cinq sans modification. Il a, par ailleurs, adopté trois nouveaux articles.

Sans ménager plus longtemps l'effet de surprise, il me semble qu'il nous sera difficile d'obtenir un accord ce matin. Je tiens toutefois à remercier la rapporteure Stéphanie Rist pour les échanges que nous avons menés avant cette réunion.

Pourtant, notons d'emblée que les textes adoptés par nos deux chambres se rejoignent sur de nombreux points.

Sans en faire la liste exhaustive, je me réjouis, en premier lieu, que nous soutenions les nouvelles compétences attribuées aux assistants dentaires de niveau II, en encadrant leur nombre dans un même lieu d'exercice. Cette évolution de leurs missions, après une formation adéquate, est attendue de longue date par les chirurgiens-dentistes comme par les assistants dentaires eux-mêmes.

De même, le Sénat a adopté les articles, introduits par l'Assemblée nationale, visant à réformer le diplôme de préparateur en pharmacie dans une optique de montée en qualification de la profession et à reconnaître comme profession de santé les assistants de régulation médicale afin de renforcer l'attractivité de ce métier.

L'Assemblée nationale et le Sénat se sont également accordés pour étendre les compétences reconnues aux pédicures-podologues, aux professionnels de l'appareillage médical, ainsi qu'aux opticiens-lunetiers. Il s'agit là d'ajustements à même de faciliter le parcours du patient et d'éviter des actes inutiles.

Enfin, attachée depuis longtemps au développement de la pratique avancée, notre chambre a adopté les dispositions visant à autoriser les infirmiers en pratique avancée (IPA) à prescrire certains produits et prestations soumis à prescription médicale obligatoire.

D'autres volets du texte ont, en revanche, fait apparaître des divergences entre nos deux assemblées, que nos échanges préalables entre rapporteures n'ont pas permis de dépasser.

Si le Sénat a voté les dispositions permettant aux sages-femmes et aux infirmiers de concourir à la permanence des soins ambulatoires, il a, en revanche, souhaité supprimer celles qui consacrent la « responsabilité collective » des praticiens en la matière. Ces dernières inquiétaient inutilement les professionnels de santé, sans revenir sur le principe du volontariat.

Dans le même objectif d'apaisement, le Sénat a supprimé les dispositions relatives à l'engagement territorial des médecins, jugeant que celles-ci interféraient inutilement avec les négociations en cours de la prochaine convention médicale et en détérioraient le climat. Le contrat d'engagement territorial, proposé par la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam), a d'ailleurs été largement rejeté par les syndicats quelques semaines plus tard.

Enfin, si le Sénat a validé le principe d'un accès direct aux infirmiers en pratique avancée, aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes, il a toutefois souhaité le réserver, s'agissant des infirmiers et masseurs-kinésithérapeutes, aux structures d'exercice coordonné les plus intégrées. Il s'agit du désaccord le plus substantiel auquel nous avons été confrontés au cours de nos échanges.

Je demeure convaincue, en effet, que cette mesure n'est souhaitable que dans le cadre d'une relation de confiance entre professionnels médicaux et paramédicaux, construite dans la prise en charge d'une patientèle commune. La participation à une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) ne suffit pas à faire la preuve d'une telle confiance : c'est pourquoi nous avons refusé d'en faire une condition suffisante à l'accès direct.

Sur deux de ces trois sujets sensibles, nous aurions pu parvenir à un accord, mais je constate que nos discussions ont achoppé sur la question des consultations dans les CPTS.

En conditionnant l'accès direct à une coopération effective entre soignants, la solution portée par le Sénat constitue pourtant une voie raisonnable, susceptible d'apaiser les tensions entre les professionnels de santé, et ce dans l'intérêt des patients.

Dans ces conditions, je crains que nous ne devions constater ce matin que les positions de nos deux assemblées ne sont pas conciliables. Je regrette que, sur un texte ayant suscité tant d'oppositions au sein des professions de santé, l'Assemblée nationale n'ait pas saisi la main tendue par le Sénat.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Nous examinons en commission mixte paritaire cette proposition de loi que j'ai déposée avec mon groupe Renaissance à l'automne dernier. Elle s'inscrit dans le prolongement des travaux engagés depuis plusieurs années, notamment de la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.

Le développement des partages d'activité apparaît incontournable pour valoriser à leur juste niveau les compétences des professionnels de santé, et pour permettre aux Français, en particulier aux plus fragiles, d'accéder aux soins, même si j'ai bien conscience que cette proposition de loi ne réglera pas à elle seule des problèmes que nous connaissons tous très bien.

Cette proposition de loi, qui suscite de fortes attentes, a fait l'objet de longues concertations avec les professionnels de santé au cours de ces derniers mois. Comportant initialement quatre articles, elle en compte désormais dix-huit, à la suite de l'examen de nos deux assemblées, ce qui témoigne de la richesse des débats.

Permettez-moi d'abord de revenir sur nos points d'accord, avant d'évoquer les points sur lesquels nos deux assemblées divergent jusqu'à présent.

Je me réjouis de l'adoption conforme de quatre articles, notamment de l'article 3, qui permet l'ouverture d'un accès direct aux orthophonistes exerçant dans une structure de soins coordonnée, y compris aux professionnels travaillant dans le cadre d'une communauté professionnelle territoriale de santé à condition que le projet de santé le prévoie.

L'examen du texte par le Sénat a montré que d'autres articles de la loi, bien qu'adoptés dans des termes différents, ont fait l'objet d'une convergence de vue. Vous avez apporté d'utiles précisions à l'article 4 bis qui vise à encadrer le nombre d'assistants dentaires ; à l'article 4 decies qui reconnaît les assistants de régulation médicale comme profession de santé ; ou encore à l'article 4 terdecies qui prévoit une expérimentation des prélèvements cervico-vaginaux par les pharmaciens biologistes dans le cadre du dépistage du cancer du col de l'utérus.

À l'issue de l'examen du texte, force est de constater que députés et sénateurs n'ont pas réussi à converger sur plusieurs articles. C'est le cas en particulier de l'article 1er sur les infirmiers en pratique avancée, qui a fait l'objet de multiples amendements, que ce soit sur la primoprescription, les conditions d'accès à la pratique avancée ou la structuration de cette profession. C'est aussi le cas de l'article 2 relatif aux masseurs-kinésithérapeutes, concernant le nombre maximal de séances possibles en accès direct, la prise en charge prioritaire des patients en affection de longue durée (ALD), ou encore la question du versement du compte rendu et du bilan initial de la consultation dans le dossier médical partagé (DMP) du patient.

Par ailleurs, plusieurs articles introduits par l'Assemblée nationale ont été supprimés par le Sénat. Tel est le cas de la possibilité pour les masseurs-kinésithérapeutes de prescrire une activité physique adaptée aux personnes atteintes d'une ALD par exemple, ou d'une demande de rapport sur les dispositions de la loi du 13 août 2004 qui conditionnent la prise en charge d'une consultation chez un spécialiste à un adressage préalable par un médecin généraliste. Il en va de même du principe de responsabilité collective des professionnels de santé pour assurer la permanence des soins, et de l'article relatif à la valorisation de l'engagement territorial des médecins. Ces évolutions envoient à mon sens un mauvais signal à nos concitoyens, qui attendent des réponses de notre part pour leur permettre d'accéder plus facilement à une offre de soins.

Le point de désaccord le plus substantiel porte sur la question de l'accès direct aux professionnels de santé dans le cadre d'un exercice coordonné. Le Sénat a supprimé les dispositions permettant à un patient de consulter en première intention un infirmier en pratique avancée, un infirmier pour la prévention et le traitement des plaies, ou un masseur-kinésithérapeute, dans le cadre d'une CPTS, alors même que cette disposition a été adoptée conforme pour les orthophonistes... Je rappelle que nous avions trouvé un compromis en séance à l'Assemblée nationale en prévoyant que seules seraient concernées les CPTS ayant défini dans leur projet de santé les modalités de prise en charge et de coordination. Il s'agit donc d'ouvrir une telle possibilité non pas pour toutes les CPTS, mais uniquement pour celles qui ont développé un véritable projet dans lequel le médecin, tout en restant le pivot du parcours de soins, n'en constitue plus nécessairement la porte d'entrée. La suppression pure et simple de ces dispositions diminue nettement la portée de cette proposition de loi. En l'état, il s'agit d'un point particulièrement bloquant, sur lequel nous devrons revenir aujourd'hui ou, à défaut d'accord, en nouvelle lecture à l'Assemblée.

M. Bernard Jomier, sénateur. - Nous sommes confrontés à un défi important, l'accès aux soins, qui fait écho à une préoccupation que l'on retrouve sur tout le territoire, la question des déserts médicaux. Nous devons imaginer une évolution permettant un nouveau partage des tâches entre les professionnels de santé, sans désorganiser les parcours de soins. Si nous ne tenons pas les deux bouts de cette équation, nous aboutirons à un système qui accroîtra les inégalités territoriales, car les patients des grandes métropoles comme Paris auront toujours accès à un médecin en face à face, mais ceux d'autres territoires ne pourront accéder qu'à d'autres professionnels de santé, peut-être même ne les voir qu'à travers un écran d'ordinateur. Cette inégalité territoriale, qui recoupe souvent des inégalités sociales d'ailleurs, nous ne l'acceptons pas.

Nous voulons envisager une évolution du partage des tâches entre les professionnels, en tenant compte de ces impératifs, sans que cette évolution se fasse contre les professionnels de santé. Pour des raisons multiples, ces derniers rencontrent de grandes difficultés. La pénurie de médecins désorganise tout, et il n'y a rien de plus difficile pour une société que de répondre de manière juste à une situation de pénurie. Or nous sommes inquiets : la pénurie de médecins est durable, notamment parce que l'effort de formation n'est pas suffisant. Au-delà des effets de communication, notre pays n'a augmenté que de 12 à 15 % le nombre de médecins formés, alors que l'augmentation devrait être bien plus importante. Du fait de la dégradation de leurs conditions de travail, les jeunes commencent même à abandonner cette profession, ce qui était inimaginable il y a encore quelques années.

Nous ne pouvons pas adopter des propositions en la matière en nous opposant à une catégorie de soignants, quelle qu'elle soit. Notre devoir de législateur est de proposer un projet sur lequel les professionnels, au-delà des conservatismes de chacun, puissent s'accorder.

Nous avons beaucoup avancé sur différents points lors de l'examen du texte. Certaines questions peuvent être réglées, notamment pour les kinésithérapeutes. Mais le point central, c'est une meilleure reconnaissance du rôle des infirmiers, et une meilleure valorisation de leur place dans les parcours de soin. Nous y sommes tout à fait favorables.

Le cadrage actuel du texte, établi par le Sénat, rend possible l'accès direct aux IPA. Les postures ne sont pas idéologiques : concrètement, le cadre proposé par le Sénat permettra l'exercice en ville de nombreux IPA. Je ne vous fais pas l'injure de vous rappeler qu'actuellement, en ville, il n'y a que 200 IPA, ou que leur formation, qui dure deux ans, doit être financée. J'entends les réticences d'autres professionnels de santé par rapport à l'ouverture trop générale du dispositif sur l'ensemble du territoire, mais l'ouverture proposée par le Sénat est raisonnable. Il sera temps, dans quelques années, lorsque ces IPA auront démontré leur utilité, d'étendre ce dispositif.

Arrêtons de produire des lois de posture, qui prétendent résoudre tous les problèmes à la fois, mais qui restent à peu près inapplicables. J'ai entendu les rapporteures, et je pense que l'on peut progresser. Je demande une suspension de séance pour que nous puissions trouver un terrain d'entente.

M. Cyrille Isaac-Sibille, député. - Nous partageons les mêmes constats : des professions connaissent des tensions de tous ordres, qu'il s'agisse de la démographie, de la perte de sens ou de l'attractivité... Effectivement, différentes professions sont concernées ; nous avons une responsabilité : si nos deux chambres, par l'intermédiaire de quatorze représentants, ne peuvent pas trouver un consensus, comment voulez-vous que ces professions y arrivent, et que les Français continuent à discuter ? Cette CMP doit aboutir. Je n'imagine pas une nouvelle lecture à l'Assemblée, où l'on ne tiendrait pas compte du travail du Sénat : personne n'y gagnerait. Je demande également une suspension de la réunion ; je vous en implore, trouvons une solution.

Mme Joëlle Mélin, députée. - Le Rassemblement national s'est positionné assez vite sur cette proposition de loi, en partageant le constat que toute profession, en raison des techniques nouvelles liées à l'informatisation et à l'intelligence artificielle, doit évoluer. Peut-être que la médecine telle que je l'ai pratiquée ne peut plus s'appliquer maintenant, tant pour les médecins généralistes ou spécialistes, les médecins hospitaliers ou de ville, que pour les multiples formes d'exercice des paramédicaux. Pour chaque profession, il faut revoir le coeur des métiers et les manières d'exercer.

En revanche, le transfert de tâches sous-tendu par cette proposition de loi doit se réaliser sereinement. Beaucoup de paramédicaux ne demandent pas autant de possibilités que celles qui sont prévues par le champ de cette proposition de loi : certains infirmiers sont satisfaits de leurs compétences actuelles, et ce texte serait de nature à déséquilibrer leur exercice. En cas de pénurie de médecins, les infirmiers doivent parfois prendre seuls des décisions sans être complètement assurés... Nous connaissons la réaction des médecins devant ce texte. Certes, les kinésithérapeutes attendent l'élargissement de leur champ de compétences et l'autorisation d'exercer sans prescription, après l'autorisation d'exercer sans diagnostic médical préalable. On arrive à une forme de médecine totale : faire un diagnostic, chercher dans ses connaissances pour proposer un traitement, se donner les moyens que ce traitement soit appliqué...

Monsieur le sénateur, je partage votre position. Donnons-nous le temps de trouver une rédaction assouplie. La proposition du Sénat nous semble acceptable. Trouvons un compromis et une solution. Madame la vice-présidente, vous avez indiqué lors des auditions que vous souhaitiez qu'il y ait d'autres étapes à la suite de ce texte. Nous sommes d'accord, mais il ne faut peut-être pas aller si vite. La profession médicale a été très touchée par cette pénurie qui s'est mise en place voilà plus de quarante ans. Petit à petit, cette profession est dépouillée de toutes ses prérogatives, à juste titre ou non. Il faut arriver à une conclusion aujourd'hui.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Je vous rejoins : une CMP conclusive permettrait peut-être d'apaiser des tensions entre professionnels ; en responsabilité, nous devons essayer de les diminuer. Le rôle du généraliste dans le parcours du patient est central. Compte tenu du mur du vieillissement qui se dresse devant nous, celui-ci sera indispensable dans les années qui viennent.

Il ne s'agit pas d'une loi de posture, cependant. La semaine dernière, en allant voir différentes CPTS dans les territoires, nous avons constaté une certaine hétérogénéité. Mais certaines CPTS sont déjà organisées, et attendent les dispositions de cette loi. Elles sont d'ailleurs parfois presque dans une forme d'illégalité, car elles permettent parfois ce partage.

Tous les professionnels de santé, les médecins comme les IPA, doivent retrouver de la sérénité, et nous devons leur donner des raisons d'espérer. Certaines étudiantes de première année pour devenir IPA nous demandent si elles devront s'arrêter en cours d'études... Que voulez-vous qu'on leur réponde ? Je suis d'accord pour avancer : j'entends les gens parfois très réfractaires à ces CPTS, et l'idée n'est pas que tous les médecins quittent les CPTS. Il faut peut-être retirer certaines CPTS de ce texte de loi, mais, comme des territoires sont en attente, il me semble important de conserver l'expérimentation votée dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour le Sénat. - Le Sénat a fait un pas en soutenant la généralisation de l'accès direct aux IPA, aux kinésithérapeutes et aux orthophonistes dans le cadre d'un exercice coordonné. Nous avons cherché un équilibre entre les inquiétudes des médecins, qui restent en effet le pivot de la médecine générale, notamment en ville, et les attentes des infirmières. Nous avons avancé en ce sens.

De mon point de vue, les CPTS ne sont pas des structures de soins, comme le disent certains professionnels : elles font de la coordination, coordination elle-même très disparate selon les territoires car tributaire de l'engagement personnel des professionnels de santé.

À titre personnel, je crains que, en raison de la volonté de couvrir l'ensemble du territoire de CPTS, cette hétérogénéité ne soit de plus en plus marquée, avec parfois des « coquilles vides », si je puis m'exprimer ainsi. Si, demain, un accès direct aux soins était possible au sein des CPTS, ces dernières ne pourraient pas assurer la coordination nécessaire, attendue et indispensable à une bonne organisation de l'accès direct aux soins, dans l'intérêt des patients et pour répondre aux attentes des médecins.

Pour cette raison, nous avons avancé sur l'accès direct aux IPA, mais en le conditionnant à l'exercice coordonné dans les maisons de santé, les équipes de soins primaires et les centres de santé. Faisons attention à cette hétérogénéité : nous la constatons aujourd'hui, mais elle pourrait être encore plus importante demain.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. - Nous allons donc suspendre la réunion, cette demande étant unanime. Si le texte poursuivait son chemin parlementaire par une nouvelle lecture, des difficultés supplémentaires se poseraient. Lors de la discussion générale du texte en séance publique, j'avais déjà indiqué que ce texte faisait l'effet d'un chiffon rouge pour les négociations conventionnelles. Généraliser en janvier une expérimentation votée en novembre, cela ne laisse que peu de recul pour légiférer... D'ailleurs, nous ne l'avions pas votée au Sénat lors du PLFSS pour 2023, car nous étions informés qu'une proposition de loi serait examinée sur ce sujet à l'Assemblée nationale.

Nous avons le sentiment d'être arrivés à un texte d'équilibre. Cela n'a pas été si facile : au Sénat, l'article 1er a été longuement discuté. Sur le terrain, j'ai rencontré comme chacun des médecins, à l'invitation du conseil de l'ordre de mon département. Je l'ai dit à François Braun, le Gouvernement doit être conscient des craintes des médecins par rapport à l'exercice futur de leur métier, notamment en ce qui concerne la place du médecin généraliste. Avec cette pénurie, on fait trop supporter à ceux qui sont en exercice, qui voient de nombreux patients, qui, pour certains, prennent des gardes et assurent, quoi qu'on en dise, la permanence des soins, et qui, sans remettre en cause la qualité de leur travail, se sentent comme des boucs émissaires. Il faut en être conscient. Nous avons tenu compte de tous ces paramètres. Dans cette période tendue où des propositions fleurissent tous azimuts, trouvons une solution. Avancer à marche forcée ne résoudra rien, bien au contraire ! Il ne sert à rien de braquer les professionnels. Voyons si nous pouvons trouver des solutions pour les CPTS et l'expérimentation.

La réunion, suspendue à 9 h 30, reprend à 11 h 55.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Concernant l'article 1er, le point restant en discussion portait sur les CPTS. L'idée est de retirer les CPTS du périmètre de l'accès direct, mais de maintenir une expérimentation dans six départements, dont deux ultramarins.

En outre, nous vous proposons d'étendre la durée de l'expérimentation à cinq ans, au lieu de trois.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour le Sénat. - Nous sommes tout à fait d'accord pour mener cette expérimentation sur cinq ans.

Le texte précise, par ailleurs, qu'il n'y aura pas de généralisation avant évaluation de l'expérimentation.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - À l'article 1er, nous vous proposons également de supprimer l'alinéa 5 du texte du Sénat, à savoir les dispositions visant à autoriser l'accession à la pratique avancée aux titulaires de diplômes non délivrés par l'université.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour le Sénat. - À l'article 2, le nombre de séances de kinésithérapie en accès direct passerait de cinq, comme le prévoyait le texte du Sénat, à huit.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Pour les masseurs-kinésithérapeutes, nous retenons la même expérimentation qu'à l'article 1er, dans six départements, dont deux ultramarins.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour le Sénat. - Au sein d'une CPTS.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - À l'article 4, nous avons procédé à des modifications rédactionnelles, avec des coordinations.

À l'article 4 sexies, il vous est proposé de sécuriser l'écriture du Sénat pour ce qui concerne les compétences des préparateurs en pharmacie.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour le Sénat. - Dans le texte du Sénat, nous citions expressément les trois pathologies contre lesquelles les préparateurs en pharmacie pouvaient administrer des vaccins : vaccin contre la grippe, vaccin contre la covid-19 et vaccin contre la variole du singe. Je reconnais que figer les choses de cette manière dans la loi n'était pas forcément idéal.

Les préparateurs en pharmacie ont été habilités à vacciner en période de crise. La crise terminée, ils pourraient perdre cette autorisation. C'est un peu dommage, puisque leurs compétences sont les mêmes.

Nous proposons de modifier la rédaction du Sénat de manière à laisser à un arrêté le soin de fixer les vaccins qui pourraient être injectés, sous la responsabilité du pharmacien présent, par les préparateurs. Ces derniers ne demandent pas forcément à pouvoir réaliser les autres vaccins autorisés aux pharmaciens et aux autres professionnels de santé. Il faudra que l'arrêté paraisse assez rapidement, avant la prochaine campagne de vaccination contre la grippe et la covid-19, en octobre prochain.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La dernière modification que nous proposons concerne l'article 4 quaterdecies : il s'agit de contraindre le pouvoir réglementaire à publier annuellement la liste des tests rapides d'orientation diagnostique (Trod) pouvant être utilisés par les professionnels de santé.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour le Sénat. - Le texte du Sénat visait à inverser la logique actuelle : plutôt que d'attendre un arrêté de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) autorisant l'utilisation d'un Trod par les professionnels de santé, il s'agissait de permettre que les Trod commercialisés soient autorisés par les professionnels de santé, sauf à ce qu'un arrêté l'exclue expressément.

Bien évidemment, l'ANSM doit donner un avis. L'objectif est de mettre un peu de pression sur le pouvoir réglementaire pour l'actualisation des Trod pouvant être utilisés par les professionnels de santé. Nous vous proposons que cette liste soit désormais révisée annuellement.

Il y a là des enjeux de santé publique. Je pense, par exemple, au dépistage du diabète : les pharmaciens ne peuvent faire une glycémie capillaire que pendant la semaine du diabète. Il y a également un enjeu important en matière d'antibiorésistance. Il faut que les tests permettant de déterminer la présence d'un virus puissent être davantage déployés - les tests doivent évidemment avoir été autorisés par l'ANSM.

Tout le monde était heureux de trouver des Trod pour la covid-19. Il faut que l'on puisse faire, en temps normal, ce que l'on a été capable de faire en période de crise, évidemment sans mettre en danger les patients et sans engager trop loin la responsabilité du professionnel. Il faut donc recueillir l'avis de l'ANSM, et que celle-ci se prononce plus rapidement qu'elle n'a pu le faire ces derniers temps.

La suppression de l'engagement territorial est maintenue.

En contrepartie, nous avons accepté que la responsabilité collective de la permanence des soins soit réinscrite, en sachant que la permanence des soins est couverte à 98 % sur le territoire national - les 2 % manquants concernent souvent des territoires où il n'y a pas de médecins.

Cependant, l'imprécision de la « responsabilité collective de la permanence des soins » me gênait : il vaut mieux parler de « responsabilité collective de l'organisation ». Sur ce point, nous allons laisser le texte tel qu'il est, c'est-à-dire dans la version issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Toutefois, il faut rassurer les médecins. On ne revient pas sur le caractère volontaire - je rappelle que 40 % des médecins généralistes assurent 98 % de la permanence des soins. Cela peut être acceptable.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. - On ne sait pas trop ce que signifie la responsabilité collective de la permanence... Juridiquement, êtes-vous sûres que cela ne vaut pas obligation ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour le Sénat. - Le Gouvernement l'a confirmé lors des auditions.

Il est vrai que, à titre personnel, comme je m'en suis ouverte tout à l'heure, j'aurais préféré que l'on écrive « responsabilité collective de l'organisation ». Jusqu'où va la responsabilité collective ? C'est un vrai sujet.

M. Bernard Jomier, sénateur. - Je remercie les deux rapporteures de nous avoir écoutés et d'avoir su trouver un terrain d'entente.

Le seul point qui continue de nous poser problème est la mention d'une responsabilité collective, pour des questions d'ordre non seulement politique, mais aussi juridique : ce concept est éminemment contestable en droit. Pour notre part, nous n'y adhérons pas. S'il est possible de modifier légèrement cette rédaction, j'en serai heureux ! Cela ne fera pas obstacle à un vote positif de notre part sur l'accord que vous avez trouvé, mais je tiens vraiment à attirer l'attention sur le fait que cette notion est à manier avec précaution sur un plan juridique.

Mme Joëlle Mélin, députée. - La « responsabilité collective » me semble extrêmement floue. Il est déjà tellement difficile, dans ces métiers, de faire apparaître la responsabilité personnelle ou la responsabilité sanitaire des politiques... Engager la responsabilité collective d'organisations territoriales me semble très compliqué ! Cela méritera d'être sécurisé par la suite.

M. Bernard Jomier, sénateur. - La rédaction proposée par la présidente Catherine Deroche est tout de même plus satisfaisante, tout en maintenant le concept auquel, visiblement, la rapporteure pour l'Assemblée nationale tient particulièrement.

Je rappelle que la loi par laquelle les CPTS ont été créées confie déjà à ces dernières une responsabilité dans l'amélioration de l'accès aux soins, mais, en apportant cette précision, on évite d'éventuelles conséquences juridiques pour les professionnels de santé, à titre personnel.

Mme Stéphanie Rist, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Le sens de la phrase est un peu plus indirect si l'on ajoute « de l'organisation ». Nous nous y opposons.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. - Nous n'en ferons pas un casus belli.

La rédaction de compromis des rapporteures est adoptée.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. - Merci, mesdames les rapporteures !

La réunion est close à 12 h 10.