Travaux de la commission des affaires sociales



Mercredi 2 novembre 2005

- Présidence de M. Nicolas About, président, puis de M. Gérard Dériot, vice-président -

PJLF pour 2006 - Missions : « Santé », « Sécurité sanitaire », « Solidarité et intégration » - Audition de MM. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, et Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille

La commission a procédé à l'audition de MM. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, et Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille sur le projet de loi de finances pour 2006 (missions : « Santé », « Sécurité sanitaire », « Solidarité et intégration »).

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées, a tout d'abord indiqué que les crédits relatifs au handicap ont progressé en moyenne de plus de 3 % par an ces dernières années. A ceux-ci s'ajoutent les financements prévus dans le cadre de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) depuis 2005 et ceux inscrits au budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), lesquels s'élèvent à 2,2 milliards d'euros en 2006.

Le projet de budget comporte 457 millions d'euros de mesures nouvelles, soit une augmentation de 6,43 % par rapport à 2005. Ces crédits supplémentaires financent, à hauteur de 340 millions d'euros, le surcroît de dépenses d'allocation aux adultes handicapés (AAH). Les crédits consacrés à cette allocation correspondent à la prise en charge de 797.000 personnes et permettent également de financer les nouveaux compléments d'AAH. Ceux-ci portent le niveau de ressources des bénéficiaires de cette allocation à 80 % du salaire minimum de croissance (SMIC), conformément aux engagements pris par le Gouvernement lors du vote de la loi du 11 février 2005.

Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit la création de 2.500 nouvelles places en centres d'aide par le travail (CAT), pour un coût de 110 millions d'euros, ainsi que le financement de la garantie de ressources des personnes supplémentaires accueillies dans ces centres pour un montant de 20 millions d'euros.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées, a enfin insisté sur le fait que le budget de l'Etat ne recouvre que la moitié des mesures nouvelles en faveur des personnes handicapées. Les crédits mobilisés au sein de l'Ondam et de la CNSA progressent de 13 % au titre des personnes âgées et de 6,16 % pour le secteur du handicap. Contrairement à 2005, la contribution de la CNSA ne se substituera pas à celui de l'Etat et de l'assurance maladie mais s'y ajoutera.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a fait valoir que les crédits de ce ministère, soit 11 milliards d'euros en 2006, reflètent les grandes priorités de l'action du Gouvernement en matière de solidarité et de santé publique et qu'ils permettent de concilier l'impératif de maîtrise des dépenses publiques et une politique volontariste en faveur de la cohésion sociale.

Les politiques sanitaires et sociales représentent 55 % des dépenses publiques qui seront mises en oeuvre dans le souci d'une juste répartition des moyens sur l'ensemble du territoire et entre les citoyens.

Selon la nouvelle nomenclature issue de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), trois missions et huit programmes relèvent du ministère de la santé et des solidarités. Les objectifs et les indicateurs annexés au projet de budget permettent aux parlementaires d'être mieux informés sur la pertinence des politiques publiques et de mieux contrôler l'action du Gouvernement.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a indiqué que la mission « Santé » dispose, pour 2006, d'un budget de 399,3 millions d'euros répartis en trois programmes : santé publique et prévention, offre de soins et qualité du système de soins et drogue et toxicomanie.

Le premier de ces programmes, de loin le plus important avec 259,6 millions d'euros, est destiné essentiellement au financement des grands plans de santé publique, notamment le plan cancer doté d'un quart des crédits du programme, soit 96,5 millions d'euros. La lutte contre le cancer, première cause de décès prématurés avec 150.000 morts par an, est ainsi réaffirmée comme priorité du quinquennat : en 2006, l'Institut national du cancer (Inca) disposera de 10 millions d'euros supplémentaires pour financer sa montée en charge et le plan cancer bénéficiera d'une augmentation de 32 % de son budget.

Les plans « nutrition-santé », « santé mentale », « lutte contre la douleur », « maladies chroniques », « maladies d'Alzheimer » et « lutte contre le sida » constituent également des priorités fortes du Gouvernement et seront financés comme telles en 2006, sans être sacrifiés à l'effort budgétaire consenti à la lutte contre le cancer. Ainsi, les actions de prévention des pratiques à risques, de soutien et de réinsertion sociale des personnes séropositives et des malades seront renforcées en 2006 dans le cadre du plan de « lutte contre le sida », dont la part de financement respective de l'Etat et de l'assurance maladie sera modifiée.

Concernant le programme drogue et toxicomanie, M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a indiqué qu'il est doté, pour 2006, de 37,3 millions d'euros, permettant à la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) de mener à bien les missions qui lui sont confiées par le plan quinquennal lancé par le Premier ministre le 26 juillet 2005.

Enfin, le programme offre de soins et qualité du système de soins, 102,4 millions d'euros en 2006, poursuit un objectif de modernisation des soins grâce notamment à la formation du personnel de santé, à la dynamisation de la recherche hospitalière et au développement de la télémédecine.

Ces trois programmes constitutifs de la mission « Santé » répondent à l'exigence d'équité territoriale en matière de santé publique et prennent en compte, à ce titre, les mesures de recentralisation du dépistage de certaines maladies (maladies sexuellement transmissibles (MST), tuberculose, etc...) assuré jusqu'à ce jour par les départements, et de décentralisation aux régions des formations paramédicales, en application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales.

Pour sa part, le programme veille et sécurité sanitaire, qui relève de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire », bénéficie d'un budget de 103,6 millions d'euros. Pour faire face à leurs missions, les agences sanitaires sont dotées de vingt postes supplémentaires, dont douze pour l'Agence de biomédecine, qui a vu sa charge accrue par la loi bioéthique. En outre, l'ordonnance du 1er septembre 2005 a confié à l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) une nouvelle compétence en matière de santé au travail, qui nécessite l'emploi de nouveaux spécialistes.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a ensuite observé que la progression substantielle des crédits dévolus à la mission « Solidarité et intégration » permettra de renforcer la cohésion sociale et de mettre en oeuvre des politiques ambitieuses, notamment dans le domaine du handicap.

La solidarité et l'intégration sont au coeur de l'action du Gouvernement pour renforcer la cohésion sociale et celui-ci s'est engagé à mener une action énergique en faveur des victimes de toute forme d'exclusion, ce qui inclut les personnes handicapées et les familles vulnérables. En conséquence, la mission « Solidarité et intégration » recueille 10,62 milliards d'euros, soit 9,56 milliards d'euros sans les dépenses de soutien.

La politique du handicap constitue le programme prioritaire de cette mission, dans la lignée du grand chantier lancé par le Président de la République et de la loi du 11 février 2005. Les moyens supplémentaires dégagés cette année sont mis au service d'une nouvelle orientation de la politique du handicap, reposant sur le changement de regard, la non-discrimination, la priorité donnée à l'intégration des personnes en milieu ordinaire, le droit à compensation et la participation des citoyens handicapés à la vie de la cité.

De ce fait, les crédits du programme « handicap et dépendance » progresseront de 6,43 % par rapport à 2005, atteignant 7,86 milliards d'euros. Ils sont destinés en priorité à l'intégration par le travail et à la mise en oeuvre du droit à la compensation : 340 millions d'euros supplémentaires financent la réforme de l'AAH et les crédits destinés aux centres d'aide par le travail (CAT) connaîtront une progression de 9,6 % permettant notamment de financer 2.500 places nouvelles.

Enfin, pour apaiser les départements inquiets du coût de la création des maisons départementales du handicap et de la nouvelle prestation de compensation du handicap, le ministre a assuré que le financement de ces mesures a été entièrement anticipé.

S'agissant de la politique en faveur des familles les plus vulnérables, M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a indiqué que les crédits inscrits au budget de l'Etat s'élèvent à 1,1 milliard d'euros, principalement destinés à l'allocation de parent isolé (API) à hauteur de 875 millions d'euros. L'accompagnement des bénéficiaires de cette prestation sera amélioré avec un suivi personnalisé et approprié de la personne pour favoriser son retour à l'emploi, conformément à l'ambition du Premier ministre d'insérer durablement les allocataires de minima sociaux sur le marché du travail. Pour faciliter la recherche d'emploi des femmes isolées, un effort particulier a été réalisé pour la garde des enfants : la convention d'objectifs et de gestion de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) prévoit ainsi la création de 15.000 places de crèches supplémentaires, qui s'ajoutent aux 57.000 en cours de construction.

S'agissant des tutelles et curatelles d'Etat, M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a indiqué que les crédits les concernant ont été revalorisés par rapport à 2005 et atteignent 197 millions d'euros. L'Agence française de l'adoption (AFA), dont le financement est prévu par le projet de budget, sera installée avant l'été 2006 afin d'optimiser le service public de l'adoption, dans l'intérêt partagé des enfants et des familles.

Il a ensuite rappelé que le troisième programme de la mission « Solidarité et intégration » concerne la protection des plus démunis et l'indemnisation des victimes de l'amiante. Les engagements de l'Etat en matière de financement de la couverture sociale des plus démunis seront tenus, puisque 607 millions d'euros seront affectés aux dépenses d'aide médicale d'Etat (AME) et au financement de la couverture maladie universelle - complémentaire (CMU-C). S'agissant de l'AME, il a fait part de son attachement à un dispositif qui répond à une exigence humanitaire et sanitaire, celle de prendre en charge les soins des personnes en situation irrégulière sur le territoire. Par ailleurs, le fonds de financement de la CMU verra sa stabilité financière confortée par la dotation d'équilibre versée par l'Etat.

Concernant les dépenses d'indemnisation, il s'est félicité de la fusion du fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles (FITH) et de l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), estimant que celle-ci permettra une meilleure gestion de ces dépenses au service des victimes. Des objectifs ont été fixés au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) afin de réduire les délais de présentation et de paiement des offres d'indemnisation, le but étant d'atteindre un traitement en moins de quatre mois de 100 % des dossiers d'ici trois ans.

Abordant enfin le programme de soutien qui finance les dépenses de personnel et de fonctionnement du ministère, M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a indiqué que ses crédits s'élèvent à 1,065 milliard d'euros. L'évolution des effectifs de l'administration sanitaire et sociale s'inscrit dans la politique globale de maîtrise de ses emplois publics, décidée par le Gouvernement. Le nombre d'emplois du ministère est fixé à 14.921 équivalents temps plein travaillé (ETPT) ; dans le même temps, des efforts seront engagés pour la réduction du taux de vacance pour la revalorisation des carrières des fonctionnaires et pour la mise en place de la validation des acquis de l'expérience (VAE) sanitaire et sociale. Une gestion vertueuse des équipements et de l'immobiliser sera mise en oeuvre à travers un important programme de cessions immobilières, d'un montant de 30 millions d'euros sur les années 2005 à 2008.

Abordant enfin la question de l'avenir de l'administration sanitaire et sociale, il s'est dit conscient des interrogations suscités par l'apparition d'agences, par le mouvement de déconcentration des services et de recentralisation de certaines actions et, plus largement, sur le rôle de l'Etat en matière de santé publique et de cohésion sociale : sur ce point, la place centrale de l'Etat est confirmée, ses missions ne sont pas remises en cause et il n'est pas question de modifier la structure des services régionaux et départementaux des affaires sanitaires et sociales.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la mission « Santé », s'est interrogé sur la suppression envisagée du fonds de concours de 1,2 million d'euros que la MILDT répartit traditionnellement entre les ministères concernés pour le financement des actions de lutte contre la drogue. Le rattachement direct, au ministère des finances, du produit des saisies de biens et de numéraire des trafiquants risque de faire perdre de vue son utilisation pour la seule lutte contre la drogue.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a assuré que cette réforme, en cours d'arbitrage, ne doit pas entraver l'action de la MILDT, qui conservera le pilotage de ces crédits entre les différents ministères, même si elle n'en opère plus directement la distribution.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la mission « Santé », s'est inquiété des moyens prévus en 2006 pour le financement des plans de santé publique compte tenu des crédits importants attribués au plan cancer et au financement de l'Inca, dans un contexte de fongibilité du programme santé publique et prévention.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a estimé que la mise en place de l'Inca permet, au contraire, de mener une politique plus efficace en matière de lutte contre le cancer et d'éviter les surcoûts. Il a confirmé que les autres plans seront, en 2006, financés au moins à hauteur des crédits perçus en 2005.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la mission « Santé », a enfin interrogé le ministre sur la capacité de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes), à mener à bien sa mission d'information et de prévention, notamment en matière de lutte contre la drogue et l'obésité, avec un budget pour 2006 en diminution de 15 millions d'euros, alors même qu'une campagne sur la grippe aviaire apparaît nécessaire.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a rappelé que les crédits consacrés par l'Inpes à la lutte contre l'obésité sont en constante augmentation. Ils se sont élevés à 5 millions d'euros en 2004, puis à 8 millions d'euros en 2005, ce qui a permis le financement d'une campagne de 5,7 millions d'euros sur les glucides.

L'Inpes bénéficiera, en 2006, d'un budget sensiblement équivalent à celui de 2005, soit 100 millions d'euros répartis comme suit : une dotation de l'Etat de 23 millions d'euros, une participation de l'assurance maladie de 61 millions d'euros, en nette augmentation, une ponction de 13 millions d'euros sur son fonds de roulement, enfin une participation de 3 millions d'euros de la CNSA pour le financement de la campagne d'information « Bien vieillir ». En 2007, il percevra également les recettes de la taxe sur les publicités vantant des produits caloriques. Par ailleurs, des crédits supplémentaires seront débloqués si une campagne spécifique sur la grippe aviaire est menée en 2006 par l'Inpes.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis du programme « Veille et sécurité sanitaires », a souhaité connaître la part du budget de l'Etat dans le financement des plans « Biotox » et « grippe aviaire », pour l'essentiel pris en charge par l'assurance maladie.

Il s'est inquiété du niveau de financement des plans « santé-environnement », « rage et canicule » en 2006 au regard de l'enveloppe prévue pour la lutte contre la grippe aviaire.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a confirmé qu'il n'y a pas d'abandon des autres priorités au profit du seul risque de grippe aviaire : des crédits sont prévus pour 2006 pour l'ensemble de ces plans, y compris le plan « Biotox » financé depuis 2001 par un fonds de concours. Le budget de l'Etat sera mis à contribution si les crédits prévus par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 pour la lutte contre la grippe aviaire s'avèrent insuffisants.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis du programme « Veille et sécurité sanitaires », s'est interrogé sur le mécanisme et le rendement attendu de la taxe additionnelle attribuée à l'Afssaps par l'article 87 du projet de loi de finances pour 2006.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a rappelé que la loi du 9 août 2004 de santé publique réforme les procédures d'autorisation en matière de recherches biomédicales. Désormais, les promoteurs de recherche doivent obtenir une autorisation de l'Afssaps ou du ministère de la santé, soumise au paiement d'une taxe. La loi de finances pour 2005 a déjà mis en place cette taxe pour les autorisations délivrées par l'Afssaps. Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit une unification du régime fiscal des autorisations en faisant de l'Afssaps le guichet unique du paiement de la taxe, sur ses propres autorisations mais aussi sur celles délivrées par le ministère ; c'est l'objet de son article 87. Le produit de cette taxe est ensuite versé au comité de protection des personnes, pour un montant escompté de 3 millions d'euros.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité et intégration », a observé que le projet de loi de finances pour 2006 soumet à des conditions plus strictes l'attribution de la CMU-C et de l'AME. Il a donc voulu savoir combien de personnes seront exclues de ces dispositifs du fait de cette sévérité accrue et connaître les prises en charges possibles en cas d'urgence sanitaire.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a assuré que les mesures prises par le Gouvernement concernant l'AME et la CMU-C n'ont pas pour objectif de réduire, coûte que coûte, le nombre de bénéficiaires de ces dispositifs.

S'agissant de la CMU-C, la modification des ressources prises en compte pour le bénéfice de la couverture maladie universelle (CMU) doit être appréhendée en lien avec l'effort consenti par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 concernant l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé. Compte tenu de l'effet de vase communicant entre les deux dispositifs, le Gouvernement a demandé une expertise plus fine sur le nombre de personnes susceptibles d'être touchées par ces changements de périmètre.

Concernant l'AME, les mesures prévues ne durcissent pas les conditions d'accès au dispositif et ne font, en réalité, qu'assurer l'effectivité des règles qui, depuis l'origine, sont censées le régir. Cet effort de contrôle va dans le sens de la responsabilité et, s'agissant d'une politique de solidarité, il est de l'intérêt même des bénéficiaires que l'Etat s'assure du bon usage des crédits ouverts. La condition de durée minimale de trois mois de présence sur le sol français nécessaire pour bénéficier de l'AME est indispensable pour éviter que des personnes abusent du dispositif et viennent en France uniquement pour s'y faire soigner. Par ailleurs, une circulaire du 16 mars 2005 fixé déjà les conditions de prise en charge des soins urgents.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité et intégration », a voulu connaître les paramètres qui ont présidé à l'établissement des prévisions de dépenses d'AAH et d'API, estimant que, malgré les réformes annoncées en faveur des titulaires de minima sociaux, les prévisions d'évolution du nombre de bénéficiaires sont peut-être trop optimistes. Il a également souhaité faire le point sur la situation des dettes de l'Etat à l'égard de la branche famille au titre de ces deux allocations.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées, a estimé les prévisions d'évolution du nombre de bénéficiaires de l'AAH et de l'API optimistes, mais non déraisonnables. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées prévoit de nombreuses dispositions pour favoriser leur emploi, qui entreront en vigueur, de façon échelonnée, au cours de l'année 2006. En outre, les travailleurs handicapés bénéficient déjà des mesures de droit commun en faveur de l'emploi prévues dans le cadre du plan de cohésion sociale. Un meilleur pilotage de la dépense est possible dans le cadre des maisons départementales des personnes handicapées, grâce notamment à une réduction des écarts de traitement sur l'ensemble du territoire.

Concernant l'API, un projet de loi en faveur du retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux sera déposé prochainement par le Gouvernement et la réforme de l'intéressement prévue dans ce cadre permet d'espérer une baisse sensible du nombre de bénéficiaires.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité et intégration », a souhaité connaître le coût de la réforme de la garantie de ressources des personnes accueillies en CAT. Il s'est également ému des divergences d'appréciation du niveau souhaitable de l'aide au poste en entreprise adaptée entre les responsables associatifs et le Gouvernement.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées, a expliqué que les gestionnaires d'entreprises adaptées ont demandé la fixation de l'aide au poste à hauteur de 12.500 euros par an, mais que ce chiffre n'a jamais été celui retenu par le Gouvernement. Cette aide au poste est finalement budgétée pour un montant de 11.877 euros, soit 80 % du Smic, ce qui représente une augmentation de 20 % de l'aide servie aux entreprises adaptées par rapport au système antérieur.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité et intégration », s'est enfin inquiété du financement de la sortie des dispositifs d'aides « Aubry I et II » pour les établissements médico-sociaux, estimant que la revalorisation de 1,5 % des financements qui leur sont attribués ne tient pas suffisamment compte de ce paramètre.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées, a rappelé que les établissements médico-sociaux ont été parmi les premiers à signer des accords de réduction du temps de travail, profitant alors d'un régime d'aides particulièrement avantageux, ce qui explique leurs difficultés actuelles. Un dispositif de soutien a été mis en place au sein du ministère, doté de 30 millions d'euros, afin d'aider les établissements les plus en difficulté. L'attribution d'une aide de l'Etat sera assortie d'une convention pluriannuelle prévoyant les mesures de gestion à mettre en oeuvre pour accompagner cette aide de l'Etat et assurer une sortie en bon ordre des dispositifs « Aubry ».

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité et intégration », a fait remarquer que 70 % des dépenses des établissements médico-sociaux sont des dépenses de personnel et que celles-ci sont tirées à la hausse par l'application de conventions collective pourtant agréées par l'Etat. Il a donc appelé ce dernier à prendre ses responsabilités en matière d'agrément des conventions collectives.

M. François Autain a souhaité obtenir des précisions sur le taux de progression du budget de la mission « Santé » en 2006 et sur les modalités de financement respectif du plan de lutte contre le sida par l'Etat et l'assurance maladie.

Il s'est inquiété de la faiblesse des sommes prévues en 2006 pour les plans « maladie d'Alzheimer », d'une part, et « soins palliatifs », d'autre part, et des risques liés à la fongibilité des enveloppes allouées aux différents plans de santé publique. Concernant les soins palliatifs, il a regretté l'insuffisance de leur nombre et a souhaité que le plan, qui arrive à échéance à la fin de l'année 2005, soit prolongé.

Il a enfin demandé quel sera le budget consacré à chaque agence de sécurité sanitaire au sein des 77 millions d'euros alloués par le programme « veille et sécurité sanitaires ». Il s'est inquiété, à cet égard, de la diminution de la subvention de l'Etat à l'Afssaps en 2006.

Mme Bernadette Dupont a témoigné de la difficile intégration des personnes handicapées en milieu de travail ordinaire. Elle a mis leurs difficultés sur le compte de leur faible qualification et a plaidé pour que le système de formation, initiale et continue, prenne en compte les besoins spécifiques des personnes handicapées. Elle a également attiré l'attention sur l'absolue nécessité d'un accompagnement dans l'entreprise pour les personnes handicapées psychiques.

Mme Raymonde Le Texier a souhaité connaître le nombre de bénéficiaires actuels de l'AME. Les nouvelles formalités imposées aux demandeurs d'AME les décourageront, à son sens, d'avoir recours à ce dispositif, ce qui produira des effets négatifs sur la santé publique.

M. Guy Fischer a fait part des inquiétudes des départements, quant au poids de la nouvelle prestation de compensation du handicap sur leurs finances, et de celles des associations de personnes handicapées, s'agissant du niveau de la prestation. Il a par ailleurs voulu savoir si les effectifs du ministère de la santé sont en hausse ou en recul par rapport à 2005 et connaître le montant des crédits prévus pour le financement du plan « santé et environnement ». Il a enfin souligné les difficultés d'accès aux soins des bénéficiaires de minima sociaux.

M. Nicolas About, président, a souhaité disposer d'un tableau récapitulatif des crédits destinés à chaque agence sanitaire, pour l'instant répartis entre les actions inscrites dans le projet de budget du programme « veille et sécurité sanitaires ».

En réponse à M. François Autain,M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a estimé que le taux de progression ne doit pas constituer le critère unique de jugement d'un budget, qui doit au contraire être lu en fonction des objectifs fixés et de l'efficacité des politiques menées.

L'ensemble des plans de santé publique bénéficieront d'une augmentation de leur enveloppe en 2006 : 852.140 euros pour les maladies rares (728.944 euros en 2005), 6,5 millions d'euros pour la santé mentale (5,2 millions en 2005), 3,2 millions d'euros pour la périnatalité (1,6 million en 2005), 730.000 euros pour la maladie d'Alzheimer et les maladies apparentées (314.000 euros en 2005). A cet égard, il a rappelé que le plan contre la maladie d'Alzheimer est applicable pour la période 2004-2007 et poursuit dix objectifs, dont la reconnaissance de la maladie comme affection de longue durée (ALD), permettant une simplification des formalités et de la prise en charge des malades. Il a souhaité que la poursuite de ce plan au-delà de 2007 soit envisagée, notamment pour améliorer le diagnostic précoce et l'accompagnement des familles. Les études et les recherches cliniques doivent être développées pour ralentir la progression de la maladie, qui touche déjà 850.000 personnes. Il a rappelé que le plan Alzheimer est en grande partie financé par l'assurance maladie, en particulier pour les structures d'accueil des malades.

Concernant le plan de lutte contre le sida, il a indiqué que les crédits sont reconduits à un niveau identique depuis 2002.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a annoncé que 8,7 millions d'euros supplémentaires seront attribués chaque année jusqu'en 2007 pour le développement des soins palliatifs et l'amélioration de l'information des familles.

Il a enfin précisé le montant de la subvention de l'Etat aux différentes agences sanitaires pour 2006 : 16,4 millions d'euros à l'Afssaps, 40,7 millions d'euros à l'Institut de veille sanitaire (InVS), 9,9 millions d'euros à l'Agence de biomédecine, 6,1 millions d'euros à l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et 4,2 millions d'euros à l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset).

Abordant ensuite la question de l'insertion professionnelle des personnes handicapées, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées, a souligné que la loi du 11 février 2005 renforce les obligations de tous les employeurs, publics comme privés, ainsi que les sanctions applicables aux employeurs qui ne respectent pas l'esprit et la lettre de la loi. Ces mesures sont particulièrement importantes dans un contexte où les personnes handicapées connaissent un taux de chômage trois fois supérieur à la moyenne et où le fait d'annoncer son handicap diminue dans une proportion de 1 à 15 les chances d'obtenir un entretien d'embauche.

La même loi met l'accent sur la scolarisation des enfants handicapés : à ce titre, le budget de l'éducation nationale pour 2006 prévoit la création de 800 postes supplémentaires d'auxiliaires de vie scolaire et de 200 nouvelles unités pédagogiques d'intégration (UPI). Il est par ailleurs nécessaire de mobiliser la formation professionnelle de droit commun en faveur des personnes handicapées qui sortent du système scolaire sans qualification.

Il a également reconnu les difficultés soulevées par la prise en charge ambulatoire des personnes handicapées psychiques. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 prévoit le financement de groupes d'entraide mutuelle et de 1.500 places spécifiques en services d'accompagnement médico-social pour personnes adultes handicapées (SAMSAH) en faveur de ce public particulier.

M. Nicolas About, président, a rappelé la concession faite par la commission en acceptant la création d'un fonds distinct en faveur de l'insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique au lieu d'un simple élargissement des missions de l'association pour la gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées (Agefiph). Il a insisté sur la nécessité, pour le fonds de la fonction publique, de faire rapidement ses preuves, faute de quoi la commission serait fondée à demander une fusion des deux fonds.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées, a dit comprendre les inquiétudes des départements concernant le financement et la montée en charge de la prestation de compensation du handicap, rappelant qu'ils ont été considérablement échaudés par l'expérience de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Il a toutefois insisté sur le fait qu'à la différence de l'APA, la prestation de compensation du handicap est financée : outre les 580 millions d'euros jusqu'ici consacrés par les départements à l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP), la nouvelle prestation sera complétée par des crédits de la CNSA à hauteur de 500 millions d'euros, sans compter les crédits qui, auparavant, finançaient les sites pour la vie autonome (SVA) et sont également maintenus. Les dépenses de prestation de compensation seront moins dynamiques que celles de l'APA qui subissent de plein fouet les effets du vieillissement de la population et le nombre de bénéficiaires de la prestation de compensation sera sensiblement le même que celui des bénéficiaires de l'ACTP, au correctif près que la condition de ressources de la nouvelle prestation est plus favorable.

M. Alain Vasselle s'est insurgé contre les mesures brutales de réduction des heures d'aide ménagère payées par les caisses régionales d'assurance maladie et par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV).

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a précisé que le nombre des bénéficiaires de l'AME s'élevait à 170.184 au 30 juin 2005. Les modalités de contrôle des conditions d'accès à ce dispositif ont été élaborées en concertation avec les associations, afin de fixer des obligations réalistes. La rationalisation des dépenses d'AME permettra d'ouvrir aux bénéficiaires l'accès aux soins de ville.

S'agissant de l'effectif du ministère, le ministre a expliqué que celui-ci diminue de soixante équivalents temps plein, mais que la réduction du taux de vacance compense totalement cette baisse.

Il a enfin indiqué qu'il était intervenu auprès de la CNAV pour mettre fin aux réductions injustifiées des heures d'aide ménagère attribuées aux personnes âgées. Cette politique des caisses est d'autant plus scandaleuse que leurs crédits d'action sociale ont été revus à la hausse.