Mercredi 6 octobre 2021

- Présidence de Madame Françoise Gatel, présidente -

La réunion est ouverte à 17 h 00.

Audition de M. Christophe MIRMAND, préfet, président de l'Association du Corps préfectoral et des Hauts Fonctionnaires du ministère de l'Intérieur

Mme Françoise Gatel, présidente. - Monsieur le Préfet, je suis très heureuse de vous accueillir au nom de la délégation. Cette audition s'inscrit dans la continuité de deux précédentes auditions que nous avons menées en juin : celle de votre ancienne collègue en Bretagne, Bernadette Malgorn, et celle du président de la 4e chambre de la Cour des comptes, qui est en charge du suivi des services déconcentrés de l'État.

Notre audition cet après-midi est destinée à nourrir la mission d'information, initiée par la délégation, sur les services déconcentrés et préfectoraux, conduite par nos deux collègues, Agnès Canayer, sénatrice de la Seine-Maritime, et Eric Kerrouche, sénateur des Landes. Chaque élu local sait que les réformes sur l'administration déconcentrée n'ont pas manqué et qu'il s'agit d'un perpétuel mouvement. Un débat est en cours sur la fonction publique d'État. Une réalité a été révélée plus que jamais par la crise sanitaire : l'importance d'une bonne articulation entre l'État et les collectivités, et nos territoires, dans toute leur diversité, ont besoin d'une administration d'État, comme l'État a besoin d'assurer sa présence sur ces territoires. La succession de réformes de l'administration traduit sans doute le caractère imparfait de ces réformes et leur résultat incertain. C'est pour cette raison, Monsieur le Préfet, que votre éclairage est particulièrement attendu, puisque vous avez vécu ces mouvements de l'intérieur. Vous avez occupé des responsabilités extrêmement variées. Celles-ci vous permettent d'avoir une vue d'ensemble des services déconcentrés. Je rappelle que vous avez été secrétaire général de préfecture, préfet, directeur de la modernisation de l'administration territoriale, secrétaire général du ministère de l'Intérieur et enfin préfet de région. Vous avez donc successivement été un inspirateur, un moteur et un acteur de ces repositionnements. Nous serons extrêmement intéressés d'entendre, dans un premier temps, le bilan que vous dressez de ces réformes, en particulier s'agissant de la relation entre l'administration déconcentrée et les collectivités territoriales, sujet au coeur des préoccupations du Sénat, qui est la Chambre des territoires, et dont nous avons longuement parlé dans le cadre récent du projet de loi 4 D. Nous aimerions connaître votre analyse du rôle du préfet aujourd'hui dans les territoires. Nous avons beaucoup parlé, suite à la crise sanitaire, du préfet de région, du préfet de département, mais aussi des sous-préfets, qui jouent dans les territoires un rôle irremplaçable de proximité de l'État. Pensez-vous que nous soyons parvenus à un point d'équilibre satisfaisant ? Nous aimerions aussi nous projeter dans l'avenir et identifier les facteurs clés de réussite, ainsi que des éléments factuels, qui permettent d'envisager une réforme de l'administration d'État territoriale performante et efficace. L'objectif que nous poursuivons au Sénat, qui est également le vôtre, est l'efficacité de l'action publique jusqu'au dernier kilomètre, dans une relation parfaitement articulée entre l'État et les collectivités. Naturellement, nous écouterons avec beaucoup d'attention votre parole sur la suppression annoncée du corps préfectoral. Vous nous expliquerez sans doute comment l'association du Corps préfectoral et des Hauts Fonctionnaires du ministère de l'Intérieur aborde cette question, qui pourrait aller jusqu'à faire changer la dénomination de votre association.

Au final, ce sujet passionne les élus locaux, en ceci qu'ils attendent de l'efficacité. Ils ont beaucoup d'exigences vis-à-vis de l'État, ce qui est aussi l'expression de la confiance qu'ils ont dans le rôle de l'État et de leurs attentes à l'égard de l'indispensable efficacité d'un binôme État-collectivités. Les questions seront certainement fournies. J'en poserai deux, puis laisserai la parole à mon collègue premier vice-président, Rémy Pointereau, avant de la passer à nos deux collègues rapporteurs. Vous savez que le Sénat a émis en juillet dernier, à l'initiative du Président du Sénat, Gérard Larcher, 50 propositions pour le plein exercice des libertés locales. Il ne s'agit en aucun cas d'émettre une envie d'autonomie ou de séparatisme des collectivités locales. Ces propositions revendiquent la nécessité de dispositifs différenciés et déconcentrés. Nous avons souhaité remettre au coeur de l'action territoriale de l'État le préfet de département. Ce niveau est en effet extrêmement important, eu égard à la taille de certaines régions. Ma question est double sur ce sujet : comment faire en sorte que le préfet de département puisse exercer de façon efficace sa mission ? Faut-il des moyens supplémentaires ? Faut-il une articulation différente ? Je pense notamment à l'articulation entre le préfet de département et les services de l'État qui sont organisés au plan régional, comme les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) ou les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL). Enfin, que pensez-vous de l'idée évoquée par le Sénat de placer l'ensemble de l'État territorial sous l'autorité du préfet de département et de région, y compris des services qui y échappent aujourd'hui, notamment les autorités régionales de santé (ARS), les directions régionales des finances publiques (DRFIP) et le Rectorat d'académie ? Par analogie, peut-on imaginer un gouvernement dans lequel le Premier ministre n'aurait pas sous son autorité Bercy, le ministère de l'éducation nationale et le ministère de la santé ?

Je vous renouvelle tous mes remerciements et passe la parole au premier vice-président, Rémy Pointereau, qui complètera ces questions, puis à nos deux rapporteurs.

M. Rémy Pointereau, premier vice-président. - Monsieur le Préfet, Madame la Présidente et mes chers collègues, après les nombreuses questions de ma collègue, je voudrais en poser trois questions supplémentaires. Les services déconcentrés de l'État ont bien sûr besoin d'une administration agile. Pour une meilleure efficacité et une plus grande simplification, il nous faut une gouvernance qui soit plus horizontale. L'une des innovations marquantes de ces dernières années réside dans la création de directions départementales interministérielles (DDI), placées sous l'autorité du préfet et censées améliorer le travail en transversalité des services de l'État. Quel bilan tirez-vous de cette création, du point de vue de la cohérence et de l'unicité de la parole de l'État face aux collectivités territoriales ? Le mouvement « d'agencisation » des politiques publiques ne vient-il pas contrarier cet objectif de cohérence et d'unicité ? Par ailleurs, au regard de l'État territorial, quelles ont été les conséquences les plus notables de la fusion de certaines régions ? L'État s'est-il bien adapté à cette nouvelle donne ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Monsieur le Préfet, nous aurions besoin que vous précisiez un certain nombre de leviers dont disposent aujourd'hui les préfets afin d'appliquer les politiques publiques aux spécificités des territoires. J'interviendrai sur deux sujets particuliers. Le premier concerne le contrôle de légalité. Les services préfectoraux appliquent une stratégie accordant une priorité à certaines matières, notamment les documents budgétaires, la commande publique ou l'urbanisme. Pour moderniser cet accompagnement des collectivités, ne serait-il pas utile de travailler à l'évolution de ce contrôle vers une logique de conseil juridique intervenant plus en amont des décisions et des délibérations, dans un souci d'économie de temps et de véritable partenariat avec les élus locaux ? Le second sujet, récurrent dans les conversations que nous avons avec les élus locaux, est celui de l'assistance en ingénierie territoriale. La disparition de l'assistance technique de l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (ATESAT) a été mal perçue par les élus locaux, qui ont considéré, notamment dans les petites communes, qu'ils perdaient un acteur clé dans le montage de leurs projets. Des départements ont tenté de prendre cette place, en offrant une aide aux communes qui se sentaient délaissées. L'État, de son côté, a mis en place une solution alternative dite de « Nouveau conseil aux territoires ». Pensez-vous, Monsieur le Préfet, que celle-ci répondent aux attentes ? Quel retour avez-vous sur ce nouvel accompagnement des collectivités territoriales, notamment dans votre région ? Je vous remercie.

M. Éric Kerrouche, rapporteur. -Monsieur le Préfet, depuis la loi du 28 pluviôse an VIII, le rôle du préfet est tout à fait particulier au sein de la République française. Cette loi risque d'être remise en cause, au vu des dernières annonces qui concernent la possible fonctionnalisation du rôle de préfet et la disparition du corps préfectoral en tant que tel. De nombreuses évolutions ont vu le jour au fil des siècles, eu égard aux fonctions des préfets. Nous nous étions contentés, en 1982, de le renommer brièvement en commissaire de la République, mais le titre de préfet était revenu, faisant écho à l'importance que conservait la fonction sur le territoire. Désormais, il existe un risque de remise en cause. Les équilibres ont en outre été redéfinis entre le rôle du préfet de département et du préfet de région, qui s'est affirmé depuis 1964, et en conséquence de la transformation des collectivités et l'affirmation de structures de plus en plus fortes, notamment les métropoles.

Comment voyez-vous se redessiner cet équilibre à travers les différents rôles joués au sein du corps préfectoral (préfet d'arrondissement, de département, de région) ? Depuis la décentralisation, une vision consiste à considérer que le préfet est un ensemblier et un généraliste de l'administration locale. Pensez-vous avoir toujours, d'une part, les moyens et, d'autre part, les capacités matérielles et humaines pour jouer ce rôle dans les territoires ? Nous attendons beaucoup de l'intégration locale, réalisée sous l'autorité du préfet, d'une administration caractérisée par un fonctionnement en silos, grâce notamment à des évolutions récentes comme la création des DDI. Les services pourraient avoir tendance à s'autonomiser par rapport au préfet, et l'agencification de l'État conduit à mettre à mal localement l'autorité du préfet. S'agissant de l'incarnation territoriale, quid de l'avenir des sous-préfets, qu'ils soient thématiques ou territoriaux, avec une carte des arrondissements qui n'a pas été revisitée depuis 1926, alors même que les évolutions démographiques ont été importantes ?

Vous l'avez compris, Monsieur le Préfet, nous souhaitons savoir comment faire en sorte que la proximité de l'État, hors du discours, demeure une réalité tangible aussi bien pour l'État que pour les élus locaux. Je vous remercie.

M. Christophe Mirmand, préfet, président de l'Association du Corps préfectoral et des Hauts Fonctionnaires du ministère de l'Intérieur. - Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Sénatrices et Sénateurs, je voudrais tout d'abord vous remercier de m'accueillir pour cette audition sur des sujets qui touchent à la fois au corps préfectoral et à ses relations avec les collectivités territoriales, et plus largement à l'organisation de l'administration territoriale, dans une période de changements, avec des perspectives de suppression du corps préfectoral, en tout cas sur le plan statutaire.

Comme vous l'avez rappelé, le corps préfectoral est une institution ancienne, qui a toujours été maintenue par les régimes qui se sont succédés, la représentation de l'État au plan territorial et l'administration départementale demeurant sa mission principale jusqu'à la décentralisation, avec d'autres compétences et attributions, notamment des missions régaliennes tenant à la sécurité et à la charge de représenter le gouvernement, tous ministères confondus, y compris pour la partie des administrations déconcentrées échappant à son autorité hiérarchique. Je pense notamment aux services des finances publiques, aux services académiques ou aux militaires, qui ne sont pas placés sous l'autorité du préfet, sauf quand une réquisition intervient dans les cas de crise. Cette permanence des missions s'inscrit néanmoins dans des cadres qui ont été modifiés au fil des années. Les modifications les plus récentes sont celles intervenues depuis le début des années 2000 en ce qui concerne la réorganisation des services de l'État : révision générale des politiques publiques (RGPP), modernisation de l'action publique (MAP), Réforme de l'administration territoriale de l'État (RéATE), qui ont mis en place une nouvelle articulation de ces services. Depuis la modification du décret de 2004 par le décret du 17 février 2010, l'autorité des préfets de région sur les préfets de département a sans doute fait évoluer l'équilibre des relations entre ces deux niveaux d'administration locale. Je note que vous n'avez pas évoqué dans vos propos le rôle que joue le préfet de zone en matière de gestion de crise, et qui lui aussi évolue, dans le sens d'un élargissement de ses attributions en matière de coordination. Cette évolution concerne y compris la mise en oeuvre des politiques publiques, qui en théorie ne relève pas de sa responsabilité, en particulier en matière de lutte contre l'immigration, où sa fonction est amenée à prendre de l'importance compte tenu de la capacité des préfets de zone à travailler sur des espaces frontaliers importants, mais également dans la profondeur des territoires, compte tenu de la taille de la plupart des zones de défense et de sécurité.

Aujourd'hui, cette organisation de l'administration préfectorale est articulée principalement sur ce pivot qu'est le préfet de département, dans sa relation avec les départements et le préfet de région. Cette relation a été modifiée par le décret de 2010, qui a créé une forme d'autorité hiérarchique du préfet de région sur le préfet de département. À cette époque, la réorganisation de l'administration territoriale était déployée, avec pour objectif principal de créer ces DDI, dont vous avez rappelé le caractère transversal. Certains ministères avaient exprimé une crainte relative au fait que la cohérence de l'action publique soit diluée dans cette interministérialité de l'organisation des services déconcentrés, et que chaque préfet adapte à sa main les politiques publiques pour les décliner au niveau local. Pour éviter ce risque et rassurer la communauté interministérielle, le Premier ministre a décidé de mettre en place un principe d'autorité hiérarchique des préfets de région sur les préfets de département. Le premier ne participe toutefois pas à la nomination des seconds, mais est amené à les évaluer, notamment au titre de la fixation de leur régime indemnitaire. Cette autorité qui avait été instituée dans le décret de 2010 avait pour objectif de garantir, par les instructions que donne le préfet de région au préfet de département, la cohérence de la mise en oeuvre d'une politique publique à l'échelle d'une région, pour éviter, comme dans certains territoires, la situation de préfets de département délivrant des autorisations au titre des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), alors même que les politiques mises en oeuvre au niveau régional commandaient que ces installations soient plutôt réduites. Pour assurer cette cohérence, il a été prévu que le préfet de région puisse donner des instructions au préfet de département voire, le cas échéant, attraire à son niveau certaines des attributions des préfets de département pour les assumer au niveau régional. Depuis 2010, rares ont été les cas de mise en oeuvre de ces dispositions. La plupart du temps, le rapport collégial du préfet de région avec les préfets de département permet de garantir cette cohérence des politiques publiques et d'éviter que de telles discordances ne justifient que des instructions soient données. Néanmoins, dans les faits, ce nouveau fonctionnement de l'État territorial est inscrit dans les habitudes. Le rythme des comités de l'administration régionale (CAR), qui est en général mensuel, permet aux préfets de région, avec les préfets de département et les chefs de services déconcentrés de l'État, de partager les enjeux de la mise en oeuvre des politiques publiques au niveau local. De fait, cette collégialité fonctionne dans des conditions satisfaisantes et garantit la bonne cohérence des politiques publiques, le préfet étant, aussi bien au niveau départemental que régional, à la charnière de la verticalité des politiques ministérielle et de l'horizontalité des territoires. Le rôle des préfets de région est donc, au-delà de leur rôle d'arbitre dans la répartition des moyens de l'État, de veiller au respect de cette cohérence. Il s'agit de l'une des innovations majeures de la réorganisation de l'administration territoriales de l'État (RéATE), qui perdure et s'est déployée sans difficulté particulière.

Vous évoquiez en outre l'organisation territoriale de l'État. Depuis la RéATE, l'organisation est théoriquement interministérielle au niveau départemental, et ministérielle au niveau régional. Ce schéma, issu des travaux consécutifs à la RGPP et mis en oeuvre entre 2008 et 2010 au titre de la RéATE, a été légèrement déformé par une interministérialisation de fait des directions régionales. Ce nouvel équilibre modifie le rôle des préfectures. Avant ces réformes, les préfets de département et de région incarnaient cette interministérialité au niveau territorial. Désormais, elle est assumée par l'organisation des services déconcentrés de l'État, au niveau départemental comme régional. Plus que jamais, le rôle des préfets, au niveau départemental et plus encore au niveau régional, est de faire vivre cette interministérialité dans un double rapport vertical (vers les ministères) et horizontal (vers les territoires). Cette organisation souple permet à l'État territorial d'assumer les responsabilités qui sont les siennes, en donnant plus d'agilité que l'organisation antérieure, strictement ministérielle.

En ce qui concerne la gestion des moyens de l'État, entre 2010 et 2019, le Premier ministre assumait le pilotage des DDI. Les tensions qui avaient entouré la mise en oeuvre de cette organisation se sont néanmoins apaisées. Ce fonctionnement fluide a permis au Premier ministre, en novembre 2019, de décider de confier au ministère de l'Intérieur la responsabilité de l'administration territoriale et de compléter cette évolution interministérielle par des moyens budgétaires et de gestion des effectifs des DDI. Une des grandes difficultés auxquelles les préfets et les chefs de services déconcentrés de l'État étaient confrontés résidait dans la compartimentation des moyens sur des programmes ministériels qui interdisaient de facto, dans une direction constituée de fonctionnaires venant de plusieurs ministères, de pouvoir faire évoluer un agent de catégorie C d'une fonction de secrétariat vers une autre attribution, lorsque celui-ci relevait de deux ministères différents. Le Premier ministre, en lien avec l'ensemble des ministères, a ainsi décidé de simplifier cette architecture, de confier au ministère de l'Intérieur la gestion de l'administration territoriale et de créer un programme nouveau, le programme 364, sur lequel est gérée aujourd'hui la plus grande masse des moyens de l'État territorial au niveau départemental et régional. Ce programme étant confié au ministère de l'Intérieur, les effectifs des DDI, emplois fonctionnels compris, ont été transférés en 2020 à ce dernier. Cette gestion se fait aujourd'hui en bonne harmonie avec les ministères, dans des conditions qui semblent garantir une plus grande agilité au niveau local. En 2021, une réforme supplémentaire est intervenue, avec la mise en place de secrétariats généraux communs (SGC), dans l'objectif de rechercher des économies dégagées par la mutualisation de structures de gestion au niveau départemental. Ils ont été installés à compter du 1er janvier 2021. L'organisation territoriale continue d'évoluer de façon classique, avec la création récente de directions régionales des entreprises, de l'emploi, du travail et de la solidarité (DREETS), ce qui a impliqué la révision de certaines DDI et la fusion de directions régionales, comme les directions régionales de la jeunesse, de la santé et de la cohésion sociale (DRJSCS) et les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE). La mise en oeuvre de cette organisation est désormais effective.

Vous évoquiez en outre la question des agences. Nous avons effectivement constaté depuis quelques années une accélération de cette forme de filialisation de l'État territorial. Des organisations comme l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), les ARS ou l'Office de la biodiversité traduisent une évolution qui entend donner à certaines politiques publiques un cadre de mise en oeuvre différent, organiquement distinct des services territoriaux de l'État, avec pour certaines d'entre elles une autorité fonctionnelle plus ou moins affirmée et des relations parfois plus distendues, qui amènent à se poser la question de la cohérence de l'action de l'État, à la fois en termes d'affichage des politiques publiques, de lisibilité du rôle des opérateurs au regard des politiques ministérielles et de cohérence par rapport à l'action qui peut être menée au niveau territorial par les préfets de département ou de région. Une réflexion est ainsi en cours, qui viserait à affirmer de façon plus forte l'autorité fonctionnelle des préfets lorsque ces agences sont amenées à intervenir au niveau départemental ou régional, afin de rendre cette cohérence plus lisible pour les services de l'État et pour ses partenaires. Il semble en effet souhaitable d'affirmer, par une politique de communication et des logos mais également par cette autorité fonctionnelle, que l'État doit être cohérent dans toutes ses composantes.

Dans les relations avec les services centraux, les moyens technologiques ont offert l'occasion à un certain nombre d'administrations de reprendre à leur niveau la mise en oeuvre de certaines politiques publiques et de privilégier des formes d'action passant par des appels à manifestation d'intérêt ou des appels à projets nationaux qui ne sont plus instruits ni décidés au niveau local. Il s'agit d'être vigilant, pour que cette forme d'intervention ne prenne pas un caractère systématique. Cette action doit privilégier la décision et la mise en oeuvre au niveau local, dans un cadre dont la cohérence est garantie par le préfet de région, mais avec le contrôle, l'évaluation et la définition des stratégies au niveau national.

Vous m'avez également interrogé sur le rôle des sous-préfets. Il me semble qu'il s'agit d'un élément d'efficacité de l'État et de sa capacité à s'adresser à ses partenaires, dans la profondeur des territoires, à commencer par les collectivités territoriales, à l'avenir desquelles il importe de veiller. Les sous-préfets d'arrondissement correspondent à une réduction du rôle de la préfecture à l'échelle de l'arrondissement, et les 240 arrondissements au niveau national maillent un territoire dont la carte n'a pas évolué depuis la réforme Poincaré en 1926, qui a été complétée par la création d'arrondissements urbains ou périurbains. Ce périmètre peut être modifié à la main des préfets de région pour tenir compte de la carte des intercommunalités. Ces arrondissements sont aujourd'hui indispensables, bien que les moyens qui leur sont confiés soient très limités, sauf pour les sous-préfectures très importantes. Le sous-préfet, quant à lui, a la responsabilité de dénouer la complexité des politiques publiques et d'incarner la profondeur de l'État dans les territoires. Ce rôle doit être maintenu.

Depuis le début des années 2000, tous les services de l'État ont été confrontés à la difficulté de la réduction de leurs moyens, qui peut être estimée entre 25 et 30 %, avec non pas une suppression significative du nombre de missions, mais une évolution des conditions dans lesquelles elles sont remplies. Le numérique et l'efficience plus importante des systèmes d'information ont certainement permis de compenser, dans une certaine mesure, les diminutions d'effectif. Les services de l'État ont une préoccupation constante de maintien d'une capacité d'expertise au niveau territorial pour accompagner les projets des collectivités locales. Cette fonction de conseil auprès des élus est essentielle et difficile à quantifier, puisqu'elle n'est pas dévolue à un service particulier mais largement mise en oeuvre au quotidien par les préfets, sous-préfets et services de l'État.

Vous me posiez la question, Madame la Sénatrice, de la disparition de l'ATESAT. Celle-ci correspondait d'abord à des missions de maîtrise d'oeuvre qui peuvent être assez aisément externalisées par les communes auprès d'un certain nombre de prestataires privés, si elles n'ont pas été assumées par des agences départementales, comme l'ont fait certains départements. Le rôle de l'agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) est aussi d'accompagner les collectivités dans des projets complexes. Enfin, cette contrainte a été rendue nécessaire par l'amoindrissement des moyens de l'État. Nous n'avons pas, au niveau départemental, la capacité de poursuivre des missions d'assistance technique en maîtrise d'oeuvre compte tenu de l'attrition des moyens. En revanche, la fonction de conseil et d'appui se poursuit sur les sujets complexes. C'est pourquoi les préfets et sous-préfets ont un rôle à jouer, en partenariat étroit avec les maires et les conseils départementaux et régionaux.

Vous m'avez en outre interrogé sur le contrôle de légalité. Celui-ci correspond à la faculté confiée à tout citoyen qui a intérêt à agir, à titre individuel ou collectif, de former un recours contre une délibération après avoir, le cas échéant, formé un recours gracieux contre les décisions prises par une collectivité. La transmission de la délibération à la préfecture permet sa mise en oeuvre effective. Le préfet dispose ensuite d'un délai de deux mois pour réaliser le contrôle de légalité correspondant et, le cas échéant, saisir le tribunal administratif. Dans l'organisation des préfectures, cette fonction n'occupe pas un grand nombre de fonctionnaires (de l'ordre de 4 % des effectifs en ce qui concerne les Bouches-du-Rhône). Pour autant, la fonction de conseil n'est pas réduite à ces effectifs, ce conseil étant mis en oeuvre à tous les niveaux.

Le rôle du préfet de zone est également important, même s'il se déploie sur des zones territoriales très vastes, qui lui donnent une responsabilité en matière de répartition des moyens qui sont délégués en appui au préfet de département. Ils ne donnent pas de responsabilité particulière au préfet de zone en matière de pilotage des crises, sauf lorsque celles-ci excèdent, par leur ampleur, la responsabilité d'un préfet de département. Le préfet de zone a, depuis quelques années, une responsabilité de coordination générale en matière de politique migratoire. En effet, le ministre de l'Intérieur lui demande aujourd'hui d'assurer une régulation des placements dans les centres de rétention administrative (CRA) pour optimiser les conditions d'occupation de ces structures.

S'agissant de l'avenir et de la relation du corps préfectoral avec les territoires, depuis 1800, l'institution préfectorale a toujours conservé des fonctions de représentation et d'incarnation de l'État au niveau territorial, le préfet étant le seul fonctionnaire dont les missions sont définies dans la Constitution. Ces fonctions ont vocation à perdurer, de même que cette relation singulière avec les élus locaux et les collectivités territoriales, qui participent de l'efficacité de la mise en oeuvre des politiques publiques.

En termes de points d'attention, vous m'avez interrogé sur la mise en oeuvre d'un principe d'autorité hiérarchique, en particulier sur des directions ou services de l'État qui ne sont pas placés sous l'autorité directe du préfet, comme les directeurs départementaux ou régionaux des finances publiques ou les recteurs et directeurs académiques. Cette question peut être soulevée par souci de cohérence de l'État territorial. Un principe doit à mon sens être rappelé : l'unicité du commandement de l'État territorial, comme de l'État national, en situation de crise. Celle-ci doit être fermement réaffirmée dans la mise en oeuvre des moyens confiés aux préfets au niveau départemental puis zonal, et également dans le principe de déconcentration. La tentation peut être grande, du fait des possibilités offertes par les systèmes d'information, de piloter la crise depuis le niveau national. Le pilotage opérationnel de la crise doit en l'occurrence être au plus près du lieu où elle se produit, soit le niveau départemental. Cette responsabilité doit demeurer celle du préfet et de l'autorité civile qui a la responsabilité de la direction des forces de l'ordre. Il semble important d'en faire un principe intangible de l'organisation de l'administration déconcentrée.

Enfin, des perspectives de réforme du corps préfectoral se font jour. Cette institution est relativement récente, puisque si la fonction préfectorale est plus que bicentenaire, les corps n'existent que depuis l'immédiat après-guerre. Cette réforme vise à supprimer la notion de corps, au sens statutaire, tout en maintenant les fonctions de représentant de l'État incarnées par le préfet ou le sous-préfet. Cela n'emporte d'ailleurs pas nécessairement de modification du nom de l'association. Il importera de garantir deux éléments. D'abord, il s'agira de garantir le professionnalisme des sous-préfets et des préfets amenés à exercer ces fonctions sur le territoire, ce qui suppose de veiller, dans l'organisation des carrières, à garantir l'acquisition d'un savoir-faire relatif à l'entretien des relations avec l'ensemble des partenaires locaux. Cette acclimatation à l'administration territoriale n'est pas antagoniste de la diversité des recrutements. De tous les corps de la haute fonction publique, le corps préfectoral est ainsi peut-être le plus accueillant, puisque le recrutement par l'ENA est largement minoritaire. La majorité du corps est aujourd'hui recrutée par détachement ou par intégration de fonctionnaires venant d'autres horizons ministériels et d'autres fonctions publiques, voire de personnes qui ne sont pas originaires de la sphère publique. Par ailleurs, l'association a exprimé la préoccupation d'une animation qui soit encore assurée par le ministère de l'Intérieur, considérant que cette dualité de missions incombant au corps préfectoral (être le représentant de l'État et du gouvernement d'une part, et être l'incarnation de l'interministérialité de l'État au niveau territorial et celui qui détient l'autorité civile sur les services chargés de la sécurité de nos concitoyens d'autre part) doit être garantie, quelle que soit la nouvelle organisation. Le ministère de l'Intérieur, qui a la double responsabilité d'être le ministère des sécurités et de l'administration territoriale, doit garantir le maintien de cette dualité.

Cette réforme importante ne doit pas altérer les principes sur lesquels a été construite cette incarnation symbolique du rôle du préfet pour dialoguer avec les acteurs au niveau local et de cette continuité de l'action publique au niveau territorial. Les préfets et les sous-préfets n'ont ni droit de grève, ni droit syndical et sont soumis à une stricte obligation de loyauté, donc à un devoir de réserve renforcé. Tous ces éléments doivent se retrouver dans le futur statut d'emploi, dont l'élaboration est actuellement en cours entre le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Fonction publique.

Mme Françoise Gatel, présidente. - Merci beaucoup, Monsieur le Préfet, pour la qualité et la précision de vos réponses. Je passe la parole à mon collègue, Pascal Martin, sénateur de la Seine-Maritime.

M. Pascal Martin. - Ma question concerne le fonctionnement, après plus de 25 ans, des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) suite aux lois de départementalisation votées dans les années 90. Ceux-ci sont des établissements publics administratifs départementaux placés sous une double autorité : d'une part une partie fonctionnelle, administrative et financière sous l'autorité du président du conseil départemental et d'autre part la partie opérationnelle, placée sous l'autorité du préfet du département concerné. Quel bilan tirez-vous de cette organisation atypique, qui contredit le principe général « qui paie commande » ? En matière de sécurité civile, le principe général consiste à confier au maire la direction des opérations de secours sur son territoire. Le préfet du département devient le directeur des opérations de secours lorsque le sinistre dépasse les limites d'une seule commune. Au quotidien, dans le fonctionnement de l'établissement public, le schéma départemental d'analyse et de couverture des risques (SDACR), arrêté par le préfet du département, consiste à analyser dans le temps l'évolution des risques du département et d'y appliquer une couverture de moyens humains, matériels et de casernes adéquate. Ce document est présenté au conseil d'administration du SDIS, ses conséquences sont non seulement opérationnelles, mais également budgétaires et financières. Je souhaitais connaître votre sentiment sur le fonctionnement de ces SDIS.

Un exemple a fait couler beaucoup d'encre ces derniers mois : la politique de défense extérieure contre l'incendie (DECI). Un arrêté ministériel fixe la doctrine générale, qui est ensuite déclinée par arrêté départemental. Il existe aujourd'hui une certaine incohérence dans le fonctionnement des SDIS, dont le financement est assuré pour l'essentiel par la contribution des départements et par les cotisations communales et intercommunales. L'État ne finance plus les SDIS. Au regard de votre expérience, voyez-vous des évolutions à apporter au fonctionnement des SDIS ?

M. Christophe Mirmand. - Merci, Monsieur le Sénateur, pour votre question qui est importante. Les SDIS reposent sur un mode d'organisation singulier, qui voit les collectivités territoriales jouer un rôle majeur depuis la départementalisation des corps de sapeurs-pompiers. L'organisation confie la gestion, l'administration, l'équipement et l'investissement aux collectivités, tandis que l'État assume la responsabilité de directeur des opérations de secours. Je ne voudrais pas laisser penser que l'État ne participe pas à la sécurité de nos concitoyens. Les moyens nationaux de la sécurité civile sont engagés pour le bénéfice des territoires, y compris pour la lutte contre les incendies, lorsque la solidarité le nécessite. Ces moyens conséquents permettent d'appuyer significativement l'efficacité de l'action conduite au niveau du terrain par les sapeurs-pompiers.

Je ne suis pas certain que ce système doive évoluer. Il me semble important d'éviter la confusion des responsabilités. S'il n'y a pas de confusion de cette nature et si le rôle de chacun est respecté, avec un travail conjoint entre le président du conseil d'administration du SDIS et le préfet, pour suivre les affaires de l'établissement public ou encore adopter le SDACR dans des conditions de complémentarité d'intervention et de contraintes d'investissement et d'armement, il n'y a, selon moi, pas de difficulté systémique qui nous amènerait à reconsidérer cette situation. Il importe de continuer d'oeuvrer dans une logique d'économie de moyens entre l'État et les collectivités territoriales. Le couple que forment le maire et le préfet se décline à d'autres niveaux de collectivités territoriales, et ce rôle d'ensemblier du préfet participe de l'efficacité de l'action collective au niveau local.

M. Laurent Somon. - Monsieur le Préfet, merci pour cet exposé très clair. Je souhaiterais revenir sur le principe de l'autorité hiérarchique fonctionnelle, par rapport aux préfets de département et aux services de l'État déconcentrés qui sont gérés par des agences. Comme vous l'avez indiqué, il ne doit pas y avoir de distorsion, notamment en période de crise. Pour autant, cela devrait aussi être le cas en période ordinaire, où malgré tout se font jour des difficultés avec un certain nombre d'organismes. Si la possibilité de différenciations voire d'expérimentations est actée, comment les préfets de département pourront-ils les mettre en oeuvre s'ils ne disposent pas de l'autorité hiérarchique et fonctionnelle vis-à-vis de ces agences ?

Mme Patricia Schillinger. - Avez-vous connaissance du nombre de préfets en attente de mutation ? Par ailleurs, pendant la période de la crise sanitaire, dans les régions frontalières, les préfets avaient beaucoup de peine à travailler avec les pays frontaliers. Dans le Haut-Rhin, lors d'une déclaration de fermeture de douane, les trois pays n'étaient pas en harmonie, ce qui pose une difficulté particulière pour les travailleurs frontaliers. Un sous-préfet dédié à ces sujets dans ces régions frontalières serait-il utile ?

M. Christophe Mirmand. - Merci, Monsieur le Sénateur et Madame la Sénatrice. S'agissant des relations frontalières, il est exact que le travail est parfois complexe avec nos voisins, dont l'organisation administrative ou politique n'est pas toujours en adéquation avec notre organisation nationale centralisée. Néanmoins, cette préoccupation a été partagée par un travail réalisé entre le ministère de l'Intérieur et le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères. Depuis quelques années, des conseillers diplomatiques sont par ailleurs nommés auprès des préfets de région. Leur rôle est justement de créer des liens bilatéraux, qui reposent souvent sur la relation personnelle entre interlocuteurs, pour fluidifier les relations et permettre de régler un certain nombre de difficultés. J'ai pu constater à quel point cette relation personnelle pouvait influer sur le partenariat avec nos homologues ou avec les autorités des pays avec lesquels nous partageons une frontière.

S'agissant du nombre de préfets en affectation, être préfet suppose à la fois d'être membre d'un corps et d'occuper une fonction territoriale. Un sureffectif pourrait ainsi apparaître dans le corps préfectoral ; il n'en est en réalité rien. 131 postes de préfets et 101 postes de préfets territoriaux, délégués ou, le cas échéant, de préfets adjoints, sont décomptés. Certaines fonctions sont assumées par des préfets de corps, mais dans des fonctions d'administration centrale. Les préfets en instance d'affectation sont en nombre très réduits, puisque la plupart des collègues en administration centrale ont une mission ou une affectation.

Enfin, en ce qui concerne l'autorité fonctionnelle ou hiérarchique, ce principe me semble devoir être rappelé. Je suis personnellement convaincu de la nécessité de renforcer la visibilité de la cohérence des politiques publiques en affirmant clairement cette autorité hiérarchique du préfet de département sur les services déconcentrés de l'État, l'autorité du préfet de région sur les préfets de département, qui s'applique dans la plupart des cas dans la collégialité de la décision, et enfin l'autorité fonctionnelle sur les opérateurs de l'État.

Mme Françoise Gatel, présidente. - Merci, Monsieur le Préfet. Il m'appartient de vous adresser, en mon nom personnel et au nom de la délégation, mes remerciements. Votre intervention était d'une grande qualité et extrêmement complète. Elle répond à la préoccupation qui est la nôtre d'inventer l'avenir avec l'État d'une manière pertinente. Il ne s'agit pas de bloquer les évolutions nécessaires mais, en tant que Chambre des territoires, de nous assurer de la pertinence et de la performance de la réforme. Vous avez parfaitement décrit le rôle d'un préfet. Nous avons retrouvé la fonction d'ensemblier qui est la vôtre sur tout un territoire, dans la relation avec les élus mais également avec tous les acteurs économiques.

Au fil des travaux du Sénat, lors des missions de suivi de la crise sanitaire, je me suis interrogée sur la cohérence entre l'exigence de visibilité et de clarté et le rattachement des préfets au ministère de l'Intérieur. J'estime que celui-ci ne facilite guère l'intelligence de fonctionnement et la porosité des ministères. Pourquoi un préfet n'est-il pas rattaché au Premier ministre ?

M. Christophe Mirmand. - Cette question est ancienne, puisque depuis bien longtemps, notamment dans la préparation et la mise en oeuvre des réformes que j'évoquais plus tôt, elle a été adressée au ministère de l'Intérieur, suspecté au moment de la mise en place des DDI de chercher à capter les économies d'emploi qui pourraient résulter de ces mutualisations. Plus généralement, le fait que le ministère de l'Intérieur incarne cette interministérialité peut être interrogé, alors qu'il est de plus en plus assimilé à un ministère de la sécurité, au mépris du rôle qui est le sien en matière d'administration du territoire, quand bien même que cette attribution figure dans le décret d'attribution du ministre de l'Intérieur. La défiance systémique des autres ministères a été très largement apaisée par le travail collectif conduit depuis 2010. Cette situation que vous évoquez existe, mais n'est pas nécessairement l'hypothèse générale du fonctionnement de l'État. Sur le terrain, dans la relation du préfet avec les directeurs régionaux ou départementaux, elle n'est pas, de fait, constatée. Ce fonctionnement de l'État est en effet plutôt fluide. Dans les circonstances exceptionnelles, le préfet doit être perçu comme le représentant de chacun des ministres, mais également du Premier ministre. Cette coordination de la crise au niveau local doit lui incomber naturellement, sans souffrir aucune exception ni remise en cause. Cette organisation est compatible avec un rattachement du corps préfectoral au ministère de l'Intérieur. Un rattachement à une autre structure, comme le Premier ministre, pourrait poser la question de l'autorité effective du représentant de l'État sur les services chargés de la sécurité au plan local.

Mme Françoise Gatel, présidente. - Merci beaucoup Monsieur le Préfet. Je suis certaine que mes collègues seront très heureux de vous transmettre leur rapport, qui est annoncé pour la fin de l'année ou début janvier.

La réunion est close à 18 heures 30.