COM(2023) 930 FINAL  du 06/12/2023

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Ø Proposition de directive du Conseil modifiant la directive (UE) 2015/637 établissant les mesures de coordination et de coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l'Union non représentés dans des pays tiers et la directive (UE) 2019/997 établissant un titre de voyage provisoire de l'Union européenne (COM (2023) 930)

Le droit, pour les citoyens de l'UE, de bénéficier, sur le territoire d'un pays tiers où l'État membre dont ils sont ressortissants n'est pas représenté, de la protection des autorités diplomatiques et consulaires d'un autre État membre dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État, est explicitement prévu à l'article 20, paragraphe 2, point c), du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

Le traité de Lisbonne a renforcé le statut que constitue la citoyenneté de l'Union et a consolidé les droits qui s'y rattachent. L'article 23 du TFUE prévoit ainsi l'adoption de directives établissant les mesures de coordination et de coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l'Union non représentés.

Tel est l'objet de la directive (UE) 2015/637 du Conseil du 20 avril 2015, que le présent texte modifie et complète, afin de rendre ces mesures et la protection qu'elles impliquent plus efficaces, à la lumière de l'expérience de crises récentes et conformément à la « boussole stratégique »1(*), ainsi qu'aux conclusions de la Commission européenne sur les suites à donner à la conférence sur l'avenir de l'Europe2(*).

En effet, le rapport de la Commission du 2 septembre 2022 sur la mise en oeuvre et l'application de la directive (UE) 2015/637 précitée, souligne la hausse tant de la fréquence que de l'ampleur des crises entraînant des demandes de protection consulaire3(*).

Le présent texte entend donc tirer les leçons de certaines des crises les plus récentes (la pandémie de Covid-19, la crise en Afghanistan, la guerre d'agression menée par la Russie contre l'Ukraine, le conflit au Soudan, les rapatriements depuis Israël et Gaza) pour combler certaines lacunes, renforcer l'effectivité du droit des citoyens de l'Union à la protection consulaire et l'efficacité de celle-ci.

1. Le contenu de la proposition législative de la Commission

Afin d'améliorer la sécurité juridique pour les autorités consulaires et les citoyens, le texte précise les critères permettant de considérer qu'un citoyen de l'Union est « non représenté », donc en droit de bénéficier d'une protection consulaire de la part des autorités consulaires d'autres États membres.

Afin de tirer le meilleur parti du réseau des délégations de l'UE, la Commission propose l'élaboration de plans d'urgence consulaires conjoints (appelés « cadres consulaires conjoints de l'UE en matière de préparation aux crises ») pour tous les pays tiers afin de faciliter la réaction consulaire à d'éventuelles crises futures. La proposition de directive fournit une base juridique pour le déploiement éventuel d'équipes consulaires conjointes, composées d'experts volontaires des États membres et des institutions de l'Union, afin de soutenir les services consulaires locaux des États membres faiblement dotés en temps de crise.

Dans le cas où l'État membre dont est ressortissant un citoyen de l'UE présent dans un État tiers en crise ne dispose pas de consulat ni de consul honoraire, ou si celui-ci n'est pas en mesure de lui offrir une protection consulaire, le texte précise les conditions dans lesquelles la délégation de l'UE ou le consulat d'un autre État membre met en oeuvre cette protection.

Il propose également d'améliorer la circulation des informations entre les États membres et les institutions de l'Union ainsi que les informations fournies aux citoyens de l'Union, quant à leurs déplacements dans les pays tiers.

Le texte rationalise en outre les dispositions relatives au remboursement financier des coûts résultant de la fourniture d'une protection consulaire. À l'avenir, les États membres devraient avoir le droit de demander un remboursement directement au citoyen concerné, et non plus via les ministères des affaires étrangères, de même que les délégations de l'Union. Ces procédures s'appliqueraient aussi au « titre de voyage provisoire de l'Union européenne » («TVP UE») délivré par les délégations ou les consulats dans le cadre de la directive (UE) 2019/9974(*).

Enfin, la présente proposition de directive aligne les dispositions de la directive (UE) 2015/637 qu'elle modifie sur les règles en vigueur concernant le mécanisme de protection civile de l'Union (MPCU)5(*), destinées à renforcer les efforts d'assistance consulaire au profit des citoyens de l'UE, pour tenir compte des expériences vécues, en particulier pendant la pandémie de Covid-19 et en Afghanistan en 2021.

2. Cette proposition législative est-elle conforme aux principes de subsidiarité et de proportionnalité ?

Cette proposition est fondée sur la même base juridique que la directive qu'elle modifie et dont elle n'élargit pas le champ mais prolonge et précise l'application : l'article 23 du TFUE. Le second alinéa dudit article dispose que le Conseil, statuant conformément à une procédure législative spéciale et après consultation du Parlement européen, peut adopter des directives établissant les mesures de coordination et de coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l'Union non représentés. Cette disposition s'applique à tous les États membres.

La protection consulaire des citoyens de l'UE considérés comme « non représentés » dans les pays tiers, comporte par définition une dimension transfrontière, indissociable de l'exercice de ce droit, conféré par l'article 20, paragraphe 2, point c), du TFUE. Elle est évidemment mise en oeuvre de manière beaucoup plus efficace par une législation européenne que par chacun des États membres agissant séparément.

Une action au niveau de l'UE est donc nécessaire et d'autant plus conforme au principe de subsidiarité qu'elle prend la forme juridique d'une directive, modifiant une directive existante.

Ces modifications proposées n'excèdent pas ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif fixé, car elles ne remettent nullement en cause les règles et procédures existantes et n'introduisent pas de procédures supplémentaires, mais s'efforcent de rationaliser les procédures existantes afin de les rendre plus efficaces et de rendre plus effective la protection consulaire, soit le service rendu au citoyen qui se trouve pris dans une crise dans un État tiers. Elles semblent en outre de nature à alléger quelque peu les charges administratives des États membres à terme, en leur permettant par exemple de percevoir les coûts afférents aux mesures de protection, directement auprès des citoyens non représentés, plutôt que de devoir demander un remboursement à l'État membre dont le citoyen a la nationalité.

En revanche, la charge de la Commission et des délégations de l'UE est susceptible d'augmenter, dans des proportions qui seront fonction de l'évolution du nombre et de l'intensité des crises et de la mise en jeu subséquente de la protection consulaire. Cela sera inscrit au budget de fonctionnement à la ligne « Dépenses administratives » selon la Commission, avec une montée en charge progressive de 2024 à 20266(*).

Le principe de proportionnalité paraît donc bien également respecté.

Dès lors, cette proposition modificative d'une directive existante ne semble pas porter atteinte aux principes de subsidiarité et de proportionnalité.

Compte tenu de ces observations, le groupe de travail sur la subsidiarité a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


* 1 Adopté par le Conseil en mars 2022, ce document annonçait notamment que les « mécanismes de réaction aux crises du [Service européen pour l'action extérieure (SEAE)], notre soutien consulaire et la sécurité sur le terrain [seraient] également réexaminés et renforcés afin d'améliorer l'assistance apportée aux États membres dans les efforts qu'ils déploient pour protéger et secourir leurs citoyens à l'étranger, et d'aider les délégations de l'UE lorsqu'elles doivent évacuer du personnel ».

* 2 Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulé « Conférence sur l'avenir de l'Europe - Transformer une vision en actions concrètes » [COM(2022) 404 final et annexe] où la Commission s'engage à « rendre la citoyenneté européenne plus tangible, y compris en renforçant les droits qui y sont attachés et en fournissant des informations fiables et facilement accessibles à ce sujet ».

* 3 Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant la mise en oeuvre et l'application de la directive (UE) 2015/637 du Conseil du 20 avril 2015 établissant les mesures de coordination et de coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l'Union non représentés dans des pays tiers et abrogeant la décision 95/553/CE [COM (2022) 437 final].

* 4 Directive (UE) 2019/997 du Conseil du 18 juin 2019 établissant un titre de voyage provisoire de l'Union européenne et abrogeant la décision 96/409/PESC (JO L 163 du 20.6.2019, p. 1, http://data.europa.eu/eli/dir/2019/997/oj).

* 5 Décision n 1313/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relative au mécanisme de protection civile de l'Union (JO L 347 du 20.12.2013, p. 924, http://data.europa.eu/eli/dec/2013/1313/oj)

* 6 L'estimation du coût affichée dans la fiche financière jointe à la proposition, de 133 000 euros plus 83 000 euros de dépense de personnel, paraît bien faible.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 18/01/2024