COM(2018) 184 final  du 11/04/2018

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Le texte COM 184 s'inscrit dans le cadre de la « nouvelle donne pour les consommateurs », proposée le 11 avril dernier par la Commission européenne. La proposition de directive marque une nouvelle étape dans la protection des intérêts collectifs des consommateurs européens en faisant obligation aux États membres de mettre en place une procédure harmonisée de recours collectif respectant les principes qu'elle définit. Elle a ainsi vocation à se substituer à la directive 2009/22/CE dont la portée est limitée aux atteintes à des droits résultant de treize directives et qui ne permet pas d'obtenir réparation du préjudice.

La question d'une harmonisation plus poussée des procédures visant à mettre un terme aux pratiques illicites et de l'élargissement de leur objet à la réparation du dommage causé aux parties lésées a été soulevée par le Parlement européen qui a adopté dès février 2012 une résolution en ce sens. En réponse, la Commission a publié le 11 juin 2013 une recommandation (2013/396/UE) relative aux principes applicables aux mécanismes de recours collectif en cessation et en réparation dans les États membres en cas de violation de droits conférés par l'Union. Elle y préconise l'extension des recours collectifs à la réparation des dommages et la possibilité pour une « entité représentative » agréée d'intervenir pour le compte et au nom de plusieurs personnes physiques ou morales qui allèguent le risque de subir un préjudice ou qui prétendent avoir subi un préjudice dans le cadre d'un préjudice de masse alors même que ces personnes ne sont pas parties à la procédure. La recommandation définit un ensemble de principes qu'elle invite les États membres à mettre en oeuvre (conditions d'agrément des entités représentatives, diffusion d'informations par les entités représentatives sur les violations alléguées de droits conférés par l'Union, transparence et encadrement des modalités de financement de ces actions, traitement diligent des demandes d'injonction et du suivi de leur exécution notamment).

Dans un rapport, publié le 25 janvier dernier, la Commission européenne a constaté que cette recommandation n'avait eu qu'un impact limité, moins de la moitié des 19 États membres qui ont introduit le recours collectif en réparation l'ayant circonscrit à des secteurs spécifiques (principalement les litiges de consommation). Elle note par ailleurs que les organisations de défense des consommateurs souhaitent la mise en place d'un système de recours collectif à l'échelle de l'Union tandis que les entreprises recommandent le développement de procédures de règlement extrajudiciaires.

La proposition de directive entend remédier aux insuffisances constatées et améliorer l'efficacité de la procédure en cessation. Elle élargit le champ d'application de la procédure à soixante actes européens transversaux et sectoriels, en particulier le crédit à la consommation, les produits et les marchés financiers, les services bancaires et les services de paiement, l'assurance, le secteur des communications (téléphoniques, électroniques et audiovisuelles), les voyages (ferroviaires, aériens, maritimes, par autocar), la fourniture d'énergie (électricité et gaz), ou encore le règlement sur la protection des données à caractère personnel, la santé et l'environnement.

Comme la directive de 2009, elle prévoit que les actions en cessation sont exercées par des « entités qualifiées », désignées par les États membres et qui devront répondre à des critères minimaux (réputation, but non lucratif et intérêt légitime). En cas de recours en indemnisation, ces entités devront également justifier de leur capacité financière et de l'origine des fonds afin de prévenir des recours abusifs, exigences destinées à prévenir l'émergence de « class actions » sur le modèle américain.

Les États membres doivent veiller à l'efficience des procédures juridictionnelles ou administratives nationales (délais, coûts, information des consommateurs) et encourager, sous le contrôle du juge ou de l'administration, voire à l'initiative de ces derniers et dans des délais qu'ils déterminent, les règlements extrajudiciaires collectifs, en particulier en prévoyant l'homologation des accords.

Les actions collectives peuvent tendre non seulement à la cessation de l'infraction grâce à des mesures provisoires ou définitives visant à faire cesser et à interdire la pratique infractionnelle, mais également à en éliminer les effets persistants y compris par voie de réparation.

Les entités qualifiées ne sont pas tenues d'obtenir un mandat de chacun des consommateurs concernés avant que des injonctions soient prononcées. En revanche, un tel mandat peut être requis préalablement au prononcé d'une décision déclaratoire ou d'une ordonnance de réparation, sauf si les consommateurs victimes de l'infraction sont identifiables et ont subi un préjudice comparable, causé par une même pratique, au regard d'une période ou d'un achat.

Lorsque des mesures ont été ordonnées ou un règlement approuvé, la proposition de directive prévoit que le professionnel doit en informer individuellement, à ses frais, les consommateurs concernés. Les sanctions pécuniaires susceptibles de lui être infligées en cas de non-respect des décisions finales rendues dans le cadre d'une action représentative seront définies par les États membres. Elles doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

Enfin, la proposition de directive facilite l'indemnisation des consommateurs transfrontières. Ainsi, les décisions finales prises dans un État membre établissant de manière irréfutable l'existence d'une infraction sont invocables à l'appui de toute autre action pour la même infraction, à l'encontre du même professionnel, devant les juridictions nationales des autres États membres. Par ailleurs, les entités qualifiées agréées dans un État membre doivent pouvoir saisir les autorités juridictionnelles ou administratives compétentes dans un autre État membre. Ces actions peuvent être soit jointes soit représentées par une entité qualifiée représentant l'intérêt collectif des consommateurs des divers États membres.

Cette proposition de directive s'inscrit dans le cadre de l'article 114 du TFUE qui prévoit notamment qu'afin de promouvoir les intérêts des consommateurs et de leur assurer un niveau élevé de protection, l'Union contribue à la protection de leurs intérêts économiques ainsi qu'à la promotion de leur droit à s'organiser afin de préserver leurs intérêts, en particulier par des mesures d'harmonisation dans le cadre de la réalisation du marché intérieur. La Commission propose une démarche d'harmonisation au niveau de l'Union pour appuyer le développement d'un mécanisme efficace d'action collective pour la protection des intérêts des consommateurs dans l'Union qui apparaît de nature à renforcer la confiance des intéressés, à harmoniser les réparations, à rééquilibrer les relations avec les entreprises et à favoriser le commerce intra européen de produits et de services. La proposition de directive ne remet pas en cause les organisations juridictionnelles et administratives nationales, ni les compétences des États membres qui disposeront d'une grande liberté pour sa transposition. Dès lors, il n'apparaît pas soulever de difficulté au regard du principe de subsidiarité et il est décidé en conséquence de pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 02/05/2018


Marché intérieur, économie, finances, fiscalité

Actions représentatives dans le domaine de la protection des intérêts collectifs des consommateurs

COM (2018) 184 final - Texte E13002

(Procédure écrite du 31 janvier 2020)

Le texte COM (2018) 184 s'inscrit dans le cadre de la « nouvelle donne pour les consommateurs », proposée le 11 avril 2018 par la Commission européenne, qui comprenait notamment la proposition de directive modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et les directives 98/6/CE, 2005/29/CE et 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne une meilleure application et une modernisation des règles de l'Union en matière de protection des consommateurs devenue la directive (UE) 2019/2161 du 27 novembre 2019. Il marque une nouvelle étape dans la protection des intérêts collectifs des consommateurs européens en faisant obligation aux États membres de mettre en place une procédure harmonisée de recours collectif respectant les principes qu'elle définit. Elle a ainsi vocation à se substituer à la directive 2009/22/CE dont la portée est limitée aux atteintes à des droits résultant de treize directives et qui ne permet pas d'obtenir réparation du préjudice.

La question d'une harmonisation plus poussée des procédures visant à mettre un terme aux pratiques illicites et de l'élargissement de leur objet à la réparation du dommage causé aux parties lésées a été soulevée par le Parlement européen qui a adopté dès février 2012 une résolution en ce sens. En réponse, la Commission a publié le 11 juin 2013 une recommandation (2013/396/UE) relative aux principes applicables aux mécanismes de recours collectif en cessation et en réparation dans les États membres en cas de violation de droits conférés par l'Union. Elle y préconise l'extension des recours collectifs à la réparation des dommages et la possibilité pour une « entité représentative » agréée d'intervenir pour le compte et au nom de plusieurs personnes physiques ou morales qui allèguent le risque de subir un préjudice ou qui prétendent avoir subi un préjudice dans le cadre d'un préjudice de masse, alors même que ces personnes ne sont pas parties à la procédure. La recommandation définit un ensemble de règles qu'elle invite les États membres à mettre en oeuvre (conditions d'agrément des entités représentatives, diffusion d'informations par les entités représentatives sur les violations alléguées de droits conférés par l'Union, transparence et encadrement des modalités de financement de ces actions, traitement diligent des demandes d'injonction et du suivi de leur exécution notamment).

Dans un rapport, publié le 25 janvier 2018, la Commission européenne a constaté que cette recommandation n'avait eu qu'un impact limité, moins de la moitié des 19 États membres qui ont introduit le recours collectif en réparation dans leur législation l'ayant circonscrit à des secteurs spécifiques (principalement les litiges de consommation). Elle note par ailleurs que les organisations de défense des consommateurs souhaitent la mise en place d'un système de recours collectif à l'échelle de l'Union, tandis que les entreprises recommandent le développement de procédures de règlement extrajudiciaires.

La proposition de directive entend remédier aux insuffisances constatées et améliorer l'efficacité de la procédure en cessation. Elle en élargit le champ d'application à soixante actes européens transversaux et sectoriels, en particulier le crédit à la consommation, les produits et les marchés financiers, les services bancaires et les services de paiement, l'assurance, le secteur des communications (téléphoniques, électroniques et audiovisuelles), les voyages (ferroviaires, aériens, maritimes, par autocar), la fourniture d'énergie (électricité et gaz), ou encore le règlement général sur la protection des données à caractère personnel, la santé et l'environnement.

Comme la directive de 2009, elle prévoit que les actions en cessation sont exercées par des « entités qualifiées », désignées par les États membres et qui devront répondre à des critères minimaux (réputation, but non lucratif et intérêt légitime). En cas de recours en indemnisation, ces entités devront également justifier de leur capacité financière et de l'origine des fonds afin de prévenir des recours abusifs, exigences destinées à prévenir l'émergence de « class actions » sur le modèle américain.

Les États membres doivent veiller à l'efficience des procédures juridictionnelles ou administratives nationales (délais, coûts, information des consommateurs) et encourager, sous le contrôle du juge ou de l'administration, voire à l'initiative de ces derniers et dans des délais qu'ils déterminent, les règlements extrajudiciaires collectifs, en particulier en prévoyant l'homologation des accords.

Les actions collectives peuvent tendre non seulement à la cessation de l'infraction grâce à des mesures provisoires ou définitives visant à faire cesser et à interdire la pratique infractionnelle, mais également à en éliminer les effets persistants, y compris par voie de réparation.

Les entités qualifiées ne sont pas tenues d'obtenir un mandat de chacun des consommateurs concernés avant que des injonctions soient prononcées. En revanche, un tel mandat peut être requis préalablement au prononcé d'une décision déclaratoire ou d'une ordonnance de réparation, sauf si les consommateurs victimes de l'infraction sont identifiables et ont subi un préjudice comparable, causé par une même pratique, au regard d'une période ou d'un achat.

Lorsque des mesures ont été ordonnées ou un règlement approuvé, la proposition de directive prévoit que le professionnel doit en informer individuellement, à ses frais, les consommateurs concernés. Les sanctions pécuniaires susceptibles de lui être infligées en cas de non-respect des décisions finales rendues dans le cadre d'une action représentative seront définies par les États membres. Elles doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

Enfin, la proposition de directive facilite l'indemnisation des consommateurs transfrontières. Ainsi, les décisions finales prises dans un État membre établissant de manière irréfutable l'existence d'une infraction sont invocables à l'appui de toute autre action pour la même infraction, à l'encontre du même professionnel, devant les juridictions nationales des autres États membres. Par ailleurs, les entités qualifiées agréées dans un État membre doivent pouvoir saisir les autorités juridictionnelles ou administratives compétentes dans un autre État membre. Ces actions peuvent être soit jointes soit représentées par une entité qualifiée représentant l'intérêt collectif des consommateurs des divers États membres.

Cette proposition de directive s'inscrit dans le cadre de l'article 114 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne qui prévoit notamment qu'afin de promouvoir les intérêts des consommateurs et de leur assurer un niveau élevé de protection, l'Union contribue à la protection de leurs intérêts économiques ainsi qu'à la promotion de leur droit à s'organiser afin de préserver leurs intérêts, en particulier par des mesures d'harmonisation dans le cadre de la réalisation du marché intérieur.

Elle constitue une démarche d'harmonisation au niveau de l'Union pour appuyer le développement d'un mécanisme efficace d'action collective pour la protection des intérêts des consommateurs dans l'Union qui ne remet pas en cause les organisations juridictionnelles et administratives nationales, ni les compétences des États membres qui disposeront d'une grande liberté pour sa transposition. Elle est de nature à renforcer la confiance des consommateurs, à harmoniser les réparations, à rééquilibrer les relations avec les entreprises et à favoriser le commerce intra européen de produits et de services.

Le 26 mars 2019, le Parlement européen a approuvé, en première lecture, la proposition de directive, qui a ensuite été examinée par le Conseil le 28 novembre. Les négociations interinstitutionnelles devraient prochainement commencer.

Compte tenu de ces éléments, la commission a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte.