Jeudi 21 mars 2024, le Sénat a modifié le projet de loi autorisant la ratification :

  • de l'accord économique et commercial global entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et le Canada, d'autre part (AECG/CETA) ;
  • de l'accord de partenariat stratégique entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et le Canada, d'autre part (APS).

Le projet de loi modifié par le Sénat ne prévoit plus d'autoriser la ratification de l'AECG/CETA. Il autorise en revanche la ratification de l'APS. Le projet de loi ainsi modifié a été adopté par 243 voix pour et 26 voix contre.

Quel est l’objet de ces accords et de ce projet de loi ?

L’accord économique et commercial global (AECG/CETA) vise à resserrer les liens économiques entre l’Union européenne (UE) et le Canada, en créant un marché élargi et en développant les échanges bilatéraux par la réduction ou l’élimination des obstacles au commerce des marchandises et des services et aux investissements.

L’accord de partenariat stratégique (APS), négocié parallèlement à l’accord de libre‑échange UE‑Canada (CETA/AECG), vise à moderniser les relations UE‑Canada, en établissant une coopération renforcée en matière notamment de protection des droits de l’Homme, de lutte contre le terrorisme, de réduction de la pauvreté, de promotion du développement durable, de recherche et de diversité des expressions culturelles.

Ces accords signés à Bruxelles le 30 octobre 2016 sont appliqués de manière provisoire depuis 2017, pour leurs stipulations entrant dans le champ des compétences exclusives de l’Union européenne.
En application de l’article 53 de la Constitution, ils nécessitent, pour leur ratification, d’être soumis à l’autorisation du Parlement.

Adopté par l'Assemblée nationale en 2019, le projet de loi autorisant ladite ratification n’a cependant jamais été inscrit à l’ordre du jour du Sénat par le Gouvernement, en dépit de demandes de la Haute Assemblée.  Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Ecologiste - Kanaky (CRCE-K) a décidé de l'inscrire sur son temps parlementaire réservé. 

Quelle est la position du Sénat ?

Le 21 mars 2024, en séance publique, le Sénat a supprimé (par 211 voix contre 44) l’article 1er du projet de loi qui entendait autoriser la ratification de l’AECG/CETA, et a adopté l’article 2 qui autorise la ratification de l’accord de partenariat stratégique (APS).

Le 13 mars 2024, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées avait estimé qu'il convenait, dans un contexte de grande détresse du monde agricole, que la France envoie un signal fort à l’Union européenne en refusant de ratifier l’AECG/CETA, tout en rappelant que le Canada est - et doit rester - un partenaire et un allié de la France.

Selon la commission, les bénéfices macroéconomiques de la mise en œuvre provisoire de cet accord depuis 2017 restent limités et ne contrebalancent pas les risques qu'il fait peser sur l'agriculture française.

La commission a notamment relevé que :

  • les différences fondamentales entre les modèles d’élevage canadien et français, voire européen, conduisent nécessairement à un déficit de compétitivité en défaveur de nos éleveurs ;
  • plusieurs facteurs pourraient conduire à une augmentation du taux d’utilisation des contingents de viande canadienne (la recherche, par les éleveurs canadiens, de nouveaux marchés si ceux des États-Unis et de l'Asie devenaient moins accessibles, ou encore la levée possible, par l'UE, de l'interdiction de l'usage de l'acide peracétique pour la désinfection des carcasses) ;
  • l'absence de "clauses miroirs" impose aux agriculteurs européens plus de contraintes que celles appliquées aux importations canadiennes.

La commission a également regretté que le projet de loi autorisant la ratification des accords n’ait jamais été inscrit à l’ordre du jour du Sénat par le Gouvernement, en dépit de promesses répétées, et que son examen ait lieu près de 7 ans après l'entrée en vigueur provisoire d'un grand nombre de stipulations.

Revoir l'examen en séance publique