Le système institutionnel de l’Union européenne est souvent dénoncé comme insatisfaisant. La Conférence sur l’avenir de l’Europe, après consultation des citoyens européens entre mars 2021 et mai 2022, a avancé diverses propositions, certaines exigeant une révision des traités. Cette mission d’information examine le suivi de ces propositions sous l’angle institutionnel et, en particulier, la faisabilité et l’intérêt de recourir aux « clauses passerelles » des traités ou autres formes de souplesse institutionnelle pour rendre l’Union européenne plus légitime, efficace et proche des citoyens.

Pourquoi ce contrôle ?

Le système institutionnel actuel de l’Union européenne, tel qu’issu du traité de Lisbonne, est souvent dénoncé comme insatisfaisant, notamment dans l’optique d’un nouvel élargissement de l’Union européenne. On peut notamment mentionner la composition pléthorique de la Commission européenne, la paralysie découlant de la persistance du droit de veto des États membres dans certains domaines ou encore le sentiment d’éloignement des citoyens européens à l’égard des institutions européennes.

Sur une initiative de la France, la Conférence sur l’avenir de l’Europe, lancée en mars 2021 et achevée le 9 mai 2022 sous présidence française du Conseil de l’UE, a été un exercice inédit de consultation de « panels citoyens » sur l’avenir de l’Union européenne. Parmi les 325 propositions figurant dans le rapport final de la Conférence, on peut notamment mentionner, sur les aspects institutionnels, la fin du droit de veto et une extension du vote à la majorité qualifiée au Conseil, l’octroi au Parlement européen d’un droit d’initiative législatif ou encore la possibilité de référendums à l’échelle de l’Union.

Ces dernières mesures nécessiteraient une révision des traités européens, procédure longue qui semble actuellement incertaine et inappropriée dans le contexte actuel. Elle nécessiterait en particulier d’obtenir l’unanimité du Conseil européen et une ratification par l’ensemble des États membres selon leurs règles constitutionnelles respectives (par la voie parlementaire ou par référendum). En outre, elle risque de susciter des divisions entre États membres, certains pays affichant ouvertement leur réticence à plus d’intégration. Enfin, au moment où l’Union européenne doit faire face à des défis majeurs, en particulier aux conséquences de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine, se concentrer sur les questions institutionnelles peut sembler éloigné des préoccupations immédiates des citoyens.

Dans ce contexte, l’idée a été émise, notamment par le Parlement européen, de recourir aux « clauses passerelles », c’est-à-dire aux clauses des traités européens permettant de passer, dans certaines conditions, du mode de décision à l'unanimité des États membres au mode de décision à la majorité qualifiée, ou de la procédure législative spéciale à la procédure législative ordinaire. Le recours à ces « clauses passerelles » nécessite toutefois une décision unanime des États membres, qui semble hors d’atteinte aujourd’hui.

Il existe en outre d’autres formes de souplesse institutionnelle prévues par les traités européens, comme par exemple le recours à la « coopération renforcée ».

Ce rapport d’information a donc pour objet de faire le point sur le suivi des propositions de la Conférence sur l’avenir de l’Europe en matière institutionnelle, de décrire les différentes options possibles - révision des traités, recours aux « clauses passerelles » ou autres formes de souplesse institutionnelle - et de s’interroger sur la faisabilité, l’opportunité et l’intérêt d’y recourir.

 

Comptes rendus

M. Jean-François Rapin, président, et Mme Gisèle Jourda, vice-présidente, co-rapporteurs, se sont rendus à Bruxelles, le 27 février 2023, pour des entretiens au sujet de la révision des traités et des « clauses passerelles », avec :

  • M. Daniel Calleja, Directeur général du Service juridique de la Commission européenne, Jurisconsulte de la Commission européenne ;
  • Mme Camille Hubac, conseillère au cabinet de M. Sefcovic, Commissaire européen chargé du suivi de la Conférence sur l’avenir de l’Europe ;
  • Mmes Luisa Cabral et Tena Misetic, conseillères au cabinet de la Présidente de la Commission européenne, Mme Ursula Von der Leyen ;
  • Son Exc. M. Philippe Léglise-Costa, Ambassadeur, Représentant Permanent de la France auprès de l’Union européenne, Mme Maelys Lange, conseillère juridique, et M. Olric Izarn, conseiller parlementaire à la Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne ;
  • Mme Thérèse Blanchet, Secrétaire Générale du Conseil ;
  • M. François Gabriel, chef de cabinet adjoint de la Présidente du Parlement européen, Mme Roberta Metsola ;
  • M. Guy Verhofstadt, député européen, rapporteur de la commission des Affaires constitutionnelles du Parlement européen.