M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour la réplique.

M. Fabien Genet. Merci de votre réponse, madame la ministre. J’entends bien que vous reconnaissez l’injustice absolue qu’il y aurait à pénaliser le patient dénué de médecin traitant quand c’est le système de santé qui est incapable de lui en fournir un.

Plus généralement, il s’agit là, me semble-t-il, d’un symptôme du mal qui ronge notre système de santé : l’on finit par oublier que la priorité absolue doit être l’accès aux soins. Il faut selon moi réarmer également notre système de santé, et il y a beaucoup de travail !

prise en charge des enfants atteints d’un trouble du spectre de l’autisme

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, auteure de la question n° 949, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Mme Laurence Harribey. Madame la ministre, ma question porte sur la prise en charge et l’accompagnement des enfants atteints d’un trouble du spectre de l’autisme (TSA) par des structures non conventionnées.

Faute de place au sein de structures publiques, de nombreuses familles se tournent vers des associations et des professionnels non conventionnés. Ces associations offrent une prise en charge pluridisciplinaire, grâce à des orthophonistes, des psychomotriciens, des éducateurs spécialisés et des psychologues. Les parents sont unanimes à reconnaître qu’elles font faire de grands progrès aux enfants.

En revanche, les frais liés à cette prise en charge sont élevés. Bien que les caisses d’allocations familiales (CAF) aident les familles, le reste à charge est important. Faute de subventions suffisantes par les agences régionales de santé, certaines associations ont annoncé leur fermeture. C’est le cas, par exemple, de l’association girondine Étape, qui sera contrainte de fermer ses portes au mois de juillet prochain, laissant 21 enfants et leur famille sans solution.

Éprouvés par un parcours fastidieux, les parents nous ont adressé un appel au secours.

On doit, à notre sens, se donner les moyens, dans nos politiques publiques, d’encourager le travail remarquable de ces associations. Alors, madame la ministre, qu’entendez-vous faire d’ici à l’été 2024 ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de légalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur un sujet absolument déterminant : l’inclusion que l’on doit à l’ensemble des Français et en particulier à nos enfants, pour que le droit commun puisse prévaloir et qu’il y ait le moins de pertes de chances possible.

C’est tout l’enjeu des dispositions adoptées au sein de la dernière loi de financement de la sécurité sociale pour le repérage précoce, afin d’éviter la perte de chances, et pour mieux former toutes celles et tous ceux qui sont au contact de nos enfants dès leur plus jeune âge. Nous rencontrons tous – vous l’avez sans doute vécu vous-même – des personnes qui nous disent que leurs troubles n’ont été détectés qu’à l’âge adulte, ce qui entraîne évidemment des pertes de chances en cascade.

Nous avons aussi fait un bond qui me semble assez spectaculaire et tout à fait nécessaire sur la question de l’inclusion scolaire. Rappelons que 325 nouveaux dispositifs spécifiques de scolarisation des élèves autistes à l’école ont été ouverts ; les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) sont désormais le deuxième métier de l’éducation nationale. Il ne faut à l’évidence pas s’arrêter là, car le grand effort accompli pour la scolarisation à l’école élémentaire doit être poursuivi pour le reste de la vie de ces personnes : leur insertion au collège, au lycée et à l’université, puis dans la société plus largement, doit être garantie.

Il faut donc poursuivre ce double effort : d’une part, le repérage précoce, entre 0 et 6 ans, permettra de garantir qu’il n’y aura pas de pertes de chances ; d’autre part, une prise en charge et un accompagnement continus, tout au long de la vie, doivent préparer ces personnes à s’intégrer dans la société, de manière que, dans ce domaine aussi, le droit commun soit la règle pour chacun des Français.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour la réplique.

Mme Laurence Harribey. Merci pour vos éléments de réponse, qui sont en effets importants, mais vous me parlez de l’école inclusive ; moi, je vous pose la question des structures non conventionnées accueillant des enfants qui ne vont pas tous à l’école.

Il y a bien un plan Autisme, mais on ne voit pas ses débouchés en la matière. Je vous rappelle que le temps d’attente avant de pouvoir accéder à un établissement médico-social varie entre deux et huit ans pour les enfants et qu’il est au minimum de dix ans pour les adultes.

La nouvelle stratégie, prête depuis le mois de juillet dernier, n’est toujours pas appliquée. Les professionnels comme les parents demandent un véritable plan de santé publique. Il est indispensable d’aider en priorité les structures existantes pour éviter qu’elles ferment, comme l’association girondine que j’ai évoquée, menacée dès le mois de juillet prochain.

collecte de sang en guyane

M. le président. La parole est à Mme Marie-Laure Phinera-Horth, auteure de la question n° 1033, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Mme Marie-Laure Phinera-Horth. Madame la ministre, je veux aujourd’hui vous parler de Karen : âgée de 8 ans seulement, elle se bat courageusement contre une leucémie aiguë. Chaque jour de vie en plus est une victoire pour elle.

Ces dernières semaines, la vie fragile de la petite Karen a failli basculer. En Guyane, les plaquettes nécessaires pour stabiliser son état de santé manquaient cruellement.

Il faut dire que la Guyane est actuellement confrontée à une forte épidémie de dengue, qui rend plus complexe encore la gestion déjà difficile du stock de plaquettes. Faut-il rappeler que la collecte de sang est suspendue en Guyane depuis près de vingt ans à la suite de l’extension à ce territoire de la maladie de Chagas ?

Depuis 2005, le sang transfusé aux Guyanais provient essentiellement des Antilles ou de la France hexagonale. Cette organisation pose plusieurs problèmes de santé publique. Se pose d’abord la question évidente de la disponibilité des stocks. En effet, la Guadeloupe n’est pas autosuffisante en matière de produits sanguins labiles. En outre, la France hexagonale et les Antilles se trouvent respectivement à huit et trois heures de vol. Nous ne pouvons pas taire non plus la question des phénotypes rares : du fait de notre diversité, on trouve en Guyane des groupes sanguins rares. L’utilisation de sang n’appartenant pas à ces groupes multiplie les risques d’incompatibilité et de réactions transfusionnelles.

Il y a deux ans, j’avais interpellé le Gouvernement sur cette même question. On m’avait opposé un rapport de Santé publique France. Or ce rapport ne ferme pas la porte à une reprise de la collecte du sang en Guyane ; il dit, tout au plus, qu’il y aura des contraintes.

Nous savons qu’à l’arrêt de la collecte de sang les actifs de l’Établissement français du sang (EFS) en Guyane ont été transférés à la Guadeloupe. Les Guyanais – j’insiste sur ce point – en ont assez d’être les sacrifiés !

Combien de Karen faudra-t-il, madame la ministre, avant que la France n’envisage sérieusement de reprendre la collecte de sang en Guyane ? Vous pouvez dès à présent, à tout le moins, autoriser le prélèvement des plaquettes, qui bénéficient d’un traitement rendant inactifs les virus. Ce sera un premier pas, en attendant que la recherche progresse encore.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de légalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Madame la sénatrice, je connais votre engagement pour votre territoire de la Guyane. Vous le savez, quel que soit le territoire concerné, hexagonal ou ultramarin, et de manière systématique, c’est uniquement pour des raisons épidémiologiques que les collectes de sang peuvent être interrompues. Il n’y a pas de discrimination en fonction du territoire : une telle mesure peut affecter n’importe lequel d’entre eux dès lors qu’existe un risque pour la santé publique, un risque de perte de chances pour les patients.

C’est la raison pour laquelle, aujourd’hui encore, en Guyane ou à Mayotte, ces collectes ne peuvent avoir lieu. Je vais en reparler au sein du Gouvernement, parce que j’entends bien l’alerte que vous lancez de nouveau sur ce sujet, mais je veux redire ici aujourd’hui, pour que tout le monde l’ait bien en tête, pourquoi ces collectes sont actuellement impossibles.

En 2005 un arrêté préfectoral a mis un terme à la collecte de sang sur le territoire guyanais, en raison de la présence en Guyane de la maladie de Chagas, qui constitue un véritable problème de santé publique sur le continent sud-américain et en Amérique latine ; 15 à 20 millions de personnes seraient infectées dans cette région, le risque de transmission de cette maladie étant très élevé.

C’est bien la raison pour laquelle la possibilité de donner son sang n’a pu être rouverte en Guyane depuis lors. Ces décisions se prennent, je le redis, uniquement sur des critères épidémiologiques, de santé publique.

Comptez sur moi néanmoins, madame la sénatrice, pour faire remonter cette problématique, afin que l’on puisse éventuellement vous apporter une autre réponse ou que d’autres études puissent être réalisées, puisque la dernière remonte au mois d’août 2021.

mineurs non accompagnés

M. le président. La parole est à M. Cédric Perrin, auteur de la question n° 938, transmise à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

M. Cédric Perrin. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur un sujet difficile dont le Sénat s’est emparé à plusieurs reprises pour proposer des solutions concrètes.

Je veux parler des difficultés liées à l’accueil des mineurs non accompagnés (MNA) et à leur entrée dans le dispositif spécifique qui leur est destiné, en amont de leur prise en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE).

Les questions légitimement posées par les travailleurs sociaux restent globalement irrésolues à ce jour. Les cris d’alerte lancés par les départements sont laissés sans réponse.

Pour faire bouger les choses, certaines collectivités, comme les départements du Territoire de Belfort, du Jura ou de la Vienne, adoptent des motions visant à limiter la prise en charge directe de ces mineurs étrangers.

Deux difficultés majeures sont bien connues par les acteurs de terrain : la première est la phase d’évaluation des demandeurs, au cours de laquelle le placement en accueil provisoire d’urgence n’est pas toujours effectif ; la seconde réside dans la saturation des établissements d’accueil.

Prenons l’exemple du Territoire de Belfort : on dénombre 61 places pour près de 90 mineurs non accompagnés.

Madame la ministre, je ne vous apprends rien : cette tendance est très documentée, notamment par le ministère de la justice, qui, en septembre dernier, annonçait une augmentation du nombre d’arrivées de 30 % en 2022 par rapport à 2021.

Pour toutes ces raisons, il me semble indispensable de procéder au transfert à l’État de la mise à l’abri des mineurs non accompagnés, comme le demande également l’association Départements de France.

Madame la ministre, le Gouvernement compte-t-il prendre cette mesure, pour enfin soulager les départements au bord de l’asphyxie ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de légalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Monsieur le sénateur, permettez-moi d’abord de m’étonner de votre dernière remarque, puisque, à ma connaissance, Départements de France n’a pas publié de communiqué demandant que cette compétence actuellement dévolue aux départements revienne à l’État.

Certes, je connais les problèmes que peuvent rencontrer les départements en la matière. Un certain nombre d’entre eux ont d’ailleurs entrepris des procédures et déposé des recours eu égard aux difficultés, parfois croissantes, que l’on constate, notamment, mais pas uniquement, dans les départements frontaliers.

En revanche, à ce stade, il n’y a pas eu de demande de modification de la répartition des compétences entre État et départements. Ce point sera peut-être abordé dans le cadre de la mission qui a été confiée à Éric Woerth sur l’action publique territoriale et l’organisation des compétences de l’État et des collectivités locales.

Au-delà de ce sujet, des initiatives ont été prises par le Gouvernement.

Ainsi, la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants a permis le déploiement national du fichier d’appui à l’évaluation de minorité, qui permet une coopération plus fluide, efficace et effective, qu’il convient de renforcer encore.

Par ailleurs, comme la Première ministre Élisabeth Borne s’y était engagée devant Départements de France en 2023, l’enveloppe de soutien aux départements dans la prise en charge des MNA a été portée à 100 millions d’euros dans la loi de finances pour 2024. Cela est d’autant plus bienvenu que cette charge fragilise les finances de certains départements, déjà fragilisées par la baisse du produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

Il faut donc distinguer entre deux sujets : d’une part, la nécessaire coordination nationale et le soutien aux départements les plus fragiles ; d’autre part, la répartition des compétences. Sur ce dernier point, il me semble que tous les départements n’ont pas la même position ; en tout cas, Départements de France n’a pas pris officiellement parti en faveur d’une recentralisation de cette compétence.

M. le président. La parole est à M. Cédric Perrin, pour la réplique.

M. Cédric Perrin. Madame la ministre, les flux migratoires sont de la responsabilité exclusive de l’État.

On ne peut pas, dans notre République, oublier les enfants dont l’ordonnance de placement ne peut pas être exécutée, faute de place en foyer, et qui doivent rester dans leur famille, où ils rencontrent des problèmes. C’est exactement ce qui se passe aujourd’hui dans le Territoire de Belfort.

Cette situation n’est pas acceptable. Compte tenu de la saturation des services, nous ne pouvons plus aujourd’hui prendre en charge les enfants qui bénéficient d’ordonnances de placement. J’espère que cette demande sera acceptée par le Gouvernement.

difficultés d’accès aux soins infirmiers et de rééducation dans la ruralité

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 1045, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

M. Jean-Yves Roux. Madame la ministre, ma question concerne les conditions de délivrance des soins infirmiers réguliers et des suites d’hospitalisation en ruralité.

Des maires m’ont alerté sur les difficultés que rencontrent leurs administrés pour faire venir des infirmiers dans les hameaux ou les communes les plus rurales pour assurer des soins du quotidien.

Des patients, dont beaucoup sortent d’hospitalisation, sont ainsi privés des piqûres quotidiennes, des pansements, des soins de rééducation que leur ont pourtant prescrits des médecins chevronnés. La raison est simple : ils ne peuvent trouver en nombre suffisant, dans leur secteur, des praticiens susceptibles d’assurer ces soins et acceptant de se déplacer de manière régulière.

Madame la ministre, cette situation est courante en milieu rural et a fortiori en montagne, où les distances parcourues et les temps de déplacement sont accrus. Elle se révèle particulièrement coûteuse pour l’assurance maladie et créée des ruptures de soins parmi ces patients, fragilisés par cette situation.

Les cabinets libéraux contactés indiquent ainsi à regret que, dans un contexte inflationniste, le plafonnement de leurs indemnités kilométriques les empêche d’assurer une permanence de soins quotidienne dans des périmètres d’intervention plus éloignés.

Au total, les dispositions prévues causent des inégalités d’accès aux soins qu’il apparaît nécessaire de prendre en considération de façon beaucoup moins technocratique, si possible dès la prescription de ces soins indispensables au bon rétablissement du patient, voire à son maintien à domicile.

« Supprimer des normes, réduire les délais, faciliter encore les embauches, augmenter tous les seuils de déclenchement d’obligation. C’est au fond la France du bon sens, plutôt que la France des tracas ». Madame la ministre, ces paroles sensées, prononcées par le Président de la République le 16 janvier dernier, résonnent tout particulièrement aux oreilles des habitants de la ruralité confrontés à ce « tracas » supplémentaire.

Aussi, madame la ministre, envisagez-vous, dans un souci de différenciation territoriale et de pragmatisme, de renforcer les modalités de compensation des frais kilométriques dans les zones rurales concernées, en particulier dans les départements comprenant des zones de revitalisation rurale ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de légalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Monsieur le sénateur, merci d’avoir mis en lumière dans votre question cette profession absolument indispensable ; j’y associe d’ailleurs l’ensemble des intervenants – souvent intervenantes – à domicile, en particulier les aides à domicile, qui sont confrontées aux mêmes difficultés.

Les infirmières et infirmiers libéraux sont essentiels pour l’accès aux soins, l’hospitalisation et le maintien à domicile. Le Gouvernement agit en leur faveur de deux manières.

En premier lieu, nous agissons pour faciliter l’installation de ces professionnels de santé. Le montant de l’aide à l’installation s’élève aujourd’hui à 27 500 euros ; l’aide prévue dans le cadre du contrat d’aide à la première installation infirmier dépasse même 37 000 euros, ce qui permet tout de même un accompagnement réel de cette installation.

En second lieu, les indemnités kilométriques restent un enjeu crucial, car elles représentent aujourd’hui en moyenne 20 % des revenus annuels des infirmières et infirmiers libéraux. Les avenants ont été revus à la hausse ; une enveloppe de 217 millions d’euros garantit une meilleure prise en charge par l’État de ces indemnités. Faut-il les moduler au-delà de leur niveau actuel ? De toute façon, comme le montant versé est lié au nombre de kilomètres parcourus, la topographie de nos territoires est déjà prise en compte. En tout cas, l’avenant a été revu pour augmenter cette prise en charge.

Par ailleurs, mesure un peu moins connue, quand une remise à la pompe a été offerte à l’ensemble des Français, cette remise a été majorée par l’assurance maladie pour les professionnels de santé libéraux : au-delà des 30 centimes offerts à tous, 15 centimes supplémentaires leur étaient remboursés, ce qui représente un effort accru en période d’inflation.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour la réplique.

M. Jean-Yves Roux. Merci de votre réponse, madame la ministre ; je suivrai avec attention les perspectives que vous nous avez indiquées et je transmettrai bien sûr votre réponse aux personnes concernées.

avenir du centre hospitalier du centre bretagne

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, auteur de la question n° 1047, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

M. Simon Uzenat. Madame la ministre, ma question porte sur l’avenir du centre hospitalier du Centre Bretagne (CHCB), dont le bassin de vie compte plus de 140 000 habitants et est classé comme désert médical.

Pour illustrer la singularité de ce territoire, nous avons coutume de dire que le Centre Bretagne est une île verte et qu’il appelle donc des moyens spécifiques. Or c’est l’inverse qui se produit ! L’espérance de vie y est plus faible qu’ailleurs, ce qui entraîne des pertes de chances pour les citoyens ruraux : nous ne pouvons pas l’accepter dans notre République garante de l’égalité.

Depuis de nombreuses années, le CHCB fait ainsi face à une pénurie de moyens, en raison notamment du fait que notre modèle de financement de l’hôpital public est à bout de souffle.

Il a également été l’un des grands oubliés des crédits d’investissement du Ségur, puisque seulement 1,5 million d’euros lui ont été accordés sur les 42 millions qui étaient demandés.

De surcroît, le CHCB rencontre des difficultés majeures en matière de recrutement de personnels soignants, ce qui a des conséquences en chaîne sur le fonctionnement des services et aboutit à leur dégradation. Toutes les composantes de l’hôpital sont touchées, de la maternité jusqu’aux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), en passant par la médecine, la chirurgie et les urgences.

Si son objectif initial pouvait apparaître louable, la loi Rist a amplifié le phénomène en réduisant considérablement le vivier des intérimaires, lesquels représentaient 40 % des médecins – jusqu’à 70 % de ces derniers aux urgences du CHCB.

Le centre hospitalier est aujourd’hui en péril et la mobilisation est générale, à l’échelon local, pour garantir la qualité et la continuité du service public de santé en Centre Bretagne.

Il convient, une nouvelle fois, de souligner l’engagement sans faille et le dévouement incroyable des équipes de direction, des soignants et des praticiens hospitaliers, qui portent le CHCB à bout de bras.

Madame la ministre, au regard de la gravité de la situation, quels moyens humains et financiers spécifiques l’État compte-t-il déployer dans les plus brefs délais pour permettre à chacun de naître, de bien vivre et de bien vieillir en Centre-Bretagne ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de légalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur l’accès aux soins, enjeu qui se pose dans votre territoire comme partout en France. Il s’agit, je le crois, de l’une des premières préoccupations des Français, si ce n’est parfois la première. Vous soulevez également la question de la force de notre hôpital public, qui constitue souvent le premier accès aux soins, ou qui en est, en tout cas, l’une des premières portes d’entrée pour de nombreux Français.

En ce qui concerne la situation spécifique du groupement hospitalier de territoire (GHT) Centre Bretagne, j’aborderai deux points : la question des urgences et celle de la restructuration, que vous avez évoquée.

L’accès aux urgences, vous le savez, est aujourd’hui régulé ; c’est une bonne chose : cela répond à une demande des professionnels eux-mêmes, afin d’en sécuriser le fonctionnement. Le service mobile d’urgence et de réanimation (Smur) fonctionne bien : 7,5 équivalents temps plein (ETP) y sont présents et 88 patients y passent en moyenne chaque jour.

Toutefois, étant donné les difficultés récurrentes, celles que vous avez vous-même évoquées, monsieur le sénateur, l’agence régionale de santé (ARS) a proposé à l’établissement de diligenter une mission d’appui, pour analyser les difficultés rencontrées et surtout pour proposer des améliorations dans l’accès aux soins et l’organisation.

Cette mission, dont la création a été acceptée par la direction, a entamé ses travaux le 3 décembre dernier : vous comprendrez donc, monsieur le sénateur, que je ne puisse pas vous en donner les conclusions aujourd’hui.

Son but est de répondre concrètement à la question de l’organisation des soins sur le territoire et de s’intéresser évidemment à l’avenir d’un établissement hospitalier auquel non seulement votre commune, mais aussi toute la Bretagne sont attachées.

J’en viens au second point. Vous avez évoqué la loi Rist. Celle-ci visait à répondre à une attente très forte. Je sais que sa mise en œuvre a suscité des inquiétudes, mais ses dispositions permettent d’éviter des dérégulations ou des dysfonctionnements trop importants, ceux que l’on pouvait connaître quand nos établissements ne reposaient presque plus que sur des intérimaires, situation qui engendrait des surcoûts considérables et une concurrence entre les professionnels de santé eux-mêmes.

Cette loi a donc pu, en effet, susciter des doutes au tout début, mais elle répond à des attentes et ses dispositions sont extrêmement bien déployées sur l’ensemble du territoire.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour la réplique.

M. Simon Uzenat. Merci de votre réponse, madame la ministre, mais nous ne pouvons pas partager le constat que vous faites : quarante lits de soins médicaux et de réadaptation (SMR) et trente lits d’Ehpad ont été fermés. Faute de lits disponibles, les urgences deviennent un service d’hospitalisation.

Vous évoquez l’audit en cours, mais le temps n’est plus aux audits ! Il faut donner les moyens aux services de bien fonctionner. Je rappelle d’ailleurs, au passage, que le rapport de la mission aurait dû être rendu en janvier de cette année.

Le plan blanc a été déclenché. Le Smur ne fonctionnait pas hier soir. Il convient de prendre des mesures spécifiques et pérennes, de revaloriser les praticiens hospitaliers et les personnels soignants, de travailler avec les médecins militaires.

Madame la ministre, il y a urgence pour le Centre Bretagne !

assistantes maternelles impayées

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, auteur de la question n° 1046, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

M. Henri Cabanel. Madame la ministre, en octobre 2022, j’avais adressé à l’ancien ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées une question, afin de relayer auprès de lui la colère légitime et l’inquiétude des assistantes maternelles impayées.

Lors d’une séance de questions orales, il m’avait été répondu qu’un état des lieux de la situation allait être dressé, en collaboration avec l’Union fédérative nationale des associations de familles d’accueil et assistants maternels (Ufnafaam), et que le comité de filière de la petite enfance allait travailler sur la mise en place d’un éventuel fonds de garantie des salaires.

Il s’agit de lutter contre des fraudes à la caisse d’allocations familiales (CAF), qui sont commises par des employeurs peu scrupuleux, puisque celle-ci leur a versé des aides, et d’indemniser les assistantes maternelles impayées. Ces dernières ont engagé des poursuites devant les prud’hommes et ont obtenu gain de cause, mais elles ne peuvent récupérer les sommes qui leur sont dues.

Madame la ministre, quelles sont les conclusions de ce groupe de travail ? Quelles sont les avancées concernant le fonds de garantie ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de légalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Monsieur le sénateur, j’ai eu l’occasion de suivre le dossier que vous évoquez dans mes précédentes fonctions. J’avais réuni le comité de filière ainsi que l’ensemble des syndicats et des fédérations qui représentent les assistants et assistantes maternelles pour travailler, notamment, sur la question spécifique des impayés.

Il s’agit bien d’une fraude. La déclaration par un employeur d’un salaire versé via Pajemploi afin de bénéficier d’un crédit d’impôt, sans versement effectif du salaire, est constitutive d’une fraude. Ce problème est ensuite très difficile à gérer pour les assistants et assistantes maternelles.

Nous avons proposé, en lien avec le comité de filière, dont nous avons repris toutes les propositions sur le sujet, que l’État puisse verser la rémunération en cas d’impayés – dans la limite de deux mois de salaires –, afin que les assistants ou assistantes maternelles ne pâtissent pas de cette situation et n’aient pas de difficultés financières. L’État jouerait ainsi le rôle d’intermédiaire.

C’est aussi la raison pour laquelle, la loi pour le plein emploi, que vous avez adoptée, comporte un volet relatif à la petite enfance, notamment aux relais petite enfance (RPE).

En effet, les assistants maternels nous disent que leur relation avec les parents revêt un caractère double : d’une part, ils ont avec eux une relation en tant que professionnels concernant l’enfant, d’autre part, ils sont leurs employés, ce qui est parfois source de tensions. Les RPE visent à faciliter la relation avec l’employeur en déchargeant l’assistant maternel de cet aspect, et donc à éviter les conflits.

En conclusion, je rappelle qu’un impayé est constitutif d’une fraude de la part de l’employeur dès lors que celui-ci a déclaré qu’un salaire a été versé.

Comme je l’ai indiqué devant le comité de filière et l’ensemble des syndicats et fédérations représentatives réunis, l’État mettra en place une forme de garantie des impayés.

Enfin, nous voulons accompagner les assistants maternels, en les libérant de la charge que constitue la gestion de la relation avec leur employeur, qui est parfois un peu lourde à porter et qui peut être source de difficultés dans leurs relations avec les parents.