M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à mettre en application les recommandations du rapport d’information de notre collègue député Charles Fournier sur la grippe aviaire et son impact sur les élevages.

Il est essentiel de soutenir les éleveurs face à cette crise, notamment les élevages de plein air, qui ont été particulièrement affectés par les mesures de biosécurité – lesquelles n’étaient pas très adaptées à leur situation.

À cet égard, le soutien de l’État à la vaccination est essentiel. Il doit être garanti à tous les éleveurs, quelle que soit la taille de leur élevage. Vous me direz si c’est bien le cas.

M. Marc Fesneau, ministre. C’est le cas !

M. Daniel Salmon. Mais cette campagne de vaccination soutenue par l’État doit s’accompagner de mesures pour anticiper au mieux la propagation du virus.

Nous proposons donc, par cet amendement, d’étudier les facteurs de diffusion du virus, en particulier les densités d’animaux dans les élevages, de mesurer l’efficacité des mesures de mise à l’abri des volailles et d’évaluer l’adaptation des mesures de biosécurité aux élevages de plein air et en autarcie.

Nous devons surtout éviter de sacrifier l’élevage de plein air, emblème de la qualité et du savoir-faire du Sud-Ouest en particulier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. Les arguments sont les mêmes que pour l’amendement n° II-672 : avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre. Rendons d’abord à César ce qui est à César : il s’agit du rapport Fournier-Bolo. Philippe Bolo, que vous n’avez pas mentionné, étant un député Modem, j’y suis particulièrement attentif ! (Rires.) Tous deux en partageaient en tout cas sur les conclusions.

Par ailleurs, nous avons commencé à mettre en œuvre les recommandations de ce rapport. Vous connaissez trop le sujet pour que je doive vous le rappeler !

Les mesures de dédensification de l’élevage sont d’ores et déjà financées. Nous menons également un travail sur les élevages de plus petite dimension.

Nombre de ces décisions sont par ailleurs prises sous l’injonction de l’Anses. Parfois, nous avons besoin de décisions politiques. Moi-même, j’ai plusieurs fois estimé que les recommandations de cette agence allaient trop loin. C’est toujours plus complexe qu’on ne le croit…

Les règles sur les élevages de petite dimension ont été assouplies. Nous avons investi les moyens nécessaires. Le rapport est en effet de qualité, et nous essayons de suivre sa trajectoire.

Avis défavorable, car le travail est en cours. Par ailleurs, le coût des mesures de dédensification est de loin supérieur aux sommes que vous avancez !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-1353.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-1265, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Varaillas, M. Gay, Mme Margaté, MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Soutien exceptionnel en faveur de l’agriculture biologique

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

 

271 000 000

 

271 000 000

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

dont titre 2

 

 

 

 

Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG)

 

 

 

 

Soutien aux associations de protection animale et aux refuges

 

 

 

 

Fonds de soutien aux technologies immatérielles agricoles

 

 

 

 

Soutien exceptionnel en faveur de l’agriculture biologique

271 000 000

 

271 000 000

 

TOTAL

271 000 000

271 000 000

271 000 000

271 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. Les aménités positives de l’agriculture biologique sont nombreuses, et elles sont désormais admises par tous. Citons par exemple la qualité de l’eau, la fertilité des sols – qui permet une meilleure capacité à séquestrer le carbone –, la qualité de l’air, la préservation de la biodiversité, l’emploi en milieu rural ou encore la santé des consommateurs. La liste n’est pas exhaustive.

Nous l’avons dit à plusieurs reprises, l’agriculture biologique connaît une crise sans précédent, les filières devant faire face aussi bien à l’inflation des prix alimentaires qu’à la multiplication des labels moins-disants en matière environnementale.

Surtout, ce n’est pas une crise de la demande. Si la croissance de la consommation de produits bio ralentit, la Cour des comptes souligne une sous-dotation structurelle de ce secteur par l’État.

En effet, la suppression des aides au maintien en 2017 avait déjà entraîné un premier ralentissement des conversions à partir de 2020, toujours d’après la Cour des comptes. Or, ce soutien va decrescendo et renforce la dépendance des agriculteurs bio au marché, ne permettant pas d’atteindre les 18 % de surface agricole utile en bio.

Notre amendement vise ainsi à soutenir ce secteur, à contrer la baisse des conversions en bio et à défendre une ambition réelle pour ce secteur agricole.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° II-673 rectifié est présenté par MM. Montaugé, Tissot, Lurel, Pla, Stanzione et Kanner, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° II-1261 rectifié est présenté par Mmes Corbière Naminzo et Varaillas, M. Gay, Mme Margaté, MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

50 000 000 

 

50 000 000 

 

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

dont titre 2

 

50 000 000

 

50 000 000

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

dont titre 2

 

 

 

Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG)

 

 

 

Soutien aux associations de protection animale et aux refuges

 

 

 

 

Fonds de soutien aux technologies immatérielles agricoles

 

 

 

 

TOTAL

 50 000 000

 50 000 000

 50 000 000

 50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° II-673 rectifié.

M. Franck Montaugé. Pour bénéficier de l’écorégime, trois voies d’accès sont possibles : les pratiques agricoles, la certification environnementale et les éléments favorables à la biodiversité.

La France a fait le choix d’un écorégime peu ambitieux, accessible à la grande majorité des paysans et paysannes – tant mieux ! –, sans qu’ils aient à changer leurs pratiques.

La conséquence, que le ministère de l’agriculture dit ne pas avoir anticipée – vous nous le confirmerez, ou non, monsieur le ministre -, est que 90 % des demandes atteignent le niveau supérieur, contre 80 %, comme cela était prévu.

Pour y faire face, l’État a décidé de réduire le montant à l’hectare pour chacun des trois niveaux de certification. Ainsi, le montant de l’écorégime bio fixé dans le plan national stratégique à 110 euros par hectare – un montant déjà insuffisant par rapport aux 145 euros demandés par les organisations paysannes – a été abaissé par arrêté à 92 euros par hectare.

Alors que la filière bio connaît une grave crise, et que l’objectif est d’atteindre 18 % de surfaces en bio en 2027, nous proposons par le présent amendement de porter l’écorégime bio à 145 euros par hectare, soit un budget supplémentaire de 50 millions d’euros.

M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° II-1261 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements qui portent sur la filière biologique.

Il nous semble que, en période d’inflation, un soutien aux filières qui proposent des produits plus chers, comme c’est le cas généralement des produits issus de l’agriculture biologique, n’est pas nécessairement viable.

Enfin, il faut reconnaître que la distribution devrait aussi prendre sa part de responsabilité dans le soutien au secteur.

J’attire une nouvelle fois l’attention de nos collègues sur le fait que ces amendements, lorsqu’ils sont gagés sur le programme 206, pourraient avoir pour conséquence d’empêcher la discussion des autres amendements gagés sur le même programme – vous en avez fait l’expérience il y a quelques instants –, en particulier des amendements portant sur l’allocation complémentaire jeunes agriculteurs.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre. J’émets également un avis défavorable sur ces amendements.

Monsieur Montaugé, vous connaissez trop bien le sujet pour ne pas savoir que modifier les montants de l’écorégime suppose de modifier également le plan stratégique national. On peut certes déposer des amendements tout en sachant qu’ils seront sans effets, mais il faut tout de même tenir compte de la réalité !

C’est en déposant de tels amendements qu’on met parfois en scène notre impuissance collective !

M. Franck Montaugé. On peut parler tout de même ?

M. Marc Fesneau, ministre. Ne vous énervez pas parce que je suis en désaccord avec vous !

Je vous dis simplement que nous avons collectivement tort de déposer des amendements en sachant que, s’ils étaient votés, ils ne seraient pas opérants. (M. Franck Montaugé sexclame.) Je pense qu’il n’y a aucun intérêt à balader les gens. Le monde agricole souffre assez, il n’est pas utile de lui raconter des carabistouilles, je vous le dis très clairement ! Donc je ne raconterai pas de carabistouilles ! Votre amendement, je le répète, est non opérant !

Ensuite, j’ai été celui qui a demandé que l’écart soit accru entre l’agriculture bio et les autres cultures dans l’écorégime. Je suis donc très à l’aise sur ce sujet.

En outre, je rappelle que, pour le bio, en plus des mesures de la PAC, il existe des mesures de défiscalisation, qui représentent près de 700 millions d’euros par an.

Par ailleurs, nous devons soutenir la demande, je l’ai dit, grâce à la commande publique et à la communication.

Enfin, comme l’a dit M. le rapporteur spécial, je pense que nous pourrions aller au combat ensemble sur ce sujet. La grande distribution a un rôle à jouer. Il n’est pas normal de réaliser des marges plus grandes sur les produits bio que sur les autres. Il n’est pas normal que le bio disparaisse des étals des supermarchés depuis qu’il ne permet plus une croissance à deux chiffres.

Voilà un combat que nous pourrions mener ensemble et qui serait utile !

M. Marc Fesneau, ministre. Mais un tel combat ne se mène pas seulement par voie d’amendement. C’est un combat politique !

M. Franck Montaugé. Allez-y, on sera avec vous !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-1265.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-673 rectifié et II-1261 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° II-664 est présenté par MM. Tissot, Lurel, Montaugé, Pla, Stanzione et Kanner, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° II-1350 est présenté par M. Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Parigi et Mmes Poncet Monge, Souyris et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

15 000 000

 

15 000 000

 

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

dont titre 2

 

15 000 000

 

15 000 000

Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG)

 

 

 

 

Soutien aux associations de protection animale et aux refuges

 

 

 

 

Fonds de soutien aux technologies immatérielles agricoles

 

 

 

 

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° II-664.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° II-1350.

M. Daniel Salmon. Monsieur le ministre, des efforts ont été faits en termes de communication sur le bio, mais nous devons aller encore plus loin. Le bio connaît aujourd’hui de grandes difficultés, mais elles ne sont pas dues au hasard.

Certes, le pouvoir d’achat des consommateurs est en baisse, mais ce n’est pas le seul problème. La confusion règne chez le consommateur, que l’on a enfumé – pardon de le dire de manière triviale – avec d’autres labels. Il ne comprend plus quels sont les intérêts du bio quand on lui vante l’agriculture de « haute valeur environnementale » (HVE),…

Mme Sophie Primas. À raison !

M. Daniel Salmon. … laquelle n’offre de garanties en termes de qualité que de façon marginale.

Nous avons une agriculture bio de qualité, qui s’inscrit dans le cadre de la transition écologique, avec des externalités positives. Il faut donc communiquer afin que le consommateur sache que, par son acte d’achat, non seulement il préserve sa santé, mais il contribue à faire vivre cette filière agricole.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. Les arguments que j’ai invoqués sur les amendements précédents s’agissant de l’aide à la filière bio valent également pour ces deux amendements.

Nous demandons que la grande distribution prenne sa part de responsabilité dans le soutien à ce secteur.

La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre. Le Gouvernement émet le même avis que M. le rapporteur spécial.

Monsieur le sénateur, vous l’avez dit, nous avons mis des moyens complémentaires, il faut donc les déployer. Nous ne faisons pas complètement rien ! Franchement, nous avons fait des efforts de communication.

Par ailleurs, je suis d’accord avec ce qu’a dit le rapporteur spécial sur le rôle que devrait avoir la grande distribution.

En revanche, je suis en désaccord avec vous sur un point, mais peut-être mes habitudes de consommation ne sont-elles pas classiques : il n’y a pas de rayon HVE dans les supermarchés. Il n’est pas nécessaire de s’en prendre aux autres pour se faire une place. Nous devons montrer quelles sont les vertus du bio sans taper sur les autres secteurs. On ne gagne jamais collectivement en faisant cela.

Les problèmes du bio sont liés à l’inflation et à l’image en partie fausse qu’ont ces produits en termes de prix, mais aussi aux marges que font certains, considérant qu’ils sont réservés à des gens ayant un niveau de revenu élevé. Ce n’est pas normal.

Enfin, il faut relocaliser le bio. La baisse de la consommation des produits bio date de la crise du covid-19. Les circuits courts, y compris conventionnels, ont alors pris le pas. Il faut s’interroger sur cette situation.

Quand la consommation est en baisse, on peut accuser tout le monde, par exemple les labels, mais il vaut mieux essayer de se remettre en cause. Le bio était en plein essor jusqu’à la crise. Aujourd’hui, il faut s’interroger sur les moyens de communiquer – nous les avons mis – et sur la manière de communiquer – c’est le travail que j’attends en particulier de l’Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique.

M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour explication de vote.

M. Pierre Cuypers. Je souhaite juste vous faire part d’une information : la filière sucrière française, qui s’est réunie hier en assemblée générale, ne produira pas de sucre bio en 2024 parce que les stocks suffiront pour les deux années à venir.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. La grande distribution a certainement une part de responsabilité dans la situation, de nombreux produits ayant été déréférencés, en raison simplement d’une légère baisse de la consommation. Elle en a profité pour vider les étals ! C’est un réel problème.

Pour ma part, je pense qu’il faut parler franchement aux consommateurs et être transparents. J’entends souvent dire que tous les modèles se valent et qu’il y a de la place pour tout le monde. Je ne suis pas tout à fait d’accord ! L’agriculture bio s’inscrit complètement dans la transition écologique et n’a pas de coûts indirects sur la potabilisation de l’eau, pour ne prendre que ce seul exemple.

M. Laurent Duplomb. Oh là là…

M. Daniel Salmon. Mais je pourrais en prendre d’autres.

L’agriculture biologique n’est pas payée à la hauteur de ses externalités positives, alors que le principe pollueur-payeur n’est pas appliqué aujourd’hui. Les coûts indirects de l’agriculture conventionnelle chimique ne sont pas répercutés dans le prix des produits issus de ce modèle d’agriculture. C’est de la concurrence déloyale !

M. Laurent Somon. Il y a l’agriculture raisonnée !

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Quand je vous entends, monsieur le ministre, j’ai l’impression que vous parlez d’une niche sympathique, celle du bio, que vous allez soutenir en faisant un peu de communication, mais simplement d’une niche, que l’on garde pour se faire plaisir.

Veut-on tendre vers l’agriculture bio – ce n’est pas un gros mot –, qui est moins dépendante des intrants, qui a moins d’impacts sur l’environnement, notamment sur l’eau, et dont le coût est moindre pour les finances publiques ? (M. Laurent Duplomb sexclame.) Allons-nous nous donner les moyens politiques d’aller vers ce type d’agriculture, qui est selon moi l’agriculture de demain ? Il faut alors une vraie volonté politique.

Au sortir de la guerre, quand on est passé au modèle agricole productiviste, on l’a fait très rapidement parce qu’il y a eu, justement, une volonté politique. La question est donc de savoir si vous avez cette volonté, si vous souhaitez développer une agriculture faisant appel à moins d’intrants, permettant de rémunérer convenablement les agriculteurs,…

Mme Sophie Primas. Ben voyons !

M. Guillaume Gontard. … ayant un impact moindre sur l’environnement et sur la santé. Je rappelle qu’il existe un fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, ce qui prouve bien que les produits phytosanitaires posent quelques problèmes de santé. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Monsieur le ministre, je vous pose donc la question : avez-vous la volonté politique de développer l’agriculture biologique ?

M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.

M. Yannick Jadot. L’Agence bio a effectivement reçu des financements, y compris pour communiquer sur l’agriculture et les produits biologiques et faire leur promotion. Cela étant, lorsque survient une crise dans un secteur, le ticket d’entrée d’une campagne de communication, c’est 30 millions d’euros. Reconnaissez, monsieur le ministre, qu’une telle campagne n’a pas été faite sur le bio.

Par ailleurs, je vous entends régulièrement dire que pour changer de modèle, il faut qu’il existe une alternative. Or il n’en existe pas toujours si l’on conserve exactement les mêmes pratiques.

L’agriculture biologique, en termes de pesticides et d’engrais, est une alternative parce que c’est un nouveau modèle.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Je vais remettre un euro dans le juke-box, et nul doute que mon propos va faire réagir ! Mais puisque de nombreux amendements sont tombés à la suite du vote des amendements précédents gagés sur le programme 215, nous disposons d’un peu de temps pour discuter ! (Sourires.)

On nous explique que le bio, c’est l’alpha et l’oméga de la qualité. Or il faut tout de même savoir, car c’est une réalité, que 27 molécules chimiques sont autorisées en agriculture biologique.

M. Laurent Duplomb. Le cuivre est utilisé à des doses qui sont assez importantes, pour ne pas dire plus. Si on analysait les sols cultivés en agriculture biologique, on y trouverait une quantité de cuivre extrêmement élevée et on constaterait une diminution importante de la matière organique. Je vous mets au défi de prouver le contraire !

Pour ma part, je trouve que la problématique aujourd’hui est simple : on a fait du bio un lobby politique.

M. Laurent Duplomb. Le principe, c’est de taper sans cesse sur tous les modèles et de dire aux consommateurs qu’il faut opter pour l’agriculture bio. Et comme ça a marché pendant quelques années, certains y ont cru. Ce n’est pas faute de vous avoir mis en garde : à coups d’argent public, on fait croire des choses qui ne sont pas la réalité. (Exclamations moqueuses sur les travées du groupe GEST.)

M. Yannick Jadot. Sérieusement, de l’argent public ?

M. Laurent Duplomb. On l’a dit, avec l’inflation, les consommateurs allaient se replier sur les premiers prix. Le problème, c’est qu’ils ne se replient pas sur les premiers prix français. Avec le système que vous êtes en train de mettre en place, la seule solution, c’est d’importer d’importantes quantités de matières premières, qui inondent ainsi notre marché.

M. Yannick Jadot. C’est vous qui faites la mondialisation de l’agriculture !

M. Laurent Duplomb. La voilà la réalité !

Continuez et vous aurez du bio français pour 5 % de la population, celle qui en aura les moyens, tout le reste sera importé. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. M. Yannick Jadot sexclame.)

Mme Sophie Primas. Vous vous êtes trompé d’assemblée, monsieur Jadot !

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.

M. Christian Redon-Sarrazy. Le sujet mérite de longs débats, mais peut-être devrions-nous nous pencher sur les problèmes de communication et ceux que pose la grande distribution.

Comme à moi, mes chers collègues, il vous arrive certainement de vous rendre dans les collectivités pour inaugurer un territoire bio engagé ou rencontrer le maire, quelle que soit sa couleur politique, d’une commune fière que de bons produits bio soient servis aux enfants dans les cantines scolaires.

Alors que l’on approuve ce discours sur le terrain, nous ferions bien de nous accorder ici sur un objectif qui, en dépit de certaines difficultés, ne doit pas nous éloigner d’une trajectoire à laquelle nous adhérons tous, à l’exception de la grande distribution, soucieuse de ses marges et de son taux de croissance à deux chiffres.

Dans la chambre des territoires, nous devrions essayer de trouver une trajectoire qui puisse convenir.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Marc Fesneau, ministre. Monsieur Gontard, vous dites que l’agriculture biologique est une niche. Or une niche à 700 millions d’euros, ce n’est pas tout à fait une niche !

M. Laurent Duplomb. Plus la PAC !

M. Marc Fesneau, ministre. La PAC est en partie incluse dans les 700 millions d’euros, monsieur Duplomb.

Ne dites pas, monsieur Gontard, que ce sujet serait pour nous marginal. Je rappelle que les objectifs que nous nous sommes fixés – 18 % des surfaces en agriculture biologique – sont très ambitieux.

Ensuite, il faut cesser d’opposer les formes d’agriculture entre elles. On commence par s’en prendre à l’agriculture conventionnelle, on continue par l’agriculture certifiée HVE, puis on finit par taper sur le bio. N’entretenons pas de malentendus.

Sans vouloir vous offenser, monsieur Duplomb, le bio, c’est de la chimie de synthèse, le sulfate de cuivre, c’est de la chimie, me semble-t-il. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)

Faisons donc attention à ce que nous disons sur ces sujets, car nous allons très vite avoir des déconvenues, y compris sur le bio.

M. Olivier Rietmann. Exactement !

M. Marc Fesneau, ministre. Enfin, il y a une loi en économie : le mieux, c’est de produire des choses que les gens consomment.

M. Marc Fesneau, ministre. Si la consommation n’est pas au rendez-vous, il n’y a pas de modèle économique. Si chaque fois qu’on avait un débours de 1, 2 ou 3 milliards, on demandait à l’État de relancer la consommation, vous voyez dans quelle logique on entrerait !

Il faut donc faire davantage de communication. M. Jadot a raison de dire que le bio permet de faire évoluer le modèle agricole, mais il n’est pas le seul.

Essayons de mettre en place un modèle permettant de produire ce que les gens consomment. À défaut, les gens finiront par consommer des produits venus d’ailleurs et nous nous retrouverons Gros-Jean comme devant.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-664 et II-1350.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° II-662 rectifié est présenté par MM. Tissot, Lurel, Montaugé, Pla, Stanzione et Kanner, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° II-1352 rectifié est présenté par M. Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Parigi et Mmes Poncet Monge, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° II-1352 rectifié est présenté par M. Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Parigi et Mmes Poncet Monge, Souyris et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

60 000 000

 

60 000 000

 

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

dont titre 2

 

 

 

 

Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG)

 

60 000 000

 

60 000 000

Soutien aux associations de protection animale et aux refuges

 

 

 

 

Fonds de soutien aux technologies immatérielles agricoles

 

 

 

 

TOTAL

60 000 000

60 000 000

60 000 000

60 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° II-662 rectifié.