M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous verrons si c’est naturel !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. … des amendements nos I-841 rectifié bis et I-1715 rectifié, qui sont identiques à celui du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. À entendre vos réponses à nos interrogations sur les budgets des départements pour l’année à venir, monsieur le ministre, je comprends que nous ne partageons pas la même approche ou la même philosophie en matière de financement des collectivités territoriales.

En effet, vous estimez, pour les départements comme pour les communes, que la DGF ne fait pas tout. En moyenne, la part de la DGF dans les budgets s’établit, de fait, à 15 %. S’y ajoutent un certain nombre d’autres financements et des variables d’ajustement qui découlent des orientations politiques du Gouvernement, que celles-ci soient partagées ou non.

J’estime pour ma part que de telles logiques doivent cesser, monsieur le ministre. La DGF – c’était du moins son avantage originel – est censée garantir la libre administration et l’autonomie des collectivités territoriales.

Or le budget des collectivités dépend de plus en plus de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), du fonds vert, et bientôt, du nouveau fonds dont vous annoncerez certainement la création d’ici à la fin du quinquennat ; vous conviendrez que l’autonomie et la libre administration en prennent un sacré coup !

Enfin, comme cela vient d’être souligné par mes collègues, les départements sont les premiers concernés.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. Nous en arrivons à un moment fort du débat, monsieur le ministre.

Tous les ans, la Haute Assemblée s’efforce de défendre les collectivités territoriales, les maires, les présidents de département et les présidents de région. Ces MacGyver du service public doivent se débrouiller avec ce qu’ils ont et ce que vous voulez bien leur donner, monsieur le ministre.

M. André Reichardt. Ils sont des couteaux suisses !

M. Patrick Kanner. Par votre amendement, vous leur allouez 100 millions d’euros supplémentaires, monsieur le ministre. Cet engagement, qui a été pris au Congrès des maires, a manifestement été négocié en amont de ce dernier. Mais il n’est pas suffisant.

Nous nous rabattrons sur l’amendement du rapporteur général, que nous voterons. Faute de grives, nous mangerons des merles, mais nous aurions préféré l’indexation de la DGF sur l’inflation pour 2024, pour 2025 et pour les années suivantes, critère qui, du reste, était plutôt partagé par l’ensemble de cette assemblée.

Je regrette d’ailleurs que certains de nos collègues du groupe Les Républicains aient retiré leurs amendements : s’ils ne s’étaient pas repliés sur l’amendement de M. Husson, ils auraient pu faire basculer le score.

Pour reprendre l’expression de Mme Gatel, certaines collectivités sont, non plus en soins intensifs, mais déjà en soins palliatifs. On ne peut donc pas en rester là.

Le Président de la République en a de nouveau appelé au « pouvoir d’agir », thème du Congrès des maires de France l’année dernière. Il a certes chargé M. André Laignel, en sa qualité de président du Haut Conseil des finances locales, de travailler à une réforme du financement des collectivités locales. Mais il est trop tard pour une partie de nos collectivités.

Nous ferons avec ce qui nous sera donné, en tant que parlementaires, pour défendre les collectivités territoriales. Mais la forme de charité que vous pratiquez depuis six ans après des élus locaux n’est plus acceptable, monsieur le ministre. (Mme Viviane Artigalas applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.

M. Arnaud Bazin. L’amendement n° I-228 du rapporteur général visant à allouer la même somme aux départements que mon amendement n° I-841 rectifié bis, je retire ce dernier, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° I-841 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.

M. Grégory Blanc. Je souhaite tout d’abord vous faire part de ma consternation, mes chers collègues.

Lors de la récente campagne des élections sénatoriales, nous sommes nombreux à avoir inscrit l’indexation de la DGF sur l’inflation dans nos professions de foi. Il ne faudrait pas s’étonner qu’un tel revirement, intervenu en l’espace de deux mois, alimente la défiance de la population. En tout état de cause, nous aurons à nous justifier de nos votes dans nos territoires respectifs.

L’adoption de l’amendement du rapporteur général contribuera à apporter une petite pierre supplémentaire à l’édifice. Tout en souscrivant à cet effort, j’estime que, dans la suite de l’examen de l’article 24, il nous faudra veiller, mes chers collègues, à rendre des marges de manœuvre aux collectivités, non pas seulement au travers des fonds de péréquation, mais aussi en leur faisant davantage confiance quant aux évolutions de taux.

Telle est en tout cas la ligne que le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires continuera de défendre, car il estime que l’amendement du rapporteur général ne suffit pas.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-226 rectifié et I-858 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° I-740 rectifié, les amendements identiques nos I-1715 rectifié et I-2282 et l’amendement n° I-1978 rectifié ter n’ont plus d’objet.

Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-2155, présenté par Mmes Briquet et Canalès, MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mme Blatrix Contat, M. Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Artigalas, Bonnefoy et Brossel, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Fichet et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa par un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre de 2024, le montant des dotations versées au titre des 1.2 et 1.3 est minoré par application d’un taux qui, appliqué au montant total à verser au titre de l’année 2022, aboutit à un montant total de, respectivement, 1 243 315 500 € et 467 129 770 €. »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Mme Isabelle Briquet. D’un montant de 467 millions d’euros en 2023, la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) constitue une part importante du budget des régions.

Entre 2017 et 2022, cette dotation a toutefois enregistré une baisse inquiétante, à hauteur de 207 millions d’euros, cette somme ayant été détournée pour financer des initiatives extérieures aux intérêts régionaux.

Le Gouvernement propose de réduire le montant de cette dotation de 20 millions d’euros en 2024, soit une baisse de 4,3 %. Cette baisse est d’autant plus préoccupante qu’elle affecte une dotation allouée en substitution à des recettes dynamiques, frappant injustement des régions déjà défavorisées par la suppression de la taxe professionnelle.

Dans ce contexte de forte inflation, il est essentiel de préserver les ressources allouées aux régions. Le présent amendement vise donc à figer le montant de la DCRTP à son niveau de 2023.

Mme la présidente. L’amendement n° I-227, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 11

Remplacer les mots :

est minoré par application d’un taux qui, appliqué au montant total à verser au titre de l’année 2023, aboutit à un montant total de, respectivement, 1 243 315 500 € et 447 129 770 €

par les mots :

est égal au montant versé au titre de l’année 2023

II. – Alinéa 13

Remplacer les mots :

de cette dotation est minoré par application d’un taux qui, appliqué au montant total à verser au titre de l’année 2023, aboutit à un montant total de 1 130 768 465 €

par les mots :

à verser est égal au montant versé en 2023

III. – Alinéa 14

Remplacer les mots :

de cette dotation est minoré par application d’un taux qui, appliqué au montant total à verser au titre de l’année 2023, aboutit à un montant total de 271 278 401 €

par les mots :

à verser est égal au montant versé en 2023

IV. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour l’État du maintien en 2024 du niveau de la dotation globale de fonctionnement de 2023 est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Les objets des différents amendements en discussion commune convergent.

Le présent amendement vise à augmenter les prélèvements sur recette de l’État aux collectivités territoriales à hauteur de 67 millions d’euros.

Le Sénat a réaffirmé sa position – soyez certain qu’elle ne variera pas, monsieur le ministre – concernant les variables d’ajustement. Le groupe de travail sur la décentralisation a formulé des propositions visant à garantir une compensation pérenne des exonérations de fiscalité locale imposées aux collectivités territoriales. Celles-ci contreviennent du reste à la rédaction du présent article, qu’il convient donc de modifier.

Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° I-744 rectifié est présenté par M. C. Vial, Mme Bellurot, MM. Allizard, Anglars et J.B. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet et Burgoa, Mmes Di Folco, Dumas et Dumont, M. Genet, Mme Josende, M. D. Laurent, Mme P. Martin, MM. Meignen et Michallet, Mme Nédélec, MM. Paccaud, Panunzi, Pellevat et Pointereau, Mme Puissat, MM. Rapin, Rojouan, Saury et Savin, Mme Schalck, M. Tabarot, Mme Ventalon et MM. J.P. Vogel et Gremillet.

L’amendement n° I-981 est présenté par Mme Cukierman, MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° I-1941 rectifié est présenté par M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Marie, Bourgi et Lurel, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, MM. Uzenat, Roiron, P. Joly, Tissot, Temal, Mérillou et Pla, Mmes Monier et Blatrix Contat et M. Jeansannetas.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 13

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Au titre de 2024, le montant à verser est égal au montant versé en 2023. »

II. – Alinéa 14

Remplacer les mots :

de cette dotation est minoré par application d’un taux qui, appliqué au montant total à verser au titre de l’année 2023, aboutit à un montant total de 271 278 401 €.

par les mots :

à verser est égal au montant versé en 2023

III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Cédric Vial, pour présenter l’amendement n° I-744 rectifié.

M. Cédric Vial. Les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent ! Vous soutiendrez toutefois certainement cet amendement, monsieur le ministre, car celui-ci vise à aider le Gouvernement à tenir ses promesses.

Lorsque la taxe professionnelle a été supprimée, le gouvernement de l’époque avait promis aux collectivités, la main sur le cœur, qu’elles seraient compensées au franc près de manière pérenne.

Aujourd’hui, non seulement le compte n’y est pas, mais je m’inquiète pour votre crédibilité et celle du Gouvernement, monsieur le ministre, car vous et vos collègues, notamment Bruno Le Maire, nous avez promis des compensations pérennes et à l’euro près lors de la suppression de la taxe d’habitation et de la CVAE.

Par cet amendement, je vous propose donc de restaurer votre crédibilité en allouant les quelques millions d’euros qui manquent pour tenir les promesses qu’a formulées par le Gouvernement quand il a supprimé un certain nombre de taxes.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° I-981.

M. Pascal Savoldelli. Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit de baisser la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle des communes et des EPCI, ainsi que la dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP). Ces diminutions s’élèveraient à un total de 27 millions d’euros pour le bloc communal.

Il s’agit d’une nouvelle entorse à la neutralité de la DCRTP, sur laquelle l’État s’était pourtant engagé.

Cette dotation avait déjà été utilisée comme variable d’ajustement par le Gouvernement dans le cadre du PLF 2018. Nous constatons une nouvelle fois que l’État ne tient pas ses engagements, et c’est l’autonomie fiscale et financière des collectivités territoriales qui en pâtit.

Lors du Congrès de maires, il a été indiqué que les dépenses du bloc communal avaient augmenté de 7 % en moyenne en 2022. Il est tout à fait normal que la hausse des prix ait des répercussions sur le budget des communes, et il m’est avis, monsieur le ministre, que ce n’est pas étranger aux 100 millions d’euros supplémentaires que vous êtes prêts à allouer à la DGF.

Mes chers collègues, en acceptant cette baisse de 27 millions d’euros de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle aux communes et aux EPCI, nous accepterions, au fond, que l’État décentralise sa dette au détriment des collectivités territoriales. Ne mettons pas le doigt dans cet engrenage.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° I-1941 rectifié.

M. Christian Redon-Sarrazy. Comme l’a indiqué mon collègue Savoldelli, il importe de ne pas amputer davantage le FDPDT et la DCRTP.

Cet amendement vise donc à supprimer la diminution de ces transferts de l’État.

Mme la présidente. L’amendement n° I-539 rectifié, présenté par M. Belin, Mme Lavarde, MM. Bas, Bazin, Bonneau, Bruyen, Cadec et Favreau, Mme Imbert, MM. P. Martin, Saury, Pointereau, Paccaud et G. Blanc, Mme Puissat, MM. Tabarot, Meignen, Bouloux et Burgoa, Mmes Borchio Fontimp et Gruny, M. Gremillet, Mme M. Mercier, MM. D. Laurent et Reichardt, Mmes Dumas, Bellurot et Berthet, M. Pellevat, Mme Lassarade, M. Rojouan, Mmes Micouleau et Petrus, MM. Chatillon et H. Leroy, Mme P. Martin, MM. Bouchet, Paul et Panunzi, Mme Gosselin, MM. Levi et Laugier, Mmes Devésa et Guidez, M. Kern, Mmes Romagny, L. Darcos et Lermytte et M. Wattebled, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 14

Supprimer cet alinéa.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Bruno Belin.

M. Bruno Belin. Nous avons longuement débattu de la DGF. La dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle est tout aussi essentielle, car il s’agit d’une recette de fonctionnement.

Les élus locaux avaient entendu les promesses de l’un de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, à savoir le secrétaire d’État chargé du budget du président Hollande, Christian Eckert, qui avait effectivement sanctuarisé un certain nombre de recettes de fonctionnement de cette nature. Je pense notamment à la taxe professionnelle dont les centrales nucléaires s’acquittaient dans vingt-huit départements, emportant un effet de ruissellement sur les communes.

Nous subissons aujourd’hui un double effet négatif, puisque, au débat sur la DGF, s’ajoute la chute du produit des DMTO et, partant, de leur ruissellement sur les communes, la baisse des DMTO étant telle qu’elle risque de mettre en danger les finances des départements.

Dans ce contexte, le maintien de la dotation de compensation de réforme de la taxe professionnelle est une mesure simple par laquelle je vous propose de préserver l’une des recettes de fonctionnement des communes, mes chers collègues.

Enfin, je précise que cet amendement a été cosigné par des sénateurs issus de groupes différents !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous partageons globalement la même intention, mes chers collègues.

Vous le constatez, monsieur le ministre, dans le cadre de chaque projet de loi de finances, le Sénat est le premier porte-parole des collectivités locales. Il se trouve de ce fait dans une situation de porte-à-faux, dont je regrette qu’elle perdure.

Le groupe de travail du Sénat sera à la tâche, non seulement pour suivre la réforme de la DGF annoncée par le Président de la République, mais également pour la préparer de la meilleure manière possible.

Une telle réforme ne pourra aboutir que si nous parvenons à simplifier le dispositif et à le rendre lisible, mais il faut aussi qu’il y ait le moins de communes lésées possible. À défaut, nous serons confrontés à un phénomène de blocage, comme c’est arrivé lors de la réforme territoriale du quinquennat Hollande.

Il faudra donc non seulement faire preuve de volonté, mais aussi éviter cet écueil, d’autant que, comme l’indiquait André Reichardt, nous avons déjà sans doute trop tardé à lancer une telle réforme.

Cela dit, je demande le retrait de l’ensemble de ces amendements, au bénéfice de l’amendement n° I-227 de la commission. À défaut, mon avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Je ne comprends pas la position de la commission, monsieur le rapporteur général.

Lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques, vous avez reproché au Gouvernement de ne pas réaliser assez d’économies et de pas réduire assez vite le déficit public.

M. Pascal Savoldelli. Vous, vous ne faites pas assez de recettes !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Le Sénat voulait faire mieux, plus vite et plus fort.

En même temps, par cette disposition qui emporte des sommes relativement modestes, monsieur le rapporteur général, vous proposez de supprimer 67 millions d’euros de variables d’ajustement.

Or sans rentrer dans des détails trop techniques, les variables d’ajustement sont précisément ce qui permet de respecter l’enveloppe normée des concours financiers aux collectivités territoriales, laquelle est prévue dans la loi de programmation des finances publiques, telle qu’elle a été votée par le Sénat, notamment par la majorité sénatoriale.

Je ne comprends pas : on ne peut pas demander des économies le lundi et concéder de nouvelles dépenses le mardi, monsieur le rapporteur général. Ce n’est pas cohérent ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Les variables d’ajustement, je le répète, sont un mécanisme classique qui permet de tenir la trajectoire des concours financiers aux collectivités territoriales.

Je ne souscris pas, en outre, au tableau que vous dressez des finances des collectivités territoriales. Si les dépenses du bloc communal, en augmentation de 5,6 %, ont effectivement pâti de l’inflation, leurs recettes, qui ont augmenté de 7,9 %, en ont bénéficié.

Les recettes progressant plus vite que les dépenses, le Gouvernement estime que, contrairement aux départements – nous y reviendrons –, le bloc communal n’est pas dans une situation difficile. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Cécile Cukierman proteste également.)

M. Mathieu Darnaud. Ce n’est qu’une moyenne !

Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas ce qui est écrit dans le rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Les chiffres sont têtus ! (Brouhaha.)

Mme la présidente. Laissez le ministre terminer, mes chers collègues !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Puisque vous n’êtes pas d’accord avec ces chiffres,…

M. Mathieu Darnaud. Ça, c’est sûr !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. … je vous en donnerai un autre, que vous ne contesterez pas.

M. Mathieu Darnaud. Mieux vaudrait arrêter là…

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Lors du débat sur les finances locales organisé par l’AMF, en présence d’André Laignel, qui, en tant que président du Haut Conseil des finances publiques locales, est chargé de réformer la DGF, il a été indiqué que l’épargne brute du bloc communal a progressé de plus de 10 %. C’est l’AMF elle-même qui le dit !

Telle est la trajectoire, monsieur le rapporteur général. On ne peut pas concéder des dépenses supplémentaires en permanence.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le ministre, je n’ai pas de problème de cohérence : contrairement au Gouvernement, qui a tendance à godiller, la commission a une ligne claire.

Lorsque nous vous avons proposé des économies sur le bouclier électricité, vous avez insinué que nous ne savions pas compter et que nous nous trompions, monsieur le ministre. Nous vous démontrerons pourtant tranquillement que la facture de 10 milliards d’euros que vous voulez faire supporter aux Français peut être réduite d’un peu plus d’un milliard d’euros. (M. le ministre délégué le conteste.) Soyez-en assuré, monsieur le ministre !

Je suis par ailleurs étonné de vos propos sur les variables d’ajustement. L’an dernier, le Sénat n’a pas touché aux 45 millions d’euros de variables d’ajustement. Mais, lorsque le texte est reparti à l’Assemblée nationale, vous avez alloué 30 millions d’euros de cette enveloppe aux régions. Ce qui était bon hier peut l’être aujourd’hui, monsieur le ministre.

Notre proposition vise simplement à garantir le respect de la compensation promise lors de réformes passées. E comme elle sera sans doute adoptée à une assez grande majorité par le Sénat, vous pouvez dès à présent mobiliser vos troupes ! (M. le ministre délégué sen amuse.)

M. André Reichardt. Lesquelles ?

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.

M. Jean-Raymond Hugonet. Vous êtes – c’est tout à votre honneur – un homme de chiffres, monsieur le ministre. Voilà quelques semaines que nous ferraillons sur les chiffres, et je veux être clair : je ne conteste pas ceux que vous communiquez.

Au fond, vous nous apportez la preuve que les communes sont bien gérées. En effet, elles y sont obligées par l’État, celui-là même qui, depuis quarante ans, organise une gabegie d’argent public.

Il est toutefois un peu fort de café de nous entendre dire que les communes sont bien gérées, alors qu’elles le sont au prix de la baisse et du recul des services publics à nos administrés. Nous vivons en effet dans la crainte du lendemain. (M. le ministre délégué le conteste.)

Vous pouvez dodeliner de la tête, monsieur le ministre. Telle est pourtant la réalité de ce que nous vivons dans nos départements respectifs. Vous pouvez ne pas l’accepter, mais vous ne pouvez pas prétendre que nous ne comprenons rien. Nous ne nous rejoignons pas, tout simplement.

La machine étant bloquée, l’État nous incite à investir. Le problème des communes est, non pas l’investissement, mais le fonctionnement, qui n’a rien d’accessoire.

Si les communes sont bien gérées, parce qu’elles font attention et qu’elles ont l’obligation de voter des budgets en équilibre, elles n’en sont pas moins exsangues. Dans ce contexte, la proposition de notre rapporteur général arrive à point nommé.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. L’intérêt que suscite ce débat est à la mesure de la nécessité d’alerter nos collègues élus dans l’ensemble de nos départements et territoires sur ce sujet.

L’article 24 prévoit une baisse de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, le montant de celle-ci dépassant largement le milliard d’euros pour les communes comme pour les régions.

Je souhaite m’attarder, comme je le fais depuis plusieurs années, sur les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, qui, comme mon collègue du département de la Vienne Bruno Belin l’a indiqué, concernent principalement les départements accueillant un site nucléaire.

Ces fonds sont versés par l’État aux conseils départementaux, qui les répartissent ensuite au profit des communes et des intercommunalités dites défavorisées.

Alors que cette dotation s’élevait à 320 millions d’euros il y a quelques années, la baisse envisagée est tout de même significative, puisqu’elle s’élève à 13 millions d’euros, sachant que le département des Ardennes a perçu, à ce titre, 12 millions d’euros en 2023. Or dans la plupart des communes, cette recette sert à financer les dépenses de fonctionnement.

Je soutiendrai donc l’amendement du rapporteur général.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Belin, pour explication de vote.

M. Bruno Belin. J’ai l’impression que nous ne parlons pas la même langue, monsieur le ministre, et que c’est pour cela que vous ne nous comprenez pas.

Si vous êtes un jour amené à gérer une collectivité locale comme c’est le cas de nombreux sénateurs – je vous le souhaite sincèrement –, vous comprendrez que, quand on se met au pain sec sur le fonctionnement, il ne reste que des miettes pour l’investissement.

Comme l’un de nos collègues l’a relevé à juste titre, les collectivités, qu’il s’agisse de villages, de communes, d’EPCI ou de départements, ne peuvent plus faire d’investissements. Il en résulte que tout le monde est perdant : n’ayant pas de marché, les entreprises ne produisent pas de valeur ajoutée, et l’État perd des recettes.

Telle est la raison pour laquelle il faut absolument préserver les recettes de fonctionnement des collectivités locales. Je maintiens donc mon amendement.