M. le président. Madame Garriaud-Maylam, je pense que votre amendement comporte une erreur d’insertion, probablement due aux modifications qui sont intervenues entre-temps dans la rédaction du rapport annexé.

Accepteriez-vous de le rectifier ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Oui, monsieur le président. La mention que je propose d’ajouter dans le texte doit en effet s’insérer après l’alinéa 32, et non à l’alinéa 33.

Je me permets d’insister sur l’importance du dispositif proposé. Comme je l’ai indiqué dans la discussion générale, cela se pratique dans certains pays, notamment en Scandinavie, où les jeunes sont formés dès le plus jeune âge. Nous avons, me semble-t-il, du retard en la matière.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 188 rectifié, présenté par Mme Garriaud-Maylam, et ainsi libellé :

Après l’alinéa 32

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Des campagnes d’éducation aux médias et de sensibilisation à la désinformation à destination du public et notamment des jeunes générations seront menées.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cambon, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Sagesse.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 188 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 116 rectifié, présenté par MM. Cigolotti, Cadic, Bonneau, Canévet, Cazabonne, Folliot, Le Nay, Poadja, Détraigne et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Alinéa 33, après la cinquième phrase

Insérer deux phrases ainsi rédigées :

Le ministère poursuit l’objectif d’acquérir une première capacité exploratrice avant 2025. Celle-ci serait constituée d’un AUV 6000 m et d’un ROV 6000 m ainsi que d’un AUV 3000 et d’un ROV 3000.

La parole est à M. Olivier Cigolotti.

M. Olivier Cigolotti. Le Sénat a rendu au mois de juin 2023 un rapport d’information intitulé Lexploration, la protection et lexploitation des fonds marins : quelle stratégie pour la France ? Celui-ci formule une feuille de route pour progresser dans la connaissance de nos grands fonds marins. Pour la France, dont la superficie maritime représente dix-sept fois la superficie terrestre, grâce à ses outre-mer, il s’agit de préserver son rôle historique de grande puissance maritime et scientifique au niveau mondial.

Le rapport pointe la nécessité pour la France de ne pas manquer le tournant des grands fonds marins, comme elle a pu le faire avec les drones.

Selon nous, le ministère doit faire en sorte d’acquérir avant 2025 une première capacité exploratrice, avec un AUV 6 000 m, un ROV 6000 m, un AUV 3 000 m et un ROV 3 000 m.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cambon, rapporteur. Avis favorable. L’exploration des fonds marins est une donnée majeure dans les nouveaux sites de conflictualité. M le ministre nous met en garde sur le fait d’acheter du matériel à l’étranger, mais je comprends qu’un matériel équivalent ne sera pas disponible en France avant 2030. Peut-être peut-il nous donner quelques éclaircissements ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. D’abord, ce type de matériel est déjà disponible en location. Ensuite, la LPM en prévoit la production, financée par France 2030, à un horizon plus lointain. Envisager 2025, c’est l’assurance d’acheter sur étagère à l’étranger. À cette échéance, il est impossible que nous ayons une capacité souveraine en la matière.

Je demande le retrait de l’amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.

M. le président. Monsieur Cigolotti, l’amendement n° 116 rectifié est-il maintenu ?

M. Olivier Cigolotti. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 116 rectifié est retiré.

L’amendement n° 117 rectifié, présenté par MM. Cigolotti, Cadic, Canévet, Cazabonne, Bonneau, Détraigne, Le Nay, Folliot, Poadja et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Alinéa 33, après la cinquième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Le ministère prévoit le remplacement d’ici à 2030 des frégates de surveillance par des navires ayant nativement la capacité de mettre en œuvre des AUV/ROV profonds dans le cadre du programme European patrol corvette.

La parole est à M. Olivier Cigolotti.

M. Olivier Cigolotti. Nous proposons le remplacement d’ici à 2030 des frégates de surveillance par des navires ayant nativement la capacité de mettre en œuvre d’autres matériels d’exploration de même nature.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cambon, rapporteur. C’était l’une des recommandations du rapport d’information sénatorial que M. Cigolotti a cité tout à l’heure. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je ne comprends pas la finalité de l’amendement.

Nous allons évoquer tout à l’heure le tableau capacitaire pour 2030, avec des cibles documentées. Si je comprends bien, vous souhaitez ajouter quelque chose d’ici à 2030, mais pas dans le tableau.

M. Olivier Cigolotti. Tout à fait, monsieur le ministre ! L’idée est de profiter du remplacement des frégates de surveillance par des navires ouvrant d’autres possibilités.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Avis défavorable. Nous y reviendrons tout à l’heure avec le tableau capacitaire. Soit nous l’amendons pour programmer des choses précises, soit il s’agit de susciter de l’innovation – pas avant 2030, sinon c’est sur étagère à l’étranger –, et cela figure déjà dans le texte.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 117 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 118, présenté par M. Cigolotti, est ainsi libellé :

Alinéa 33, après la cinquième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Les entreprises de la BITD française contribuent à la montée en puissance et à l’élaboration de drones sous-marins afin de ne pas rater le tournant de cette technologie, comme cela a pu être le cas pour les drones aériens militaires.

La parole est à M. Olivier Cigolotti.

M. Olivier Cigolotti. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 118 est retiré.

L’amendement n° 163, présenté par Mme Duranton, MM. Rohfritsch, Haye, Patriat, Gattolin, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert, Dennemont et Hassani, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Richard, Mme Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :

Alinéa 33, après la cinquième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

De plus, la base industrielle et technologique française devra être mise à contribution afin de ne pas rater le tournant des drones sous-marins.

La parole est à Mme Nicole Duranton.

Mme Nicole Duranton. L’amendement est retiré, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 163 est retiré.

L’amendement n° 205 rectifié, présenté par MM. Gontard, Fernique, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 33, après la cinquième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

L’usage des sonars présents sur les sous-marins et bateaux militaires est rationalisé au maximum pour limiter leur impact sur les cétacés.

La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Des dizaines de baleines échouées sur une plage en Australie, une centaine d’autres retrouvées mortes sur les côtes écossaises et irlandaises en 2013, 1 965 échouages de cétacés pour l’année 2020 sur l’ensemble du littoral français… Ce n’est qu’un avant-goût de ce qui se poursuivra, si nous ne freinons pas l’utilisation massive des sonars.

Dès les années 1980, les scientifiques ont constaté un lien entre leur utilisation et la mort de cétacés. D’après des études récentes, les sonars militaires à basse et moyenne fréquence peuvent avoir un impact considérable sur une distance de 300 mètres. Or, à cette distance, bon nombre de cétacés ne sont pas détectables.

Ayant la capacité d’émettre pendant des heures, ces sonars peuvent causer des répercussions irrévocables sur la faune marine. Les impulsions sonores de ces instruments effraient et désorientent les cétacés et les mènent à la mort.

Cette pollution générée par l’utilisation de sonars interfère avec leur faculté à communiquer et à se déplacer. Elle engendre des blessures oculaires, qui, tout en accroissant leur perte de repères, provoquent des changements dans leurs techniques de plongée, d’ordinaire parfaitement calibrées. Et, s’il ne peut plus plonger correctement, l’animal ne peut plus se nourrir. Il est alors condamné à dériver, simplement porté par le courant, en état de malnutrition et de déshydratation, pour aller s’échouer sur une plage.

Il ne s’agit pas, avec cet amendement, de contraindre outre mesure notre marine et l’activité de nos sous-marins, mais nous demandons à l’armée de faire tout ce qui est en son pouvoir, sans, bien sûr, compromettre ses missions, pour rationaliser l’utilisation des sonars, afin de protéger au mieux la faune marine, et particulièrement les cétacés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cambon, rapporteur. Il est avéré que l’utilisation des sonars militaires a un impact sur la vie des cétacés. Cela a été scientifiquement démontré, notamment lors des exercices navals de grande envergure.

Néanmoins, cet amendement ne nous semble pas particulièrement bien placé, puisque l’alinéa qu’il tend à modifier concerne la lutte contre les actions hybrides dans les grands fonds marins.

Je pense que cette question doit, de toute façon, être traitée sur le plan international.

Nous sollicitons l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. La rationalisation est déjà intégrée par nos forces armées : le risque est identifié par nos marins, et ceux qui ont pu aller à leur contact ont pu voir à quel point la marine française a une approche de la protection et de la préservation de l’environnement qui lui est propre. Je veux d’ailleurs saluer nos marins pour les efforts qu’ils fournissent.

Le sénateur Philippe Folliot a passé suffisamment de temps avec eux dans les Terres australes et antarctiques françaises (Taaf) pour constater que ce sont souvent nos soldats qui sont engagés pour la protection et la préservation de la biodiversité. Et je ne parle même pas de la pêche illégale ni de la lutte contre l’orpaillage illégal, dans un autre registre, en Guyane.

Cette préoccupation est prise en compte dans la doctrine.

Je rappelle tout de même que, pour nos marins, les sonars sont des outils clés de protection – dans la guerre des mines, pour éviter d’être pisté par un sous-marin, etc. Leur usage n’est donc pas superflu.

La rationalisation étant déjà intégrée, monsieur le sénateur, je sollicite le retrait de votre amendement.

M. le président. Monsieur Fernique, l’amendement n° 205 rectifié est-il maintenu ?

M. Jacques Fernique. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 205 rectifié est retiré.

L’amendement n° 208 rectifié, présenté par MM. Gontard, Fernique, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 33, après la cinquième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

La marine nationale poursuit ses efforts pour supprimer les peintures antisalissure (antifouling) chimiques, nocives pour la vie marine, et chercher des solutions alternatives, si possible naturelles.

La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Cet amendement concerne le fouling, qui correspond à un encrassement causé par la colonisation de la surface immergée d’un bateau par des organismes végétaux ou animaux pouvant nuire à son bon fonctionnement.

De nombreux produits sont utilisés pour accroître la sécurité : c’est ce que l’on appelle « l’antifouling ».

À l’heure où, même à faible concentration, les biocides contenus dans les peintures « antifouling » contaminent l’ensemble de la chaîne alimentaire marine, il est temps d’agir plus efficacement. Des phytoplanctons aux prédateurs, en passant par les organismes filtreurs – huîtres, moules, etc. –, aucun animal n’est épargné.

Il est également important de rappeler que nous-mêmes, au sommet de la chaîne alimentaire, nous ne sommes pas à l’abri d’en subir les conséquences.

Alors que, depuis 2008, la convention internationale sur le contrôle des systèmes antisalissure nuisibles sur les navires pousse les entreprises françaises, dans le cas de la construction d’un navire standard, à contrôler les systèmes antisalissure, ces produits existent toujours.

Nous sommes conscients des efforts que fait la marine nationale pour supprimer les peintures antisalissure, mais il faut reconnaître qu’ils ne sont pas encore suffisants. C’est pourquoi nous les encourageons à chercher des solutions alternatives, si possible naturelles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cambon, rapporteur. Quel que soit l’intérêt de ce sujet, déposer un amendement sur l’utilisation de peintures écologiques par la marine nationale dans un paragraphe consacré aux forces spéciales et aux actions hybrides nous semble déplacé.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je me réjouis de l’avis de la commission.

Sur le fond, cet amendement est satisfait : l’effort qu’il est demandé de poursuivre est d’ores et déjà largement engagé et il est évident que nous allons continuer.

Pour autant, comme je vous le disais tout à l’heure, si nous intégrons ce type d’ajout, nous aurons un rapport annexé comme il n’y en a jamais eu sous la Ve République, avec un lot de prescriptions qui semblent un peu éloignées de l’objectif opérationnel pour lequel ce rapport a été imaginé.

Je suis donc, par cohérence, défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 208 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 106 rectifié, présenté par MM. M. Vallet, Temal et Kanner, Mmes Carlotti, Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Roger, Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 33, avant-dernière phrase

1° Remplacer les mots :

les entreprises

par les mots :

l’écosystème des entreprises privées

2° Supprimer les mots :

(New Space)

La parole est à M. Mickaël Vallet.

M. Mickaël Vallet. Permettez-moi de vous citer un extrait d’une lettre personnelle adressée par le général de Gaulle à Pierre Messmer le 19 juillet 1962 : « J’ai constaté, notamment dans le domaine militaire, un emploi excessif de la terminologie anglo-saxonne. Je vous serais obligé de donner des instructions pour que les termes étrangers soient proscrits chaque fois qu’un vocable français peut être employé, c’est-à-dire dans tous les cas. »

L’esprit de cette lettre du général de Gaulle a été repris dans la loi Toubon, qui pose pour principe que nous devons employer le terme français lorsque l’équivalent existe.

Je veux vous féliciter, monsieur le ministre, parce qu’il n’y a qu’un seul terme anglo-saxon dans l’ensemble du rapport annexé. Je ne peux pas dire que tous les ministères et tous vos collègues soient aussi vertueux… C’est un euphémisme que de le dire, et je ne monte pas plus haut que le niveau gouvernemental – les adeptes de la start-up nation me comprendront…

Pour la bonne forme, parce que j’ai décidé que nous allions désormais regarder cela de près dans tous les textes qui nous seraient soumis, parce que nous devons être exemplaires et parce que les gens sont finalement, plus qu’on l’imagine, exaspérés par les excès du « globish », je vous serais obligé, monsieur le ministre, de bien vouloir émettre un avis favorable sur cet amendement qui a pour objet de remplacer la référence aux entreprises par celle à « l’écosystème des entreprises privées innovantes du domaine spatial » et de supprimer la parenthèse suivante, où est inscrite l’expression « New Space ».

On peut comprendre que certaines expressions consacrées, certains concepts internationaux puissent ou doivent être employés, mais il faut alors prévoir un glossaire en fin de rapport. Les choses seront ainsi traitées dans le respect de la lettre et de l’esprit de la Constitution.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cambon, rapporteur. La mention de l’écosystème des entreprises privées innovantes est moins concise que celle du « New Space »,…

M. André Gattolin. Au moins, elle est parlante !

M. Christian Cambon, rapporteur. … mais elle a, en effet, l’avantage d’être parlante.

La commission est favorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Certes, il n’y a qu’un terme anglo-saxon, mais c’est un de trop !

Je pense qu’il faut tout simplement que nous trouvions un nom pour cette notion de « New Space ». La rédaction proposée est satisfaisante ici ; de toute façon, le rapport annexé sera tellement long que personne ne le lira… (Sourires.)

L’appellation « New Space » vient, comme on peut l’imaginer, de l’Otan. Il faut que nous fassions l’effort d’imaginer des mots français de substitution, quitte, d’ailleurs, à saisir, s’il le faut, l’Académie française, comme je l’ai déjà fait.

Cela dit, au-delà de la question de l’utilisation de vocables anglais, le « New Space » mérite d’être mentionné : il renvoie, dans les rencontres internationales, à la militarisation de l’espace.

J’émets un avis favorable sur l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour explication de vote.

M. Mickaël Vallet. Je veux dire, pour la suite – je ne voudrais pas avoir à le répéter à chaque fois –, que ce n’est pas tant l’Académie française qu’il faut saisir, même si votre lointain prédécesseur Pierre Messmer y a siégé – ce sera peut-être également votre cas un jour, monsieur le ministre –, que la Commission de terminologie qui a d’ailleurs maintenant pour titre : Commission d’enrichissement de la langue française.

Cette commission, qui a fêté, me semble-t-il, ses trente ans, est un organe exceptionnel, qui travaille beaucoup. Elle est interministérielle, mais elle n’est peut-être pas très écoutée ou pas toujours aussi écoutée qu’il le faudrait par les premiers concernés, à savoir les ministres et administrations de l’État.

N’hésitez pas à la saisir. Elle vous trouvera un terme adéquat !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 106 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 133, présenté par M. P. Laurent, Mmes Gréaume, Cohen et Cukierman, MM. Gay, Lahellec, Ouzoulias et Savoldelli, Mmes Varaillas, Apourceau-Poly et Assassi, MM. Bacchi et Bocquet et Mme Brulin, est ainsi libellé :

Alinéa 33, avant-dernière phrase

Supprimer les mots :

et en développant une capacité d’action dans l’espace

La parole est à M. Pierre Laurent.

M. Pierre Laurent. Par cet amendement, nous voulons de nouveau poser la question de la militarisation de l’espace et de nos décisions en la matière. J’ai eu plusieurs fois l’occasion d’évoquer ce sujet, et je ne comprends toujours pas pourquoi nous le banalisons.

Je veux mettre en avant deux problèmes.

Premièrement, cette militarisation aura des conséquences très concrètes sur les usages civils de l’espace, parce que l’encombrement spatial ne laissera pas de la place à tout le monde, à tous les satellites et systèmes spatiaux placés en orbite. Il y aura donc une compétition croissante.

Deuxièmement, la militarisation de l’espace conduira à des restrictions dans les coopérations internationales en matière spatiale, puisqu’elle appelle la privatisation des connaissances scientifiques, quand le développement des usages civils appelle, au contraire, leur partage.

Nous allons transformer l’espace en un lieu de compétition de plus en plus privatisé. Je crains que cette compétition se fasse au bénéfice de la militarisation et au détriment d’usages civils essentiels dans l’avenir, par exemple pour la lutte contre le réchauffement climatique, la surveillance des sols et des océans ou encore la géolocalisation.

Nous allons détourner notre capacité de coopération vers la militarisation. Je crois que nous n’avons pas à accompagner ce mouvement. Nous avons plutôt à nous dresser contre lui et à agir avant qu’il ne soit définitivement trop tard.

M. le président. L’amendement n° 82 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret, MM. Temal et Kanner, Mmes Carlotti et G. Jourda, MM. Roger, Todeschini, M. Vallet, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 33, avant-dernière phrase

Remplacer les mots :

dans l’espace

par les mots :

, de détection et d’attribution des actions menées dans l’espace, potentiellement malveillantes, afin d’être en mesure de protéger nos moyens et de décourager nos adversaires d’y porter atteinte

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Le domaine spatial a connu trois évolutions majeures depuis la fin de la Guerre froide : premièrement, le passage d’une activité spatiale militaire purement stratégique à un usage plus lié aux opérations elles-mêmes – la guerre en Ukraine a démontré l’accélération de l’utilisation des données spatiales en soutien des opérations de combat – ; deuxièmement, la multiplication du nombre de satellites en orbite ; troisièmement, une « arsenalisation » de l’espace, qui transforme les satellites en cibles potentielles. Par exemple, en 2019 et 2021, l’Inde, puis la Russie ont procédé à des tests antisatellites destructifs.

En tant que puissance spatiale, la France a besoin de protéger ses matériels et, plus largement, ses intérêts. Sa capacité d’action dépend de son aptitude à surveiller l’environnement spatial pour détecter, puis attribuer les actes inamicaux ou illicites dans le cadre du droit international.

Cet amendement vise à faire figurer ce niveau d’ambition dans le rapport annexé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cambon, rapporteur. Pour ce qui concerne l’amendement n° 133, on peut regretter, avec Pierre Laurent, que l’espace soit devenu un champ de conflictualité, mais ne pas prendre en compte cette nouvelle donne risque de nous priver des moyens d’y répondre et de nous affaiblir, alors même que d’autres puissances se mobilisent et développent de telles capacités. Avis défavorable.

L’amendement n° 82 rectifié a recueilli l’avis favorable de la commission, puisqu’il tend à préciser que les capacités spatiales françaises futures devront être en mesure de détecter et d’attribuer les actions menées dans l’espace. On sait qu’il y a déjà eu un certain nombre d’incidents et cette recommandation est utile. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ce que dit Pierre Laurent est intéressant. Je pense que ce n’est pas le principe même de la capacité qui est en jeu. C’est, comme pour toute arme, tout programme ou toute mission, la doctrine que nous mettons en place.

Vous affirmez que ce que l’on mettra sur le spatial militaire, c’est ce que l’on ne mettra pas sur le spatial civil. Je ne suis pas d’accord avec ce lien que vous établissez, précisément parce que les satellites civils seront, demain, en danger.

Qui dit militarisation dit défense, protection. Quand la France commence à se doter de capacités dans l’espace, c’est non pas pour être en mesure d’agresser – je pense que vous vous en doutez –, mais tout simplement pour être en situation de patrouiller, de surveiller et de protéger nos propres intérêts civils.

Je pense que nous devons nous accorder sur le fait que ces capacités serviront à cela. On pourra y revenir lors de l’examen du tableau capacitaire du rapport annexé, parce que la problématique est la même : quand on veut se doter de matériel, il convient de se demander pour quelle mission, dans quelle logique expéditionnaire. Cela vaut aussi pour l’espace en matière de protection.

Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 133.

En revanche, je suis favorable à l’amendement n° 82 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 133.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 82 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 107 rectifié, présenté par Mme G. Jourda, MM. Raynal, Temal et Kanner, Mmes Carlotti et Conway-Mouret, MM. Roger, Todeschini, M. Vallet, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 33, dernière phrase

Remplacer cette phrase par deux alinéas ainsi rédigés :

La stratégie spatiale de défense (SSD) sera actualisée afin de conduire les ambitions opérationnelles de la très haute altitude telles que le développement de la surveillance améliorée de l’espace et la défense des intérêts spatiaux français critiques, permettant ainsi à la France de jouer un rôle moteur au sein de l’Europe spatiale et de créer une communauté spatiale militaire alliée ayant pour objectif d’assurer la sécurité dans l’espace.

Dans un contexte spatial marqué par les tensions, la France devra relever le défi capacitaire à travers l’adoption cadencée de programmes soutenant ses ambitions, afin de mettre en cohérence sa volonté d’aboutir à un véritable modèle français de maîtrise de l’espace, capable de s’adapter aux changements et aux évolutions doctrinales, capacitaires et politiques, mais également convaincre la communauté internationale de la pertinence de ce modèle comme une contribution importante à la sécurité collective.

La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. Nous considérons que le contexte spatial actuel nécessite que le rapport annexé soit plus ambitieux dans son évocation de la stratégie spatiale de défense. En effet, une seule de ses phrases y fait référence : « La stratégie spatiale de défense sera actualisée afin de prendre en compte des enjeux opérationnels de la très haute altitude. » Il faut un peu plus !

Comme cela a été dit précédemment, l’espace s’est militarisé, devenant un nouveau théâtre de batailles entre objets spatiaux offensifs et défensifs. Nous devons fixer un haut niveau d’ambition.

L’objet de cet amendement est donc de préciser ce que doivent être ces ambitions stratégiques majeures, en évitant de réduire les intérêts français à ses seuls satellites militaires et en impliquant nos partenaires alliés, notamment européens, en vue d’une appropriation collective de la sécurité dans l’espace.