M. le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe, pour présenter l’amendement n° 563.

Mme Sabine Van Heghe. Le manque de moyens dans les Ehpad et dans le secteur du maintien à domicile est considérable. Les besoins en termes de création d’emplois et de financement sont énormes et inquiétants. Les personnels sont à bout de souffle.

La perte d’autonomie peut aussi être liée à des problèmes de santé dus à l’insuffisance des mesures de prévention des risques tout au long de la vie, particulièrement en situation de travail. Faire travailler les salariés deux ans de plus, alors que les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ont été supprimés augmente les risques d’aggravation des situations difficiles pouvant mener à la dépendance.

Les moyens dédiés à la branche autonomie prévus à l’article 18 sont ridiculement en deçà des besoins. Nous demandons la suppression de celui-ci comme nous demandons, au nom des Français, le retrait de votre réforme des retraites, injuste et brutale.

Les Français étaient d’ailleurs nombreux dans la rue aujourd’hui, pour la sixième journée de mobilisation. Nous savons que 90 % des actifs sont opposés à cette réforme. Cessez ce mépris envers les Français ! Cessez ce mépris envers les parlementaires et demandez au président Macron d’avoir le courage de recevoir les organisations syndicales, qui demandent à le rencontrer !

Retirez votre projet !

M. le président. Les amendements nos 605 et 634 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 662.

M. Yan Chantrel. Vous l’aurez compris, au-delà de cet amendement de suppression de l’article 18, c’est bien évidemment l’ensemble du texte que nous souhaitons supprimer !

J’aimerais partager avec vous une information importante : un accord vient d’être trouvé en Espagne pour faire davantage contribuer les hauts revenus au régime de retraite. (M. Fabien Genet sexclame.) Qui sait, peut-être cela changera-t-il la donne et accepterez-vous de revenir sur cette réforme ?

Les Espagnols vont donc accroître l’assiette de cotisation, c’est-à-dire la part du salaire sur laquelle les employés cotisent, en augmentant le plafond au-delà duquel les salariés ne sont plus prélevés afin de dégager des recettes supplémentaires. Monsieur Dussopt, une réforme des retraites de gauche est possible, mais ce n’est pas la vôtre !

D’autres choix politiques sont aussi possibles. Mme la rapporteure générale en appelle à la raison budgétaire, mais le vrai courage, quand on fait une réforme, ce n’est pas de s’attaquer à ceux qui en ont le moins, c’est de s’attaquer à ceux qui en le plus. Voilà ce qui est difficile !

Certes, il n’est pas aisé de faire contribuer davantage les riches et les puissants qui financent parfois vos campagnes et les médias (Marques dapprobation sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.), mais il n’en reste pas moins que c’est là que résiderait le vrai courage. Ce n’est pas en s’attaquant à ceux qui en ont le moins.

Nous vous demandons donc de retirer cette réforme, profondément injuste et brutale. (Applaudissements sur des travées du groupe SER. – M. Jacques Fernique applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 692.

Mme Annie Le Houerou. « Les vieillards sont-ils des hommes ? À la manière dont notre société les traite, il est permis d’en douter », écrivait Simone de Beauvoir dans son essai La Vieillesse, publié en 1970.

La parution du livre Les Fossoyeurs, qui a déclenché l’affaire Orpea, en est une triste illustration. Maltraitante institutionnelle, délais d’attente, faible prise en charge : les scandales se multiplient, mais les moyens alloués à l’accompagnement de nos aînés restent insuffisants.

Où sont les promesses du président Macron sur l’autonomie ? Nous aurions dû avoir droit à une ambitieuse cinquième branche et à une grande loi sur la dépendance. Dans les faits, la loi a été abandonnée et seules quelques mesures éparses se sont frayé un chemin dans la loi de financement de la sécurité sociale.

La branche autonomie n’est pas dotée de moyens suffisants pour faire face aux immenses défis du secteur : crise aiguë des recrutements, besoin de dizaines de milliers d’embauches, hausse drastique du taux d’encadrement dans les Ehpad, etc.

En 2019, le rapport Libault estimait que la branche autonomie nécessiterait a minima 6 milliards d’euros supplémentaires par an à partir de 2024 et 9 milliards d’euros supplémentaires par an à partir de 2030.

L’article 18 de ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale vient corriger à la marge le plafond des dépenses de la branche autonomie pour l’année 2023. C’est une paille au regard des besoins : 240 000 recrutements en Ehpad supplémentaires pour améliorer le taux d’encadrement et revaloriser des métiers du grand âge et 10 000 nouvelles places. Les ressources que vous proposez sont inadaptées.

Nos anciens, leur famille et les professionnels des Ehpad, qui étaient dans la rue aujourd’hui, vous disent que votre projet n’est pas légitime et vous demandent de le retirer. Toutes ces personnes méritent mieux que du mépris de la part du Président de la République.

Retirez votre projet !

M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° 721.

Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement vise à rejeter la rectification de l’objectif de dépenses de la branche autonomie proposée au travers de l’article 18.

Cet article vient corriger à la marge le plafond des dépenses de cette branche pour l’année 2023. Alors que nous sommes face à un vieillissement démographique sans précédent, alors que le Gouvernement refuse une loi Grand Âge afin de nous préparer collectivement à cette évolution majeure, le budget proposé est insuffisant face aux besoins réels.

Vous voulez, de manière dogmatique et obsessionnelle, repousser l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, alors que d’autres solutions existent. Nous n’avons pas manqué, depuis le début de l’examen de ce texte, de vous présenter des mesures justes et responsables. D’autres pays en prennent le chemin, cela a été évoqué par Yan Chantrel.

Vous tentez d’imposer votre réforme injuste au terme d’un véritable passage en force et au mépris de la mobilisation historique des Français. Travailler jusqu’à l’épuisement, être malade à la retraite : voilà ce que promet votre réforme.

Pour un homme, l’espérance de vie est de 79,4 ans et l’espérance de vie en bonne santé s’établit à 64,4 ans. Pour une femme, l’espérance de vie s’élève à 85,5 ans et l’espérance de vie en bonne santé à 65,9 ans. Deux ans de travail en plus, cela signifiera dans beaucoup de cas, notamment lorsque le travail est difficile, que les problèmes de santé iront en s’accélérant.

Retirez votre réforme, elle est injuste !

M. le président. L’amendement n° 752 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 802.

M. le président. Les amendements nos 857, 887 et 924 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Rémi Cardon, pour présenter l’amendement n° 967.

M. Rémi Cardon. Cet amendement vise à supprimer l’article 18, qui tend à fixer l’objectif de dépenses pour la branche autonomie.

J’ai fouillé un peu, j’ai notamment regardé le tract de M. Macron à la présidentielle, qui comprenait des propositions en faveur de l’autonomie. Pourtant, j’ai beau chercher et chercher encore dans votre réforme, elle ne prévoit rien d’autre pour nos seniors que de les faire travailler deux années supplémentaires !

Nous aurions dû avoir droit à une ambitieuse cinquième branche et à une grande loi sur la dépendance. Rien de tel ! Dans les faits, la loi a été abandonnée et les mesurettes annoncées ont totalement disparu. Encore une fois, la branche autonomie n’est pas dotée de moyens suffisants pour faire face aux immenses défis du secteur de l’autonomie, notamment à la crise aiguë dans le recrutement.

Nous avons besoin de dizaines de milliers d’embauches et d’une hausse drastique du taux d’encadrement dans les Ehpad. Le rapport Libault du mois de mars 2019 estimait que la branche autonomie nécessiterait a minima 6 milliards d’euros supplémentaires par an à partir de 2024 et 9 milliards d’euros supplémentaires par an à partir de 2030.

Pourtant, les dépenses en faveur de l’autonomie progressent seulement de 2 milliards d’euros dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, ce qui n’est pas suffisant. Pour une branche de l’autonomie ambitieuse, il faudrait 240 000 recrutements en Ehpad pour améliorer le taux d’encadrement et la création de 10 000 places supplémentaires. Au total, la revalorisation des métiers du grand âge s’élèverait à une enveloppe de 11 milliards d’euros.

Monsieur ministre, j’aimerais vous poser une question, mais je ne sais pas si vous aurez le courage de me répondre : si l’on ramenait les aides aux entreprises au niveau de 2018, la cagnotte serait-elle bien de 20 milliards d’euros ?

M. le président. Les amendements nos 1004, 1051 et 1122 ne sont pas soutenus.

La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1165 rectifié bis.

Mme Monique Lubin. Au tout début de la présentation de ce projet de loi, certains ministres affirmaient que les économies réalisées permettraient de dégager des budgets nécessaires pour mener à bien d’autres grandes réformes sociales. En clair, il s’agissait de demander aux salariés de faire des sacrifices pour payer les réformes censées améliorer leur vie future.

Monsieur le ministre, j’ai eu l’occasion d’échanger rapidement avec vous, vous m’aviez dit que telle n’était pas votre vision des choses. (M. le ministre acquiesce.) Je le reconnais, sur ce point, nous semblions d’accord.

On va demander des sacrifices aux salariés, on va reculer l’âge de la retraite, mais, pour ce qui est des réformes, notamment un projet de loi pour les personnes âgées, on ne voit strictement rien venir !

Je crains que, d’ici à la fin du quinquennat, on aille vers des réformes qui amènent toujours du moins, sans jamais voir arriver les réformes urgentes devant amener du plus, en particulier en ce qui concerne la dépendance !

M. le président. Les amendements nos 1198, 1231 et 1262 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 1299.

M. Franck Montaugé. Pas plus que les sujets précédents – accidents du travail-maladies professionnelles, famille, Ondam –, l’autonomie, question très importante s’il en est, n’est traitée par votre gouvernement à la hauteur des enjeux ni des difficultés rencontrées par beaucoup de nos compatriotes en perte d’autonomie.

Vous avez plusieurs fois annoncé, cela vient d’être rappelé, une loi sur la dépendance, toujours repoussée. Malgré vos annonces, nous n’avons absolument rien vu venir.

Certes, le ministre du travail que vous êtes, monsieur Dussopt, est plus éloigné des territoires que les sénateurs, mais il faudrait que vous alliez interroger, au-delà de la question difficile et douloureuse des Ehpad, les élus locaux chargés des centres communaux d’action sociale (CCAS) et des centres intercommunaux d’action sociale (CIAS), les présidents et les conseillers communautaires des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), ainsi que les représentants des départements. Il serait bon que vous fassiez avec eux le point sur les besoins en termes de financement de leurs services d’aide et d’accompagnement à domicile.

Ce secteur est aussi en train de craquer, ce qui met parfois à mal la qualité du service offert aux usagers, mais aussi les conditions de travail des personnels et leur retraite. La modification de la branche autonomie de la sécurité sociale que vous proposez de rectifier ici n’apporte aucune réponse budgétaire à ces questions terribles et importantes.

C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l’article 18.

M. le président. Les amendements nos 1334, 1397, 1430, 1491, 1528 et 1534 ne sont pas soutenus.

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° 1564.

Mme Marie-Pierre Monier. L’article 18 prévoit une augmentation de 100 millions d’euros des dépenses de la branche autonomie de la sécurité sociale.

En bonne professeure de mathématiques, j’ai fait mes petits calculs : cela représente 0,27 % d’augmentation de l’enveloppe globale de la branche autonomie. C’est peu, c’est même à des années-lumière des besoins réels et des moyens que nous devrons mobiliser pour faire face au vieillissement de la population.

Ce n’est pas avec ces 100 millions d’euros que nous permettrons à chacun de vivre le vieillissement avec sérénité et de profiter d’une retraite en bonne santé, avec une réelle capacité d’autonomie. Nous devons nous donner les moyens pour que tous puissent profiter de ces années de repos bien mérité.

Pourquoi avoir choisi de présenter cette réforme dans le cadre d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale si votre intention n’était pas de profiter de cette occasion pour apporter également une réponse à la question de l’autonomie des seniors, liée à celle des retraites ? Pourquoi avoir choisi un tel véhicule législatif si votre objectif n’était pas de proposer aux Français qui ont travaillé dur de profiter de leur retraite dans de bonnes conditions ?

Je crains, monsieur le ministre, que votre choix n’ait été avant tout motivé par une volonté de contraindre, une fois de plus, le débat, puisque seul un texte budgétaire légitimait le recours à l’article 47-1 de la Constitution. Cet amendement vise donc à supprimer cet article 18, dont le seul objet est de faire illusion.

Il est encore temps de renoncer à cette réforme injuste. Retirez-la !

Au lieu de faire porter les efforts sur ceux qui ont les métiers les plus pénibles, nous pourrions réfléchir collectivement à une manière de leur offrir une vieillesse joyeuse et vivante, notamment en ouvrant le chantier d’une loi Grand Âge à la hauteur des besoins !

M. le président. L’amendement n° 1616 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 1646.

Mme Émilienne Poumirol. Vous parlez sans cesse du virage domiciliaire. Oui, les Français préfèrent terminer leur vie à domicile. Pour cela, il faut une véritable politique publique et la mise en place d’un service d’aide à la personne digne de ce nom.

Nous connaissons les difficultés des services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad) et des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad). Ils sont confrontés à une pénurie de personnel, essentiellement en raison du manque de reconnaissance de ces métiers et des salaires de misère !

Où est donc passée l’ambition d’une grande loi sur la dépendance ? Qu’en est-il du budget de la cinquième branche, certes créée, mais sans moyens ?

Je ne reviendrai pas, mes collègues l’ont fait, sur le scandale des Ehpad privés. La marchandisation de la dépendance est déjà là. Quelle honte !

Pour un vrai budget, il faut des moyens. Nous vous avons proposé différentes ressources, mais vous les refusez, car il s’agit de taxer les plus riches, ce dont vous ne voulez pas entendre parler.

Votre réforme est injuste. Nous n’en voulons pas !

M. le président. Les amendements nos 1685, 1719 et 1740 ne sont pas soutenus.

La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 1773.

Mme Michelle Meunier. Je vous l’ai dit tout à l’heure, la CNSA, qui est à la solidarité et à l’autonomie ce que le COR est aux retraites, à savoir une instance autorisée et avisée, n’est pas favorable à cette réforme.

La CNSA est inquiète et tire la sonnette d’alarme sur les problèmes rencontrés par les professionnels du secteur, aussi bien en ce qui concerne l’attractivité des métiers qu’en ce qui concerne leur pénibilité. Elle plaide en faveur d’une grande loi sur l’autonomie pour les personnes âgées.

La CNSA s’inquiète aussi de l’équilibre de sa branche. Les dispositions inscrites à l’article 12 sur l’assurance vieillesse des aidants, qui seront certainement votées, ne sont pas suffisamment financées. Le coût de ces mesures est évalué à 140 millions d’euros par an. La CNSA demande que ces dépenses soient compensées par de nouvelles recettes, ce qui n’est pas le cas en l’état.

C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article 18. Au-delà, nous souhaitons la suppression et le retrait de l’ensemble du projet de loi.

M. le président. Les amendements nos 1786 et 1813 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 1843.

M. Patrick Kanner. Monsieur le ministre, comme vous le constatez, des amendements de suppression peuvent être l’occasion d’aborder des questions de fond qui auraient donc mérité d’être mieux prises en considération, notamment pour le grand âge.

Si, en 1945, l’espérance de vie avait été celle d’aujourd’hui, elle aurait certainement été prise en considération en vue de la construction d’une cinquième branche de la sécurité sociale. Or la cinquième branche imaginée depuis quelques années par le gouvernement – cela fait soixante-dix mois que l’exécutif autour de M. Macron travaille et avance des propositions en la matière – est une branche sans feuilles ! (Sourires sur les travées du groupe SER.) C’est déjà un point positif, il y a une branche, mais il n’y a pas de feuilles, c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’argent puisqu’il manque entre 10 et 12 milliards d’euros pour faire une grande loi sur la dépendance.

Non seulement une grande loi sur la dépendance aurait permis de régler un important problème de société vis-à-vis de nos aînés et de leur famille – on sait que beaucoup de retraités aident aujourd’hui les personnes de 90 ans ou de 95 ans, en Ehpad ou, pour les plus chanceux d’entre elles, encore à domicile –, mais elle aurait également permis de créer des dizaines de milliers d’emplois de qualité, qualifiés, pérennes et non délocalisables. Nous aurions ainsi pu faire entrer en masse un très grand nombre de cotisations et équilibrer le budget de la Cnav. Voilà donc une mesure vertueuse qui aurait dû être imaginée depuis bien longtemps par ce gouvernement !

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour présenter l’amendement n° 1865.

M. David Assouline. Selon le baromètre des aidants 2017 de la Fondation April et de BVA, 11 millions d’aidants familiaux, soit un Français sur six, accompagnent au quotidien un proche en situation de dépendance en raison de son âge, d’une maladie ou d’un handicap. En 2030, selon les projections, un actif sur quatre sera aidant.

Voilà les sujets que nous aurions pu aborder au travers d’une loi sur les retraites. Nous aurions dû discuter du travail, au travers d’une loi Travail, et avoir un débat de fond sur les mutations attendues dans les décennies à venir, notamment en raison de l’allongement de la durée de vie. D’ailleurs, cette dernière continuera-t-elle encore de croître ? Je l’espère, mais les choses ne paraissent plus aussi évidentes, en particulier du fait du réchauffement climatique. J’ignore quelles sont les projections en la matière, mais force est de reconnaître que cette société du grand âge, avec tout ce qu’elle implique en termes d’emploi comme de mutation de l’assurance vieillesse, aurait dû être au cœur du débat à l’occasion de l’élaboration d’une véritable loi sur les retraites. Cela ne s’est pas produit.

Aujourd’hui, nous en sommes à la sixième manifestation historique pour dire non à la retraite à 64 ans. Par ailleurs, 90 % des actifs sont opposés à votre réforme. Pour autant, monsieur le ministre, votre seule réponse reste le mépris.

Le Président de la République n’a-t-il pas osé dire, le jour même où vous avez demandé le vote bloqué, qu’il ne répondait pas aux syndicats parce que le temps était au Parlement ? Le mépris, c’est ça !

M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour présenter l’amendement n° 1931.

M. Patrice Joly. Rappelons les enjeux derrière les chiffres de l’article 18 : 2,5 millions de personnes en perte d’autonomie aujourd’hui, 4 millions en 2050. Le sujet est donc devant nous.

Si cette thématique concerne les plus âgées des personnes âgées, puisque 30 % des plus de 75 ans sont touchés par la perte d’autonomie, elle concerne aussi 6,6 % de la tranche des 60-75 ans. On mesure donc les conséquences qu’aurait un report de l’âge de la retraite !

S’ajoutent à cela les disparités sociales liées au métier exercé et ayant des conséquences sur l’usure des individus, mais aussi territoriales au regard de la part que représentent les personnes âgées dans la population des territoires.

Au vu du nombre de personnes qui seront en perte d’autonomie dans les années à venir, la question est devant nous, je le disais. Le travail de réflexion et les innovations à mettre en œuvre, à la fois dans l’organisation des services et dans les modalités de prise en charge des personnes dépendantes, doivent être engagés.

Les pertes d’autonomie sont progressives et nécessitent une adaptation de leur prise en charge : accompagnement à domicile, alternative résidentielle, Ehpad du futur. Autant de solutions qu’il nous faudra envisager dans une approche d’établissements, mais également territoriale, d’où l’intérêt d’adopter rapidement une loi Grand Âge. Il y a véritablement urgence à traiter de cette question sociétale.

M. le président. Les amendements nos 2011, 2093 et 2283 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 2292.

M. Jean-Claude Tissot. Il est question, dans l’article 18, d’une rectification de l’objectif de dépenses de la branche autonomie. Cette rectification mériterait d’être d’une tout autre ampleur pour donner véritablement corps à cette cinquième branche de la sécurité sociale. Les moyens qui y sont affectés sont dramatiquement insuffisants ces dernières années. Différents rapports nous ont d’ailleurs alertés sur les grandes problématiques du vieillissement de la population. Tous indiquent deux axes incontournables en la matière : d’une part, besoin d’un financement pérenne pour le secteur, d’autre part, nécessité de revaloriser les métiers de l’aide et des soins à domicile.

Sur le premier axe, le compte n’y est évidemment pas avec cet article ; quant au second, la revalorisation de ces métiers, qui souffrent pourtant d’un fort déficit d’attractivité, attendra encore. Ces professionnels, qu’ils travaillent en établissement ou à domicile, devaient avoir une vie un peu trop dorée à vos yeux, puisque vous leur ajoutez deux années supplémentaires, qui viennent en plus des conditions de travail harassantes, des sous-effectifs chroniques et des salaires indignes.

Emmanuel Macron avait annoncé une réforme Grand Âge et autonomie pour avant l’automne 2019. Des personnes en perte d’autonomie ou en situation de handicap, leurs familles et les associations l’attendaient avec beaucoup d’espoir, de même que les personnels qui les accompagnent. Il n’y a pas eu de réforme ; il n’y a eu que du mépris, le même mépris que celui qui a été opposé aujourd’hui aux 90 % d’actifs qui sont opposés à cette réforme injuste, le même mépris que celui qui est opposé aux millions de personnes qui ont participé aux six manifestations historiques que nous venons de connaître, le même mépris que celui que vous opposez à l’opposition sénatoriale depuis le début de ces débats.

Nous sommes surtout choqués par le mépris jupitérien du Président de la République envers les syndicats et les organisations de jeunesse qu’il refuse de recevoir. Afficher tant de mépris ne vous donne pas plus de légitimité, bien au contraire.

Retirez ce projet et occupez-vous des vraies urgences.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour présenter l’amendement n° 3210.

M. Jacques Fernique. Le budget proposé pour la branche autonomie ne répond pas aux besoins. Je tiens à rappeler que, consulté pour avis à propos du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, le conseil de la CNSA a émis un avis défavorable. En 2050, selon l’Insee, 4 millions de seniors seront en situation de perte d’autonomie. Vous n’y répondez pas. Les défiances de la CNSA sont claires et nous les partageons, ce qui nous amène à demander la suppression de cet article.

Pour conclure, et puisque c’est ma dernière intervention, le 44.3 de la Constitution et le 42.9 du règlement du Sénat s’étant mis à deux pour me priver d’explication de vote globale, je vous rappellerai maintenant l’essentiel : six journées de manifestations d’ampleur considérable, l’immense majorité des actifs opposés à la retraite à 64 ans. Votre seule réponse est le mépris : mépris envers l’opposition sénatoriale – la Constitution et notre règlement vous le permettent –, mépris du Président de la République envers les syndicats, envers les salariés, envers les Français. Qu’est-ce qui légitime cette attitude ?

En posant cette question, je ne peux m’empêcher de penser à une certaine déclaration : « Aucune réforme, si nécessaire soit-elle, ne peut être menée à bien sans une large adhésion de toutes les parties intéressées […] Il apparaît clairement que ce n’est pas le cas aujourd’hui. Les manifestations en cours […] en sont la preuve. C’est pourquoi j’ai décidé de retirer l’actuel projet de loi. » Ce sont les mots du président Jacques Chirac, le 8 décembre 1986. Puisse le président Emmanuel Macron faire preuve d’un même sens de la cohésion nationale.

Ce projet n’est pas légitime. Il faut le retirer ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Florence Blatrix Contat applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 4063 rectifié.

Mme Michelle Gréaume. Par cet amendement, nous voulions interroger le montant clairement insuffisant que vous prévoyez pour la branche autonomie de la sécurité sociale.

J’en profite pour vous dire combien votre réforme est regrettable pour tous les corps qu’elle va abîmer, casser, les maladies professionnelles qu’elle va déclencher en nombre, les décès prématurés qu’elle va provoquer. En repoussant l’âge de départ à la retraite à 64 ans, en ajoutant des années de cotisation à toutes celles et à tous ceux qui travaillent, pour en porter le nombre à 43 ans et 44 ans, vous avez fait le choix de faire payer le travail pour protéger le capital, à qui vous ne demandez rien. Les profits des entreprises, les dividendes ne sont pas égratignés. Au contraire, ils sont concentrés et renforcés.

Demander aux Français de travailler plus longtemps parce qu’ils vivraient plus longtemps est une imposture, d’autant que, vous le savez bien, l’espérance de vie, comme celle d’une retraite en bonne santé, varie selon la classe sociale et l’emploi occupé.

Votre réforme est mauvaise, tout comme cet article et les précédents. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 18.

Malgré les six manifestations historiques, les 90 % des actifs opposés à la retraite à 64 ans, votre seule réponse, c’est le mépris : mépris envers l’opposition sénatoriale, mépris, surtout, du Président de la République envers les syndicats, qu’il refuse de recevoir, mépris envers les salariés et les Français.

Votre projet n’est pas légitime. Retirez-le !