M. le président. Il faut conclure !

Mme Corinne Féret. Le risque est réel de mettre en concurrence les seniors et les jeunes si l’on s’en tient au seul critère du coût du travail.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je n’imagine pas que cet amendement puisse être autre chose qu’un amendement d’appel.

Monsieur le ministre nous dit qu’il n’a pas de tabou sur les exonérations sociales. Vous en avez un peu, tout de même, monsieur le ministre, car vous annoncez 75 milliards d’euros d’exonérations annuelles de charges sociales sans renoncer au discours permanent sur les déficits publics. Or jamais aucun lien n’est fait entre le volume des exonérations de charges sociales et le montant des déficits publics.

M. Éric Bocquet. Très juste !

Mme Laurence Rossignol. Pourtant, il y en a un, et vous n’en parlez jamais : voilà quel est votre tabou !

Monsieur Savary, je vous crois sincère quand vous renvoyez à la consultation des partenaires sociaux. Toutefois, permettez-moi de vous inviter à la prudence sur la nature de cette concertation et sur les garanties que pourraient retirer les partenaires sociaux d’une négociation avec le Gouvernement qui a clairement fait le choix de s’émanciper de leur avis en matière de politique sociale.

Je n’ai pas tout compris des dispositions de cet amendement – peut-être n’ai-je pas été assez rigoureuse ou attentive. Vous avez dit que l’employeur s’engageait à garder le salarié, nonobstant l’ensemble des règles du code du travail concernant le licenciement, par exemple. Je n’imagine pas qu’il s’agisse d’un engagement qui protège le travailleur dans toutes les circonstances. Comment cette disposition s’articule-t-elle avec la procédure de licenciement habituelle, que ce soit pour faute, pour raison économique ou à la suite d’un plan social ? À ce moment-là, il n’y aurait plus d’engagement. Il est donc nécessaire de retravailler ce point.

Enfin, alors que le président Retailleau nous a dit qu’il existait un lien entre cet amendement et le recul d’âge, notre collègue Olivier Henno a souligné que ce dispositif était un pari. En ce qui me concerne, j’aime bien que les paris soient équitables. Or le recul de l’âge de départ à la retraite n’est pas un pari pour le Gouvernement, mais un couperet appelé à tomber dès le vote de la loi.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.

M. Jean-Luc Fichet. Je souhaite préciser ce dont Corinne Féret vient de faire état : on parle de CDI senior, mais en réalité il s’agit d’un CDD de quatre ans puisqu’on le signera à l’âge de 60 ans et qu’il se terminera quand on aura 64 ans. C’est donc une sorte de « CDD vieux » ou de contrat de « dernière embauche ».

Quid si les personnes souhaitent travailler jusqu’à 70 ans ? Elles n’émargeront pas aux caisses de retraite pendant ce temps supplémentaire, soit autant d’économies réalisées. Cela mérite qu’on y réfléchisse.

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.

Mme Michelle Meunier. Tout d’abord, je me réjouis de la tonalité de nos propos et de la qualité des débats ce matin. Voilà qui augure d’une belle semaine à venir. (Sourires.)

M. René-Paul Savary, rapporteur. Cela change des monologues !

Mme Michelle Meunier. Monsieur le rapporteur Savary, vous avez dit que ce dispositif était un « outil nouveau ». Certes, mais c’est un outil au service d’une mécanique dont nous ne voulons pas, raison pour laquelle je ne voterai pas votre amendement.

Monsieur le ministre Attal, vous avez parlé d’une prise de risque, mais c’est l’ensemble du projet de loi qui est une prise de risque pour les personnes concernées, c’est-à-dire les plus modestes, ceux qui exercent les métiers les plus difficiles et qui devront s’acquitter de deux ans de cotisation supplémentaires avant de partir à la retraite.

Vous prétendez aussi ne pas avoir de tabou en matière d’exonérations ; je vous crois sans difficulté sur ce point. En revanche, vous avez des tabous concernant les recettes et les possibilités de recettes nouvelles.

De ce côté de l’hémicycle, nous vous avons fait plusieurs propositions en ce sens que vous persistez à ne pas vouloir entendre, qu’il s’agisse de la taxation des superprofits, des contributions sur les hauts salaires et les grosses fortunes ou de toutes les possibilités que nous continuerons de décliner tout au long de ce débat. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je souscris à ce qu’a dit le président Retailleau : si l’on ne fait rien pour inciter à l’embauche des seniors, on passe à côté d’un point essentiel de cette réforme.

Avec le groupe Union Centriste, nous avons entendu en audition le professeur Lorenzi, président du Cercle des économistes. Celui-ci a calculé que rattraper notre déficit en matière d’emploi des seniors – je rappelle que la France a dix points de déficit par rapport à la moyenne des pays de l’OCDE – rapporterait 13 milliards d’euros à notre système de retraite : je crois que les chiffres parlent d’eux-mêmes !

Monsieur le ministre, les documents que vous nous avez transmis au moment du bilan d’étape soulignent que la création de 100 000 emplois de seniors permettrait de récupérer 1 milliard d’euros de recettes supplémentaires. Vous pourrez le confirmer aisément.

Ces chiffres nous permettent d’envisager – je souscris tout à fait à la position que défendait Olivier Henno – une prime à l’embauche plutôt que des exonérations. Lors de l’examen de tous les PLFSS, on se plaint des exonérations que l’État est obligé de compenser depuis le vote de la loi organique.

Le plus simple serait donc de prévoir une prime à l’embauche. Quand la création de 100 000 emplois rapporte un milliard d’euros, il doit être possible de dégager quelques centaines de millions d’euros pour permettre à des seniors de retrouver la dignité du travail. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.

Mme Victoire Jasmin. Nos discussions montrent clairement qu’il ne s’agit pas d’une proposition de loi de gauche !

Plus on avance, plus on se rend compte que les amendements qui sont défendus, notamment celui de notre rapporteur, ne correspondent pas à l’objet du texte. Il faudrait une vraie loi pour parler de la retraite, du travail des jeunes et de celui des seniors.

Pour l’instant, on est dans la confusion et dans le bricolage ! Ce n’est pas le bon véhicule législatif. Pour aller en Guadeloupe, je prends l’avion, pas une trottinette ! (Sourires sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)

Nous devons être sérieux et travailler dans l’intérêt premier des seniors. La manière dont le sujet est appréhendé revient en quelque sorte à les maltraiter au profit des entreprises. Nous le constatons tous !

Il n’est pas normal d’évoquer la branche famille dans le cadre de ce texte. Je l’accepte, parce que beaucoup est à faire et que ma collègue Le Houerou vient de proposer un certain nombre de pistes, mais nous ne pouvons et ne devons pas faire n’importe quoi ! Dans mon territoire, la question de l’emploi des jeunes se pose avec plus d’acuité que celle de l’emploi des seniors, même si le sujet est également important.

Nous devons mettre en œuvre tous les moyens possibles pour aboutir à une loi sur les retraites qui se tienne, en veillant à ne pas faire n’importe quoi pour les seniors. Les maltraiter, c’est maltraiter aussi les enfants, les plus jeunes et la société.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Le président Retailleau nous expliquait hier, dans une belle envolée, que le recul de l’âge de départ à la retraite permettrait, entre autres bienfaits, d’augmenter mécaniquement le temps d’emploi des seniors et de mettre ainsi plus de travail dans la machine. Je m’étonne donc qu’il nous explique à présent le contraire et qu’il estime nécessaire d’adopter un autre dispositif – de l’huile dans la machine ? – pour pouvoir employer ces mêmes seniors.

Il me semblait important de souligner cette petite incohérence. L’un de vos collègues nous dit que si l’on ne fait rien, on aura tout faux. J’aimerais donc comprendre si le recul de l’âge de départ à la retraite est un bienfait qui permettra mécaniquement d’augmenter le temps d’emploi des seniors ou bien si ce dispositif ne sert à rien. À moins qu’il ne s’agisse tout simplement que d’un faux CDI et d’une voie de garage…

M. Claude Raynal. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Comment ne pas contester ce dispositif de CDI senior dont on ne perçoit pas la finalité et dont on imagine mal la portée au regard des nombreuses limites fixées ?

En outre, M. le ministre Attal nous dit que l’adoption de cet amendement coûterait 800 millions d’euros. Je suis surpris par la dualité du discours tenu : quand il s’agit de supprimer la taxe d’habitation, ce qui représente à peu près 26 milliards d’euros en moins, dont 8 milliards d’euros au profit des 20 % de contribuables les plus aisés, ou bien quand il s’agit de supprimer la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), l’exécutif fait des paris sans en évaluer les conséquences. En revanche, quand il est question d’augmenter, même de manière modérée, les recettes pour financer la protection sociale, plus rien n’est possible !

Il existe tout un ensemble de solutions, que nous vous proposons régulièrement, pour combler les besoins du système de retraite comme l’augmentation du taux d’emploi des seniors, l’égalité salariale entre les hommes et les femmes ou encore, comme l’a montré Thomas Piketty, l’augmentation de 2 % de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les hauts patrimoines.

En réalité, monsieur le ministre, la question est de savoir pourquoi, d’un côté, vous êtes relativement timoré et pourquoi, de l’autre, il faudrait vous faire confiance.

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour explication de vote.

Mme Mélanie Vogel. Je souscris aux propos de mon collègue Guillaume Gontard : nous nous trouvons dans une situation pour le moins curieuse.

Du côté droit de l’hémicycle, des collègues nous disent que cette réforme est nécessaire et très utile, notamment parce que reculer l’âge de départ à la retraite permettrait d’augmenter le nombre de seniors en emploi. Et concomitamment, on nous dit qu’il faut mettre en place un CDI senior pour ne pas passer à côté de l’élément essentiel de cette réforme, qui ne figure pourtant pas dans le projet de loi !

Pouvons-nous commencer par nous accorder sur le fait que le recul de l’âge de départ à la retraite ne crée pas d’emplois chez les seniors, puisque les élus du groupe Les Républicains ont eux-mêmes déposé un amendement pour réparer un oubli essentiel de la réforme ?

En outre, même si je n’avais pas le chiffre en tête, je crois bien volontiers notre collègue qui nous indique que corriger notre déficit d’emploi des seniors par rapport à la moyenne des pays de l’Union européenne nous permettrait de faire entrer 13 milliards d’euros supplémentaires dans les caisses, soit à peu près la somme recherchée.

Or on nous propose un dispositif qui consiste à diminuer les cotisations, donc à appauvrir les caisses de la sécurité sociale ! On marche sur la tête : d’un côté, on nous dit que cette réforme permettra d’augmenter l’emploi des seniors ; de l’autre, on nous explique qu’on a besoin d’un nouvel outil pour éviter que l’emploi des seniors ne rapporte moins dans les caisses de la sécurité sociale que ce dont nous avons besoin pour financer les retraites ! Du point de vue de la cohérence intellectuelle, une partie du raisonnement m’échappe totalement. (M. Guillaume Gontard applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. On voit bien que cette proposition part du constat que le recul de l’âge de départ à la retraite aggravera la situation des seniors. Certes, dans certains cas, on prolongera le temps d’emploi des seniors, mais le gros du paquet restera bloqué, ni en emploi ni à la retraite. Et, comme d’habitude, la seule idée de la droite, c’est d’exonérer les employeurs des cotisations sociales !

Voilà des lustres que l’on crée des contrats de ceci ou de cela, de première ou, en l’occurrence, de dernière embauche, dont l’efficacité est nulle. En revanche, l’assèchement des comptes de la protection sociale, c’est du sérieux !

Parlons des cotisations : il est tout de même plus facile de se fixer comme objectif d’établir l’égalité salariale entre les femmes et les hommes que de faire travailler des gens dont une partie aura des difficultés pour y parvenir. Si cette égalité était à l’œuvre, l’on aurait trouvé déjà trouvé 6 ou 7 milliards d’euros, soit la moitié de la somme recherchée.

De plus, voilà des années que nous expliquons que les exonérations de cotisations sociales ne peuvent être pertinentes qu’à deux conditions : la première, c’est qu’elles soient ciblées sur des activités qui visent à accompagner, par exemple, la réindustrialisation ou l’évolution de la transition écologique ; la seconde, c’est qu’elles doivent être conditionnées, c’est-à-dire qu’il faut des garanties.

Au lieu de créer une énième cotisation allégée, il faut exiger que la contrepartie d’allégements de cotisations sociales qui équivaut au CICE soit conditionnée à un accord ou à des engagements prévoyant toute une série de critères, dont l’augmentation de la part des seniors. Ainsi, vous ne ferez pas de dépenses supplémentaires et vous ciblerez le dispositif.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Certains parlent de concurrence entre jeunes et vieux, ce que j’ai du mal à entendre. Je suis peut-être idéaliste, mais je crois à l’utilité de chacun dans la société. Il n’y a pas de mise en concurrence de telle catégorie avec telle autre.

Dans ce pays, on pense parfois à prévoir des politiques spécifiques pour les jeunes, mais moins pour les seniors. C’est dommage.

Il est tout de même un territoire, le Val-de-Marne, où l’on y a pensé avec la création d’un dispositif d’accompagnement dit « Promo 45+ ». Les acteurs de ce dispositif, que nous avons auditionnés, nous ont permis de comprendre qu’il faudrait le déployer un peu partout sur le territoire pour sensibiliser les entreprises et la population.

Comme je le soulignais hier, c’est la société tout entière qui doit changer de mentalité vis-à-vis de nos aînés, lesquels ont des choses à transmettre et à dire aux jeunes. Alors que l’on compte de plus en plus d’apprentis dans nos territoires, on devrait précisément « capitaliser » – je sais que le terme ne vous plaît pas ! – sur le savoir des anciens. Or le CDI senior que nous vous proposons relève de cet idéal de transmission et de tutorat.

Il est vrai que la rédaction mériterait sans doute d’être améliorée, mais nous pourrons y travailler ensemble dans le cadre d’une prochaine loi Travail.

Je veux aussi revenir sur l’index seniors, car il me semble qu’il faudra penser, dans cette future loi, à l’assortir d’un bonus. On ne cesse de prévoir des dispositifs pour punir encore et encore, mais il faut aussi savoir apprécier ce qui va bien et valoriser les bonnes initiatives, ce qu’est assurément le CDI senior.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. René-Paul Savary, rapporteur. Sans allonger les débats, deux ou trois précisions me semblent indispensables. Non, je ne suis pas asservi au Medef ; preuve en est que j’accepte bien volontiers l’indicateur, dont je ne crois pas que ce soit le Medef qui le réclame.

J’ai des relations toujours respectueuses avec les différents partenaires sociaux, que ce soit le Medef, Force ouvrière (FO), dont j’ai eu l’occasion d’entendre en audition le secrétaire général, ou encore l’Agirc-Arrco, dont je rencontre régulièrement la présidente, Mme Pisa, dans le cadre du Conseil d’orientation des retraites (COR).

Monique Lubin connaît bien les discussions que nous pouvons avoir au sein du COR : on évite d’y parler des sujets qui fâchent, sinon on n’en sortirait pas ! Une fois posé ce principe, on peut parler du reste, notamment de l’employabilité des seniors. C’est ainsi qu’à force de discussions est venue cette idée, qui ne sort pas de nulle part ! Je tenais à vous le dire, en toute sincérité.

L’un des intervenants a souligné que mieux valait s’occuper des seniors en emploi que des seniors au chômage.

M. René-Paul Savary, rapporteur. Oui, il faut aussi s’en occuper. C’est pourquoi nous dénonçons aussi ce que vous êtes les premiers à dénoncer, à savoir le sort réservé aux mères de famille, qui restent en emploi un peu plus longtemps, peut-être en raison du décalage de l’âge de départ à la retraite, mais surtout de la réforme Touraine.

Ne me reprochez pas d’être inhumain en voulant à tout prix mettre les seniors au travail. Ce sont les conséquences de la réforme Touraine qui prévoit de travailler pendant quarante-trois ans : quand vous avez commencé à travailler à 20 ans, vous travaillerez jusqu’à 63 ans ; mais quand vous avez commencé à 22 ans, vous travaillerez jusqu’à 65 ans. (Marques dapprobation sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Certes, le recul de l’âge de départ peut avoir un effet, mais soyons très clairs entre nous : il ne s’agit pas d’ajouter deux ans de travail supplémentaires de 62 à 64 ans. Non, il s’agit de l’ajustement des bornes !

Sous l’effet de la réforme Touraine, certains seront amenés à travailler plus longtemps ; d’autres, sous l’effet du recul de l’âge légal de départ à la retraite, seront également conduits à travailler quelques mois, voire une année de plus. Mais il ne s’agit pas d’ajouter deux ans de travail supplémentaire pour tout le monde !

Arrêtez de vendre ce faux argument qui contribue à mettre les gens dans la rue ! (Exclamations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)

Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est la réforme qui met les gens dans la rue !

M. René-Paul Savary, rapporteur. … Si on leur explique bien les choses, nos concitoyens mesureront la différence ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Je ne suis pas le bourreau des seniors que vous prétendez !

Jean-Marie Vanlerenberghe, qui est un sage, connaît bien ce dispositif. Il connaît bien aussi les syndicats sans être asservi à aucun d’entre eux. Je souscris au principe selon lequel un index pénalise, alors qu’un label valorise. Il doit être possible de trouver un équilibre. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Sans allonger les débats, car nous avons été suffisamment éclairés, je répondrai sur quelques points, ce qui pourra être utile au moment de voter cet amendement, s’il n’est pas retiré.

Monsieur Vanlerenberghe, je me range totalement à votre position sur la question du taux d’emploi : si l’on avait le même taux d’emploi en France que chez nos voisins allemands, j’aurais beaucoup moins de travail pour équilibrer les comptes. En effet, les recettes supplémentaires induites par dix points de taux d’emploi en plus nous permettraient d’équilibrer beaucoup mieux le budget.

La question est donc de savoir comment améliorer le taux d’emploi. Cela implique de travailler sur l’emploi des jeunes, comme nous le faisons déjà, notamment dans le cadre de l’apprentissage, et comme nous devons le faire avec la réforme du lycée professionnel qui, aujourd’hui, ne permet pas objectivement d’insérer véritablement les jeunes dans l’emploi. C’est donc une réforme particulièrement importante.

Mais il faut aussi s’interroger collectivement sur les mesures les plus efficaces pour améliorer le taux d’emploi des seniors. Il est vrai – je réponds notamment à Mme Vogel – que la réforme de 2010 a permis une amélioration de leur taux d’emploi de quinze points. Toutes les études le montrent : il n’y a pas eu besoin de contrats spécifiques, après la réforme Fillon de 2010, pour améliorer de quinze points le taux d’emploi des seniors.

Toutefois, nous devons bien évidemment penser à des mesures supplémentaires. L’index seniors en est une, mais il peut y en avoir d’autres. J’ai entendu Mme la rapporteure générale et M. Vanlerenberghe souligner que ce dispositif de CDI senior n’était peut-être pas le plus abouti. Je proposerai donc volontiers de retirer cet amendement pour en améliorer la rédaction dans le cadre de la loi prochaine Travail ou du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Encore une fois, je ne suis pas totalement convaincu par une mesure qui coûterait 800 millions d’euros à la branche famille, sans aucune garantie sur son efficacité – vous avez d’ailleurs parlé de « pari ».

Pour répondre à M. Retailleau, l’effet d’aubaine interviendrait si toutes les entreprises qui ont un contrat en cours avec un senior de plus de 60 ans le transformaient en CDI senior. Le coût serait alors de 2,3 milliards d’euros.

Cependant, si on laisse un chef d’entreprise choisir entre un CDI classique sans allégement de cotisations sur la branche famille et un CDI senior avec cinq points en moins sur lesdites cotisations, il choisira bien évidemment ce dernier pour recruter un senior de plus de 60 ans. Or cela concerne 100 000 embauches par an, pour un coût de 800 millions d’euros. Il faudrait une énorme augmentation des embauches pour compenser ce surcoût.

Avant de conclure, je veux revenir sur la question des allégements et des exonérations de cotisations. J’ai notamment entendu M. Kerrouche parler de dualité dans mon discours.

En vingt ans, nous avons connu deux grandes étapes d’allégement de cotisations pour les entreprises dont la première est intervenue dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale de 2014, présenté sous la présidence de François Hollande, et qui prévoyait des allégements et des exonérations maladie et famille pour un montant de 25 milliards d’euros.

J’ai demandé à mon équipe de ressortir le scrutin public de l’époque : l’intégralité du groupe socialiste avait voté la mesure d’exonération pour les entreprises de 25 milliards d’euros de cotisations maladie et famille, à l’exception de trois sénateurs – Mme Lienemann et MM. Godefroy et Daudigny.

La deuxième étape, c’est la transformation du CICE en baisse de cotisations en 2019, alors qu’Emmanuel Macron était Président de la République. Il est intéressant de comparer les chiffres : la baisse des cotisations a permis d’embaucher davantage – 1,5 million d’embauches supplémentaires –, ce qui a permis de générer 21 milliards de recettes en plus pour la sécurité sociale !

Telles sont les raisons pour lesquelles j’affirme n’avoir aucun tabou en matière de baisses de cotisations.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4741.

(Le sous-amendement nest pas adopté.)

M. le président. Monsieur Duffourg, le sous-amendement n° 3387 rectifié est-il maintenu ?

M. Alain Duffourg. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. Le sous-amendement n° 3387 rectifié est retiré.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 4742.

(Le sous-amendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4743.

(Le sous-amendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4744.

(Le sous-amendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2112 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 175 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 325
Pour l’adoption 202
Contre 123

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

L’amendement n° 2598 rectifié, présenté par Mmes Deseyne, Lassarade et Gruny, M. Milon, Mme Imbert, MM. Bonne, Piednoir, Belin, Cuypers, Cambon, Burgoa, Bacci, Rietmann et Perrin, Mmes Belrhiti, Demas et M. Mercier, M. Chatillon, Mmes Bonfanti-Dossat et Malet, M. J.P. Vogel, Mme Estrosi Sassone, MM. Anglars, Cadec, Panunzi, Genet et Sido, Mme Micouleau et MM. Calvet et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre III du titre II du livre II de la première partie du code du travail est complété par une section ainsi rédigée :

« Section …

« Contrat de mentorat

« Art. L. 1223-10. – Un employeur peut conclure un contrat de mentorat, avec d’une part un salarié âgé d’au moins soixante ans, d’autre part un salarié âgé de moins de vingt-six ans ou un salarié en contrat d’apprentissage prévus dans les conditions prévues aux articles L. 6221-1 et L. 6221-2 du présent code.

« Le contrat signé dans les conditions prévues au premier alinéa de cet article constitue un avenant au contrat de travail de chaque salarié. Il est établi par écrit. Il précise les modalités de la transmission intergénérationnelle qui lie l’entreprise et les deux salariés.

« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret. »

II. – La section 4 du chapitre Ier du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 241-… ainsi rédigé :

« Art. L. 241-…. – Les rémunérations versées aux salariés ayant signé l’avenant au contrat prévu à l’article L. 1223-10 du code du travail sont exonérées des cotisations dues au titre du 1° de l’article L. 241-6 du présent code. »

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Chantal Deseyne.