M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Colette Mélot applaudit également.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord saluer la qualité des travaux de nos six rapporteurs. Je limiterai mon propos aux mesures qui relèvent des affaires sociales.

Nous retiendrons d’abord, à l’article 12, que le projet de loi vient étendre les obligations en matière d’accessibilité issues de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. À compter de 2025, l’exigence d’accessibilité s’appliquera également aux terminaux numériques tels que les distributeurs automatiques de billets ou les liseuses numériques.

Nous avons tous en mémoire qu’il nous a fallu voter un report à l’obligation d’accessibilité, prévue initialement pour 2015. Dès lors, nous invitons le Gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour accompagner ce nouveau changement, afin que celui-ci s’opère dans les délais.

Ensuite, soulignons les dispositions de l’article 14 visant à permettre au salarié de conserver le bénéfice de tous les avantages qu’il avait acquis avant le début de son congé familial. Il s’agit d’une avancée importante, car le droit en vigueur assure au salarié de retrouver son poste ou un emploi similaire, mais reste muet sur les droits acquis.

Le groupe Union Centriste est particulièrement attentif à l’extension du congé de proche aidant et de solidarité familiale aux salariés du particulier employeur, assistants maternels et assistants familiaux employés par des personnes privées.

Nous soutenons également l’amendement visant à ajouter les périodes de congé de paternité aux congés assimilés à une présence dans l’entreprise pour la répartition de la réserve spéciale de participation.

L’article 15 impose à l’employeur de remettre au salarié un ou plusieurs documents précisant les informations principales de la relation de travail. Lorsque l’on augmente les contraintes des entreprises, il convient d’accompagner les plus petites d’entre elles pour s’assurer que la mesure sera effective. Nous invitons donc le Gouvernement à mettre des documents types à la disposition des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME).

À l’occasion de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous avions été sensibilisés par le secteur des dispositifs médicaux à propos des nouvelles règles applicables en matière de certification. Les organismes certificateurs connaîtraient une situation d’embolie et ne pourraient ni certifier les nouveaux dispositifs ni recertifier le stock. Le texte de la commission répond à cette crainte, mais une prolongation temporaire de certification aurait pu être envisagée pour le stock.

Toujours dans le champ des affaires sociales, l’article 24 mérite une attention particulière. En effet, la lutte contre la falsification des médicaments est une nécessité au regard des enjeux de santé publique. Elle relève de l’égalité entre les patients et les pharmaciens au sein de l’Union européenne. L’application de cet article contribuera à augmenter la qualité de la chaîne du médicament. Le corollaire de cette ambition est la mise en place d’une amende forfaitaire pour ceux qui ne respecteraient pas leur obligation de sérialisation.

Monsieur le ministre, lorsque l’on met en place une sanction à l’encontre de ceux qui ne déclarent pas, encore faut-il s’assurer que la déclaration est faisable. En l’espèce, au 28 novembre 2022, près de 62 % des pharmacies seulement parvenaient à se connecter au répertoire national de vérification des médicaments (NMVS, en anglais National Medicines Verification System). Cela laisse songeur.

Le groupe UC votera ce projet de loi dans la version amendée par nos commissions. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Colette Mélot applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. Stéphane Artano. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons, au sein duquel la technicité des sujets ne saurait occulter l’importance des enjeux soulevés, est un texte fourre-tout. Plusieurs dispositions y sont transposées sans lien entre elles. La cohérence de l’ensemble ne tient qu’à l’adaptation de notre droit national aux évolutions décidées par le législateur européen.

Sur la forme, nous avons dû travailler dans l’urgence un texte dense, aux dispositions très techniques. De nombreux sujets sont abordés : l’économie, la santé, le travail, les transports et l’agriculture.

La difficulté de l’exercice réside dans le fait que, quelles que soient les réserves que nous pourrions nourrir quant à certaines mesures, nous devons être à jour de nos obligations, ne présenter aucun déficit de transposition et disposer d’un droit national conforme aux exigences de l’Union européenne. Le groupe RDSE, attaché au projet européen, entend parfaitement cet argument.

Néanmoins, les délais très contraints imposés pour l’examen du texte ne sont pas sans rappeler ceux que nous avons connus lors de l’examen du récent projet de loi de finances. Les délais constitutionnels imposés pour le budget ne sauraient justifier l’affaiblissement du rôle du Parlement, que chaque recours au 49.3 à l’Assemblée nationale vide déjà un peu plus de son essence.

Sur le fond, mon groupe, attentif à l’expression législative de la solidarité, ainsi qu’à la protection de nos concitoyens français et européens, se réjouit de l’accent mis dans ce projet de loi sur les sujets sociaux.

Dans un pays où 12 millions de personnes relèvent d’une situation de handicap, l’absence d’une société pleinement inclusive constitue une anomalie, une atteinte au principe d’égalité des droits et des chances. L’article 12 de ce texte, qui vise à transposer la directive du Parlement européen et du Conseil relative aux exigences en matière d’accessibilité applicables aux produits et services, doit être un des catalyseurs de l’effort collectif en faveur de la généralisation de l’inclusivité dans notre société.

Les exigences d’accessibilité, élargies à davantage de produits et à un plus grand nombre d’acteurs, devront être effectives à compter du 28 juin 2025. Je rappelle que sont concernés, entre autres, les fabricants, importateurs, distributeurs de produits ou prestataires de services du secteur bancaire, des transports ou de la culture.

Néanmoins, je partage les inquiétudes de la commission des affaires sociales, pour laquelle l’enjeu réside davantage dans le calendrier de mise en œuvre de ces obligations par les opérateurs économiques que dans l’adoption et la promulgation de ces nouvelles règles en droit interne.

Au regard des retards constatés dans l’application de la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, le Gouvernement devra faire preuve de volontarisme. Il est ainsi nécessaire de prévoir un régime d’incitations, voire de sanctions, de nature à accompagner les opérateurs économiques dans le déploiement des évolutions techniques nécessaires à l’accessibilité des produits et services.

Par ailleurs, sur fond de sortie de crise sanitaire, d’inflation galopante, de défi énergétique, et face à la nouvelle menace qu’augure le Inflation Reduction Act de Joe Biden à partir de 2023, le projet de loi s’inscrit dans un contexte économique particulièrement tendu.

Néanmoins, nous pouvons espérer que certaines de ses dispositions participent à la facilitation des échanges, ainsi qu’au soutien des sociétés en difficulté. Le groupe RDSE est, dans l’ensemble, satisfait des réponses systémiques que tente d’apporter l’Union européenne à travers ses différents règlements et directives.

L’élimination de la surtransposition visée par l’article 10 du projet de loi entre dans ce cadre. Notre droit national conduit aujourd’hui les entreprises françaises à faire face à un risque de dissolution excessif et considérablement accru, comparativement aux entreprises d’autres États membres, dans le cas où les capitaux propres d’une société deviennent inférieurs à la moitié de son capital social. Il était temps que cette singularité française prenne fin.

Je souhaite également souligner l’harmonisation de la procédure française applicable avec celle des fusions transfrontalières de l’Union européenne. L’introduction en droit national des procédures de scissions et transformations transfrontalières est intéressante, parce que ces dispositions garantiront la protection des droits des parties prenantes, également renforcée par un dispositif anti-fraude et anti-abus.

Enfin, plusieurs de mes collègues souhaitent être rassurés quant aux orientations de l’article 30 en matière d’aides à l’installation en agriculture pour que celles-ci continuent de toucher leurs cibles dans un souci de flexibilité et, surtout, d’équité.

Mes chers collègues, malgré ces remarques, mon groupe est, à ce stade, globalement favorable à ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi quau banc des commissions. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme le rapporteur applaudit également.)

M. Jean-Claude Anglars. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture porte bien son nom, tant il constitue un agglomérat de mesures n’ayant d’autre point commun que de provenir de l’Union européenne.

Je commencerai par formuler trois observations relatives à l’écriture de la loi.

Premièrement, il me semble que la cohérence d’un tel texte est aussi limitée que son utilité est certaine. Ces transpositions expéditives du droit européen, qui s’apparentent à du fret législatif, interrogent quant aux modalités de transposition du droit de l’Union.

Deuxièmement, il est à déplorer que le Parlement n’ait disposé que de quelques jours pour examiner ces articles techniques et pour débattre de modifications directes de notre droit ou de demandes d’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance. Les amendements adoptés par les différentes commissions montrent cependant toute l’importance du Parlement et du Sénat dans le processus législatif, ainsi que la qualité de son travail.

Troisièmement, je regrette que l’étude d’impact ne comporte pas d’éléments de droit comparé qui permettraient de mieux apprécier les solutions choisies par le Gouvernement par rapport à celles retenues par les autres États membres de l’Union européenne et, partant, d’éclairer le débat et la délibération parlementaire.

Pour le reste, j’aborderai plusieurs thématiques visées dans le projet de loi.

Concernant le volet transports, l’article 26 du texte vise à transposer la directive Eurovignette dans sa version révisée en 2022, qui prévoit de nouvelles obligations en matière de taxation des véhicules pour l’utilisation d’infrastructures routières.

Cet article se borne toutefois à transposer les nouvelles obligations aux seuls péages des futures concessions autoroutières. Il ne modifie donc que les dispositions relatives aux péages figurant dans le code de la voirie routière. Cela est insuffisant.

En effet, l’ordonnance du 26 mai 2021 relative aux modalités d’instauration d’une taxe sur le transport routier de marchandises recourant à certaines voies du domaine public routier de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA) est, elle aussi, conforme aux règles fixées par la directive Eurovignette. La transposition prévue par le projet de loi initial est donc incomplète.

Cette ordonnance, prise sur le fondement d’une habilitation prévue par la loi du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d’Alsace, permet à cette dernière d’instaurer une taxe sur les véhicules lourds de transport routier de marchandises empruntant son domaine public routier.

En l’état actuel du droit, cette ordonnance applique des obligations fixées par la directive Eurovignette dans sa version antérieure à la révision de 2022.

Elle prévoit, par exemple, que les taux kilométriques de cette taxe sont différenciés en fonction de la classe d’émissions Euro du véhicule. Or, dans la version révisée de la directive, cette modulation des taux en fonction de la classe Euro est remplacée par une modulation en fonction des émissions de CO2.

Faute de modifications pour mettre cette ordonnance en conformité avec le droit européen révisé, la taxe instaurée par la CEA risque donc de ne plus être compatible avec les dispositions de la directive à compter de 2024.

Afin d’éviter une telle situation, et alors que les Alsaciens attendent la mise en œuvre de la taxe depuis des années, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a adopté un amendement visant à rectifier cet oubli en mettant en conformité l’ordonnance du 26 mai 2021 avec le droit européen révisé.

Lors de l’examen du projet de loi de ratification de cette ordonnance, dont j’avais été désigné rapporteur, le Sénat avait souhaité anticiper la révision de la directive, notamment en permettant de différencier les taux en fonction des émissions de CO2 des véhicules. Cet ajout n’avait toutefois pas été conservé dans la suite de la navette.

La nouvelle directive étant, depuis lors, entrée en vigueur dans sa version révisée en 2022, l’article 26 bis, introduit par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, permettra à la CEA d’anticiper les nouvelles obligations de la directive à l’amont de l’instauration de la taxe.

Concernant le volet finances, le constat formulé par le rapporteur pour avis Hervé Maurey interpelle. Un peu plus d’un an après la promulgation de la précédente loi Ddadue, le Parlement examine de nouveau des dispositions visant à adopter le droit financier, assurantiel, bancaire et économique. La France pourrait ne pas respecter les délais qui lui sont accordés pour prendre ces dispositions.

Je rejoins la commission des finances, qui, sur proposition de son rapporteur pour avis, a adopté des amendements visant à harmoniser les exigences et à renforcer le contrôle des dirigeants de mutuelle en l’alignant sur celui qui est prévu pour les dirigeants de sociétés d’assurance et d’institutions de prévoyance.

Enfin, l’amendement visant à restreindre le champ de l’habilitation à légiférer par ordonnance demandée par le Gouvernement pour transposer les dispositions de la directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises est bienvenu, car le champ d’habilitation prévu dans le texte initial excédait très largement celui de la directive visée.

Concernant les dispositions relevant de la commission des lois, pour l’essentiel, le présent texte transpose en droit interne deux directives relatives au droit des sociétés et prévoit la mise en œuvre d’un règlement relatif à la protection de l’enfance. Les apports du Sénat sont notables.

La directive concernant les transformations, fusions et scissions transfrontalières devant être transposée par ordonnance avant le 31 janvier 2023, le Parlement est tenu de légiférer dans des délais particulièrement contraints.

Je salue la réduction du délai de transposition de la directive à trois mois au lieu de six, adoptée par la commission des lois sur proposition de son rapporteur pour avis.

Il était en outre nécessaire de supprimer l’option, prévue par la directive, permettant aux États de réduire la proportion des représentants des salariés au sein de l’organisme de direction de la société issue d’une opération transfrontalière, susceptible d’être favorable aux salariés.

Il convenait également de confier le contrôle de légalité des opérations transfrontalières aux greffiers des tribunaux de commerce, qui ont – il faut le souligner – acquis une compétence certaine en matière d’enregistrement des projets de fusion transfrontalière.

J’en viens au volet santé.

En matière de santé publique, les mesures sont également très hétérogènes, visant aussi bien la composition des produits chimiques aux exigences que l’encadrement des denrées alimentaires destinées à des fins médicales ou encore le taux de connexion des officines de pharmacie.

J’évoquerai le problème de l’encadrement de la publicité des activités de chirurgie esthétique. La France est mise en demeure depuis 2019 par la Commission européenne sur ce sujet important du fait de l’interdiction totale de publicité.

Pour remédier à la non-conformité de ces dispositions au droit de l’Union européenne, il est proposé de préciser que le retrait de l’autorisation d’exercer n’est prononcé qu’en cas de publicité contrevenant à l’enjeu de protection de la santé publique.

Comme l’a souligné à juste titre le rapporteur de la commission des affaires sociales Pascale Gruny, la publicité pour les activités de chirurgie esthétique doit être mieux contrôlée par les autorités compétentes. Il convient que cet encadrement soit également de nature déontologique et qu’il soit effectué par les ordres, afin de prévenir les dérives constatées, notamment sur les réseaux sociaux.

Concernant enfin le volet social, les apports du texte sont divers.

En matière de handicap, les dispositions de la directive du 17 avril 2019 contribueront à améliorer l’accessibilité à divers produits et services du quotidien.

Du fait du délai relativement court qui est prévu pour l’application de ces dispositions, il faudra s’assurer que les acteurs sont opérationnels et que les difficultés rencontrées n’entraînent pas de désengagement de leur part, en veillant notamment à la couverture de l’ensemble du territoire par des distributeurs automatiques accessibles.

En matière de droit du travail, des difficultés pourraient survenir dans certaines entreprises, en particulier dans les TPE-PME, notamment dans celles qui ne disposent pas d’un service de ressources humaines.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, notre groupe approuve ces dispositions tendant à mettre notre droit en conformité avec le droit de l’Union européenne telles que modifiées et améliorées par le Sénat, dont les apports sont nombreux. Nous serons vigilants quant à l’usage qui sera fait des habilitations à légiférer par ordonnance accordées au Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot. (MM. Jean-François Longeot et Pierre Louault applaudissent.)

Mme Colette Mélot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, économie, santé, travail, transports et agriculture : comme c’est habituellement le cas, ce projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne concerne des domaines aussi vastes qu’importants.

Encore une fois, et malgré la grande technicité du texte, les délais d’étude ont été très courts. Les rapporteurs l’ont souligné à plusieurs reprises, notamment en commission.

Je tiens à saluer le travail de chacun sur ce texte, au sein tant de la commission des affaires sociales, dont j’ai l’honneur de faire partie, que des commissions saisies pour avis.

Le contrôle de subsidiarité qu’effectuent les parlements nationaux est essentiel au bon fonctionnement du système dans lequel nous vivons. Disposer d’un droit de regard sur l’action de l’Union européenne revêt un caractère d’autant plus essentiel que le droit de l’Union européenne a vocation à être incorporé dans nos droits internes. Par ce projet de loi, nous exerçons un tel droit de regard.

J’ai parfois entendu des remarques sur le calendrier ou la nécessité de tels textes. Je souhaite rappeler que nous disposons d’un temps limité pour transposer les directives – celles qui sont visées dans le présent projet de loi sont d’ailleurs nombreuses – et que les règlements sont d’application directe.

La mise en conformité de notre droit interne est une étape assez décisive, non pas seulement parce qu’elle nous permet de respecter nos propres règles et d’éviter à notre pays d’être mis en demeure, voire sanctionné, mais aussi parce que nos règles en sont enrichies, ce qui est positif pour les Français.

L’effet positif de l’incorporation du droit européen au sein du droit français est toutefois subordonné à deux conditions, que le groupe Les Indépendants – République et Territoires défend d’ailleurs depuis toujours.

La première est que toute transposition, toute mise en conformité soit correcte. Dans ce projet de loi, j’ai l’impression qu’il y a moins de rectifications d’erreurs de transposition ou de mauvaises mise en conformité que dans les précédents. Si la technicité des dispositions visées est souvent grande, les conséquences de telles erreurs n’en demeurent pas moins dommageables pour les Français et le pays.

La seconde condition est bien sûr la non-surtransposition. Ce fut un véritable problème, et je me réjouis que la France se soit améliorée en la matière. Mais cette problématique n’est jamais loin, et nous devons rester vigilants. Il ne me semble pas, en tout cas, que nous soyons confrontés à des surtranspositions dans le présent texte.

J’en viens au fond. Comme à l’accoutumée, le texte est riche et très varié. Je m’attarderai pour ma part sur certains sujets relatifs à la santé et aux affaires sociales.

L’article 14, qui transpose la directive relative à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants, concerne, entre autres, le congé parental d’éducation, le congé de présence parentale et le congé pour événements familiaux.

Le texte proposé par le Gouvernement et enrichi par la rapporteure prévoit des avancées intéressantes et nécessaires pour les salariés et leurs familles. Je salue particulièrement les aménagements et les ouvertures du bénéfice du congé de proche aidant. Le Sénat accorde beaucoup d’importance à ce sujet, dont il a débattu à de nombreuses reprises, car nous connaissons les responsabilités des proches aidants et leur dévouement.

Je me félicite ensuite de l’adoption par la commission, à l’article 23, d’un amendement visant à éviter les ruptures d’approvisionnement des dispositifs médicaux indispensables, ainsi que des dispositifs de diagnostic in vitro.

Les ruptures d’approvisionnement et les pénuries de médicaments me préoccupent d’autant plus que nous déplorons d’importantes tensions depuis la crise du covid.

Enfin, de manière générale, si les adaptations relatives au secteur de la santé seront propices à des évolutions positives, j’estime que les précisions apportées par la commission quant à la mise à œuvre de certaines d’entre elles sont à prendre en considération.

Notre groupe, convaincu de l’importance pour notre pays de transposer les directives européennes dans les temps et de mettre son droit interne en conformité avec le droit de l’Union européenne, votera en faveur de ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

M. Jacques Fernique. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de transposition du droit communautaire est, comme c’est habituellement le cas, très disparate et d’une grande technicité. Il n’en aura pas moins des effets concrets sur la vie des Françaises et des Français.

Il n’est effectivement pas correct – plusieurs orateurs l’ont souligné – d’examiner un texte dans un délai aussi court.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires salue évidemment ces efforts de transposition, d’autant que la France a longtemps été parmi les mauvais élèves de l’Europe du fait de déficits de transposition importants. Du retard a été rattrapé, en particulier à l’occasion de la présidence française de l’Union européenne, mais je regrette que cette adaptation du droit communautaire dans notre législation par ce texte demeure tout de même assez minimaliste.

La priorité donnée à la décarbonation des transports, par exemple, aurait pu être plus résolue. Le texte se borne en effet en quelque sorte au « service minimum », sans couvrir les évolutions nécessaires ; j’y reviendrai.

Mon groupe salue également les avancées sociales du texte, qui prévoit l’élargissement des exigences d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap, permet un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des proches aidants et renforce la coopération entre pays européens en matière de services d’aide sociale à l’enfance.

Ces transpositions restent toutefois limitées. Le texte ne prévoit pas de mesures structurelles pour renforcer l’accompagnement à la parentalité ou l’accès au numérique. Il ne prévoit pas de stratégie sur l’accessibilité, comme le demandait pourtant le collectif Handicaps, qui regrette de ne pas avoir été associé aux travaux de transposition. Mon groupe soutiendra donc leur proposition, qui, ayant reçu un avis favorable, sera – je l’espère – votée.

Si ce texte comprend des avancées intéressantes quant aux congés de paternité et de parentalité, il conviendrait d’aller plus loin, en apportant, comme le fait l’Espagne, un véritable soutien au congé de parentalité, où il a été porté à seize semaines, et où il est non transférable et rémunéré à 100 %.

Sur le volet transports, pour l’essentiel, ce projet de loi prend en compte la révision de la directive Eurovignette, dont l’intitulé ne correspond plus à la réalité, puisqu’il s’agit non plus d’achat de vignettes, mais d’une taxe kilométrique.

Alors que dans de nombreux pays d’Europe existent déjà des taxes poids lourds significatives qui expliquent en partie le développement d’un fret ferroviaire bien plus avancé que celui de notre pays, nos gouvernements successifs n’ont pas su actionner ce levier de rééquilibrage de la concurrence entre la route et le rail.

Ce texte n’affectera donc pour l’essentiel que les péages autoroutiers, à l’exception de la future taxe poids lourds alsacienne. À ce titre, il est bon que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ait rectifié le texte pour que la CEA puisse saisir les nouvelles options européennes ouvertes par cette actualisation. L’Assemblée nationale ne l’avait pas souhaité, contrairement au Sénat, qui, une fois encore, a eu raison d’introduire cette modification. Il faudra donc faire preuve de vigilance à cet égard.

En ce qui concerne le réseau autoroutier, le Gouvernement écarte pour l’instant les options de redevances facultatives, notamment celle qui est liée à la congestion, ainsi que le surpéage pour financement des infrastructures de transport. Mon groupe proposera des amendements en ce sens.

L’article 26 prévoit deux dispositifs permettant de renforcer le principe du pollueur-payeur pour les poids lourds. Si ces dispositifs sont bienvenus, il est encore une fois regrettable que le Gouvernement n’aille pas assez loin, puisque la modulation et la majoration ne sont applicables qu’aux seuls péages des contrats de concession à venir, à l’exclusion des contrats en cours.

Le Gouvernement fait le choix de différer l’obligation d’internaliser dans les tarifs des péages les coûts environnementaux liés à la pollution. L’argument avancé, selon lequel il conviendrait de ne pas bouleverser l’équilibre économique des contrats, ne constitue pas à notre sens une justification suffisante.

Si ce report est conforme à la directive, il est regrettable au regard de l’urgence climatique. La plupart des concessions autoroutières ne se terminent qu’après 2030. Or on ne peut pas attendre une décennie. Il est urgent d’activer le report vers le rail et le fluvial afin de réduire la part du transport routier de marchandises, comme il est urgent de nous concentrer sur l’intermodalité, par des plans « vélo-train ». Ce texte prévoit d’ailleurs de rattraper notre retard sur la moyenne européenne, dont je rappelle qu’elle s’établit entre six et huit emplacements de vélo par train.

Enfin, mon groupe, comme d’autres, s’opposera à l’habilitation à légiférer par ordonnance demandée par le Gouvernement afin de transposer la directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, dite directive CSRD. Il s’agit en effet d’une étape importante du Pacte vert européen, dans le cadre duquel des choix déterminants devront être effectués. Il est donc essentiel d’assurer la transposition de cette directive par voie législative.

Malgré ces réserves, mon groupe voit des avancées dans ce texte, et votera donc pour. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)