Mme Marie-Pierre Monier. Les retours de terrain indiquent très clairement que l’éducation nationale ne prend pas toujours en considération les notifications des MDPH, en raison notamment d’un nombre insuffisant d’AESH.

Max Brisson a raison d’évoquer des situations très différentes d’un département à l’autre. Ainsi, en Seine-Saint-Denis, 2 500 enfants ayant fait l’objet d’une notification sont sans AESH. Ce chiffre est impressionnant ! Certaines familles en arrivent à chercher par elles-mêmes ou par le biais d’associations des AESH « privés ». Selon les associations de parents, un marché de l’accompagnement est en train de se développer, même s’il est encore difficilement quantifiable.

Cette privatisation de l’accompagnement du handicap me semble très inquiétante. Elle provoque une rupture d’égalité et renforce les inégalités sociales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Ces deux amendements sont inspirés par une préoccupation forte et légitime, celle des familles.

La commission des finances a émis un avis défavorable sur ces deux amendements, mais je veux profiter de cette intervention pour faire une remarque plus générale et interroger M. le ministre.

L’inclusion est une responsabilité nationale, qui relève de la solidarité. Le ministère de l’éducation nationale doit-il être le seul ministère chargé de ce sujet ? C’est un vrai débat.

Je vous rappelle que les MDPH sont départementales, comme leur nom l’indique, et qu’elles prescrivent l’attribution d’AESH sans véritable concertation avec l’éducation nationale, pourtant seule en mesure d’évaluer la situation de chaque élève.

Reconnaissons néanmoins, monsieur le ministre, que les grands établissements n’ont pas toujours un lien suffisamment étroit avec leurs élèves et que les établissements plus petits, s’ils ont une approche parfois moins rationnelle, sont aussi souvent mieux placés pour évaluer précisément la situation des enfants ayant reçu une prescription d’AESH par une MDPH.

Je souhaite qu’un travail interministériel soit engagé avec l’Assemblée des départements de France (ADF) sur ce sujet. Sinon, nous risquons une sorte de fuite des responsabilités : les MDPH renverront la leur au ministère, qui doit s’occuper de tous les élèves et de tous les enseignants, et dont les moyens ne sont pas illimités.

Je comprends très bien l’esprit de l’amendement n° II-866 rectifié, porté par André Reichardt et plusieurs de ses collègues, mais son adoption priverait le programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale » d’une bonne part de ses crédits.

Le coût de l’amendement n° II-887 est plus raisonnable, madame Monier, mais son adoption opérerait également une ponction considérable sur les crédits de ce programme.

Il s’agit donc surtout d’amendements d’appel, monsieur le ministre, un appel que vous avez la responsabilité d’entendre ! Vous appartenez à un gouvernement, vous n’êtes pas seul, mais je crois qu’il vous faut au plus vite rassurer le Parlement – la même question vous sera sans doute posée à l’Assemblée nationale – sur la possibilité de partager ce fardeau.

Il serait injuste de faire peser sur les seuls moyens du ministère de l’éducation nationale le poids d’une responsabilité qui doit être maîtrisée, contrôlée, puis partagée entre différentes sources de solidarité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pap Ndiaye, ministre. Nous avons créé 8 000 postes d’AESH en 2020, 4 000 en 2021 et 4 000 en 2022. Nous en créerons 4 000 en 2023 si vous approuvez ce budget, pour un effectif total supérieur à 130 000. Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’il s’agit du deuxième métier de l’éducation nationale.

Pour autant, nous avons des difficultés à répondre aux notifications adressées de façon insistante, et bien légitimement, par les MDPH.

Il ne s’agit donc pas simplement de créer des postes d’AESH, comme nous le faisons. Il faut aussi repenser plus structurellement les conditions d’accueil des élèves en situation de handicap. C’est précisément notre objectif dans la perspective de la Conférence nationale sur le handicap qui se réunira au printemps 2023. Un comité interministériel a été mis en place et nous allons échanger avec les collectivités, en particulier les départements – une réunion est prévue à ce sujet le 15 décembre. Nous travaillons également avec les MDPH sur une remise à plat du système en vue de la conférence nationale.

En matière d’école inclusive, les progrès ne passeront pas seulement par la multiplication des postes d’AESH, mais aussi par une réflexion globale et structurelle sur l’accueil des enfants en situation de handicap. C’est précisément notre idée d’acte 2 de l’école inclusive.

Soyez assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, de notre volonté de réserver les meilleures conditions d’accueil aux enfants concernés, et ce de manière pérenne.

L’avis du Gouvernement sur ces deux amendements est donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.

M. Michel Canévet. Ces amendements traduisent les attentes extrêmement fortes qui s’expriment sur le terrain – M. le rapporteur spécial les a rappelées fort opportunément.

Il est difficile de trouver des personnels, ce qui entraîne une fragmentation de la prise en charge des enfants en situation de handicap.

Ne serait-il pas opportun de décentraliser la responsabilité des AESH ? Il semblerait assez cohérent que les décisions des MDPH soient suivies d’une prise en charge par les départements eux-mêmes, ce qui permettrait sans doute d’améliorer l’accompagnement des enfants en situation de handicap. Une réflexion devrait s’engager sur le sujet.

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.

Mme Pascale Gruny. Monsieur le ministre, je vous ai écouté attentivement ; vous nous proposez de poursuivre la réflexion. Combien de temps devrons-nous encore réfléchir ? Sur le terrain, nous rencontrons des parents désemparés, des gamins perdus…

Mon département de l’Aisne est le premier touché par l’illettrisme. Nous inaugurerons l’an prochain la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, qui en est le berceau ; pourtant, nous sommes complètement oubliés !

On a besoin d’AESH en nombre, mais aussi d’AESH correctement formés et rémunérés. Si le métier n’est pas attractif, c’est aussi parce qu’il ne permet pas de vivre décemment.

Nous voulons bien vous aider à réfléchir, monsieur le ministre – en tant que conseillère départementale, je travaille pour ma part avec le directeur académique et la MDPH –, mais, sincèrement, nous en avons assez de réfléchir. Quand passerons-nous à l’action ?

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre Monier. Le choix a été fait d’une école inclusive et de créer des Pial pour ouvrir l’école à l’ensemble des enfants handicapés.

Parfois, ces enfants auraient pourtant besoin d’être accueillis dans d’autres structures, comme des Ulis ou des instituts médico-éducatifs (IME).

Le nombre de places y étant restreint, l’école se voit dans l’obligation d’apporter une réponse à ces enfants sans leur offrir un accompagnement à la hauteur des besoins. Cet aspect doit être pris en compte dans votre réflexion, monsieur le ministre.

En outre, pour approcher les 100 % de couverture que vous visez, il faudrait une augmentation de postes de 12,6 %, soit 10 270 postes supplémentaires pour 2023 et non 4 000 comme cela est prévu. Un effort est certes fait, mais il ne suffit pas pour obtenir une couverture efficace.

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

M. Max Brisson. Je reconnais que des progrès ont été réalisés depuis la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, dite loi Blanquer. Il serait injuste de ne pas le dire : la situation était bien pire auparavant.

Pour autant, l’école inclusive n’est pas au rendez-vous. Elle n’est pas à la hauteur de cette belle mission que l’école voudrait se donner. Sur ce sujet, nous devons tous faire preuve d’une grande modestie, tant le retard s’est accumulé au cours des années.

Si la réponse ne peut pas être uniquement quantitative, vous comprendrez que, tout au long de la soirée, nous mettions en avant la précarité institutionnelle que subissent les AESH et qui est indigne d’un grand pays comme le nôtre.

Notre rapporteur spécial a posé la question centrale : comment mettre en place une politique globale et partenariale de la prise en charge de l’enfant en situation de handicap ?

La réflexion sur le chef de filat est ouverte. À cet égard, nous pouvons nous demander si l’éducation nationale est la mieux placée pour assurer ce rôle compte tenu de ses compétences, de sa culture et de son organisation.

En tout état de cause, c’est dans cet esprit que les concertations que vous évoquez, monsieur le ministre, doivent s’engager.

L’absence d’articulation est une réelle faiblesse. Pour le girondin que je suis, l’hétérogénéité des situations d’un département à l’autre n’est pas acceptable. (M. le rapporteur spécial approuve.) Nous avons donc besoin, comme l’a proposé Gérard Longuet, d’un cadrage national interministériel.

Pour faire suite à la demande du rapporteur spécial, je retire l’amendement n° II-866 rectifié.

M. le président. L’amendement n° II-866 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° II-887.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-914, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

Vie de l’élève

dont titre 2

135 000 000

135 000 000

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

135 000 000

135 000 000

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

Enseignement technique agricole

dont titre 2

TOTAL

135 000 000

135 000 000

135 000 000

135 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Le constat est partagé sur toutes les travées : la situation des AESH n’est pas tolérable.

Comment accepter que cette profession, féminine à 90 %, vive largement en dessous du seuil de pauvreté ? Comment accepter que la rémunération moyenne s’établisse à 850 euros net ? Comment accepter qu’une telle fonction, pourtant vitale au sein de l’école dite inclusive, soit rémunérée de manière aussi indigne ?

Nous vous proposons d’augmenter de 10 % l’enveloppe budgétaire consacrée à la rémunération des AESH. Cela ne doit être qu’un premier pas. L’objectif est simple : aucune AESH en dessous du SMIC !

M. le président. L’amendement n° II-873 rectifié, présenté par Mmes Monier et S. Robert, M. Marie, Mme Meunier, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel, Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

Vie de l’élève

dont titre 2

20 000 000

20 000 000

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

20 000 000

20 000 000

Enseignement technique agricole

dont titre 2

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Mme Marie-Pierre Monier. Aujourd’hui, 132 000 AESH, dont 93 % de femmes, jouent un rôle fondamental pour assurer dans les meilleures conditions, dans le cadre de l’école inclusive, la scolarisation des élèves en situation de handicap.

Pourtant, ces professionnels ne bénéficient pas de la reconnaissance qu’ils méritent. Ils ne font même pas partie de l’équipe éducative. Contraints de travailler à temps partiel, souvent dans plusieurs établissements à la fois, et jonglant avec un emploi du temps très variable, ils font face à une grande précarité.

À cet égard, les différences de traitement entre les départements appellent une véritable harmonisation.

La majorité des AESH perçoivent une rémunération extrêmement faible, en moyenne de 850 euros par mois. Ils exercent dans des conditions très difficiles, aggravées par la mise en place des Pial et l’affectation auprès de plusieurs enfants.

De fait, l’aide individualisée a cédé la place à une mutualisation croissante, qui entraîne une multiplication des déplacements – se pose d’ailleurs la question du remboursement de ces frais de déplacement, monsieur le ministre.

Certes, 80 millions d’euros ont été intégrés par le Gouvernement au présent projet de loi de finances considéré comme adopté à la suite du recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. C’est un premier pas, mais la marche est encore haute pour garantir une rémunération décente à ces personnes.

Même en tenant compte de l’augmentation prévue, la rémunération des AESH restera inférieure au seuil de pauvreté !

Aussi, nous proposons d’abonder le fonds correspondant de 20 millions d’euros supplémentaires.

J’en profite pour vous interroger, monsieur le ministre, sur les modalités de répartition de cette enveloppe de 80 millions d’euros. Permettra-t-elle réellement d’augmenter l’ensemble des AESH de plus de 10 % ? Cette augmentation sera-t-elle conditionnée à l’acceptation de nouvelles missions, notamment durant le temps périscolaire ?

M. le président. L’amendement n° II-937, présenté par Mme Brulin, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

Vie de l’élève

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

Enseignement technique agricole

dont titre 2

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Cet amendement vise également à augmenter la rémunération des AESH.

Le turnover est important dans ce métier. Les femmes qui exercent cette profession – ce sont très majoritairement des femmes – la quittent dès qu’elles trouvent un emploi plus rémunérateur.

Or la professionnalisation de ce métier est un enjeu important et nous avons besoin de fidéliser les professionnels en exercice. Cela passe par d’importantes revalorisations.

En la matière, ni les 10 % d’augmentation prévus en septembre prochain ni les primes REP et REP+ ne permettront à ces salariés de dépasser le seuil de pauvreté.

Vous venez vous-même de dire, monsieur le ministre, que les AESH étaient le deuxième métier de l’éducation nationale. Il n’est pas tolérable que, dans un pays comme la France, le deuxième métier de l’éducation nationale soit rémunéré en dessous du seuil de pauvreté.

Enfin, pour apporter notre pierre au débat très intéressant qui s’est engagé sur la manière dont on conçoit l’accompagnement des enfants, et pas seulement pendant le temps scolaire, il nous semble que le statut de la fonction publique est un creuset à travailler pour améliorer les choses en la matière.

Il permet notamment des passerelles entre la fonction publique territoriale et la fonction publique de l’État. Ainsi, il y aurait des choses à imaginer pour que ce nouveau métier soit encadré dans le statut de la fonction publique territoriale et que les AESH puissent bénéficier de ces passerelles.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° II-228 rectifié bis est présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, A. Marc, Decool, Wattebled et Menonville, Mmes Guidez et Jacquemet, MM. Belin et Somon, Mmes Belrhiti et Dumont et M. Détraigne.

L’amendement n° II-483 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac, Cabanel, Corbisez, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

L’amendement n° II-595 rectifié ter est présenté par Mmes Billon et Tetuanui, M. Levi, Mme Morin-Desailly, M. Canévet, Mme Vérien, MM. Kern et Duffourg, Mmes Férat et Doineau, MM. Hingray, J.M. Arnaud, P. Martin et Le Nay, Mme Gacquerre, M. Longeot, Mmes Saint-Pé et de La Provôté, M. S. Demilly et Mme Herzog.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

Vie de l’élève

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Enseignement technique agricole

dont titre 2

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° II-228 rectifié bis.

Mme Colette Mélot. Le droit à l’éducation pour tous les enfants en situation de handicap est un droit fondamental, que le Président de la République a placé parmi les priorités de son nouveau mandat.

L’école inclusive vise à assurer une scolarisation de qualité à tous les élèves, de la maternelle au lycée, par la prise en compte de leurs singularités et de leurs besoins éducatifs particuliers.

Cet amendement d’appel tend à encourager le Gouvernement à revaloriser l’ensemble des rémunérations des AESH, à encourager ces derniers à exercer leur droit à la formation et à la validation des acquis de l’expérience et à leur proposer davantage de contrats à temps plein. Nous proposons un montant moins élevé que dans les amendements précédents, mais l’objectif est le même.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° II-483 rectifié.

Mme Nathalie Delattre. Il est défendu, monsieur le président. Le groupe du RDSE s’associe au combat en faveur des AESH.

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° II-595 rectifié ter.

Mme Annick Billon. Cet amendement tend à abonder l’action n° 03, Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap, de 5 millions d’euros.

Je souscris naturellement aux propos qui viennent d’être tenus sur le métier d’AESH et il me semble que le montant que nous proposons est raisonnable.

M. le président. L’amendement n° II-898 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. L’amendement n° II-914, qui n’est pas un amendement d’appel, est significatif pour la commission des finances, eu égard au montant des crédits qu’il tend à ajouter.

Une augmentation des crédits de 5 % est simplement impossible à financer, dans la mesure où elle ponctionnerait significativement, une fois encore, le programme 230, « Vie de l’élève ». Or nous savons tous, les uns et les autres, que ce programme répond à de véritables besoins dans les établissements.

Tout en comprenant l’esprit et la pertinence des autres amendements qui sont en discussion commune et qui me semble être des amendements d’appel, la commission des finances en souhaite le retrait.

Les indications qu’a données M. le ministre, en particulier ce contact permanent avec les grandes associations nationales d’élus locaux, me paraissent être de bon augure et répondent en partie à la préoccupation de notre collègue Pascale Gruny, qui demandait que l’on passe de la parole aux actes.

On ne peut pas dire que rien n’est fait. De majorité en majorité, la prise en charge de l’enfant handicapé dans l’école inclusive a considérablement progressé.

Mais il nous faut reconnaître la diversité des handicaps et des besoins que les enfants handicapés expriment sur le chemin de leur intégration. Il est donc extraordinairement difficile de définir un standard absolu.

C’est pourquoi il nous faut déterminer, à l’échelle ministérielle comme locale, des critères d’action particulièrement fins.

Une prescription obligatoire qui ne serait ni discutée ni évaluée renforcerait les incertitudes et ne permettrait pas à la commission des finances, qui est gardienne des finances publiques, de cibler finement les crédits. Nous manquons encore d’une vision précise et d’une maîtrise dans l’organisation pratique.

Nous disposons déjà d’une belle enveloppe de crédits. Nous pourrions faire mieux, mais pour cela nous devons savoir comment organiser les choses, ce qui n’est pas le cas à ce stade.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pap Ndiaye, ministre. Le Gouvernement partage la volonté exprimée ici d’augmenter la rémunération des AESH. Dès la rentrée 2023, les primes en éducation prioritaire leur seront versées, de même qu’aux AED.

Par ailleurs, tous les AESH bénéficieront, à la rentrée 2023 également – nous avons retenu en première lecture à l’Assemblée nationale un amendement allant en ce sens –, d’une augmentation inconditionnelle de 10 %.

Au-delà de ces avancées, l’effort de formation qui accompagne ce mouvement doit être souligné.

Plus généralement, il est nécessaire d’augmenter le temps de travail des AESH, car leur faible rémunération est liée à un temps de travail hebdomadaire trop faible, d’environ 24 heures. Nous devons tendre vers les 35 heures.

Dans cette perspective, nous travaillons avec les collectivités locales à la préparation de la prochaine Conférence nationale sur le handicap, qui doit engager l’acte II de l’école inclusive.

L’objectif est que les AESH soient payés à la hauteur des tâches qu’ils accomplissent et puissent atteindre un volume horaire de travail hebdomadaire leur permettant de toucher des rémunérations satisfaisantes.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.

Je partage, je le répète, l’ambition de mieux rémunérer les AESH. Cette ambition aura des traductions concrètes dès la rentrée prochaine et elle prendra tout son sens dans le cadre de la Conférence nationale du handicap.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.

M. Jacques Fernique. Monsieur le ministre, je dois dire que j’ai sursauté tout à l’heure, en vous entendant dire que le métier d’AESH était le deuxième métier de l’éducation nationale. Quel drôle de métier que ce métier dont on ne peut pas vivre correctement et qui est si peu attractif, si peu reconnu sur le plan institutionnel et autant dépourvu de perspectives de carrière !

Combien de remarquables AESH de première génération, qui ont su construire un vrai savoir-faire et un vrai savoir-être dans l’accompagnement des enfants, ont dû se résoudre à abandonner au profit d’un métier plus rémunérateur !

Pour que les AESH aient un véritable métier, il faut qu’ils aient un salaire et des conditions de travail dignes de ce nom.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre Monier. Il me semble que le Sénat devrait envoyer un signal fort !

Nous travaillons depuis longtemps sur ce sujet. Nous savons combien la précarisation est inacceptable. Celles et ceux qui ont assisté aux auditions que nous avons menées dans le cadre de la proposition de loi visant à lutter contre la précarité des accompagnants d’élèves en situation de handicap et des assistants d’éducation ont entendu les cris de détresse des AESH.

Nous savons parfaitement ce qu’il adviendra de notre vote… Peut-être pourrions-nous alors trouver le courage d’augmenter la rémunération des AESH et chacun prendra ses responsabilités !

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Mme Annick Billon. J’ai entendu les arguments de M. le rapporteur spécial et de M. le ministre. J’entends, bien entendu, les propos de notre collègue très engagée, Marie-Pierre Monier.

Je l’ai dit dans la discussion générale : nous partons de très loin et le budget est en hausse. Le nombre d’AESH augmente. Grâce aux Pial, l’organisation progresse, même si beaucoup reste à faire en matière d’égalité, notamment en ce qui concerne la formation.

Je retire mon amendement, en espérant que nous avancerons rapidement sur le sujet de l’accompagnement des enfants en situation de handicap.

Mme Colette Mélot. Je retire également mon amendement.

Mme Nathalie Delattre. J’en fais de même, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos II-228 rectifié bis, II-483 rectifié et II-595 rectifié ter sont retirés.

Je mets aux voix l’amendement n° II-914.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-873 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-937.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-915, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

Vie de l’élève

dont titre 2

100 000 000

100 000 000

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

100 000 000

100 000 000

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

Enseignement technique agricole

dont titre 2

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Nous abordons à présent la question du statut. Les AESH enchaînent majoritairement les contrats à durée déterminée (CDD) et moins de 20 % d’entre eux sont en contrat à durée indéterminée (CDI).

Aux difficultés liées à la rémunération et à la mobilité s’ajoute la grande précarité de la carrière. Le droit actuel prévoit que l’État employeur se doit de proposer à ces personnels un CDI au bout de six ans passés en CDD. C’est trop long !

Ces personnels doivent être sécurisés dans leur emploi. Nous appelons à ce que les AESH soient recrutés en CDI et bénéficient d’une formation adaptée dès le premier contrat, comme le prévoyait la proposition de loi de Michèle Victory adoptée en début d’année à l’Assemblée nationale, mais dans une version détricotée.

La stabilité de l’emploi est aussi un facteur d’attractivité. Nous vous appelons donc à voter cet amendement, qui débloque les moyens nécessaires à la titularisation des AESH.