M. le président. L’amendement n° 86, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

I. – Par dérogation aux articles L. 5422-20 à L. 5422-24 et L. 5524-3 du code du travail, les mesures d’application des dispositions législatives relatives à l’assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422-20 du même code ne peuvent être déterminées par décret en Conseil d’État qu’après la négociation des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ainsi que des associations représentatives de demandeurs d’emploi et de salariés enchaînant des contrats courts.

II. – Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. La réforme menée à partir de 2019 s’est faite contre les partenaires sociaux, qui n’ont cessé d’alerter sur ses graves conséquences sociales.

Alors qu’une évaluation de l’impact de cette réforme n’est promise que pour la fin de 2024, les premières données font apparaître, premièrement, une augmentation des chômeurs en catégories B, C, D et E, deuxièmement, une tension inédite sur le marché de l’emploi saisonnier en raison de l’allongement de la durée d’affiliation, soit un effet contre-productif, et, troisièmement, une baisse des indemnités faisant basculer de nombreuses personnes dans la pauvreté.

Même sous l’angle de la réduction des emplois vacants, la réforme s’apparente à un échec puisque ces derniers ont augmenté entre le deuxième trimestre 2021 et le deuxième trimestre 2022, passant de 264 000 à 362 000, selon la Dares. Cette réforme ne permet donc pas de lutter contre les tensions sur le marché de l’emploi, qui ont bien d’autres causes.

Malgré cela, le document de concertation que vous avez envoyé aux partenaires sociaux est clair : le Gouvernement a l’intention d’intensifier la réforme en envisageant un nouvel allongement de la durée d’affiliation, une diminution de la durée d’indemnisation, accompagnée de la baisse du taux de remplacement héritée de la réforme précédente, voire une territorialisation de l’assurance chômage, sur le modèle du Canada.

Cette situation de plus en plus inacceptable explique le refus d’une négociation préalable, dans le respect du paritarisme et de la démocratie.

Au travers de cet amendement, nous voulons rétablir l’obligation d’une négociation avec les partenaires sociaux, incluant les associations représentatives de chômeurs et précaires, premiers concernés par les effets des réformes successives, qu’une démocratie vivante devrait intégrer comme parties prenantes.

M. le président. L’amendement n° 77 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Alinéa 1

1° Première phrase

Après le mot :

État

rédiger ainsi la fin de la phrase :

proroge, à compter du 1er novembre 2022, les mesures d’application, actuellement en vigueur, des dispositions législatives relatives à l’assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422-20 du même code.

2° Seconde phrase

Après la date :

31 août 2023

supprimer la fin de la phrase.

La parole est à M. Éric Gold.

M. Éric Gold. Il s’agit d’un amendement de repli.

Attachés à la gestion paritaire de l’assurance chômage, nous proposons de proroger les mesures actuellement en vigueur dans l’attente de la concertation avec les partenaires sociaux sur la gouvernance, l’équilibre financier et les règles d’indemnisation de l’assurance chômage.

M. le président. L’amendement n° 19 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

1° Remplacer les mots :

, pris après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, détermine

par les mots :

peut proroger

2° Après le mot :

application

insérer les mots :

en vigueur

La parole est à M. Yan Chantrel.

M. Yan Chantrel. Cet amendement de repli vise à rétablir la compétence des partenaires sociaux pour la période de carence, que le Gouvernement a lui-même créée en laissant filer les délais.

Comme le rappelle le Conseil d’État dans son avis du 5 septembre 2022, le « projet de loi ne comporte en effet aucune limitation directe ou indirecte quant à l’objet ou à la portée des dispositions du futur décret ».

Or, si les rapporteurs ont introduit un dispositif plus favorable au paritarisme en ce qui concerne la nécessaire évolution de la gouvernance de l’assurance chômage, ils n’ont pas touché au dispositif relatif au décret régissant les règles d’indemnisation, sauf pour réduire la durée durant laquelle le Gouvernement pourra agir de son propre chef.

Tout cela s’apparente donc toujours à la signature d’un chèque en blanc au profit du Gouvernement, en piétinant le paritarisme ainsi que le Parlement.

Pour mémoire, la réforme menée durant le précédent quinquennat fut la première, depuis 1971, à être réalisée contre l’avis des partenaires sociaux. Le Gouvernement ne peut, une nouvelle fois, contourner le dialogue social.

Au travers de cet amendement, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain entend redonner la main aux partenaires sociaux, y compris sur la période transitoire commençant le 1er novembre 2022.

M. le président. L’amendement n° 20 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

Après le mot :

après

insérer les mots :

transmission au Parlement et aux partenaires sociaux du rapport prévu à l’article L. 5422-25 du même code et après

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à conditionner la publication du décret en Conseil d’État à la transmission au Parlement et aux partenaires sociaux d’un rapport sur la gestion de l’assurance chômage.

Aux termes de la loi du 5 septembre 2018, le Gouvernement transmet chaque année, avant le 15 octobre, au Parlement et aux partenaires sociaux gestionnaires un rapport sur la situation financière de l’assurance chômage. Or ce rapport n’a pas été transmis depuis 2018. Le Parlement légifère donc sans même qu’un bilan officiel de la précédente réforme d’assurance chômage ait été réalisé et rendu public.

Pourtant, c’est sur le fondement de résultats factuels que de nouvelles règles d’indemnisation doivent être réfléchies et mises en place. Nous devons connaître précisément les conséquences des règles d’indemnisation décidées par décret en 2019, notamment sur l’accès à l’indemnisation et sur le retour à l’emploi. Sans bilan chiffré et étayé, il n’est en effet pas possible de justifier de nouvelles règles.

En déplaçant le problème sur la question de la pseudo-responsabilité individuelle culpabilisatrice du demandeur d’emploi, ce projet de loi réactive tous les vieux stéréotypes sur le chômeur qui ne veut pas travailler et qui refuse un CDI. Ce faisant, il ouvre la voie à des mesures encore plus régressives de la part de la majorité sénatoriale.

M. le président. L’amendement n° 47, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase, alinéa 11 et alinéa 12, première phrase

Remplacer le mot :

concertation

par le mot :

négociation

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. La droite sénatoriale se pose en défenseure du paritarisme de l’assurance chômage face au Gouvernement, qui souhaite décider seul des règles d’indemnisation, mais elle prévoit une simple « concertation » entre organisations syndicales et patronales, qui n’est qu’une mascarade. Le ministre du travail la décrit comme un « échange », une « discussion » avec propositions et contre-propositions, mais, à la fin, c’est bien le Gouvernement qui décidera.

Ce dernier invoque l’urgence pour mettre en place un cadre juridique relatif à l’indemnisation des chômeurs, mais c’est lui qui n’a pas envoyé la lettre de cadrage aux organisations syndicales avant le 29 juin ! C’est lui qui décide de ne pas simplement proroger la réforme de 2019 ! C’est encore lui qui a fixé jusqu’au 31 décembre 2023 la durée de l’habilitation à décider seul des règles d’indemnisation chômage ! Le Président de la République avait pourtant annoncé vouloir revenir à un fonctionnement plus horizontal…

Notre amendement vise à remplacer la concertation prévue à l’article 1er pour discuter de la modification des règles d’indemnisation chômage par une véritable négociation sociale, dans laquelle l’avis des partenaires sociaux est non pas simplement consultatif, mais obligatoire, avant toute réforme de l’assurance chômage.

Le Gouvernement se comporte comme un banquier qui s’installerait à notre domicile et entendrait fixer les règles d’utilisation des radiateurs…

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 21 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 90 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 1, première phrase

Remplacer le mot :

concertation

par le mot :

négociation

La parole est à Mme Poumirol, pour présenter l’amendement n° 21 rectifié.

Mme Émilienne Poumirol. La sémantique ayant son importance, cet amendement vise à remettre au centre de notre démocratie sociale la négociation plutôt que la concertation, mise en avant par le Gouvernement, entre partenaires sociaux. Cela n’a pas du tout la même signification.

Le paritarisme et le dialogue social impliquent un cadre d’échange tel que les partenaires sociaux voient leurs prérogatives reconnues ; c’est cela, la négociation ! Il y va du respect de la philosophie ayant présidé à la mise en place de l’assurance chômage.

Les rapporteurs sont allés dans ce sens en supprimant la lettre de cadrage dans la procédure de négociation des accords sur l’assurance chômage et en fixant un cadre transitoire de discussion plus favorable au paritarisme. Nous leur proposons d’aller plus loin, en exigeant également une négociation pour la période de carence à venir.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 90.

Mme Raymonde Poncet Monge. Le Gouvernement entend faire de la concertation le grand principe qui devrait guider la construction de ses politiques publiques. Or le droit du travail est une affaire non pas de concertation, mais de négociation.

Les partenaires sociaux ne sont pas seulement des instances à consulter : ce sont les interlocuteurs privilégiés de la négociation collective, garante non seulement du paritarisme et d’une connexion réelle avec les personnes concernées, mais aussi de la protection des droits des personnes en recherche d’emploi.

Comme nous l’avons déjà souligné, en s’autorisant à prendre par décret de nouvelles règles pour l’assurance chômage, sans réelle négociation avec les partenaires sociaux, le Gouvernement peut facilement outrepasser les oppositions à sa lettre de cadrage ou à son support de concertation et imposer une réforme qui ne respecte pas les principes du débat démocratique et du dialogue social, ce qui est inacceptable en démocratie. Comme l’écrivait Rousseau dans Du Contrat social, « le peuple soumis aux lois en doit être l’auteur », de sorte qu’un régime n’est démocratique que si les personnes concernées par les lois ne sont pas exclues de la fabrique de la loi elle-même.

La prise en compte par des procédures démocratiques des positions des travailleurs, actifs occupés ou privés d’emploi, et des agents de Pôle emploi est primordiale pour la mise en place de réformes efficaces et protectrices.

Dès lors, les modifications envisagées par décret dans cet article doivent obligatoirement faire l’objet d’une négociation – j’y insiste, d’une négociation – avec les partenaires sociaux.

M. le président. L’amendement n° 22 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

Après le mot :

interprofessionnel

insérer les mots :

et la transmission au Parlement par le Gouvernement d’un rapport réalisé conjointement par le Conseil d’analyse économique, le Conseil d’orientation pour l’emploi et le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, évaluant les impacts et l’efficacité de la réforme de l’assurance chômage menée entre 2018 et 2021

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement de repli vise à insister sur la nécessité d’évaluer les réformes de l’assurance chômage.

Comme je l’ai déjà souligné, nous ne pouvons évaluer objectivement ni de manière exhaustive les conséquences de la précédente réforme, faute d’avoir reçu les éléments nécessaires.

M. le président. L’amendement n° 93, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Alinéa 1, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Les mesures d’application déterminées par ce décret ne peuvent avoir pour effet d’entraîner une différence de traitement des travailleurs remplissant les critères prévus à l’article L. 5422-1 du même code sur la base de leur lieu de résidence ou de travail.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Dans son support de concertation envoyé aux partenaires sociaux, le ministre du travail envisage la possibilité d’appliquer une régionalisation du régime d’assurance chômage, en s’appuyant sur l’exemple du Canada, où un tel dispositif a été introduit en 1977.

Amplifié depuis lors et corrélé à une augmentation de la durée d’affiliation et à une baisse de la durée d’allocation, le modèle canadien a eu pour seul effet de faire chuter continuellement le nombre de personnes éligibles à l’assurance chômage : ils étaient 87 % en 1989 et seulement 42 % en 1997 ! Son instauration en France, couplée aux mesures de durcissement d’accès à l’assurance chômage, ne manquera pas d’entraîner les mêmes conséquences.

La régionalisation est vertement critiquée au Canada du fait de son iniquité. En France, le dynamisme de l’emploi n’a rien à voir selon les régions : le nombre d’offres d’emploi doit, pour chaque territoire, être rapporté à celui des demandeurs d’emploi.

De plus, sauf à ne pas tenir compte des compétences et des qualifications, les offres et demandes d’emploi peuvent nécessiter d’amples reconversions et formations avant de s’apparier.

Rien ne devrait justifier une inégalité de traitement entre les demandeurs d’emploi selon les régions – cela ne devrait même pas être à l’étude au regard des conséquences négatives des réformes menées tant au Canada qu’aux États-Unis, qui n’ont rien résolu des tensions rencontrées sur le marché du travail, mais qui ont, au contraire, entraîné la multiplication des emplois de mauvaise qualité et de piètre productivité –, sauf à introduire un nouveau paramètre pour durcir encore et toujours les droits des chômeurs.

Cet amendement vise à exclure la possibilité, pour le Gouvernement, d’inclure la régionalisation par décision unilatérale dans le nouveau décret prévu pour le début de l’année 2023.

M. le président. L’amendement n° 50, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 1, seconde phrase

Remplacer la date :

31 août

par la date :

1er février

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il s’agit également d’un amendement de repli.

Nous proposons de ramener le terme de la durée au cours de laquelle le Gouvernement est autorisé à fixer par décret des règles d’assurance chômage du 31 décembre 2023 au 1er février de la même année, et non au 31 août, comme le propose la commission.

Mme la rapporteure l’a rappelé : il ne s’agit pas d’une petite décision. Les fondements de notre modèle social issu de l’après-guerre sont détricotés petit à petit. La démocratie sociale était la réponse française à la nécessité d’associer davantage travailleurs et entreprises aux décisions qui les concernent. C’est une certaine vision de la société qui disparaît si l’État reprend la main, surtout s’il ne voit les choses qu’à travers le prisme financier.

Philosophiquement, l’indemnisation est un droit lié à la mutualisation des cotisations ; ce n’est pas une aide sociale donnée au titre de la solidarité nationale.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Et cela change beaucoup de choses, car le discours sur l’assistanat confond tout : les droits acquis par les salariés s’inscrivent dans un cadre décidé par la négociation sociale entre partenaires sociaux, il ne s’agit pas d’une assistance versée au nom de la solidarité nationale.

À force de petites réformes de ce genre, on finit par glisser et trouver illégitime ce qui est un droit et, ce faisant, on fait reculer l’idée même que se font les salariés de leur reconnaissance par la société française. (Mmes Émilienne Poumirol et Angèle Préville applaudissent.)

M. le président. L’amendement n° 7 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled, est ainsi libellé :

Alinéa 1, seconde phrase

Remplacer le mot :

août

par le mot :

décembre

La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. Au travers de cet amendement, mon collègue Emmanuel Capus propose un compromis.

En commission, le délai limite au terme duquel les règles actuellement en vigueur devront être révisées a été ramené de fin décembre 2023 à août de la même année. Or ce délai, tel qu’il avait été prévu par le Gouvernement, avait pour objectif de mieux prendre en compte les effets de ces règles.

Ainsi, indépendamment du mode de détermination des futures règles, qui succéderont aux règles actuelles, il paraît judicieux de conserver un délai suffisamment long pour permettre la collecte de données qui permettront de mieux évaluer l’efficacité de ces règles et donc de prendre des décisions plus éclairées le moment venu.

Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 23 rectifié, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les mesures d’application prises par décret en Conseil d’État en application du premier alinéa ne peuvent conduire à réduire les recettes générées par la majoration du taux de contribution de chaque employeur prévue au 1° de l’article L. 5422-12 dudit code ou à augmenter la perte de recettes générées par la minoration du taux de contribution de chaque employeur prévue au 1° du même article.

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement de repli tend à introduire, à l’article 1er, une « clause de sécurité » selon laquelle le chèque en blanc signé au Gouvernement ne pourrait entraîner une réduction du bonus-malus des entreprises recourant excessivement aux contrats courts et précaires.

Ce dispositif nous semble important et nécessaire eu égard à la refonte du bonus-malus déjà engagée par les rapporteurs. Il s’agit du pendant de la suppression du dispositif de minoration introduit à l’article 2.

M. le président. L’amendement n° 108, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les dispositions prévues au premier alinéa du présent article ne concernent pas les salariés et contrats de travail mentionnés au a du 1° de l’article L. 1242-2 dudit code. Les concernant, le décret en Conseil d’État est pris après négociation avec les organisations professionnelles et syndicales les représentant.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Depuis la mise en place de la dernière réforme de l’assurance chômage, qui a notamment prolongé la durée d’affiliation, les constats se multiplient pour en souligner l’impact négatif pour les saisonniers, dont les emplois sont par définition plus courts, voire discontinus.

Si la modification de la durée minimale d’affiliation requise pour ouvrir des droits à indemnisation, passée de quatre à six mois, a profondément amoindri les droits des saisonniers, le support de concertation envoyé aux partenaires sociaux poursuit cette fuite en avant, puisqu’un allongement de la durée d’affiliation est de nouveau envisagé.

Cet allongement et la prise en compte des jours non travaillés entre deux emplois dans le calcul, forcément à la baisse, du salaire journalier de référence se sont avérés contre-productifs pour l’attractivité de secteurs concentrant les emplois saisonniers, dont la pénurie s’est accrue l’été dernier, ce qui a encore renforcé la tension sur le marché du travail. Ces emplois se caractérisent déjà par une intensification massive du travail, dans de dures conditions, très mal prises en compte dans les rémunérations. La réforme de l’assurance chômage introduit donc une double peine pour les travailleurs saisonniers, dont nombre d’entre eux ont vraisemblablement été contraints de se réorienter vers d’autres activités.

Cet amendement vise à prendre en compte les spécificités de ces travailleurs et à obliger à des négociations entre représentants des salariés concernés et Gouvernement, afin d’aboutir à un accord spécifique et mieux adapté.

M. le président. L’amendement n° 67, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…°Le dernier alinéa de l’article L. 5422-20 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Lorsque la validité des mesures d’application ainsi déterminées expire sans qu’un nouvel accord ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d’application du dernier accord relatif à l’assurance chômage conclu dans ces conditions s’appliquent jusqu’à ce qu’un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d’employeurs et de salariés. Les partenaires sociaux proposent au Gouvernement des mesures pour que le changement n’entraîne ni de baisse de l’indemnisation ni de diminution de la durée des droits ouverts pour les assurés. » ;

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Le fonctionnement actuel de l’assurance chômage permet au Gouvernement et au patronat de se passer des organisations syndicales : en effet, si les négociations entre partenaires sociaux achoppent sur la définition d’une nouvelle convention, le Gouvernement peut imposer par décret les réformes que le patronat lui souffle à l’oreille.

Ce texte est l’aboutissement de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, à laquelle nous nous étions opposés.

Après avoir réduit les capacités de décision des organisations syndicales en encadrant toujours davantage les prérogatives du paritarisme, ce projet de loi transfère directement à l’État la gestion de l’assurance chômage.

À l’inverse, nous pensons que les syndicats de salariés ont toute leur place dans l’élaboration des normes régissant l’assurance chômage. Notre amendement vise donc à revenir automatiquement à la dernière convention conclue par les organisations syndicales et patronales lorsque le régime de carence expire. Cette disposition empêchera les gouvernements de jouer la montre pour justifier la reprise en main des règles d’indemnisation chômage.

M. le président. L’amendement n° 49, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

… L’article L. 5422-1 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Le régime d’assurance chômage est fondé sur le principe de solidarité face au risque de privation d’emploi. Il assure la continuité du salaire d’activité et garantit un niveau de vie satisfaisant aux travailleurs privés d’emploi. » ;

II. – Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Selon Jean-Pascal Higelé, maître de conférences en sociologie à l’université de Lorraine, la réforme de l’assurance chômage constitue un déni de solidarité. Au-delà de la baisse des indemnités des plus précaires, le Gouvernement vise à transformer une assurance collective en épargne individualisée.

Notre amendement vise à inscrire dans la loi le caractère assurantiel de l’assurance chômage et sa vocation à sécuriser le revenu des travailleurs.

En imposant des taux de cotisation différents selon les entreprises ou les secteurs et en différenciant les règles d’indemnisation pour les plus hauts salaires, la réforme détricote la solidarité interprofessionnelle selon laquelle les titulaires d’emplois stables paient pour ceux qui subissent le chômage.

De même, la dégressivité des allocations des chômeurs les mieux payés sépare les intérêts des plus aisés et des autres. Le risque est donc que les particularités de chacun finissent par délégitimer toute solidarité et que les mieux rémunérés et les plus stables ne veuillent plus payer pour les plus précaires. Le chômage deviendrait alors un simple risque individuel.

Face à une telle situation, il est urgent de renouer avec la logique de solidarité salariale interprofessionnelle garantissant chacun contre le risque social du chômage.