M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président Kanner, nous le voyons tous les jours, et nous en sommes convenus lors de notre premier échange : la première priorité des Français, c’est le pouvoir d’achat. Ce doit être aussi notre priorité commune.

Depuis le premier jour, mon gouvernement est à l’action, dans la continuité de ce qui avait été fait par mon prédécesseur Jean Castex depuis l’automne dernier, sous l’autorité du Président de la République.

Nous avons agi pour le pouvoir d’achat des Français. Je rappelle que nous avons mis en place à l’automne dernier un bouclier tarifaire sur le gaz et l’électricité, bloquant les prix du gaz et limitant à 4 % la hausse de l’électricité. Il est important que les Françaises et les Français en soient conscients : sans ces boucliers tarifaires, les factures auraient explosé.

L’action que nous avons menée, c’est aussi la remise sur les carburants. Sans cette remise, le prix d’un plein de 50 litres serait plus cher de 10 euros.

Et nous avons agi aussi avec l’indemnité inflation, avec la revalorisation du barème de l’indemnité kilométrique, avec une aide exceptionnelle sur le chèque énergie, autant de mesures qui ont protégé les Français, notamment les plus modestes et ceux qui travaillent.

Monsieur le président Kanner, l’ensemble de ces mesures représentent 26 milliards d’euros, une somme considérable, mais qu’il était nécessaire de mobiliser pour protéger le pouvoir d’achat des Français.

Grâce à ces mesures, nous avons l’inflation la plus basse de la zone euro. Et nous avons la chance, en France, d’avoir un salaire minimum indexé sur l’inflation et le pouvoir d’achat, qui progressera de nouveau le 1er août prochain.

Il nous faut aussi agir pour l’ensemble des Français. La guerre en Ukraine dure, les perspectives économiques s’assombrissent, les prix continuent à monter. Nous voulons donc prendre de nouvelles mesures pour les protéger.

C’est tout le sens des textes sur le pouvoir d’achat qui sont en cours d’examen à l’Assemblée nationale, et dont vous aurez prochainement à débattre.

Ces textes ont pour objectif de prolonger les boucliers tarifaires sur l’énergie, d’augmenter les revenus du travail et de mieux partager la valeur, par exemple avec une baisse de charges pour les indépendants ou un triplement du plafond de la prime de pouvoir d’achat. Ils visent aussi à revaloriser les retraites et les prestations sociales, et à aider les travailleurs pour lesquels la voiture est une nécessité.

M. Thierry Cozic. Et sur les salaires ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Bref, nous voulons agir globalement pour l’ensemble des Français. Je vous ai présenté nos propositions ; nous voulons en débattre avec le Parlement, mais nous serons attachés dans les discussions à venir à ce que ces propositions soient efficaces, c’est-à-dire qu’elles se traduisent par un impact rapide pour les Français, mais aussi responsables, c’est-à-dire que nous voulons encourager le travail, préserver l’équilibre de nos comptes publics et agir en cohérence avec l’urgence climatique.

Enfin, il faut qu’elles soient équitables, parce que nous voulons d’abord protéger effectivement ceux qui souffrent le plus de cette inflation.

Agir vite et agir fort : tel est le sens de notre action pour les Français. Je suis convaincue qu’ensemble nous y parviendrons. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE et INDEP.)

M. David Assouline. Et rien sur les salaires !

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.

M. Patrick Kanner. Madame la Première ministre, je suis désolé, mais vous ne m’avez pas répondu. J’entends bien toutes les mesures que vous évoquez, qui coûtent d’ailleurs très cher au budget de l’État. À un moment donné, il faudra savoir comment nous réglons la dette en résultant pour la France.

Ma question était simple : quel effort demandez-vous aux employeurs de ce pays ?

Votre ministre de l’économie et des finances, qui n’est pas là aujourd’hui, sûrement pour de bonnes raisons, demande depuis trois ans aux patrons, permettez-moi ce mot, d’augmenter les salaires. Pour quels résultats ? C’est de l’incantation !

Vous nous dites que vous allez augmenter le SMIC. J’entends bien, madame, mais cela correspond à 26 euros pour un SMIC à 1 302 euros aujourd’hui. Voilà la réalité ! Encore une fois, les Français ne demandent pas l’aumône ; ils demandent de pouvoir vivre de leur travail dans de bonnes conditions et dans la dignité. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et GEST.)

conséquences des intempéries sur l’agriculture

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, je me fais la porte-parole de l’Association nationale des élus de la vigne et du vin pour vous souhaiter la bienvenue dans vos nouvelles fonctions.

Au cours du mois de juin, dix jours de grêle ont ravagé 30 000 hectares de vignes sur l’ensemble des terroirs français, de la Gironde à la Lozère, en passant par l’Hérault. Vous avez pu constater les dégâts lors de votre venue en Gironde, le 6 juin dernier. Les viticulteurs sont désemparés ; la viticulture française est sinistrée. Nous ne savons plus comment faire face à l’accumulation des difficultés.

La crise diplomatique avec les États-Unis, la crise covid, avec la fermeture des bars et des restaurants, la crise climatique, la crise inflationniste : face à ces innombrables défis, les viticulteurs ont besoin d’un soutien massif du Gouvernement.

J’ai une pensée également pour nos sylviculteurs, nos élus et pompiers girondins, qui se battent depuis hier soir sur le front de trois incendies dévastateurs. Je remercie M. le ministre Darmanin d’avoir décidé de s’y rendre tout à l’heure.

À court terme, il semble inévitable de mettre en place un fonds d’urgence pour venir en aide non seulement aux viticulteurs, mais aussi, plus largement, aux agriculteurs, dont la trésorerie a disparu avec cette succession de crises.

Nombre d’agriculteurs ont souscrit un prêt garanti par l’État (PGE), mais la situation actuelle transforme son remboursement en véritable couperet. Aussi, l’allongement généralisé des délais de remboursement des PGE est la seule solution pour éviter de placer en cessation de paiements les exploitations qui connaissent le plus de difficultés.

Enfin, je salue l’action du Gouvernement dans la réforme du dispositif assurantiel de gestion des aléas et le travail de notre collègue Henri Cabanel, mais tout cela sera vain si le mode de calcul des références de production historique, fondé sur la moyenne olympique,…

M. le président. Votre question !

Mme Nathalie Delattre. … ne permettent pas de tenir compte de l’enchaînement des aléas ayant frappé nos terres ces dernières années.

Monsieur le ministre, quelles annonces pouvez-vous faire ici aujourd’hui pour prévenir les drames familiaux et entrepreneuriaux à venir ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Alain Richard applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Marc Fesneau, ministre de lagriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la présidente Delattre, je vous remercie de votre question et voudrais tout d’abord m’associer aux propos que vous avez tenus sur les feux de forêt en cours en Gironde. Vous l’avez dit, Gérald Darmanin va s’y rendre, et j’imagine qu’il interviendra à ce sujet, mais je tiens moi aussi à saluer le travail des sapeurs-pompiers – nos soldats du feu –, des forces de sécurité civile, des gendarmes, des policiers, des élus locaux, qui sont particulièrement mobilisés en ce moment, alors que nous ne sommes qu’en début de période à risque, et que, malheureusement, la sécheresse et la canicule font rage.

Vous me permettrez aussi de lancer un appel à la citoyenneté et à la vigilance de chacune et chacun de nos compatriotes, sachant que près de 90 % des incendies sont d’origine humaine.

Vous m’interrogez sur les épisodes de grêle qui se sont déroulés, en particulier dans votre département, les 4 et 5 juin, et qui, malheureusement, se sont prolongés plusieurs jours et même durant plusieurs semaines.

Je me suis effectivement rendu en Gironde le 6 juin pour me rendre compte de la situation. Plusieurs dispositifs sont mobilisés.

Premièrement, il y a le dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti, comme il est de coutume. Deuxièmement, il y a le report des cotisations sociales. Troisièmement, il y a le dispositif des calamités agricoles, là où il peut s’appliquer. Malheureusement, sur des sujets comme ceux-là, tel n’est pas vraiment le cas.

Par ailleurs, s’agissant des PGE, en particulier les PGE dits « résilience », je vous confirme que, dans le projet de loi de finances rectificative qui sera débattu à l’Assemblée nationale puis au Sénat, leur prolongation est proposée. C’est un outil qui sera utile pour faire face.

En outre, j’ai diligenté une mission d’inspection express, dont j’aurai les résultats la semaine prochaine, la nature des événements, leur ampleur et, en même temps, leur intensité, variable selon les secteurs, nécessitant que nous réfléchissions à des dispositifs très adaptés, secteur par secteur.

Cela a touché la viticulture au mois de juin, mais l’arboriculture, les grandes cultures ou d’autres secteurs peuvent être touchés, donc il faut que nous adaptions au mieux nos outils. Sous l’autorité de la Première ministre, je m’engage à mettre en place les dispositifs adéquats.

Soyez rassurée, madame la sénatrice, l’État a toujours été au rendez-vous ces dernières années, notamment lors des épisodes de gel.

Enfin, s’agissant du système assurantiel, l’objectif est bien de le mettre en œuvre au 1er janvier 2023, avec le principe de la moyenne olympique, tout en continuant à travailler sur ce sujet au niveau européen, car on sait que ce système peut être pénalisant pour un certain nombre d’agriculteurs qui ont subi plusieurs épisodes de calamités. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE et INDEP. – M. Pierre Louault applaudit également.)

situation aux urgences

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre de la santé et de la prévention, faut-il confier le ministère de la santé à des médecins ? La question est légitime quand on constate le risque accru d’effondrement de l’hôpital public, tel qu’il a été laissé par votre confrère et prédécesseur. Dans mon interrogation, j’aurais pu préciser « à des médecins peu soucieux d’y défendre un service public universel de qualité ».

Votre traitement d’urgence fait de nouveau la part belle au libéral en multipliant les différences de rémunération entre ceux qui exercent et restent à l’hôpital, assurant quasiment seuls la pénibilité de la permanence des soins, et ceux à qui vous n’imposez aucune obligation de prendre enfin leur part, tout en leur octroyant des surrémunérations horaires, ce qui creuse le différentiel, dégrade l’attractivité de l’hôpital et alimente le cycle des démissions et vacances de postes.

Votre diagnostic est incomplet : il omet l’absence de lits d’hospitalisation, par exemple aux urgences pédopsychiatriques pour hospitaliser les enfants en détresse psychologique. En effet, vous continuez à fermer des lits !

Votre préconisation principale porte sur le tri des patients à l’entrée des urgences, alors que les SAMU sont déjà débordés et que 10 % des postes d’assistants de régulation médicale sont vacants. En Seine-Saint-Denis, depuis que l’on encourage à appeler le 15, seuls 8 % des appels peuvent être décrochés dans la minute. Un psychiatre dirait que cela revient à déplacer le symptôme plutôt que de traiter la maladie.

Rouvrez des lits ! C’est notre 42e proposition !

Monsieur le ministre, ma question est simple : ces mesures dites d’urgence s’inscrivent-elles dans votre vision des urgences, réduite aux seules urgences vitales – cela n’est pas notre conception –, ou bien, une fois l’été de tous les dangers passé, allez-vous enfin consentir à nous présenter un budget à la hauteur des besoins de santé des populations et des territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Poncet Monge, ma mission, en tant que ministre de la santé, c’est de permettre à chaque Français d’être pris en charge de manière adéquate lorsque cela est nécessaire. Cette mission ne se limite pas, bien entendu, à l’urgence vitale, vous l’aurez compris.

Je veux tout d’abord couper court à ce que j’entends parfois. Chaque Français continuera bien à être pris en charge dans le cadre de l’urgence et des soins non programmés là où ce sera le plus utile pour lui. En aucun cas je n’ai préconisé et ne préconise la fermeture de services d’urgence.

Le terme « triage » est particulièrement utilisé, mais à mauvais escient. Nous, professionnels, préférons le terme « qualification ». Il s’agit de procéder à une qualification du patient ou de sa famille et, en fonction de celle-ci, de l’orienter vers le parcours de soins le plus adapté. J’ai l’habitude de le dire : quand on a mal au genou depuis trois semaines, il vaut mieux aller voir son médecin traitant ou un médecin généraliste proche plutôt que d’aller dans un service d’urgence. (Exclamations sur plusieurs travées.)

Mme Laurence Cohen. Il n’y a pas assez de généralistes !

M. François Braun, ministre. Nos services d’urgence font face à une tension qui n’est pas seulement liée à leurs difficultés ou aux difficultés de l’hôpital. Il y a bien un enjeu systémique global d’organisation de l’offre de soins.

C’est dans cette perspective globale que nous travaillons : il s’agit de transformer un système fondé sur l’offre de soins en un système fondé sur la réponse aux besoins de santé de nos concitoyens.

Je ne reviendrai pas sur les 41 mesures. Vous en proposez, madame la sénatrice, une 42e, qui est de rouvrir des lits. Je vous rejoins totalement, mais, pour ouvrir des lits, il faut des soignants ; pour avoir des soignants, il faut qu’ils reviennent à l’hôpital ; pour qu’ils reviennent à l’hôpital, il faut qu’ils retrouvent du sens à leur métier. C’est là un objectif important.

J’ai signé dimanche l’instruction aux agences régionales de santé pour reprendre l’ensemble de ces mesures d’urgence, dont vous dites qu’elles privilégient le secteur privé. Je m’inscris en faux.

Ces mesures reposent sur deux éléments principaux.

Pour la première fois, on reconnaît la notion de pénibilité, en particulier la pénibilité du travail de nuit. C’est une porte ouverte. Bien entendu, il faut aller plus loin.

En ce qui concerne la permanence des soins, il ne vous aura pas échappé que nous préconisons qu’elle soit partagée entre le secteur privé et le secteur public en fonction des spécialités. On ne peut faire porter sur le secteur public seul cette pénibilité.

M. le président. Il faut conclure.

M. François Braun, ministre. Vous l’aurez compris, ma volonté est de faire travailler tout le monde ensemble : les soignants, les soignés, les élus, le privé et le public, en s’affranchissant des silos qui existent à ce jour. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, INDEP et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour la réplique.

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre de la santé, un indicateur simple nous permettra de juger de la réalisation de vos promesses : 200 000 infirmières ont quitté leur métier pour ne pas être maltraitées, pour ne pas devenir maltraitantes ; si vous ne traduisez pas ce que vous venez de dire dans vos politiques de santé, l’hémorragie continuera. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Jean-Paul Prince applaudit également.)

filière de la canne à sucre à la réunion

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Jean-Louis Lagourgue. Monsieur le ministre des outre-mer, après plus de deux semaines de mobilisation et de négociation dans le cadre de la nouvelle convention « canne », les planteurs réunionnais ont enfin obtenu gain de cause hier soir. Je vous remercie d’avoir pesé de tout votre poids pour que cette négociation aboutisse.

C’est la fin d’un conflit qui aura duré longtemps, bien trop longtemps, comme c’est le cas malheureusement à chaque renégociation de cette convention depuis plus de vingt ans.

Si agriculteurs et usiniers ont trouvé un accord global sur les six prochaines années, il n’en demeure pas moins que les acteurs de la filière restent très inquiets pour l’avenir de leur profession.

Ils n’ont pas obtenu satisfaction sur plusieurs points, notamment sur le fait que l’industriel Tereos refuse toujours d’adopter à La Réunion le même modèle coopératif qu’il applique en métropole, lequel garantit une meilleure répartition des richesses. Les planteurs regrettent également que l’État ne les accompagne pas davantage, au moins le temps que durera la situation actuelle, pour faire face aux prix des intrants, l’engrais notamment, qui ont été multipliés par trois ces derniers mois.

Enfin, ils réclament toujours que la prime bagasse soit revalorisée. Cette prime, actuellement de 14,50 euros par tonne de canne, n’a en effet pas évolué depuis 2015, alors que, pour des énergies polluantes telles que le charbon, le montant est passé de 80 euros à 400 euros.

Au regard de ces inquiétudes légitimes et des enjeux cruciaux qui en découlent, monsieur le ministre, quelles actions pérennes comptez-vous mettre en œuvre pour sauvegarder cette filière « canne », qui demeure plus que jamais au cœur d’une économie circulaire employant dans nos territoires ultramarins des milliers de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Alain Richard applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des outre-mer.

M. Jean-François Carenco, ministre délégué auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur, je suis effectivement très content que vous me posiez cette question aujourd’hui, puisque, pas plus tard qu’hier, à l’Assemblée nationale, nous étions accusés de ne rien faire sur ce dossier. Pourtant, j’ai bien assisté à la signature de cette convention, pour la première fois en présence de Mme la présidente du conseil régional et de M. le président du conseil départemental. Celle-ci règle les affaires jusqu’en 2027, à la grande satisfaction des planteurs de canne, des rhumiers, des industriels. C’est une avancée considérable qu’ils aient signé tout cela ensemble. Tout le monde a fait des efforts significatifs : Albioma pour revaloriser la prime bagasse – 3 euros de plus pour les planteurs –, les planteurs et Tereos pour aboutir à une répartition équilibrée des bénéfices – nous sommes allés chercher les bénéfices accumulés par Tereos pour les remettre dans la convention et pour répartir les bénéfices à l’avenir si bénéfices il y a.

Dans le même temps, l’État a augmenté l’aide aux planteurs de 14 millions d’euros et confirmé l’aide à l’industriel de 28 millions d’euros. Le résultat est sans commune mesure avec ce qui préexistait, puisque, pour la première fois, le prix d’achat de la canne pourra être supérieur à 100 euros par tonne, soit 15 euros de plus qu’avec la précédente convention.

Je puis vous affirmer que les canniers présents à cette signature étaient contents.

Sur la signature particulière de Tereos à La Réunion, je répète ce que j’ai dit hier à l’Assemblée nationale : je travaillerai avec les autres ministres concernés à renforcer la transparence des activités de ce groupe à La Réunion.

S’agissant du coût des intrants, enfin, et plus largement sur les conséquences du conflit en Ukraine, des mesures ont déjà été adoptées, notamment la prise en charge des cotisations sociales pour 2022 et 2023, ce qui n’est pas rien.

Par ailleurs, une aide exceptionnelle du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) a été mobilisée par le conseil départemental de La Réunion, qui était présent pour confirmer son accord.

Le ministère des outre-mer et le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire vont désormais travailler sur la souveraineté alimentaire à travers la production animale et la production de fruits et légumes. Les premières discussions que j’ai eues avec le ministre chargé des comptes publics,…

M. le président. Il faut conclure.

M. Jean-François Carenco, ministre délégué. … laissent fermement espérer une évolution positive pour l’ensemble des départements d’outre-mer. (M. François Patriat applaudit.)

situation des maternités

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Deroche. Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Monsieur le ministre, pour votre première séance de questions d’actualité au Sénat, j’aurais eu de nombreuses questions à vous poser sur le domaine de compétences de notre commission des affaires sociales. Néanmoins, je me limiterai aujourd’hui au problème des maternités.

La semaine passée, je me suis rendue à l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis, où j’ai souhaité rencontrer les équipes de la maternité pour voir comment se préparait l’été. Il s’agit d’un établissement de niveau 3, qui réalise plus de 4 000 accouchements par an, et qui prend en charge, notamment, des grossesses à risque. Je pense aux femmes atteintes de drépanocytose.

Le constat que nous y avons fait est accablant. Sur 91 postes de sage-femme, 30, soit un tiers, ne sont pas pourvus. Nous avons traversé un service de néonatologie, avec un service de soins intensifs, quasiment vide – trois berceaux sur vingt occupés –, chacun se démenant pour essayer de trouver des places pour les nouveau-nés dans des établissements à proximité, eux aussi en situation de tension.

Vous êtes ministre de la prévention ; or celle-ci est complètement laissée de côté.

Que souhaitez-vous faire pour que les femmes, en Île-de-France, mais aussi partout en France, puissent accoucher en toute sécurité, ce qui n’est pas le cas actuellement ? Comment pouvez-vous faire revenir des sages-femmes dans les hôpitaux, puisque ce sont surtout les personnels qui manquent ?

Par ailleurs, on nous a signalé que le recrutement de sages-femmes à diplôme hors Union européenne est beaucoup plus complexe que celui des praticiens diplômés hors Union européenne (Padhue). Pourtant, ils font tous partie des professions médicales. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la présidente Deroche, vous avez raison, le problème de notre système de santé est systémique. Au-delà de la crise conjoncturelle que nous vivons actuellement, c’est bien sur l’ensemble du système de santé qu’il faut faire peser nos efforts.

Notre pays connaît depuis plusieurs années une réorganisation continue des maternités, sous l’effet, déjà, de contraintes de démographie médicale, mais aussi, et surtout, pour tenir compte d’exigences de sécurité et de qualité des soins que nous devons à l’ensemble de nos concitoyennes.

Des inégalités persistent. Je vais lutter contre celles-ci, comme d’ailleurs, de façon générale, contre toutes les inégalités d’accès à la santé.

En réponse à ces constats, nous agissons déjà pour mieux prendre en charge les femmes dans nos maternités, avec le déploiement en cours de maisons de naissance : huit maisons de naissance expérimentales en voie de pérennisation pour une cible de vingt à court terme. (Mme Cécile Cukierman ironise.)

Le projet d’extension des missions des centres périnataux de proximité vise à apporter une réponse au plus près des territoires. Il s’agit d’étendre leurs actions dans le champ de la santé de la femme et de l’enfant. Il y a également l’expérimentation d’équipes mobiles de néonatalogie à domicile, la mise en place pour les femmes issues de territoires isolés de la prise en charge d’un hébergement de proximité à la maternité, ainsi que des frais de transport.

Nous renforçons aussi l’attractivité des métiers du soin, notamment pour les maternités. Je pense en particulier à la question de l’exercice mixte ville-hôpital pour les sages-femmes.

Vous parlez de faire revenir des sages-femmes à l’hôpital. Les sages-femmes avec qui j’ai discuté quittent l’hôpital aussi à cause de la pénibilité de la permanence des soins. Je le répète, cette pénibilité de la permanence des soins ne doit pas porter seulement sur l’hôpital public ; elle doit être partagée entre le public et le privé. (Mme Laurence Cohen sexclame.)

Les professionnels exerçant en maternité ont par ailleurs bénéficié de 12 millions d’euros de revalorisation « Ségur ». Les sages-femmes ont connu également une revalorisation complémentaire, portant la hausse de revenus à 500 euros par mois en moyenne.

Nous poursuivons en outre des actions pour développer nos capacités de formation dans ces métiers et ces spécialités par l’ouverture de places, avec la fin du numerus clausus, ou la sixième année d’études de maïeutique.

Enfin, pour soutenir les professionnels des maternités, et dans l’attente des travaux menés dans le cadre de la conférence des parties prenantes, il ne vous a pas échappé que les mesures de la mission dite « urgences » ou dite « flash » s’appliquent à l’ensemble des professionnels, donc aussi à ceux des maternités. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour la réplique.

Mme Catherine Deroche. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse sur certains points. Cependant, quand on vit une grossesse à risque, ce n’est pas dans une maison de naissance que l’on va accoucher !

Mme Catherine Deroche. Il y a vraiment un problème urgent dans ces maternités. Les personnels que nous avons vus sont formidables de dévouement, mais ils sont en proie à un désespoir total. Ils réclament de revenir au minimum à la situation antérieure, qui était déjà difficile en raison des sous-effectifs. Actuellement, ils sont bien en deçà.

Vous ne m’avez pas répondu sur les diplômes étrangers : on ne peut pas balayer ici tous les sujets. Nous vous donnons rendez-vous à la rentrée, dès le mois de septembre, pour voir avec vous bien d’autres sujets avant l’examen du PLFSS. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse