M. Olivier Véran, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je rappelle que nous travaillons sur la gouvernance dans les Ehpad, que nous y avons créé 10 000 postes médicalisés et facilité le recours à des infirmières de nuit au sein des réseaux de santé.

M. Vincent Éblé. Il ne s’agit pas des salariés des Ehpad mais des dirigeants !

M. Olivier Véran, ministre. Pour faire tout cela, nous n’avons pas attendu la parution d’un livre. Ce sont les actions que nous déclinons depuis des années maintenant.

Madame la sénatrice, j’ai été socialiste, vous êtes socialiste. Je me souviens comme vous du rapport de la Cour des comptes de 2017, qui indiquait qu’il y avait eu, sous la présidence socialiste et notamment dans les départements dirigés par les socialistes, un très fort boom des Ehpad privés. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)

Mme Martine Filleul. Ce n’est pas le sujet !

M. Vincent Éblé. Vous étiez où, à l’époque ?

M. Olivier Véran, ministre. Si vous changiez vos convictions, peut-être qu’un jour vous auriez également l’occasion de changer la politique que vous avez menée jusqu’ici ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Nouvelles protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour la réplique.

Mme Monique Lubin. Monsieur le ministre, votre exemple est fort mal choisi. Je suis l’élue d’un département dont vous avez bien connu le président, Henri Emmanuelli, et où tous les Ehpad sont publics ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mmes Laurence Cohen et Marie-Claude Varaillas applaudissent également.)

M. Olivier Véran, ministre. C’est le seul !

impact des prix de l’énergie sur les collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. Bruno Rojouan, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Rojouan. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

En pleine préparation de leur budget pour 2022, de nombreuses collectivités territoriales tirent le signal d’alarme : l’augmentation des prix de l’électricité de près de 35 % a des répercussions importantes sur les finances locales. On assiste à une hausse brutale des prix, sauf pour les collectivités bénéficiant d’offres à prix fixe ; celles dont le contrat arrive à échéance éprouvent des difficultés à passer de nouveau marché à des prix raisonnables.

L’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité et la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) estiment que cette augmentation des prix s’échelonne de 30 % à 300 %, et que neuf communes sur dix seraient affectées.

L’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dite Agence de la transition écologique) évaluait à 4 milliards d’euros leurs dépenses en énergie en 2017. Le surcoût dépasse cette fois un milliard d’euros. L’addition est salée !

La crise covid a nécessité beaucoup d’efforts pour suppléer l’État. Les collectivités vont être contraintes de renoncer à certains investissements.

Il est vrai que certaines collectivités sont en partie préservées grâce à des contrats au tarif réglementé de vente, mais la plupart ne sont plus éligibles à de tels contrats. Monsieur le ministre, faisons en sorte que toutes les collectivités locales puissent de nouveau accéder à ce tarif réglementé.

J’ai entendu le Gouvernement s’inquiéter du sort des ménages et des entreprises confrontées à ces difficultés. N’oubliez pas que tous les échelons locaux sont également fortement affectés. Si la hausse de l’inflation va entraîner une revalorisation des bases locatives, l’augmentation des recettes fiscales sera très loin de compenser celle du prix de l’énergie.

Monsieur le ministre, quel message adressez-vous aux collectivités territoriales, qui s’inquiètent une fois de plus de la réduction de leur capacité financière ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Stéphane Demilly applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur, voici quelques éléments pour apporter des réponses à votre interrogation, sur un sujet qui concerne tant les collectivités que l’État.

Vous m’interrogez en tant que ministre chargé des comptes publics. Avec Mme la ministre de la transition écologique, à l’automne dernier, nous avons dû réviser un certain nombre de contrats d’énergie, du fait des difficultés rencontrées par nos propres fournisseurs. L’État a dû lui aussi faire face à une augmentation des tarifs représentant un coût non négligeable. Cela nous amène, avec le Premier ministre, à faire preuve d’une grande attention au sujet du coût de l’énergie pour l’ensemble des acteurs, privés comme publics.

Aujourd’hui, je veux porter à votre attention deux éléments, qui, à ce stade, peuvent être rassurants.

Premier élément : certaines dispositions que nous avons prises s’appliquent aux collectivités locales. Comme les particuliers, ces dernières bénéficient de la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE), notamment lorsque leurs activités ne sont pas de nature commerciale, et ne sont pas assujetties à la TVA. Concernant leurs activités qui relèvent d’un assujettissement à la TVA, les collectivités sont en revanche considérées comme des entreprises.

Deuxième élément : la décision prise avec Bruno Le Maire de relever le volume d’électricité produite au titre de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) bénéficie aussi aux collectivités. Là où des hausses de prix de 40 % auraient pu être constatées, l’augmentation du volume de l’Arenh ramène ces hausses à 20 %.

En outre, comme vous l’avez dit, les collectivités de plus petite taille, celles qui ont une section de fonctionnement avec un budget de moins de 2 millions d’euros ou qui emploient moins de 10 équivalents temps plein, bénéficient du tarif réglementé. L’augmentation du prix de l’électricité est ainsi pour elles limitée à 4 %, et celle du prix du gaz limitée aux montants du mois d’octobre.

Monsieur le sénateur, vous vous inquiétez de la capacité des collectivités à faire face. J’ai indiqué tout à l’heure à M. le sénateur Marc que, par le biais d’une augmentation des recettes de TVA, les compensations versées à l’ensemble des collectivités vont augmenter de 2 milliards d’euros par rapport à 2021.

Par ailleurs, la dynamique des recettes fiscales liées à l’évolution des bases locatives est certaine. Elle tient au développement des collectivités. La révision forfaitaire des valeurs locatives à hauteur de 3,4 % représente de manière cumulée entre quatre et cinq fois l’augmentation crainte et non encore constatée du prix de l’énergie pour les collectivités.

M. le président. Il faut conclure !

M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Cela reste rassurant à ce stade, mais n’empêche pas le Gouvernement de faire preuve de la plus grande vigilance. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Rojouan, pour la réplique.

M. Bruno Rojouan. Monsieur le ministre, protégez les finances des collectivités locales ! N’oubliez jamais que ces dernières réalisent 70 % de l’investissement public en France. Pour elles, un milliard d’euros représentent une baisse de leurs investissements de 2 %, avec autant d’impacts sur l’emploi et l’économie générale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Stéphane Demilly et Daniel Chasseing applaudissent également.)

augmentation des tarifs des péages autoroutiers

M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Annick Jacquemet. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’économie, mais c’est M. le ministre délégué chargé des comptes publics qui le représente.

Monsieur le ministre, une fois encore, les tarifs des péages d’autoroute augmentent. Il y a de quoi exaspérer nos concitoyens, dont le pouvoir d’achat fond comme neige au soleil. Entre cette nouvelle hausse et les prix de l’énergie qui flambent, les Français sont pressurés de toutes parts. La situation est d’autant plus explosive qu’il est bien difficile d’expliquer pourquoi les tarifs des péages augmentent encore, puisque les sociétés concessionnaires sont « hyper-rentables ».

La seule justification de cette hausse est proprement scandaleuse : les prix augmentent parce que cela était prévu dans les contrats de concession. Cela conduit donc, une fois de plus, à remettre ces contrats en cause.

C’est ce que le Sénat a fait, sur l’initiative de notre collègue Vincent Delahaye, que j’associe à ma question. Sous la houlette de ce dernier, la Haute Assemblée a constitué une commission d’enquête, qui a rendu ses conclusions en septembre 2020, sans susciter la moindre réaction de la part du Gouvernement. Elle a pourtant fait des propositions concrètes pour sortir du statu quo, qui n’est plus tenable, sans verser dans la fausse bonne solution de la renationalisation, qui coûterait plus au contribuable qu’elle ne lui rapporterait.

Les plus importantes de ces propositions consistent à ne plus prolonger la durée des concessions et à organiser un sommet des autoroutes, pour enfin définir quel doit être l’équilibre économique de ces contrats et identifier les marges d’investissement dont bénéficieraient les usagers, sans nouvelle augmentation tarifaire.

Monsieur le ministre, allez-vous prendre en compte ces propositions ? Plus globalement, comment allez-vous reprendre en main les concessions autoroutières ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice, vous évoquez l’augmentation annoncée des tarifs d’un certain nombre de concessions autoroutières ou plutôt l’augmentation de certains tarifs de presque toutes les concessions autoroutières.

Vous l’avez dit, nous sommes liés par le droit des contrats. Ces concessions ont été signées sur le fondement d’un décret de 1995, qui définit les modalités par lesquelles les tarifs des péages d’autoroute peuvent être révisés par les sociétés titulaires. Selon ce décret, l’augmentation des tarifs doit être limitée à 70 % de l’inflation, ce qui explique la hausse de 2 % qui intervient en ce moment.

À cet égard, je tiens à saluer les sociétés concessionnaires d’autoroutes qui ont fait le choix – ce n’est pas le cas de toutes – de geler les tarifs sur les trajets dits du quotidien, c’est-à-dire sur les trajets les plus courts.

Devons-nous remettre brutalement en cause le modèle des concessions ? Je ne le crois pas, car cela mériterait un débat beaucoup plus approfondi. D’abord, le modèle concessif a connu certains progrès au cours des dernières décennies : l’augmentation du nombre de kilomètres aménagés ainsi que, entre 2006 et 2018, 50 milliards d’euros de recettes fiscales pour l’État et 20 milliards d’euros d’investissement sur le patrimoine.

Dans quelques années, nous devrons réinterroger collectivement le modèle de la concession à l’aune de tous les éléments, puisque, vous l’avez dit, toutes les concessions se terminent entre 2031 et 2036.

Ce serait une folie budgétaire que de vouloir renationaliser brutalement les concessions ; cela représenterait un coût de 47 milliards d’euros et, tout le monde en conviendra, l’État doit financer d’autres priorités avant celle-ci au cours de la période qui vient. Nous allons y travailler, dans un cadre très particulier : celui de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, portée par le ministre de l’industrie de l’époque, Emmanuel Macron. En vertu de ce texte, l’État ne peut plus accorder la prolongation de concessions en contrepartie de la réalisation de travaux ; en outre, la remise en cause des concessions doit être le modèle de droit commun. C’est dans ce cadre que nous allons travailler.

Par ailleurs, je vous renvoie à l’ensemble des éléments de réponse apportés par ma collègue Bérangère Abba sur les actions de l’État pour aider les Français face à la hausse du coût de l’énergie. (MM. François Patriat et Julien Bargeton applaudissent.)

séparatisme islamiste à roubaix

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Madame la ministre, le dimanche 23 janvier dernier, M6 diffusait un reportage sur les dangers de l’islam radical, au cours duquel de nombreux Français ont dû découvrir, avec effroi, la réalité de ce qui se passe sur notre territoire.

Depuis lors, la journaliste Ophélie Meunier et le juriste Amine Elbahi, auxquels nous apportons évidemment tout notre soutien, ont dû être placés sous protection, en raison des nombreuses menaces dont ils sont victimes. En France, trente-cinq personnes seraient ainsi placées sous protection policière, pour des propos jugés par certains hostiles à l’islam.

Madame la ministre, trouvez-vous normal qu’il faille vivre caché ou protégé lorsque l’on dénonce une idéologie mortifère, qui n’a pas sa place dans notre pays ? Ou bien faut-il, pour vivre tranquille, se taire sur certains sujets ?

Qu’avez-vous fait concrètement, depuis cinq ans, pour faire taire ces pressions ? Pour dénoncer l’islamisme et lutter contre cette idéologie et contre l’entrisme des Frères musulmans, qui continuent de mettre en place leur projet, inlassablement, inexorablement, sur notre territoire ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de lintérieur, chargée de la citoyenneté. Si vous me le permettez, madame la sénatrice, je souhaite commencer par saluer votre engagement sur ces sujets. (Marques de satisfaction sur des travées du groupe Les Républicains.) Vous avez été très impliquée à nos côtés quand nous avons, ensemble, examiné le projet de loi confortant le respect des principes de la République. Nous avions alors partagé le constat, mais également l’objectif et l’urgence de lutter contre la menace islamiste dans notre pays.

Cette loi, qui a été enrichie puis adoptée ici, par vous, mesdames, messieurs les sénateurs, a justement permis de nous doter d’un certain nombre d’outils plus pratiques, plus utiles, plus concrets. Cela répond, madame la sénatrice, à votre question sur ce que nous avons fait : nous avons élaboré et fait adopter cette loi, qui manquait. Ce texte s’inscrit dans la droite ligne du discours des Mureaux du Président de la République, Emmanuel Macron, qui a enfin décidé de nommer la menace – le séparatisme – et de dire la réalité de ce que nous vivons en France.

Cette loi nous a permis de nous doter du « contrat d’engagement républicain », que j’évoquais précédemment, mais également de renforcer notre protection face aux menaces qui peuvent exister, en particulier sur les réseaux sociaux. Voilà à peine quelques semaines, le Premier ministre, le garde des sceaux et moi-même avons visité Pharos (plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements) et le parquet de lutte contre la haine en ligne, qui protègent et mettent en œuvre les dispositifs de la loi confortant les principes de la République.

Ainsi, vous le voyez, le Gouvernement agit. (M. Roger Karoutchi proteste.) Nous faisons fermer les établissements qui représentent une menace, grâce à l’action des cellules départementales de lutte contre l’islamisme et le repli communautaire (CLIR) et grâce à la loi qui a été renforcée, ce dont je vous remercie encore. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour la réplique.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Des mots, encore des mots, toujours des mots…

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Non, c’est une loi !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Et toujours cette ambiguïté !

En novembre 2019, le Sénat mettait en place une commission d’enquête sur la radicalisation islamiste et, pour la première fois, le 24 janvier 2020 – juste après la constitution de notre commission, comme par hasard –, le Président de la République parlait enfin de séparatisme.

Le Sénat a voulu vous tendre la main à plusieurs reprises, au travers d’amendements que certains d’entre vous, mes chers collègues, qualifient hypocritement d’« amendements textiles » : interdiction de signes religieux ostentatoires lors des accompagnements scolaires et lors des compétitions sportives – on l’a encore vu récemment – ou encore interdiction du burkini.

Or vous avez toujours renoncé, refusé,…

M. Roger Karoutchi. Absolument !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. … préférant subir les pressions de minorités agitées par peur de combattre ces dernières, par lâcheté et au moyen d’accommodements qui s’apparentent, selon moi, à du clientélisme.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. C’est faux !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Pendant ce temps, la base arrière des Frères musulmans, l’Institut européen des sciences humaines (IESH) de Château-Chinon et celui de Saint-Denis, participerait à la formation des imams dans le cadre du Conseil national des imams.

Madame la ministre, les Français en ont assez des paroles.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Ils veulent des actes, des preuves et vous ne leur en donnez pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

lutte contre la pédopornographie

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président, je souhaite tout d’abord m’associer aux hommages rendus à Olivier Léonhardt. Il était mon ami et il était, je le rappelle, un maire aimant passionnément sa ville, Sainte-Geneviève-des-Bois, ainsi qu’un irréductible militant de la lutte contre le racisme et contre l’antisémitisme. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, RDSE et RDPI, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et UC.)

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Voilà une dizaine de jours, l’association Osez le Féminisme ! a procédé à 200 signalements de milliers de vidéos pornographiques, dont au moins la moitié constituaient une infraction au code pénal.

L’industrie pornographique et les sites, comme celui de Jacquie et Michel, répondent aux pires fantasmes. Je vous prie, mes chers collègues, de garder votre calme malgré ce que je vais dire, qui va certainement vous choquer : « beurette des cités prise dans une cave », « grosse salope qui revient du bled », « viol collectif d’ado enceinte »… Tout cela est accessible sur le Net, pour peu que l’on saisisse les bons mots clés : les viols sont de vrais viols, les tortures, de vraies tortures.

Toutes ces vidéos constituent des infractions pénales – apologie de la haine, apologie de crimes de guerre, incitation à la haine raciale, viol en réunion, proxénétisme, homophobie –, mais toutes demeurent accessibles.

En réalité, seule la lutte contre le terrorisme est vraiment traquée sur internet. Si une vidéo montrait un violeur en train de sodomiser une femme en criant « Allahu Akbar ! À mort les kouffars ! », je n’ai aucun doute, elle serait retirée dans l’après-midi même. Mais s’il viole une femme en disant juste « Salope ! », la vidéo restera indéfiniment.

Madame la ministre, quelles suites ont été données aux signalements faits à Pharos ? Combien de vidéos ont-elles été retirées ? Combien de sites ont-ils été fermés ?

M. Jean Castex, Premier ministre. C’est n’importe quoi !

M. David Assouline. Non, ce n’est pas n’importe quoi !

Mme Laurence Rossignol. Ce n’est pas n’importe quoi, monsieur le Premier ministre ! Je conçois que vous ne connaissiez pas bien le dossier et je ne vous en fais pas grief, il y a un tel tabou sur la question, mais ne dites pas que je dis n’importe quoi. Ce que je dis est la triste réalité… (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains. – Mme Nathalie Delattre et M. Bernard Fialaire applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de lintérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice, je m’inscris en faux contre le « deux poids, deux mesures » que vous décrivez ; je vais vous expliquer pourquoi.

Auparavant, je veux dire que le constat que vous faites est évidemment très choquant ; le Gouvernement condamne évidemment ces pratiques. C’est un sujet grave et différents ministres ont présenté, de manière coordonnée, le 15 novembre dernier, le premier grand plan national de lutte contre la prostitution des mineurs, afin de mieux protéger ces jeunes filles et ces jeunes hommes qui sont exploités par des filières dans un tel cadre.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. On ne parle pas de prostitution !

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Si, il y a parfois de la prostitution sur ces sites.

Par ailleurs, nous avons renforcé et amélioré la coordination des unités judiciaires, de la police nationale et de la gendarmerie nationale, qui contribuent à lutter au quotidien contre ces pratiques. Ainsi, nous avons créé un réseau d’enquêteurs spécialisés : le réseau CyberGend. Je rends hommage à ces gendarmes, qui font un travail extrêmement difficile : toute la journée, ils prennent en pleine figure ces images, ces vidéos. Quelque 300 enquêteurs ont été formés en 2021 à l’enquête sous pseudonyme, afin de mettre en place des actions de traque, pour confondre les auteurs d’infraction. Nous comptons ainsi 310 enquêteurs spécialisés et 6 100 correspondants.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il faut retirer les vidéos !

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. En outre, nous avons mis en place et diffusé la cellule nationale de lutte contre les images de pédopornographie, qui administre la base de données Caliope, comparant et analysant les logiciels des images d’origine pédopornographique afin de mieux lutter, notamment dans le travail avec Interpol, puisque ces actes ont parfois une dimension internationale.

En 2021, Pharos a reçu 20 000 signalements relatifs à des contenus pédopornographiques. Quand M. le Premier ministre, M. le garde des sceaux et moi-même avons visité cette plateforme, les agents nous ont très clairement présenté leur activité comme visant tant le terrorisme que la pédopornographie.

C’est aussi pour cette raison que Pharos est désormais ouverte vingt-quatre heures sur vingt-quatre, afin de recueillir les signalements jusques et y compris pendant la nuit.

Enfin, je veux rendre hommage aux agents de l’Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP), qui, au sein du ministère de l’intérieur, travaillent jour et nuit. Ces agents nous ont expliqué à quel point les enquêtes qu’ils menaient pouvaient être traumatisantes pour eux-mêmes. Ce sont eux qui sont à l’origine des récents coups de filet ayant permis, notamment pendant le confinement, d’arrêter des centaines de pédocriminels, grâce à leur action délicate en ligne. Je les salue. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour la réplique.

Mme Laurence Rossignol. Bien sûr que c’est traumatisant de traquer ces vidéos, madame la ministre ! Mais ça l’est également pour les citoyens qui font ces signalements et qui n’en dorment pas la nuit !

Comment expliquez-vous donc que, malgré tout ce que vous venez de nous dire, les citoyens doivent tout de même porter plainte, saisir la justice, faire des signalements à Pharos ? Pourquoi les dispositifs que vous nous décrivez n’entraînent-ils pas la fermeture de ces sites et le retrait de ces vidéos ?

M. le président. Il faut conclure !

Mme Laurence Rossignol. Malgré tout ce que vous venez de nous dire, les vidéos que j’ai décrites sont toujours sur le Net. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE, UC et Les Républicains.)

filière des véhicules électriques

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Sautarel. À l’occasion d’une déclaration récente, un grand chef d’entreprise lanceur d’alerte a cassé les idées reçues sur les voitures électriques. Nous vivons un moment de transformation, enthousiasmant à certains égards, inquiétant à d’autres. Cela me conduit à vous interroger, monsieur le ministre chargé des comptes publics, autour de cinq préoccupations : environnementale, énergétique, sociale, budgétaire et industrielle.

D’abord, en raison de la mauvaise empreinte carbone liée à la fabrication des batteries, sans même parler de leur recyclage, un véhicule électrique doit rouler 70 000 kilomètres pour commencer à être positif sur le plan environnemental. Cela soulève déjà des interrogations.

Ensuite – ce n’est pas tout –, pour faire rouler une voiture électrique, il faut de l’électricité. Si nous continuons de refuser d’engager une stratégie claire en faveur du nucléaire, devrons-nous produire de l’électricité avec des centrales à charbon, comme nous le faisons cet hiver, les sources d’énergie non pilotables ne suffisant pas à satisfaire nos besoins croissants, alors même que vous fragilisez EDF ? Il faut en outre organiser l’avitaillement.

Le sujet du coût est également majeur. La production d’un véhicule électrique est plus onéreuse, d’environ 50 %, que celle d’un véhicule thermique, entraînant un prix minimal de 30 000 euros, sans parler du marché de l’occasion. La différence n’est pas l’épaisseur du trait ! Les classes moyennes françaises mais aussi les collectivités et les entreprises ont-elles vraiment les moyens de supporter cette différence ? Nos finances publiques, déjà bien fragiles, ont-elles encore les moyens de compenser ?

Enfin, il y a le sujet de l’emploi et de la mutation profonde et rapide de notre industrie automobile. Pouvez-vous démentir la rumeur insistante, entraînant une crainte répandue, relative à l’imminence d’un gigantesque plan social dans l’industrie automobile française ?

Dans un moment d’inflation galopante et de report de l’entrée en vigueur de la zone à faibles émissions (ZFE) du Grand Paris, que compte faire le Gouvernement pour arrêter de nuire aux classes moyennes, pour défendre nos entreprises et nos emplois, et pour définir une trajectoire réaliste de notre transition énergétique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)