Mme le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. François Bonneau, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a bien voulu déléguer à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées l’examen sur le fond de l’article 28 relatif aux minerais de conflit.

Je l’en remercie, car le règlement européen qui nous est soumis vise à adapter en droit national le contrôle du devoir de diligence des importateurs de l’Union européenne à l’égard de la chaîne d’approvisionnement de l’étain, du tantale, du tungstène et de l’or provenant de zones de conflit ou à haut risque. C’est un sujet qui concerne notre diplomatie, mais aussi notre industrie de défense.

Tout d’abord, il faut se féliciter de cette étape importante dans la lutte contre le financement des guerres civiles et des groupes armés non étatiques par le commerce de ces minerais. Elle marque l’aboutissement de plus d’une décennie de négociations internationales et européennes. Ce règlement s’inspire de la prise de conscience internationale qui avait conduit, au début des années 2000, les pays de la région des Grands Lacs africains, puis l’Organisation des Nations unies, à lutter contre le trafic des « diamants du sang » et ses conséquences dévastatrices pour les populations.

Le règlement européen impose aux importateurs un devoir de diligence pour assurer la transparence de la chaîne d’approvisionnement et la traçabilité de ces minerais, qui sont indispensables à l’industrie, à l’électronique, aux équipements civils, mais aussi militaires.

Il s’agit d’un mécanisme juridique différent de la prohibition ou de l’embargo. Au lieu d’évincer des régions entières du commerce international, au risque d’engendrer davantage de fraudes et de fragiliser encore plus les populations, il place directement les entreprises devant leur responsabilité sociale et leur devoir d’information du client et du public.

Le règlement repose donc sur une logique de compliance, c’est-à-dire de conformité au devoir de diligence. Le Gouvernement propose de mettre en place un système de contrôles a posteriori privilégiant l’incitation par rapport à la sanction. En cas de manquement, l’autorité administrative pourra enjoindre aux intéressés d’appliquer des mesures correctives sous peine d’exécution d’office et d’astreintes administratives pouvant aller jusqu’à 1 500 euros par jour de retard.

On peut s’interroger sur l’efficacité d’un tel dispositif dépourvu de sanction pénale, mais nous avons considéré qu’il n’y avait pas lieu sur ce point de « suradapter » notre législation.

Par ailleurs, il faut reconnaître deux vertus à ce règlement.

Sa première vertu est de contrôler le commerce de ces quatre minerais. C’est un dispositif européen porteur d’espoir, qui ouvre aussi une réflexion, sous un angle environnemental, concernant d’autres secteurs, dans le domaine des terres rares et de minerais comme le cobalt, nécessaire à la fabrication des batteries.

La seconde vertu, qu’il faut signaler, est la clause de « revoyure » prévue en janvier 2023 pour que la Commission européenne réexamine l’efficacité du dispositif et étudie la nécessité ou non d’adopter des mesures plus contraignantes.

Pour conclure, je vous propose d’adopter l’article 28 du présent projet de loi tel que nous l’avons modifié en commission, d’une part pour préciser le périmètre des contrôles sur la documentation devant être tenue par les importateurs, d’autre part pour nous assurer de la proportionnalité du montant des astreintes administratives à la gravité des manquements et à la situation financière des entreprises.

Mme le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi quau banc des commissions.)

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis de la commission des finances. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, sans doute pour démontrer son exemplarité en matière de transposition, alors que la France s’apprête à prendre la présidence du Conseil de l’Union européenne au début de l’année prochaine, le Gouvernement a décidé de recourir à un « texte balai » d’adaptation au droit de l’Union européenne. Si l’on peut parfaitement comprendre cette volonté, il en résulte inévitablement un texte touffu et technique portant sur de nombreux domaines.

La commission des finances dispose sur ce texte d’une délégation au fond pour le dernier des cinq chapitres, qui rassemble les dix articles portant sur le droit économique et financier. On peut distinguer, parmi ces articles, deux catégories.

La première comporte des dispositions techniques visant à remédier à des difficultés d’explication et d’articulation avec les règles européennes existantes. Celles-ci font donc suite à de précédentes transpositions en droit interne ou à des aménagements décidés pour préparer le Brexit. C’est le cas des articles 33, 37, 38, 39, 40 et 42.

Ces articles, de nature essentiellement technique, ne nous ont pas paru poser de difficultés. La commission des finances a donc adopté uniquement trois amendements rédactionnels et de coordination.

La seconde catégorie d’articles rassemble, à l’inverse, des dispositions visant à adapter notre droit économique et financier à de nouvelles évolutions du droit de l’Union européenne. C’est le cas des articles 34, 35, 36 et 41. Sur les quatre articles, deux procèdent à des transpositions « en dur », tandis que deux autres sollicitent une habilitation à recourir aux ordonnances.

Ainsi, les articles 34 et 35 transposent directement deux articles d’une même directive de 2019 qui mettent en œuvre les conclusions de l’exercice de revue des autorités européennes de supervision mené en 2019. Ils ne soulèvent pas de difficultés et ont seulement fait l’objet d’amendements rédactionnels en commission.

En ce qui concerne les deux articles sollicitant une habilitation à légiférer par ordonnance, nous avons fait preuve d’une grande vigilance, en vérifiant qu’ils se justifiaient par l’absence de marge de manœuvre du législateur et l’impossibilité d’intégrer directement dans la loi les mesures de transposition.

Il nous a semblé que ces deux conditions étaient pleinement remplies pour l’article 36, qui vise à transposer la série de mesures de relance par les marchés de capitaux contenues dans la directive 2021/338 du 16 février 2021.

À l’inverse, l’article 41 nous a paru emporter un risque majeur de dessaisissement du Parlement. Il visait en effet initialement à habiliter le Gouvernement non seulement à mettre notre droit national en conformité avec le nouveau règlement européen sur le financement participatif, mais également « à adapter et moderniser », notion très large, les dispositions encadrant les activités de financement participatif ne relevant pas du droit européen.

En effet, le règlement européen n’encadre qu’une partie des activités de financement participatif aujourd’hui admises en droit interne. Or cette habilitation très large pourrait permettre au Gouvernement de durcir les conditions d’exercice et même de supprimer certaines activités de financement participatif qui n’entrent pas dans le cadre européen.

De tels choix très lourds en termes de conséquences pour les acteurs concernés et nullement imposés par le législateur européen doivent faire l’objet d’un débat public et nous semblent relever par essence d’un vote au Parlement.

Aussi, pour éviter tout dessaisissement du Parlement, la commission des finances a adopté un premier amendement visant à restreindre le champ de l’habilitation à la mise en conformité avec le règlement européen et à des évolutions ciblées des activités nationales pour l’ouverture des financements participatifs aux sociétés civiles agricoles, mais également pour lutter contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Il s’agit, par cet amendement, de contraindre le Gouvernement à préserver les activités non régulées par le droit européen.

Enfin, un second amendement, essentiel, est venu assouplir les conditions d’accès des collectivités territoriales au financement participatif. Si les collectivités territoriales peuvent déjà recourir au financement participatif, elles le peuvent uniquement pour financer un service public culturel, éducatif, social ou solidaire. Ce champ nous paraît inutilement restrictif au regard de la variété des projets susceptibles d’être financés.

En outre, il existe aujourd’hui une incertitude juridique sur la possibilité pour les collectivités territoriales de recourir au financement participatif en émettant des obligations. Cet amendement répond donc à une préoccupation exprimée de longue date par les élus, notamment par l’Association des maires de France.

Au total, mes chers collègues, la commission des finances a donc adopté sept amendements, dont deux de fond. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi quau banc des commissions.)

Mme le président. La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, alors que la France s’apprête à prendre la présidence de l’Union européenne, nous est soumis ce projet de loi permettant au Gouvernement de montrer sa bonne volonté. Nous en prenons acte.

Pour autant, je souhaiterais formuler quelques remarques, dont certaines sur la forme.

Nous regrettons, nous aussi, les habilitations systématiques à légiférer par voie d’ordonnance ; plusieurs intervenants l’ayant rappelé, je ne m’y attarderai pas. Quatre ordonnances sont ainsi prévues dans le seul titre premier sur le transport aérien, ce qui semble tout de même beaucoup.

Notons ensuite que l’exercice est quelque peu frustrant pour les parlementaires que nous sommes, s’agissant le plus souvent de transpositions de règlements européens avec peu de marges de manœuvre ou de directives techniques, ce qui limite d’autant la capacité d’intervention du Parlement.

Je souhaiterais également évoquer l’avis du Conseil d’État, qui déplore « que certaines consultations sont réalisées trop tardivement pour être correctement prises en compte, telle celle de la commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP) requise pour un article du chapitre II, qui s’est réunie le 1er avril et dont l’avis n’a été reçu que le 7 avril, et celle de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), qui a été saisie en urgence le 26 mars et devait se prononcer dans un délai de onze jours. » Convenons qu’une telle précipitation n’est guère favorable au plein exercice parlementaire.

Sur le fond, les mesures de ce projet de loi sont cosmétiques ou sans grandes conséquences. Ainsi, la plupart sont déjà mises en œuvre en pratique.

Par ailleurs, quelques autres mesures nous apparaissent problématiques et les travaux en commission n’ont pas totalement levé nos inquiétudes. Il s’agit notamment du travail des jeunes marins dont la période de repos se voit rabotée à l’article 20. À cet égard, les propos qui viennent d’être tenus ne me rassurent pas complètement : on ne peut pas dire qu’il s’agit là d’une grande avancée sociale !

Pour évoquer encore la question maritime dans sa dimension sociale, nous regrettons que notre amendement à l’article 21 sur la prise en compte de toute la période effective d’activité partielle dans le calcul du droit à la retraite n’ait pas été retenu. On me rétorquera que cela ne concerne que quelques dizaines de marins – encore faudrait-il en connaître le nombre exact –, mais cela fait toujours plusieurs dizaines de trop !

Si le Gouvernement n’y revenait pas, ce serait pour les marins concernés par ces périodes d’activité partielle non prises en compte une remise en question des conditions leur permettant de faire valoir leurs droits à la retraite à 55 ans. La moitié des marins concernés étant bretons, vous comprendrez l’attention toute particulière que je porte à ce dossier. Notons par ailleurs que l’essentiel de ceux-ci exerce leur activité professionnelle à la Brittany Ferries, qui connaît d’autres difficultés, par les temps qui courent… Certes, des dispositions récentes ont été prises, mais il n’en demeure pas moins que les conditions sont très particulières, les marins constituant une catégorie professionnelle un peu oubliée dans les dispositions retenues dans le cadre de la crise sanitaire.

Concernant le secteur aérien, nous regrettons le passage d’un régime d’autorisation à un régime déclaratoire pour les activités aériennes. Certaines dispositions sécuritaires zélées dans ces transpositions nous paraissent en outre plutôt motivées par la volonté de pénaliser les actions citoyennes autour de ces plateformes aériennes.

Enfin, les problématiques du détachement et du cabotage sont évoquées, mais les mesures proposées sont extrêmement faibles pour répondre aux enjeux de rééquilibrage modal et confirment la concurrence assez déloyale de la route, faute là encore de moyens au sein des directions concernées pour faire respecter une réglementation déjà bien faible.

Mes chers collègues, pour l’ensemble de ces raisons, et nonobstant le travail assez exhaustif conduit par M. le rapporteur, le groupe CRCE s’abstiendra sur ce texte.

Mme le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Gilbert-Luc Devinaz. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la période inédite que nous traversons ébranle les fondations du projet européen, déjà fragilisées par le retrait du Royaume-Uni. Cet accord a été éprouvant pour l’ensemble des parties et demande encore de nombreux ajustements dans des domaines comme le transport ou bien la pêche, pour n’en citer que quelques-uns.

Il nous faut aujourd’hui, alors qu’elle traverse une zone de turbulences sans précédent, consolider l’Europe de demain à vingt-sept États membres autour de notre projet commun. Car, outre la perte de l’un de nos membres, la période est plus que singulière : il nous faut faire face à l’épidémie du coronavirus dans laquelle le monde entier se débat encore, plus d’un an et demi après son apparition.

Cette crise sanitaire et sociale a eu des conséquences de tous ordres, à commencer par la restriction des libertés, l’un des fondements du projet européen, mais aussi sur nos modes de vie, sur l’État de droit et l’économie. Elle porte atteinte au cœur même de nos ambitions européennes.

Cette crise sans précédent a mis en exergue la vulnérabilité de l’Union et ouvre les yeux sur les impératifs de résilience et d’autonomie stratégique. Ainsi, la relance européenne est sans doute une chance unique pour consolider la construction de l’Union, surtout pour sortir plus forts de la pandémie, transformer nos sociétés, créer de nouvelles opportunités et répondre ainsi aux impératifs environnementaux.

L’Union européenne doit être plus soudée que jamais face aux défis exceptionnels auxquels nous sommes confrontés. L’harmonisation est, me semble-t-il, l’une des clés de voûte de notre performance.

Le projet de loi que nous examinons est bien désigné par son titre : il agrège un ensemble divers de mesures qui permettra à la France de montrer patte blanche à la veille de sa présidence du Conseil de l’Union européenne.

Sa cohérence ne tient guère qu’à l’adaptation de notre droit aux évolutions législatives décidées par les législateurs européens. Il est hétérogène et technique, mais essentiel pour garantir la bonne application des réglementations européennes. Dans sa version actuelle, je le rappelle, le texte transpose douze directives à travers quarante-deux articles, dont trente et un ont été examinés par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

Toutefois, s’il est de coutume que les projets de loi sur les diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne soient complexes, techniques et hétéroclites, ils ne devraient pas être inscrits à l’ordre du jour dans des délais aussi courts, alors que le calendrier est déjà bien chargé. Les conditions d’examen sont discutables, vu l’ampleur et l’importance des sujets traités.

Je me contenterai donc de passer rapidement en revue quelques dispositions particulièrement importantes, dont certaines auront des conséquences concrètes.

Sur l’aérien, la sécurité et la sûreté seront renforcées, mais il est impératif de voter cette transposition à condition que les pilotes puissent bénéficier non seulement du secret médical, mais aussi de mesures de contre-vérification des tests de dépistage d’alcool ou de psychotropes. Notre groupe a proposé un amendement en ce sens à l’article 1er du texte.

Concernant les télépéages, au regard de l’agitation et de l’effervescence du Gouvernement engagé dans la lutte contre le changement climatique, je trouve paradoxal que notre pays transpose des dispositions européennes contradictoires avec le projet de loi Climat et résilience que nous étudions actuellement.

Vous validez, par la transposition de la directive concernant les télépéages, la volonté d’harmoniser un système européen. Cela montre à quel point votre approche régionale de l’écocontribution poids lourds dans le projet de loi Climat et résilience est « micro ». Vous fabriquez un dispositif « puzzle », ingérable tant pour les régions que pour les transporteurs et en contradiction complète avec ce que vous nous proposez de valider dans ce texte.

Pour autant, cette directive représente tout de même la première fondation d’une approche européenne, en attendant l’eurovignette poids lourds. De facto, la position du Gouvernement n’est pas très claire.

Sur le détachement des travailleurs routiers, la transposition des nouvelles règles encadrant le transport routier était très attendue, à la suite des longues négociations relatives au paquet mobilité, qui ont duré plus de trois ans.

Cette disposition permettra, je l’espère, d’améliorer concrètement les conditions de travail des chauffeurs routiers, la régulation des règles de cabotage, notamment face à la distorsion de concurrence résultant des réglementations des pays de l’Est, mais aussi du détachement des transporteurs routiers.

En juillet dernier, le Parlement européen votait le paquet mobilité pour le transport routier. Malgré les mesures en cours, de nombreuses lacunes et difficultés d’exécution persistaient autour de la législation européenne, avec une application différente entre les États membres. Ce nouveau cadre juridique et le train de mesures sur la mobilité que nous allons valider permettront une meilleure application des règles.

Vu la complexité de l’harmonisation et de la clarification des règles sur le détachement des conducteurs, il est nécessaire d’instaurer une application plus ferme des règles spécifiques à ce secteur. Cette application assurera un équilibre entre, d’une part, la liberté des opérateurs des services transfrontaliers et, d’autre part, de bonnes conditions de travail et de protection sociale pour les conducteurs, dont la nature du travail reste difficile. Cette réforme donnera enfin des conditions sociales décentes aux transporteurs routiers.

Effectivement, c’est un sujet politique majeur que le président Emmanuel Macron avait enfourché en début de mandat, allant jusqu’à affirmer qu’il allait tout régler. A fortiori, les transporteurs routiers sont restés une exception, à la suite des pressions exercées par les pays de l’Est, qui vivent en grande partie du cabotage.

Grâce au long travail de la commission du transport et du tourisme du Parlement européen et de sa présidente, Karima Delli, de nombreux progrès ont été portés au paquet mobilité, bien qu’un peu tardivement, ce que je regrette. Les distorsions de concurrence des dernières années ont déjà beaucoup épuisé les transporteurs nationaux.

Ce texte présente un progrès sur les conditions de travail et les obligations de retour au pays pour limiter le cabotage, mais aura-t-on des moyens de contrôle suffisants et significatifs ? On attend sur ce sujet une réponse du Gouvernement.

Au sujet du littoral, je tiens à saluer la mise en place d’exemptions de certaines normes du code de l’urbanisme liées au littoral. Il faut souligner qu’elles sont essentielles à l’égard des spécificités de la localisation de Calais.

Pour clore mon propos, je souhaite évoquer à mon tour les indemnités des marins. Vous acceptez de transposer une disposition dans la volonté d’atténuer les conséquences de la crise sanitaire due au covid-19 pour les marins. En ces termes, elle prévoit que les périodes d’activité partielle seront soumises au versement de cotisations vieillesse à compter du 1er mai 2021. Le groupe socialiste approuve bien évidemment cette mesure. Néanmoins, comme l’a souligné le rapporteur, je tiens à alerter sur un point, et non des moindres : l’application de cette disposition au 1er mai 2021 va créer une discrimination par rapport aux salariés ayant débuté le chômage partiel dès le début de la pandémie, en 2020.

C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste réclame que la prise en compte des indemnités d’activité partielle dans le salaire de référence retenu pour le calcul de la pension des marins puisse s’appliquer dès le 1er mars 2020, pour empêcher toute forme de discrimination. Le couperet de l’article 40 de la Constitution ne nous a malheureusement pas permis de déposer un amendement allant en ce sens, et nous souhaitons que le Gouvernement s’explique à ce sujet.

Au regard de ces éléments et des apports résultant de nos travaux en commission et en amont de la séance, le groupe socialiste se prononcera pour l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme le président. La parole est à M. Pierre Médevielle. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi quau banc des commissions.)

M. Pierre Médevielle. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, on l’oublie souvent, mais les parlements nationaux jouent un rôle majeur dans le processus législatif européen : ils contrôlent l’application du principe de subsidiarité. Ce contrôle intervient préalablement à l’incorporation de ce droit dans notre droit interne, ce que nous sommes appelés à faire aujourd’hui.

Comme l’ont soulevé beaucoup de nos collègues en commission, le texte qui nous est proposé est particulièrement technique. Ce projet de loi recouvre énormément de sujets, par ailleurs très hétéroclites. Je ne pourrai évidemment pas tous les traiter dans le temps qui m’est imparti ; je me limiterai donc à évoquer seulement quelques points.

Premièrement, tout comme le précédent projet de loi consacré à l’adaptation de notre droit interne au droit européen examiné l’an dernier, le Gouvernement sera habilité à légiférer par ordonnance sur plusieurs sujets. Si nous comprenons l’utilité d’avoir recours aux ordonnances dans certains cas, notamment concernant les transpositions ou les mises en conformité au droit européen, nous n’en restons pas moins vigilants.

À ce titre, je salue le travail qui a été effectué concernant l’article 41 du texte. La demande d’habilitation du Gouvernement allant au-delà de ce que le droit européen propose, la restriction du champ de cette habilitation était essentielle. En tant que législateurs, il est important, surtout lorsque nous habilitons le Gouvernement, d’être clairs sur notre rôle.

Deuxièmement, la question de la transposition des directives européennes en droit français est un long débat qui cristallise les passions depuis des années. Ce texte comprend douze transpositions de directives.

Loin du sujet habituel de surtransposition, qui ne se justifie que lorsque notre droit est plus contraignant que celui de l’Union européenne, ce projet de loi révèle un autre problème : celui des erreurs de transposition. Nous retrouvons cet écueil dans plusieurs articles de ce texte sur les sujets environnementaux et relatifs à la biodiversité.

Cela mène la France vers des mises en demeure et des procédures d’infraction que nous pourrions et devrions éviter. Il en va de même pour les retards de transposition, aussi soulevés dans ce texte. Là encore, je prône la vigilance de chacun et me réjouis des modifications apportées pour une meilleure application du droit européen, a fortiori dans le contexte de préparation de la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne que la France assumera dans quelques mois.

Le troisième point qui me paraît important concerne les mises à jour découlant du Brexit et de ses premières conséquences. Nous en vivons les effets depuis la sortie du Royaume-Uni, notamment pour ce qui concerne les transports.

Je ne serais pas étonné que, dans un futur plus ou moins proche, nous devions encore adapter notre droit. Nous ne connaissons pas encore toute l’étendue des changements que la sortie d’un État membre implique pour l’Union européenne et les autres États membres.

La France est en première ligne des relations post-Brexit. En tant que voisine directe de la Grande-Bretagne, elle partage beaucoup de ses valeurs. Les dernières évolutions dans nos relations ne montrent malheureusement pas une application totalement apaisée de l’accord commercial qui nous unit. De plus – et je m’exprime ici en tant que président du groupe d’amitié France-Irlande –, les événements du week-end dernier nous appellent à être attentifs au respect de l’accord, par et pour toutes les parties.

De manière plus générale, ce projet de loi fixe un objectif clair : mettre à jour notre droit national en prévision de la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne que la France prendra durant la première moitié de l’année 2022.

C’est l’avenir de l’Europe qui sera en question. Les priorités doivent être claires. La puissance de l’Europe passe par son autonomie et sa souveraineté. Je souhaite ici dégager quelques axes qui me paraissent prioritaires à cet égard.

Notre agriculture et notre alimentation doivent être placées au centre de notre souveraineté. Nous devons assumer une véritable diplomatie. Le monde pâtit beaucoup trop de l’absence d’une voix européenne unifiée et puissante. Notre politique commerciale doit évidemment évoluer et notre nouvelle stratégie doit se concrétiser afin de défendre nos valeurs et nos intérêts.

Enfin, faisons de l’Europe l’un des plus grands espaces de protection de notre biodiversité. Les articles de ce texte concernant la question environnementale montrent l’importance du dossier.

Le groupe Les Indépendants, très attaché aux questions européennes et à une bonne incorporation des avancées du droit européen dans notre droit interne, votera en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi quau banc des commissions.)

Mme le président. La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union pour les transports, l’environnement, l’économie et les finances est particulièrement dense et disparate. Je ne suis pas le premier à le souligner.

Une bonne part des mesures concernées ne soulèvent pas d’objections et sont bienvenues. Toutefois, on peut relever quelques points problématiques.

Sur la procédure, l’étude d’impact n’ayant été finalisée que tardivement, dans des délais restreints, il a été difficile pour le Conseil d’État d’émettre en temps utile une appréciation des mesures envisagées. Il en va de même – notre collègue Gérard Lahellec l’a déjà relevé – de certaines consultations, qui ont été effectuées dans la précipitation.

Sur le fond, si l’harmonisation des régimes de responsabilité des transporteurs aériens, le contrôle de la consommation éventuelle d’alcool et d’autres psychotropes par les équipages ou, entre autres, l’extension de l’application des règles sur le transport aérien de matières dangereuses sont positives, le renforcement particulièrement démesuré de la répression des intrusions sur les pistes nous paraît excessif. Une telle mesure vise des manifestations qui ne sont vraiment pas fréquentes et nous paraît relever d’un signal politique outrancier plutôt que du seul souci de sécurité.

Les autres dispositions sur l’aérien nous semblent aller dans le bon sens. J’en profite d’ailleurs pour exprimer notre souhait qu’aboutissent favorablement les négociations sur la directive pour un ciel unique européen, afin de donner un périmètre favorable aux efforts de transition environnementale et de régulation du secteur.

J’aimerais à présent aborder les transports terrestres et le domaine maritime. L’article 21 est évidemment positif, puisqu’il permettra d’intégrer les périodes d’activité partielle pour les droits à pension des marins. Mais ce sera le cas seulement à partir du 1er mai, et non dès le début du travail partiel résultant de la pandémie. Il faudrait vraiment une évolution sur ce point.

Les dispositions restreignant le repos obligatoire des jeunes travailleurs des navires sont en revanche une régression, contrairement aux mesures sur les temps de conduite et de repos des conducteurs routiers et sur la lutte contre les pratiques abusives de cabotage, qui constituent des avancées positives. Nous sommes d’ailleurs en attente forte de la prochaine fournée du paquet mobilité.

Nous approuvons évidemment les dispositions visant à faire respecter leurs obligations liées au devoir de diligence aux entreprises important des minerais en provenance des zones de conflit ou à haut risque. Ces dispositions sont, on le sait, le résultat d’un travail long et très compliqué pour enfin parvenir à réprimer des pratiques qui jettent de l’huile sur ces zones de feu en contribuant au financement des guerres civiles. Cela a été souligné, une clause de revoyure en 2023 permettra d’évaluer l’efficacité du dispositif et, si nécessaire, de l’améliorer encore.

Sur le volet environnemental, nous saluons la transposition des diverses dispositions du droit de l’Union européenne, et en particulier de celle sur la conservation des habitats naturels, ainsi que de la faune et de la flore sauvages. La Commission européenne a d’ailleurs mis en demeure la France pour défaut de transposition. Il était donc temps que cette mesure s’applique.

Enfin, sur l’initiative de mon collègue Ronan Dantec, notre groupe a saisi l’occasion pour proposer un amendement sur un enjeu d’importance. Il s’agit en quelque sorte d’instaurer une clause de rattrapage ouvrant aux projets susceptibles d’avoir une incidence notable sur l’environnement la possibilité d’être soumis à une évaluation environnementale même s’ils sont en deçà des seuils et critères requis.

Nous sommes en phase avec les deux amendements de la commission des finances sur l’article 41, relatif au financement participatif.

Telles sont les principales appréciations et observations de mon groupe sur ce texte. Même si, comme je le soulignais en introduction, la plupart des dispositions transposées sont évidemment bienvenues, le caractère outrancier de l’aggravation de la répression des intrusions en zone « côté piste » nous conduira à nous abstenir.