M. Jean Sol. Cet amendement tend à mettre en œuvre deux recommandations du rapport de l’IGAS de septembre 2018 relatif à l’évaluation du fonctionnement des centres d’action médico-sociale précoce (CAMSP), des centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP) et des centres médico-psychologiques infanto-juvéniles (CMP-IJ).

Cet amendement vise tout d’abord à garantir le pluralisme des approches thérapeutiques utilisées dans les centres pour la prise en charge des enfants et adolescents dans le respect des recommandations de bonnes pratiques de la HAS. Cela implique la mise en place de nouveaux modules de formation des praticiens des centres, qui induisent des dépenses supplémentaires pouvant être estimées, si l’on se fonde sur les chiffres du rapport, à 6,6 millions d’euros.

Nous proposons de prévoir des crédits supplémentaires pour l’action n° 19, Modernisation de l’offre de soins, du programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », visant à financer ces formations.

Cet amendement vise ensuite, conformément à la recommandation n° 5 du rapport de l’IGAS, à repositionner les CAMSP, les CMPP et les CMP-IJ sur le niveau 2 de complexité, tout en structurant les capacités d’accueil des professionnels de premier niveau.

Ainsi, le montant de 6,6 millions d’euros inclut également la généralisation des actions de formation entre les centres et les professionnels de premier niveau – généralistes, pédiatres, personnels des crèches – et la valorisation financière de ces actions dans la tarification des actes.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. Le présent amendement tend à prévoir le financement de nouveaux modules de formation des praticiens des centres d’action médico-sociale précoce, des centres médico-psycho-pédagogiques et des centres médico-psychologiques infanto-juvéniles, à hauteur de 6,6 millions d’euros.

La mission « Santé » gagnerait à être rééquilibrée et recentrée sur la modernisation des structures sanitaires. S’il était adopté, l’amendement n° II-203 rectifié y concourrait, mais il resterait insuffisant et ne saurait remettre en cause les transferts constatés vers le budget de la sécurité sociale des investissements en faveur de ce type de structures.

En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Si vous me le permettez, j’émettrai un avis assez long, car le sujet est éminemment important. En outre, des choses sont déjà en cours.

Votre amendement vise, d’une part, à mettre en place de nouveaux modules de formation et, d’autre part, à repositionner les CAMSP, les CMPP et les CMP-IJ sur le niveau 2 de complexité, c’est-à-dire sur la prise en charge des situations relevant d’une équipe pluridisciplinaire spécialisée, pour un montant global de 6,6 millions d’euros.

Concernant les CMP-IJ, je me permets de rappeler qu’il s’agit de structures hospitalières et que les plans de formation relèvent donc des centres hospitaliers auxquels ils sont rattachés.

Le repositionnement des CMP-IJ que vous suggérez au travers de votre amendement représente une évolution profonde de ces structures pour les patients, qui nécessite des travaux préalables et une concertation avec l’ensemble des acteurs. Ce chantier est bien prévu et se déroulera dans le cadre des travaux de réforme des autorisations en psychiatrie.

Concernant les CAMSP et les centres médicaux psycho-pédagogiques, le renforcement de la formation des professionnels de ces structures constitue l’un des axes forts de la stratégie nationale pour l’autisme au sein des troubles du neuro-développement portée par Sophie Cluzel et la délégation interministérielle à l’autisme. Des travaux ont ainsi été conduits pour recenser et structurer l’offre de formation initiale et continue à destination de ces professionnels et pour élaborer des outils et des référentiels d’action. La formation des professionnels des CAMSP et des CMPP constitue pour nous un levier majeur d’action pour réformer l’ensemble du secteur médico-social, au-delà des CAMSP et des CMPP.

Vous le savez aussi, le Premier ministre a tout récemment confié à Michel Laforcade, ancien directeur général de l’agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine, une mission sur le développement de l’emploi et des compétences dans les métiers de l’autonomie, qui va permettre d’éclairer les réflexions sur ces questions.

Enfin, vous proposez de financer cet amendement en prélevant 6,6 millions d’euros de crédits sur le programme 183, ce qui équivaut à une sous-budgétisation du dispositif de l’aide médicale de l’État : ce serait contraire, nous semble-t-il, au principe de sincérité budgétaire.

Pour toutes ces raisons – je vous prie de m’excuser d’avoir été un peu long –, je demande également le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme le président. Monsieur Sol, l’amendement n° II-203 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean Sol. J’entends bien vos explications et votre point de vue, monsieur le secrétaire d’État. Toutefois, je m’interroge sur ce qu’il advient des recommandations figurant dans les nombreux rapports que l’on demande à l’IGAS…

Je maintiens donc mon amendement.

Mme le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Je soutiendrai cet amendement.

M. le secrétaire d’État vient de nous présenter toutes les actions menées par le Gouvernement, les interventions qui sont en cours, les rapports sur lesquels elles s’appuient, la mission qui a été confiée à M. Laforcade, anciennement directeur de l’ARS Nouvelle-Aquitaine.

On le voit, sur le fond, vous êtes d’accord avec les propositions qui sont faites dans cet amendement, mais vous considérez que tout est déjà en route et que, finalement, cet amendement n’est pas utile. Pour ma part, je considère que, en votant cet amendement, nous allons soutenir et renforcer vos initiatives. J’appelle donc chacun à le voter !

Mme le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je souscris aux préoccupations de mon collègue Jean Sol. Ce matin déjà, lors de l’examen des crédits d’une autre mission, il nous a fait part de ses préoccupations concernant la santé mentale.

Le problème, c’est que nous touchons ici au cœur du dysfonctionnement de la mission « Santé ». Nous allons dans quelques instants examiner plusieurs amendements portant sur des sujets très importants : l’endométriose, les cancers, le VIH. Tous ces sujets relèvent à n’en pas douter du système de soins et de l’assurance maladie, et donc du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Or nous n’avons pas réussi à les faire adopter dans ce texte, car ils ont chaque fois été déclarés irrecevables.

La seule solution, c’est donc de prélever des crédits de l’AME : 2 millions par-ci, 6 millions par-là, 5 millions ailleurs, 3 millions encore ici. Or il est vrai qu’il va falloir, à un moment, faire preuve d’un peu de sincérité budgétaire. Un cadre est défini, et on ne peut pas, malgré l’importance des problèmes de santé publique évoqués, prélever, amendement après amendement, des crédits sur l’aide médicale de l’État.

Il aurait été plus cohérent d’inverser l’ordre de discussion : il aurait mieux valu débattre d’abord du cadre que vous proposez pour l’aide médicale de l’État, puis des amendements. Si vous réduisez le cadre, on comprend que vous dégagez des marges et que vous voulez les attribuer à d’autres politiques de santé. Là, on aborde les sujets à l’envers ! En tout état de cause, nous ne pouvons pas souscrire à cette façon de procéder.

Nous pensons que le périmètre actuel de l’AME doit être maintenu et que l’on ne peut pas le réduire au profit de tel ou tel autre problème de santé publique, aussi important soit-il. On ne peut pas opposer les problèmes de santé les uns aux autres et aborder ici la question de l’AME sous l’angle du contrôle des flux migratoires. Nous ne voterons donc aucun des amendements qui vont suivre, non pas évidemment en raison de la thématique qu’ils abordent, mais pour les raisons que je viens d’évoquer.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-203 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme le président. L’amendement n° II-180 rectifié, présenté par Mme Doineau, M. Longeot, Mme Sollogoub, MM. Perrin, Rietmann et Guerriau, Mme Demas, MM. S. Demilly, Détraigne et Bonhomme, Mme L. Darcos, MM. Lefèvre, Houpert, P. Joly et D. Laurent, Mmes Saint-Pé, F. Gerbaud et Havet, MM. Bonnecarrère et Laménie, Mme N. Delattre, M. Delahaye, Mmes Férat et Vermeillet, MM. Bazin, Decool et Canevet, Mmes Létard et Boulay-Espéronnier, MM. Sol, Kern et A. Marc, Mmes Guidez, Perrot, Billon, Dindar, Morin-Desailly et Canayer, MM. Chevrollier, Le Nay et Saury, Mmes Berthet, Jacquemet, Pluchet, Bonfanti-Dossat et Malet, M. Delcros, Mme Gatel, M. Somon, Mmes de La Provôté et Gruny, MM. P. Martin et Cazabonne, Mme Loisier, MM. Vogel et de Nicolaÿ, Mme Mélot, M. Lagourgue, Mmes Paoli-Gagin, M. Carrère, Schalck et Garriaud-Maylam, MM. Artano, Meurant, Longuet, Menonville et B. Fournier, Mme Herzog, M. Savin, Mme M. Mercier et MM. Gremillet et L. Hervé, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Recherche contre les maladies vectorielles à tiques

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

Protection maladie

 

 

 

 

Recherche contre les maladies vectorielles à tiques

5 000 000

 

5 000 000

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Comme je l’ai déjà dit il y a quelques semaines, je suis une récidiviste. J’ai déposé il y a un an un amendement visant à prévoir des crédits en faveur de la recherche contre la maladie de Lyme. Je l’ai redéposé il y a quelques semaines lors de l’examen du projet de loi de programmation de la recherche.

C’est vrai, cher collègue Jomier, la méthode n’est pas satisfaisante, mais on ne peut pas abandonner les malades atteints de la maladie de Lyme à leur vie brisée. À l’heure où l’on consacre autant de crédits pour lutter contre la covid-19, je pense que l’on pourrait affecter également des crédits à la recherche sur les zoonoses, sur toutes les maladies vectorielles à tiques.

En tout cas, on ne peut pas ignorer le nombre de malades qu’il y a en France aujourd’hui. En 2014, ils étaient 26 000 ; aujourd’hui, ils sont plus de 65 000. C’est tout de même incroyable : le réchauffement climatique, le fait que les cervidés soient de plus en plus nombreux et porteurs de tiques font que, aujourd’hui, des enfants sont eux aussi touchés. Les problèmes, ce sont le diagnostic, la prise en charge et le traitement. Les malades sont la plupart du temps en errance thérapeutique.

Je sais bien que je ne suis pas suivie par la majorité à l’Assemblée nationale, pas plus que par le Gouvernement, mais je pense qu’il faut cesser de ne pas essayer de soulager tous ces malades, qui ont besoin d’espoir ! Le seul fait de voter des crédits pour la recherche afin d’essayer de trouver des moyens de soigner ces malades, qui sont en grande souffrance, serait une preuve que nous ne les abandonnons pas.

Telles sont les raisons pour lesquelles je représente cet amendement. J’espère que je serai très suivie, même si cela doit être aux dépens des crédits de l’AME – ce serait insatisfaisant, je le sais, mais je veux absolument que ces vies brisées ne le soient plus totalement, que ces malades aient de l’espoir pour demain.

M. Antoine Lefèvre. Très bien !

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. L’amendement n° II-180 rectifié vise à créer au sein de la mission « Santé » un programme spécifique dédié à la protection contre la maladie de Lyme. Il serait abondé par une dotation de 5 millions d’euros, prélevée sur le programme 204.

Face à la recrudescence des cas, la priorité semble aujourd’hui aller vers le développement de la prévention. Il peut sembler délicat, dans ces conditions, de baisser les crédits du programme 204, pour partie consacrés à la prévention.

Un redéploiement interne au programme 204, de l’action n° 11, Pilotage de la santé publique, vers l’action n° 14, Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades, qui couvre les travaux de l’Anses, pourrait être plus opportun.

En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Madame la sénatrice, la question n’est pas de savoir s’il est pertinent ou non de prélever des crédits sur le programme 204. Pour ma part, je salue la récidiviste que vous êtes et, au-delà, l’engagement qui est le vôtre sur ces questions, d’année en année, lors de la discussion des projets de loi de financement de la sécurité sociale.

Nous prenons collectivement, pas seulement le Gouvernement, un certain nombre de dispositions porteuses d’espoir, me semble-t-il, lesquelles ne passent pas nécessairement par le vote aujourd’hui de ces crédits. À cet égard, vous avez évoqué le projet de loi de programmation de la recherche, dans lequel, sur l’initiative du Sénat, des dispositions ont été adoptées.

Par ailleurs, vous le savez, un certain nombre d’autres actions conduites par le ministère de la santé visent à mettre fin à l’errance d’un certain nombre de patients, à la souffrance qui y est associée. Nous essayons de coordonner l’ensemble des efforts dans le cadre d’un plan de lutte contre les maladies vectorielles à tiques. Vous allez me dire « encore un plan, encore une stratégie », mais nous essayons de structurer un parcours de soins des patients en renforçant les mesures de prévention contre ces maladies.

En outre, nous essayons de mobiliser la recherche sur ces maladies. Vous le savez, le ministère apporte un soutien financier aux actions de recherche nationale, en lien avec l’Inserm. Néanmoins, les actions de recherche sur ces maladies doivent être interdisciplinaires, transversales et doivent s’inscrire dans une démarche globale. Il en va de même en ce qui concerne leur pilotage et leur financement, qui doivent bénéficier de cette transversalité. En conséquence, le ministère de la santé, en lien avec les agences sanitaires et les partenaires du secteur de la recherche, va augmenter sa contribution aux projets de recherche dédiés aux maladies vectorielles à tiques.

Par ailleurs, je l’ai évoqué, un parcours de soins a été organisé en trois niveaux. Il doit permettre d’améliorer la prise en charge des patients.

Compte tenu des crédits qui sont déjà employés dans le cadre du plan national de prévention et de lutte contre la maladie de Lyme et du caractère nécessairement interdisciplinaire de cette recherche, il ne nous semble pas pertinent de créer un nouveau programme spécifique, même si je mesure bien la part symbolique du message que vous portez au travers de cet amendement. Je pense que toutes les actions que nous menons sont sources d’espoir pour l’ensemble des patients.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je salue le travail d’Élisabeth Doineau, qui s’est beaucoup investie sur le dossier du traitement de la maladie de Lyme. Je soutiendrai cet amendement, que j’ai oublié de cosigner.

Nous nous apercevons que de plus en plus de cas de maladie de Lyme sont diagnostiqués tardivement en zone rurale. En effet, comme vous le savez, ce sont les réactions locales qui permettent d’établir le premier diagnostic. Or il arrive qu’il y en ait très peu et que ce soit seulement dans un deuxième temps que la personne subisse des complications, par exemple de l’arthropathie ou des problèmes neurologiques. Le diagnostic et le traitement ne sont pas parfaitement codifiés. Ils ne sont pas toujours partagés par les professionnels.

Cet amendement me paraît donc tout à fait utile. Comme cela est précisé dans l’objet, les crédits ainsi dégagés serviraient à financer non seulement des actions de prévention, mais également de la recherche fondamentale. J’y suis très favorable.

Mme le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Je rejoins notre collègue Élisabeth Doineau sur un point : il faudrait effectivement aider beaucoup plus les personnes atteintes d’endométriose, de la maladie de Lyme ou d’un cancer. Le traitement de ces pathologies est un vrai sujet.

Mais souvenez-vous dans quel cadre nous sommes amenés à nous prononcer : on déshabille Paul pour habiller Pierre ou Jacques ! À force d’être déshabillé, il va finir tout nu ! Tous les crédits qui sont ponctionnés le sont sur l’AME. C’est le cadre politique qui ne va pas.

Car il s’agit bien de choix politiques ! Encore une fois, la fraude patronale atteint 20 milliards d’euros. Par conséquent, l’argent qui pourrait servir à lutter contre la maladie de Lyme ou l’endométriose existe bien. Le problème est que l’on ne va pas le chercher là où il est !

Tous les amendements qui sont présentés seront rejetés à cause du cadre politique, c’est-à-dire in fine des choix gouvernementaux !

Honnêtement, quand on me dit qu’il faut donner à la lutte contre l’endométriose ou le cancer, j’ai un peu mal au cœur. Bien sûr qu’il faut lutter contre ces maladies ! Mais je rappelle tout de même que les bénéficiaires de l’AME sont aussi des êtres humains – il serait bien de penser de temps en temps à l’humain –, y compris parfois des enfants !

Mme le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Mme Annick Billon. À l’inverse de notre collègue Chasseing, je n’avais pas oublié de cosigner cet amendement (Sourires), que je soutiens également.

Les réponses que M. le rapporteur spécial et M. le secrétaire d’État ont apportées ne sont pas celles qu’attendent les malades. Comme notre collègue le rappelait, derrière les chiffres, il y a des hommes et des femmes qui souffrent terriblement de complications très lourdes faisant suite à des diagnostics inopérants ou trop tardifs.

Je comprends qu’il soit problématique de déshabiller Paul pour habiller Jacques. Mais, à un moment, il faut faire des choix. Le mien sera de soutenir cet amendement.

Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Les sénateurs et les sénatrices qui veulent soutenir des amendements de fond sont presque en situation de maltraitance ! Pour ma part, je soutiens cet amendement de Mme Doineau, ainsi que celui qu’elle présentera dans quelques instants. Comme notre collègue l’a montré, le prélèvement opéré sur l’AME découle non pas d’un choix idéologique, mais d’une nécessité liée aux contraintes de l’exercice.

Je n’ai pas déposé d’amendements, ne sachant pas quel programme j’aurais pu proposer de ponctionner. Comme je l’ai indiqué, la mission « Santé » nous paraît sous-budgétisée.

Mme le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.

M. Arnaud Bazin. Les collectivités territoriales sont déjà très investies dans la recherche contre la maladie de Lyme, notamment sur la partie animale. L’ancienne Entente de lutte interdépartementale contre les zoonoses est devenue un syndicat mixte. Un programme de recherche permet de mieux connaître la distribution géographique de la maladie chez l’animal, ainsi que les modes de transmission entre animaux. Les collectivités sont donc mobilisées et font leur part du travail.

La maladie de Lyme va prendre de plus en plus d’importance dans notre société. Je pense que vous en êtes conscient, monsieur le secrétaire d’État.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Je n’ai pas dit l’inverse !

M. Arnaud Bazin. Mais il faut que cela se traduise dans les actes !

Mme le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Dans son amendement, Mme Doineau propose de prélever des crédits sur le programme 204, et non sur le programme 183, dont relève l’aide médicale de l’État.

M. Bernard Jomier. Cela étant, il s’agit bien d’opérer une ponction sur un programme, exercice auquel nous sommes une nouvelle fois contraints de nous livrer.

La question de fond est de savoir si la maladie de Lyme revêt un enjeu politique spécifique. Certes, des maladies dont le diagnostic peut être retardé ou compliqué, ou dont le traitement ne fait pas consensus, il y en a beaucoup. Mais, disons-le clairement, il y a bien une problématique particulière avec la maladie de Lyme. D’ailleurs, sauf erreur de ma part, la commission des affaires sociales avait organisé un débat sur le sujet l’an dernier. Cela nous avait permis de constater l’existence d’un dissensus scientifique en la matière. À celui-ci se greffent les revendications de patients qui ont le sentiment profond de n’être ni écoutés ni entendus.

Voilà ce qui arrive quand un système de santé n’écoute pas suffisamment ses usagers ! Voilà ce qui arrive quand des personnes atteintes d’une pathologie ou ayant une vision à défendre en matière de santé n’ont pas la place qu’elles méritent dans la gouvernance du système !

Certes, je partage les analyses d’Élisabeth Doineau quant aux enjeux en matière de recherche fondamentale, de diagnostic, de traitement, de forme retardée ou de forme non diagnostiquée produisant des symptômes possiblement liés à la maladie de Lyme. Mais n’oublions pas la question de la démocratie en santé !

Dans ces conditions, je m’abstiendrai sur cet amendement.

Mme le président. La parole est à M. Jean Sol, pour explication de vote.

M. Jean Sol. Comme cela a été souligné par notre collègue Élisabeth Doineau, les divisions internes à la communauté scientifique laissent tout de même de nombreux malades et leur famille dans une errance thérapeutique. Les complications peuvent être lourdes et conduire à des dommages irréversibles.

À mon sens, nous ne pouvons pas ne pas répondre à de telles problématiques. Nous le savons, en l’absence de diagnostic rapide, les choses se corsent. Je pense qu’il est grand temps de mettre un terme aux divisions internes à la communauté scientifique. Les crédits supplémentaires qui sont proposés dans cet amendement devraient le permettre, à court terme ou à moyen terme.

Mme le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour explication de vote.

Mme Élisabeth Doineau. La maladie de Lyme fait partie des dix maladies infectieuses les plus fréquentes en France. Il faut donc y accorder un intérêt supérieur.

Certes, monsieur Jomier, il y a effectivement des dissensions ; nous l’avons tous constaté lors de nos tables rondes au Sénat. Et j’entends bien que tout ne va pas se résoudre avec des crédits sur un budget recherche. Mais il en faut ! Et il faut surtout de la communication, du relationnel et de l’implication des usagers, comme cela vient d’être souligné.

Au demeurant, et cela vient aussi d’être rappelé, derrière les individus, il y a des familles qui souffrent tout autant, par exemple en voyant des enfants qui ne peuvent plus aller à l’école.

Nous devons, me semble-t-il, réfléchir tous ensemble aux moyens de réconcilier la communauté scientifique, la communauté médicale et les malades atteints de telles pathologies. Ils s’appellent Pierre, Paul ou Jacques, ma chère collègue. Leurs vies ont été brisées. Certains sont déjà décédés.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-180 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme le président. L’amendement n° II-826 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre et MM. Fialaire, Gold, Guérini, Requier et Roux, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Protection maladie

5 000 000

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Cet amendement vise à répondre aux inquiétudes, qui sont nombreuses depuis le premier pic de la crise du covid, des oncologues, mais également du président de la Ligue nationale contre le cancer.

Durant ce premier pic, de nombreux médecins ont alerté le Gouvernement sur la baisse inquiétante du nombre de consultations médicales hors covid, dont les suivis et les premiers dépistages du cancer. Selon la Fédération hospitalière de France, le nombre d’opérations et d’examens de dépistage et de suivi non effectués entre mars et juin 2020 serait de deux millions.

Cet amendement vise donc à répondre à l’absence de dépistage et de prise en charge précoce de ce qui est toujours – je le rappelle – la première cause de mortalité en France.

Le président de la Ligue nationale contre le cancer, Axel Kahn, estime à environ 30 000 le nombre de cancers non diagnostiqués pendant le premier confinement du fait des consultations annulées ou reportées et de l’arrêt des dépistages. Ainsi, 20 % à 50 % des diagnostics n’auraient pas été réalisés, soit 7 % des opérations qui auraient été également reprogrammées. Dans une récente tribune parue dans la presse locale, le président de la ligue départementale se montrait aussi très inquiet face à ces retards de dépistage, qui peuvent avoir pour conséquence une surmortalité.

Aussi, par cet amendement, nous proposons d’attribuer 5 millions d’euros supplémentaires en 2021 pour tenter de rattraper le retard accumulé en 2020 sur la prise en charge précoce du cancer.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. Cet amendement vise à minorer les crédits dédiés à l’AME au sein du programme 183 pour majorer ceux qui sont dédiés à la lutte contre le cancer, en ciblant particulièrement le dépistage.

Les indicateurs retenus dans le projet annuel de performance de la mission montrent qu’il y a des efforts à mener en la matière. La majoration des moyens dédiés à la prévention donnerait donc du sens à une mission « Santé » qui en semble dépourvue.

Cela étant, sur le fond, nous prônons le rejet des crédits de cette mission. Dans ces conditions, je m’en remets à la sagesse du Sénat.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Nous partageons évidemment les inquiétudes des auteurs de l’amendement, en particulier en cette période de crise sanitaire. Mais les crédits en question relèvent de l’assurance maladie, et non de l’État. Ils ont été maintenus et permettent de répondre aux besoins.

Toutes les actions de prévention du cancer, en particulier la lutte contre les déterminants de la maladie tels que le tabac, l’alcool ou la sédentarité, ont été poursuivies en direction de la population. En outre, durant le deuxième confinement, contrairement au premier, toutes les consultations ont été maintenues.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.