M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Pierre Corbisez, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable pour les transports routiers. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs spéciaux et rapporteurs pour avis, mes chers collègues, je partage bien évidemment le sentiment exprimé par l’ensemble des orateurs qui m’ont précédé à cette tribune concernant les événements d’hier. J’ose espérer, à ce sujet, que le Gouvernement changera de cap.

Après des années de sous-investissement dans les infrastructures routières, qui ont conduit à une détérioration de l’état des voiries et des ouvrages d’art, le projet de budget pour 2019 confirme le choix du Gouvernement d’investir en priorité dans la modernisation des réseaux existants.

Au total, 833 millions d’euros sont prévus pour financer l’entretien du réseau routier national existant, lorsque ce montant oscillait entre 610 et 680 millions d’euros les années passées. En ce qui concerne le développement de nouvelles infrastructures routières, 589 millions d’euros sont prévus, dont 389 millions d’euros provenant de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, et 200 millions d’euros des collectivités territoriales.

L’augmentation des moyens consacrés à l’entretien du patrimoine routier doit être saluée. J’ai cependant plusieurs réserves à exprimer.

La première, c’est que les travaux menés tant par le Conseil d’orientation des infrastructures, le COI, que par les cabinets d’audit missionnés ont montré qu’il faudrait 1 milliard d’euros par an au minimum pour enrayer la dégradation du réseau existant. Nous n’y sommes donc pas encore.

La deuxième réserve concerne le budget de l’AFITF, qui nécessitera, à l’avenir, 500 millions d’euros de ressources supplémentaires au minimum, comme l’a dit ma collègue Fabienne Keller, sans que l’on sache aujourd’hui comment ce besoin de financement serait comblé, d’autant que l’idée de créer une vignette poids lourds n’est pas vraiment dans l’air du temps.

Une dernière réserve, qui est plutôt une inquiétude, concerne cette fois le réseau routier géré par les collectivités territoriales. Il semble que de nombreuses collectivités n’ont ni les moyens ni l’expertise technique suffisante pour assurer l’entretien de leur voirie et, ce qui est plus préoccupant encore, de leurs ouvrages d’art. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a d’ailleurs créé une mission d’information pour étudier cette question et faire des propositions.

S’agissant, pour finir, des moyens dédiés au « bonus-malus automobile », le budget 2019 prévoit de renforcer le barème du malus automobile, ce qui permettra d’atteindre un niveau de recettes de 610 millions d’euros. Cette hausse des crédits devait initialement servir à financer l’extension de la prime à la conversion, l’ancienne prime à la casse, à hauteur d’environ 2 500 euros, aux véhicules rechargeables neufs ainsi qu’aux véhicules électriques et hybrides rechargeables d’occasion pour les ménages non imposables. Toutefois, M. le Premier ministre a annoncé récemment que la prime à la conversion serait finalement portée à 4 000 euros pour 20 % des ménages les plus modestes. Nous sommes donc dans l’attente du décret devant fixer le montant et, surtout, les conditions d’éligibilité de cette subvention.

Concernant le bonus automobile, je regrette la décision du Gouvernement de le limiter aux véhicules de moins de 60 000 euros. En effet, ce plafonnement ne me semble pas approprié, en particulier pour les véhicules à hydrogène, qui représentent une alternative intéressante par rapport aux véhicules tout électriques – pas de recyclage des batteries, autonomie de 600 à 700 kilomètres et moins de trois minutes pour faire le plein.

Malgré ces différentes remarques et compte tenu de l’effort réalisé en faveur de l’entretien et de la modernisation du réseau routier, la commission a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits consacrés aux transports routiers.

M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli, en remplacement de M. le rapporteur pour avis. (M. François Bonhomme applaudit.)

M. Didier Mandelli, en remplacement de M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable, pour les transports ferroviaires, collectifs et fluviaux. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme les orateurs précédents, je ne saurais débuter sans avoir une pensée pour les événements tragiques qui se sont déroulés hier. Aucune cause ne peut justifier que de tels actes soient perpétrés ! J’espère que nous en identifierons très rapidement les auteurs.

Notre collègue Gérard Cornu ne pouvant être présent aujourd’hui, il m’a demandé d’exprimer en son nom la position de notre commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur les crédits dédiés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux.

Lors de l’examen de ces crédits, notre commission a salué la priorité donnée par le Gouvernement à la modernisation des réseaux existants, ainsi que la démarche engagée pour rendre la trajectoire des dépenses de transport plus soutenable, par l’inscription d’un volet « programmation » dans le projet de loi d’orientation des mobilités, que nous examinerons prochainement.

Dans ce contexte, nous avons considéré que le budget de l’AFITF pour 2019, qui s’élèvera à près de 2,7 milliards d’euros, soit une augmentation de 10 % par rapport à 2018, pouvait être accepté, même s’il reste contraint et conduira sans doute l’agence à retarder certains engagements, comme elle l’a déjà fait par le passé. Nous avons toutefois regretté que ce budget soit inférieur au montant préconisé par le Conseil d’orientation des infrastructures dans son scénario 2.

En ce qui concerne le volet relatif aux ressources du projet de loi d’orientation des mobilités, nous regrettons la décision malheureuse, prise par le précédent gouvernement, en 2014, de l’abandon de l’écotaxe ainsi que l’indemnisation d’Écomouv à hauteur de 800 millions d’euros, qui grèvent encore aujourd’hui le budget de l’AFITF et la privent évidemment des ressources indispensables pour réaliser le scénario médian retenu par le COI.

Du fait de cet abandon, il convient désormais de trouver des recettes supplémentaires, à hauteur de 500 millions d’euros par an. Même si le contexte actuel est difficile, la mise en place d’une vignette pour les poids lourds circulant sur les routes françaises nous paraît inéluctable. Il conviendra de concevoir un mécanisme d’allégement ou de dégrèvement pour toutes les entreprises routières qui paient des impôts en France, afin que le dispositif soit neutre pour ces dernières et permette in fine de faire payer les poids lourds étrangers qui utilisent nos infrastructures sans en assumer ne serait-ce que partiellement le coût aujourd’hui.

Enfin, concernant les crédits consacrés au transport ferroviaire, nous approuvons les mesures prises pour assainir la situation financière de SNCF Réseau, indispensables à sa transformation en société anonyme, et nous serons particulièrement vigilants, lors de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités, sur les crédits consacrés à la modernisation du réseau.

Pour ces différentes raisons, et avec les réserves que je viens d’exprimer, notre commission a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2019 consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux. (MM. Stéphane Piednoir et Hervé Maurey applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, en remplacement de Mme la rapporteur pour avis.

M. Michel Dagbert, en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable, pour les transports aériens. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne peux commencer cette intervention sans évoquer le contexte dans lequel cette prise de parole intervient. À mon tour, je veux saluer les forces de sécurité et répéter que, si les revendications des « gilets jaunes » sont légitimes, les désordres auxquels nous avons assisté hier attristent l’ensemble des représentants que nous sommes.

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Très bien !

M. Michel Dagbert, en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. Madame la ministre, le fait que la fiscalité soit considérée par beaucoup de nos concitoyens comme punitive, les transports maritime et aérien ne faisant pas l’objet d’une taxation carbone à due proportion de la pollution qu’ils engendrent, explique en grande partie ces agissements.

Aussi, je souhaite vous inviter à faire preuve d’une grande détermination, y compris au niveau européen, afin de faire évoluer ces questions.

Nous avons également un certain nombre de craintes et de désaccords sur la privatisation d’Aéroports de Paris, mais le projet de la loi PACTE nous donnera l’occasion d’y revenir.

Plusieurs constats réalisés ces dernières années sont encore valables aujourd’hui.

Ainsi, comme les années précédentes, il convient de noter que le trafic aérien connaît une forte croissance, de près de 8 % au niveau mondial et de 6,2 % sur le plan national. Toutefois, comme les années précédentes, les compagnies françaises n’arrivent à capter qu’une partie de cette croissance et perdent des parts de marché au profit des compagnies à bas coûts, dont la dynamique de développement reste forte.

En mars dernier, vous avez lancé, madame la ministre, les assises nationales du transport aérien, dont nous nous félicitons. Ces assises s’intéressent au problème de la compétitivité des compagnies aériennes, mais aussi à la performance sociale, environnementale et territoriale du transport aérien. Depuis leur lancement, des mesures positives sont intervenues. Je pense, par exemple, à l’amendement adopté par l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, visant à délester les compagnies aériennes d’une partie du coût des mesures de sécurité et de sûreté dans les aéroports parisiens. Je pense également à l’augmentation des crédits consacrés aux lignes d’aménagement du territoire, pour un montant de 4 millions d’euros.

Cependant, de réels motifs d’inquiétude demeurent.

Il en va ainsi de la situation du groupe Air France : des conflits sociaux coûteux n’ayant pas réussi à être évités, il a été procédé à un changement de gouvernance et, si un accord salarial a été conclu le mois dernier, tout n’est pas pour autant réglé et des négociations catégorielles continuent.

Enfin, la perspective de la privatisation d’Aéroports de Paris nous amène à insister sur le renforcement du cadre de la régulation, par l’accroissement des compétences techniques et des pouvoirs de l’Autorité de supervision indépendante des redevances aéroportuaires.

Pour terminer, je n’omets pas de souligner que, si son désendettement se poursuivra en 2019, le budget annexe « Contrôle et exploitations aériens » maintiendra un bon niveau d’investissement dans les programmes de modernisation des systèmes de gestion de la navigation aérienne.

Pour cette raison, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits relatifs aux transports aériens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Frédéric Marchand et Hervé Maurey applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Michel Vaspart, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable, pour les transports maritimes. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a rendu un avis défavorable à l’adoption des crédits relatifs aux affaires maritimes et portuaires.

D’abord, la commission considère que la stabilité des crédits de ces programmes n’est pas compatible avec le développement d’une politique maritime française ambitieuse. Certes, je me félicite du fait que l’État honore l’engagement, pris au Comité interministériel de la mer – le CIMer – de 2016, de couvrir les dépenses de dragage des grands ports maritimes, mais cette mesure est normale, puisque les douze ports concernés sont placés sous la responsabilité de l’État. Cette augmentation permettra néanmoins de sécuriser la situation financière du GIE Dragages-ports.

S’agissant des crédits des affaires maritimes, je salue le maintien des exonérations de charges consenties aux armateurs, qui représentent 72 millions d’euros. Cette année, Bercy n’a pas osé supprimer la ligne.

Le gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre, a marqué sa volonté de soutenir le transport maritime dans la transition écologique. C’est notamment l’objet de l’article 18 quinquies du PLF, confirmé par le Sénat. Néanmoins, je m’étonne que ce dispositif permette au crédit-bailleur qui assure le financement du navire au gaz naturel liquéfié ou à l’hydrogène de conserver jusqu’à 20 % de l’aide fiscale du suramortissement.

Concernant le Brexit, je m’étonne du manque d’anticipation du Gouvernement sur la révision des corridors maritimes du mécanisme d’interconnexion en Europe, en lien avec le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. La Commission a proposé une révision des tracés du corridor qui relie la Mer du nord à la Méditerranée qui exclut les ports normands et bretons des nouvelles routes entre l’Irlande et le continent européen. Cette proposition de règlement est inacceptable.

Comment comptez-vous rééquilibrer la situation, madame la ministre ? Le Comité européen des régions et la rapporteur de la commission des transports et du tourisme ont déjà proposé des amendements en ce sens. Qu’en est-il de la nouvelle stratégie portuaire que le Premier ministre vous a chargée de définir ? Quels moyens sont prévus pour permettre aux ports bretons et normands d’effectuer leurs missions de contrôle sanitaire et de douane sur les marchandises anglaises ? Le modèle économique de nos ports et des compagnies maritimes est en grand danger.

Enfin, le CIMer de 2017, présidé par le Premier ministre, a pris un engagement concernant le financement de la responsabilité élargie du producteur, la REP, pour la déconstruction des navires de plaisance, en prévoyant que 1 % du produit du droit annuel de francisation et de navigation, le DAFN, serait attribué à la filière, taux qui passerait ensuite à 2 % et grimperait jusqu’à 4 % en 2021. Or vous plafonnez ce taux à 2 %. Les professionnels, qui s’étaient engagés à recycler 20 000 à 25 000 bateaux attendent ce financement. Quel financement de substitution allez-vous proposer pour respecter les engagements du CIMer de 2017 ?

Madame la ministre, le Gouvernement a, semble-t-il, une grande ambition maritime. Tant mieux ! Il faudra néanmoins avoir le courage de sortir d’une certaine technocratie des structures, puis faire évoluer, si ce n’est moderniser, la gouvernance des grands ports français. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, en remplacement de M. le rapporteur pour avis.

M. Hervé Maurey, en remplacement de M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable, pour la prévention des risques. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j’interviens à ce stade au nom de Pierre Médevielle, qui ne peut être présent parmi nous ce matin.

Notre commission regrette le manque global d’ambition des programmes budgétaires dédiés à la prévention des risques et au fonctionnement du ministère de la transition écologique et solidaire dans le projet de loi de finances pour 2019.

Concernant la prévention des risques, nous déplorons l’absence de tout effort notable en faveur de cette politique portant dédiée à la protection de nos concitoyens et à la préservation de l’environnement. En matière de risques naturels, l’intensification et la multiplication des aléas, liées au changement climatique, devraient pourtant inciter l’ensemble des pouvoirs publics à renforcer leur action. La tragédie humaine provoquée par les inondations dans le département de l’Aude, au début du mois d’octobre, nous rappelle une fois encore l’importance des politiques de prévention.

Concernant le fonds Barnier, après le regrettable plafonnement de ses ressources, l’an passé, pour alimenter le budget général de l’État, les modifications adoptées à l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement privilégient les dépenses consacrées aux bâtiments et aux maisons individuelles, aux dépens des outils de planification et des travaux engagés par les collectivités territoriales. Ce choix affaiblit les mesures d’anticipation et les opérations de protection les plus structurantes pour nos territoires, alors que de nombreuses communes exposées à d’importants risques naturels ne sont toujours pas couvertes par un plan de prévention ou protégées par des ouvrages suffisants.

Nous regrettons, par ailleurs, que l’Autorité de sûreté nucléaire n’ait obtenu qu’une augmentation très limitée de ses effectifs, en contradiction avec la multiplication des dossiers dont elle aura à connaître dans les prochaines années, compte tenu du vieillissement du parc et des projets de nouvelles installations.

Enfin, nous souhaitons vous alerter, madame la ministre, sur la nécessité de doter la Commission nationale du débat public, la CNDP, de moyens humains suffisants au regard du développement de ses missions. L’année 2018 a été marquée par l’organisation du premier débat public sur un plan national, en application de la réforme de 2016 sur la programmation pluriannuelle de l’énergie. Or la CNDP considère que l’insuffisance de ses moyens a eu un impact important sur les outils de mobilisation et sur la capacité à installer le débat dans la sphère publique à l’échelle nationale, ce qui est extrêmement regrettable.

Enfin, la baisse des effectifs du ministère de la transition écologique et solidaire, de l’ordre de 4 % sur deux ans, nous semble problématique. Elle ne saurait se poursuivre sans porter atteinte au pilotage des politiques du ministère et à l’accompagnement des projets en faveur de la transition écologique.

Pour ces différentes raisons, notre commission a émis un avis défavorable sur l’adoption des crédits dédiés à la prévention des risques et à la conduite des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Guillaume Chevrollier, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable, pour la biodiversité et la transition énergétique. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits des programmes 113, 159 et 174 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Ces crédits sont dédiés aux politiques de l’eau et de la biodiversité, de l’expertise, de l’information géographique et de la météorologie, ainsi que de l’énergie, du climat et de l’après-mines. Ils concentrent 1,1 milliard d’euros et baissent de moins de 1 % par rapport à l’année dernière.

Notre commission a exprimé un certain nombre d’inquiétudes, dont je vais vous retranscrire les grandes lignes.

Je ne vous cache pas, madame la ministre, que, pour l’essentiel, les interrogations ont porté sur une disproportion manifeste entre, d’une part, l’urgence liée au réchauffement climatique et l’érosion de la biodiversité et, d’autre part, la faiblesse des moyens consacrés à ces sujets, qui sont pourtant régulièrement brandis par le Gouvernement comme des priorités – ce n’est pas le seul sujet sur lequel les actes du Gouvernement sont en contradiction avec sa parole…

Cette disproportion s’observe tout d’abord dans les moyens consacrés à la politique de biodiversité : 10 millions d’euros supplémentaires pour la mise en œuvre du plan Biodiversité, c’est loin d’être suffisant !

En ce qui concerne les opérateurs, l’Agence française pour la biodiversité ne dispose, pour toute action nouvelle, que d’environ 30 millions d’euros de dépenses d’intervention non « fléchées », alors que 20 millions d’euros supplémentaires seraient nécessaires. Cet argent manque cruellement pour l’appui à la mise en œuvre concrète de la Stratégie nationale pour la biodiversité, pour le déploiement d’atlas communaux ou encore pour des campagnes de sensibilisation, mais surtout pour des actions réelles dans les territoires. En clair, il faut moins de colloques et plus d’action concrète et d’investissements dans les territoires, au bénéfice des élus locaux, qui mènent des politiques pragmatiques pour l’environnement, en lien, notamment, avec les agriculteurs.

De la même manière, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, l’ONCFS, voit ses moyens amputés de 21 millions d’euros, du fait de la baisse des redevances cynégétiques.

Enfin, cette année encore, la commission a tiré la sonnette d’alarme sur les moyens des agences de l’eau, dont les ressources sont réduites par la diminution du plafonnement de leurs redevances votée l’an dernier. Les onzièmes programmes qu’elles ont adoptés font apparaître un ciblage de leurs aides sur certaines priorités, au détriment d’autres missions pourtant essentielles, comme l’assainissement non collectif ou encore l’entretien des cours d’eau. Le sujet est essentiel, comme le prouvent, d’ailleurs, les assises de l’eau qui se tiennent actuellement. Nous attendons, dans ce domaine, du concret et des moyens, pour nos agriculteurs, pour les retenues collinaires et pour la qualité de l’eau.

Tels sont, madame la ministre, les sujets sur lesquels nous attendons vos réponses ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Jean-Pierre Corbisez, rapporteur pour avis, et Pierre Louault applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons, ce dimanche matin, le budget de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », alors que c’est précisément une approche de l’écologie trop technocratique, trop théorique, trop dogmatique, trop punitive, trop coupée de la réalité du terrain qui a été la goutte d’essence qui a fait déborder le réservoir et conduit aux événements dramatiques que nous avons vécus et qu’il convient évidemment de condamner.

Puissent-ils au moins enfin faire prendre conscience au Gouvernement qu’il faut davantage écouter le Sénat, dont les membres sont les représentants des territoires en souffrance. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – M. Joël Bigot applaudit également.)

Les six rapporteurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ont eu l’occasion de vous présenter leur avis. Je tiens à les remercier pour la qualité du travail qu’ils ont effectué.

J’évoquerai plus spécifiquement les crédits dédiés à l’environnement au sein de cette mission, ainsi que les enjeux de la fiscalité écologique. Mon collègue Jean-François Longeot abordera, pour sa part, les crédits alloués au transport.

De manière globale, nous observons avec satisfaction que les crédits de la mission sont en augmentation. Nous nous en félicitons dans le contexte actuel de restriction budgétaire, mais nous nous inquiétons de la réduction importante des effectifs – c’est l’une des plus importantes à l’échelle des différents ministères –, alors que les enjeux environnementaux et sociétaux sont tout à fait considérables.

Je veux faire trois observations sur les crédits de la mission.

Premièrement, en dépit de l’augmentation des crédits globaux, nous sommes inquiets pour certains établissements publics, tels que Météo France – Vincent Capo-Canellas l’a souligné –, dont les effectifs sont marqués par une évolution inédite, avec la suppression de 95 équivalents temps plein par an pendant cinq ans. D’ici à 2022, 40 % des effectifs auront été supprimés, alors même que les risques climatiques augmentent.

Je pourrais également citer l’ADEME, car, si les moyens affectés au fonds chaleur seront augmentés à 300 millions d’euros, cette hausse est rendue possible uniquement par l’annulation de projets antérieurs, et non par un effort financier supplémentaire en faveur de la transition écologique. Or il faudra continuer à accroître, dans les années à venir, le soutien au développement de la chaleur renouvelable, car la précarité énergétique est aujourd’hui l’un des enjeux majeurs pour les ménages. Elle ne fait que progresser, alors qu’elle aurait dû diminuer à la suite de l’adoption de la loi de transition énergétique en 2015.

Deuxièmement, je veux évoquer la question de la biodiversité – je serai bref, parce que Guillaume Chevrollier en a déjà parlé. Le Gouvernement a annoncé, voilà quelques mois, un plan qu’il a présenté comme ambitieux. Mais comment peut-on parler d’un plan ambitieux alors que le programme 113 ne prévoit que 10 millions d’euros supplémentaires pour mettre en œuvre ce plan ? Comment peut-on parler d’ambition quand les agences de l’eau voient leurs moyens diminuer à mesure que leurs missions s’étendent ?

Troisièmement, je souhaite aborder la question des objectifs de développement durable, les ODD, adoptés en 2015 par les Nations unies. En septembre 2019, un forum politique de haut niveau réunira les chefs d’État sur ce sujet à l’ONU. Le Gouvernement s’est engagé à rendre, l’année prochaine, les indicateurs de performance budgétaire cohérents avec les ODD.

Pour notre part, nous avons décidé, au sein de la commission, d’anticiper ce mouvement. Dès cette année, nos rapporteurs pour avis ont comparé, au sein de chaque programme, les indicateurs de performance budgétaire avec ceux des ODD. Force est de constater que cette comparaison révèle des limites : par leur sélectivité, certains indicateurs de performance, au sein du budget de l’État, ne sont pas en conformité avec les indicateurs des objectifs du développement durable. Il faudra y remédier. Des indicateurs complémentaires pourraient enrichir les informations existantes.

Pour terminer, je veux bien évidemment évoquer la question de la fiscalité écologique et rappeler la position de notre commission, que nous avons exprimée devant le Premier ministre jeudi dernier, lorsqu’il nous a reçus.

Les recettes issues de la fiscalité écologique doivent davantage financer la transition énergétique et beaucoup moins le budget général de l’État. Le lien entre recettes et dépenses écologiques doit pouvoir être établi de manière transparente et être mesurable.

Ensuite, des mesures sociales et économiques spécifiques doivent être prévues pour les populations les plus fragiles, notamment dans les territoires ruraux. Quand on a le choix entre la voiture et la voiture, il est difficile de faire évoluer son comportement, quelle que soit l’importance de la fiscalité écologique !

Enfin, une part de la taxe carbone doit être affectée aux collectivités territoriales, qui jouent un rôle essentiel en matière de transition écologique. Là encore, on ne peut pas demander aux collectivités locales de participer à la contribution carbone sans les faire profiter des recettes qui en découlent.

À défaut de prendre ces mesures, la fiscalité écologique sera définitivement condamnée, et la transition écologique fortement compromise. Au-delà, la prise en compte de ces différents points, même si elle n’est sans doute pas suffisante, est nécessaire au rétablissement de la paix civile et de l’ordre public dans notre pays. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – MM. Joël Bigot et Jérôme Bignon applaudissent également.)