Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je suis un peu plus interrogative que M. le corapporteur. À l’instar de ce dernier, je réaffirme que la compétence sur les espaces naturels sensibles et la taxe départementale des espaces naturels sensibles, ou TDENS, doivent continuer à relever des départements.

Soyons transparents jusqu’au bout : il y a eu beaucoup de débats sur le transfert de la taxe aux régions. Et j’ai bien compris quelles étaient les motivations des différents acteurs. Cela m’a rappelé M. Retailleau expliquant en toute honnêteté qu’il voulait garder la compétence sur les routes pour continuer à bénéficier des ressources liées à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, ou CVAE.

J’ai quelques nuances avec M. le corapporteur. Certes, nombre de départements veulent bénéficier d’une gestion souple de la taxe ; nous sommes tous d'accord sur ce point. Toutefois, le dispositif envisagé par les auteurs de ces deux amendements identiques serait cohérent avec le pouvoir réglementaire et de planification qui est confié aux régions.

Il y a ainsi une difficulté sur les parcs naturels régionaux, qui ne rentrent pas dans les espaces naturels sensibles des départements,…

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. C’est un autre sujet !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. ... ou sur le classement des réserves régionales.

Je ne serais donc pas gênée qu’il y ait un partage de compétences. La gestion des ENS et la taxe pourraient continuer à relever des départements, puisque telle semble être la volonté majoritaire du Sénat à ce stade, mais cela n’empêcherait pas des discussions entre régions et départements.

En clair, je ne propose pas de modification juridique abrupte, mais je pense qu’une ouverture est possible. COMME j’ai également entendu les arguments de M. le corapporteur, je m’en tiens à un avis de sagesse, tout en faisant part de mes doutes : peut-être le droit évoluera-t-il dans l’avenir.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.

M. Michel Bouvard. Je partage la position de M. le corapporteur. Par ailleurs, j’ai écouté avec attention la réponse de Mme la ministre.

À mon sens, ce débat met en évidence l’une des faiblesses du texte, qui s’attache aux compétences des collectivités locales sans aborder leurs ressources financières, qu’il s’agisse de fiscalité directe ou de taxes affectées. Certains amendements ont pour unique objet, Mme la ministre l’a souligné avec beaucoup d’honnêteté, de détourner une partie des ressources au bénéfice de telle ou telle collectivité.

Certes, nous pouvons discuter de l’affectation de la ressource liée aux espaces naturels sensibles. Simplement, madame la ministre, les départements contribuent presque systématiquement au financement des parcs naturels régionaux ; je ne connais quasiment aucune région qui soit contributrice unique !

Toutefois, les ressources des espaces naturels sensibles servent aussi à la gestion de sites de proximité, qui relèvent des conservatoires départementaux d’espaces naturels.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. C’est autre chose !

M. Michel Bouvard. D’ailleurs, cela contribue à faire accepter certaines politiques environnementales sur des sites sensibles.

Tous ceux qui ont vécu l’aventure de Natura 2000 – c’est le cas de beaucoup d’élus présents aujourd'hui – le savent, nous ne serions pas arrivés à une gestion de proximité intelligente d’un certain nombre d’espaces naturels sensibles sans l’intermédiation de ces conservatoires. Grâce à leurs capacités de dialogue, ces organismes étaient acceptés, là où le fonctionnement des services de l’État suscitait méfiance et inquiétude.

Par conséquent, dès lors que de tels outils n’ont pas vocation à disparaître, il est important que la ressource ne soit pas détournée et que nous en restions à une logique de compétences partagées. Avec les régions gigantesques que nous allons avoir, il sera d’autant plus nécessaire de disposer d’outils de proximité pour gérer les espaces naturels ! Le dialogue territorial avec les agriculteurs, les propriétaires fonciers, les chasseurs et les acteurs du monde forestier est une nécessité.

Il serait antiéconomique de confier cette tâche aux régions, qui devraient alors créer des services dans chaque département et chaque territoire !

Je ne suis pas toujours d'accord avec M. le corapporteur, mais, en l’occurrence, je pense que sa position est une position de sagesse. C'est la raison pour laquelle je la soutiens.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Merci, mon cher collègue !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Je ne comprends pas pourquoi certains veulent revenir sur un système qui fonctionne très bien et qui ne pose aucun problème.

Les départements procèdent non seulement à des classements, comme les régions, mais aussi à des acquisitions, grâce à la TDENS. En outre, je le rappelle, on a confié voilà quelques années la protection des espaces périurbains aux départements – à mon sens, les communes et les intercommunalités sont les mieux à même de faire ce travail –, sous prétexte qu’il existe une taxe départementale sur les espaces naturels sensibles.

Confier une telle responsabilité à la région aurait pour conséquences d’éloigner la prise de décisions des problématiques locales, ce qui ne me paraît pas une bonne chose.

Normalement, une réforme, ce n’est pas fait pour qu’un système fonctionne plus mal ! Enfin, normalement… (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. Les analyses de M. le corapporteur et de nos collègues Michel Bouvard et Pierre-Yves Collombat sont très pertinentes. J’aimerais ajouter un argument complémentaire.

L’expérience qui est la nôtre dans l’Oise du schéma régional de cohérence écologique n’est certainement pas de nature à nous encourager à soutenir une telle disposition. Le conseil régional, en lien avec les services de l’État, est sur le point d’adopter un schéma contre l’avis de toutes les communes et du conseil départemental. Le document a été élaboré sans la moindre concertation, et la région a fait fi des autres collectivités territoriales.

Il faut garder un niveau de proximité. Je crains fort que, en cas d’adoption de ces deux amendements identiques, la région ne puisse demain prendre des décisions contraires aux intérêts des départements et des collectivités locales.

Voilà un argument supplémentaire pour nous en tenir à la position de la commission !

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Mme la ministre a, me semble-t-il, raison de souligner que le problème n’est pas si simple. Aujourd'hui, les régions gèrent des réserves naturelles régionales ; elles interviennent sur les parcs naturels régionaux.

À mon avis, c’est l’adjectif « sensibles » qui introduit de la confusion. Peut-être faudrait-il le supprimer dans le texte de l’amendement, dans un souci de clarification. En effet, il n’est pas question de retirer la TDENS aux départements – j’ai bien entendu votre message, mes chers collègues –, mais il faut permettre aux régions d’intervenir sur les espaces naturels, d’autant qu’elles le font déjà.

Je propose donc de supprimer, si cela nous permet d’avancer, le terme « sensible » dans le texte de l’amendement, afin de bien marquer qu’il n’est pas question de la TDENS et que l’on ne touche pas à cette cagnotte. Il s’agit uniquement de préciser que la région, qui le fait déjà, a la capacité d’intervenir sur les espaces naturels. Cette modification répondrait peut-être à l’interrogation de Mme la ministre.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Autant je suis opposé à la maîtrise foncière, autant, en ce qui concerne la question de la gestion des espaces, force est de reconnaître que le dispositif fonctionne très bien en Lorraine.

Effectivement, ce point a été souligné, l’échelon de proximité est le département. En revanche, il convient de réaliser des économies. Voilà pourquoi le niveau régional s’est accaparé la gestion des espaces naturels sensibles.

Il est intéressant de maintenir la proximité sur la propriété, l’acquisition foncière. Par ailleurs, un travail en commun entre les régions et les départements pourrait avoir un sens sur le plan économique dans le futur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Lenoir. En passant par la Lorraine, on trouve de bons exemples, semble-t-il, contredisant mon opinion sur le sujet, laquelle rejoint celle de mes collègues qui se sont exprimés avant Ronan Dantec ! (Sourires.)

Nous en avons assez des schémas régionaux qui viennent de nulle part. Officiellement, ils sont estampillés « conseil régional », avec une once de direction régionale, etc. Tout cela parvient aux collectivités locales, communautés de communes, pays et communes, généralement au mois de juin. Les collectivités ont alors trois mois pour donner leur avis. Évidemment, il est difficile dans un tel laps de temps de réunir les personnes pouvant avoir une opinion sur la question, sans parler de l’assemblée chargée de délibérer. (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.)

Des personnes, que je respecte par ailleurs, mais qui n’ont aucun sens des réalités, veulent que, en vertu d’une loi, tel schéma qui n’a pas été contredit avant une date donnée ou sur lequel on n’a pas pris position s’impose à tout le monde. Sur cette question comme sur d’autres, tournons-nous plutôt vers les territoires et vers les communes !

Je refuse que la région, qui n’est que le passage obligé emprunté par des administrations et par un certain nombre de personnes qui ont un avis sur tout, puisse exiger que notre pays, notre communauté de communes ou quelque autre collectivité doive respecter un certain nombre de schémas sur lesquels nous n’avons strictement aucun avis ! C’est vraiment une caricature que celle à laquelle nous assistons aujourd'hui.

M. Bruno Sido. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je confirme toute la révulsion que nous inspirent ces schémas de cohérence. Dans ma région, les communes et les intercommunalités ont été sollicitées au moment des élections départementales. C’était un beau sujet de débat au cours des réunions dans les petites communes. Le résultat de cette consultation devrait vous interpeller, madame la ministre, puisque 70 % des communes ou intercommunalités n’ont pas répondu ! En conséquence, l’avis a été considéré comme favorable.

Pourquoi n’ont-elles pas répondu ? Tout simplement parce que le document leur a été transmis de façon dématérialisée. Ce point a peut-être échappé aux services, mais un certain nombre de territoires ne disposent pas encore du débit suffisant pour recevoir les mille pages d’un schéma régional de cohérence écologique ! En conséquence, devant la difficulté de la tâche, en raison de l’absence de personnels compétents pour analyser le document et du manque de volonté des conseillers municipaux de se pencher sur un schéma qu’ils ont du mal à recevoir par la voie informatique, tout cela est resté sans réponse.

Toutefois, ce n’est pas pour autant que l’avis est favorable. Au contraire, tous les territoires sont vent debout contre cette méthode. Ils n’approuvent pas ce découpage à gros traits, qui coupe les champs et les bois de façon incohérente au prétexte qu’il ne s’agit pour l’instant que d’une approche grossière, qui sera définie plus tard. Puis, dans quelques mois, sera présenté le projet de loi sur la biodiversité. On nous dira alors : ma foi, le schéma est opposable… Alors que les documents n’auront pas forcément été examinés !

Cette approche n’est pas celle que nous souhaitons. Nous voulons davantage de concertation avec les territoires, qui éprouvent de plus en plus un sentiment d’abandon. Voilà pourquoi l’écart se creuse entre les visions nationales et les visions locales. L’incompréhension devient terrible pour nos concitoyens. Ne nous étonnons pas ensuite, madame la ministre, du résultat des élections !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Je me permets de ramener le débat à son point de départ, car il a beaucoup dérivé. Il est ici question de la protection et de la gestion des espaces naturels sensibles. (M. René-Paul Savary s’exclame.) Si nous nous mettons à parler de tout et du reste, mes chers collègues, nous allons y perdre notre latin !

Je rappelle que la protection et la gestion des espaces naturels sensibles est une compétence du département depuis la loi du 18 juillet 1985. Environ 200 000 hectares sont concernés et 1,3 million d’hectares sont en préemption possible – cela s’appelle de la protection ! Au total, cela représente 24 millions d’hectares pour les parcs naturels régionaux, Natura 2000, etc. Laissons au département ce qui lui appartient et cessons d’être hors sujet !

M. René-Paul Savary. Ce n’est pas hors sujet !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. L’occasion ne manquera pas, lorsque nous évoquerons la question des schémas, d’aborder tous ces sujets. Gardez votre enthousiasme pour ce moment-là.

M. René-Paul Savary. Mais lisez l’objet de l’amendement !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Ah non ! Il faut lire l’amendement, pas son objet, sinon on ne s’en sort pas. Nous ne votons pas sur l’exposé des motifs !

Je confirme donc qu’il convient de rejeter ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 482 rectifié bis et 646.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 403 rectifié n'est pas soutenu.

Je suis saisie de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 350 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collombat, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Je rebondirai sur les excellents propos de Jean-Claude Lenoir concernant les pouvoirs du conseil régional. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 11 à 13 de l’article 1er, car nous sommes tout à fait opposés, depuis le début, à l’affirmation et à l’exercice d’un pouvoir réglementaire régional.

Je rappellerai, tout en remerciant la commission des lois du travail qu’elle a réalisé, ce qui avait été voté par l’Assemblée nationale.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Il ne vaudrait mieux pas !

M. Jacques Mézard. Si ! C’est important, car ce vote illustre ce qui est sous-jacent à une partie de cette réforme.

L’Assemblée nationale, comme il est souligné à la page quarante-sept de notre excellent rapport, avait adopté un amendement d’Alain Rousset dont l’objectif était de « renforcer dans la loi le pouvoir réglementaire de la région en précisant qu’elle est compétente pour adopter les mesures d’application de dispositions législatives traitant de ses compétences », afin de « rendre plus opérationnelle la capacité des régions à pouvoir proposer des modifications législatives ou réglementaires concernant leurs compétences, leur organisation et leur fonctionnement ».

Mme Jacqueline Gourault. C’est anticonstitutionnel !

M. Jacques Mézard. Tout à fait !

Voilà, mes chers collègues, ce qui a été voté en première lecture par l’Assemblée nationale. Voilà ce qui sous-tend ce texte depuis l’origine !

M. Jacques Mézard. Pour notre part, nous sommes très opposés à l’affirmation d’un tel pouvoir régional. Si nous remplaçons le jacobinisme national par un jacobinisme régional, ce sera encore pire.

M. Bruno Sido. Exact !

M. Jacques Mézard. J’attire l’attention de la Haute Assemblée sur un point : la commission a certes fait voter un amendement qui est beaucoup plus raisonnable que ce que proposait l’Assemblée nationale, mais il est important de faire passer un message clair en nous opposant fermement à la proposition de nos collègues députés.

Il ne peut être question de donner le moindre pouvoir réglementaire, au-delà de celui que reconnaît aujourd'hui le Conseil constitutionnel, aux conseils régionaux. C’est un point fondamental à nos yeux.

Mme la présidente. L'amendement n° 545, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Après le mot :

ministre

insérer les mots :

, aux présidents des deux assemblées

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Actuellement, il est prévu que les résolutions votées par les conseils régionaux demandant à modifier ou à adapter une loi, un projet de loi ou une proposition de loi ne seront envoyées qu’au Premier ministre et à l’autorité préfectorale. Il serait opportun, puisqu’il s’agit bien de dispositions législatives, que le pouvoir législatif en soit informé.

Dès lors, il semble nécessaire que les présidents des deux assemblées reçoivent également ces résolutions. Un consensus doit pouvoir être trouvé sur ce point.

Mme la présidente. L'amendement n° 354 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et M. Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par les mots :

et aux commissions concernées du Parlement

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise à préciser que les propositions adoptées par les conseils régionaux devront par ailleurs être transmises pour avis aux commissions parlementaires concernées. Cela permettra à ces propositions adoptées par les conseils régionaux d’instaurer un débat avec le véritable législateur.

Mme la présidente. L'amendement n° 355 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elles sont rendues publiques.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Cet amendement vise à préciser que les propositions adoptées par les conseils régionaux sont impérativement rendues publiques.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 487 rectifié est présenté par MM. Anziani, Patriat et M. Bourquin.

L'amendement n° 547 est présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

En cas de refus de ces propositions, le Premier ministre notifie aux régions concernées les motifs de ce refus dans un délai de six mois à compter de la réception de la demande de modification ou d’adaptation.

La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l’amendement n° 487 rectifié.

M. Alain Anziani. Si nous donnons à la région le pouvoir de proposer des modifications législatives ou réglementaires se pose la question de savoir comment l’État, à savoir le Gouvernement, fera connaître sa position.

Cet amendement vise donc à préciser que le Premier ministre devra notifier sa réponse dans un délai de six mois.

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l'amendement n° 547.

M. Ronan Dantec. Nous nous étions inspirés des propositions du Gouvernement en matière de simplification administrative, que nous avons adaptées aux questions régionales. (Marques d’ironie sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. Pour de la simplification, c’est de la simplification !

Mme la présidente. L'amendement n° 546, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque année avant le 1er mars, le Gouvernement établit un bilan public qui fait état de l’ensemble des demandes de modification ou d’adaptations législatives ou réglementaires proposées par les régions et par l'Assemblée de Corse, ainsi que les réponses qui y ont été apportées. » ;

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Cet amendement est d’une nature quelque peu différente de celle de l’amendement n° 547, même s’il est dans le même esprit.

Ne perdons pas de vue que les demandes d’adaptation législatives ou réglementaires prévues pour la Corse depuis plusieurs années n'ont, jusqu'à cette loi, jamais fonctionné. Il y a eu des votes, des demandes d’adaptation, le tout sans réponse de la part de l’État avant la taxe de mouillage sur laquelle nous nous étions exprimés lors du vote précédent.

Notre proposition, très simple, est la suivante : « Chaque année, avant le 1er mars, le Gouvernement établit un bilan public qui fait état de l’ensemble des demandes de modification ou d’adaptations législatives ou réglementaires proposées par les régions et par l’Assemblée de Corse, ainsi que les réponses qui y ont été apportées. »

Il faut absolument sortir d’une situation dans laquelle l’État peut ne pas répondre, ce qui n’est pas acceptable en termes démocratiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Compliquons, compliquons à dessein les procédures…

Tout d'abord, je ne vois pas pourquoi les propositions d’adaptation réglementaire de dispositions législatives seraient transmises aux assemblées. Vous pensez bien que nous en aurons connaissance !

Le Sénat, en première lecture, puis la commission des lois, en deuxième lecture, ont adopté les modestes extensions proposées par le projet de loi en la matière, lesquelles se justifient par l’élargissement du périmètre de certaines régions dont le territoire sera plus hétérogène qu’aujourd’hui et par l’élaboration de schémas régionaux opposables.

En outre, vous avez eu raison de le souligner, monsieur Mézard, un amendement des corapporteurs a été adopté par la commission pour supprimer les dispositions introduites par l’Assemblée nationale sur un pouvoir réglementaire d’adaptation des normes législatives et réglementaires, en raison des difficultés constitutionnelles - c’est le moins qu’on puisse dire - qu’elles soulevaient.

L’amendement n° 350 rectifié est néanmoins contraire à la position du Sénat en première lecture et à celle de la commission des lois en deuxième lecture, je vous invite donc à le retirer ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 545 de M. Dantec, j’ai déjà indiqué qu’il ne me paraissait pas indispensable de préciser dans la loi que les présidents des assemblées devaient être directement informés des résolutions adoptées par les conseils régionaux. Il en va de même, a fortiori, des commissions permanentes, que vise l'amendement n° 354 rectifié de M. Mézard.

Pour ce qui est de la publicité, monsieur Mézard, vous savez que les délibérations des conseils régionaux sont publiques ; il n’est nullement besoin de le préciser. La commission demande donc le retrait de l'amendement n° 355 rectifié.

En revanche, la commission est favorable à l’amendement no 487 rectifié de M. Anziani, et l'amendement identique n° 547 de M. Dantec bénéficie société du même sort favorable. (Sourires.)

Aux termes de ces amendements, le Premier ministre, en cas de refus, notifierait aux régions concernées les motifs de cette décision dans les six mois suivant la réception de la demande. En effet, il me paraît opportun d’obliger le Gouvernement à apporter une réponse, quelle qu’elle soit : oui, non, peut-être, occupez-vous de ce qui vous regarde, bien sûr, nous allons présenter un projet de loi, modifier le décret, etc. Bref, ce sera formidable ! (Nouveaux sourires.)

Enfin, l'amendement n° 546 vise à prévoir l’établissement d’un bilan. De grâce, arrêtons-nous là ! L’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Pour les mêmes raisons, je demande le retrait des amendements nos 350 rectifié de MM. Mézard et Collombat, 545 de M. Dantec, 354 rectifié et 355 rectifié de M. Mézard. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable. Je préférerais le retrait, car l’adoption de ces amendements rendrait la loi un peu bavarde.

Pour ce qui est des amendements identiques nos 487 rectifié et 547, soutenus par la commission, le Gouvernement avait une position différente, mais il s’est donné une règle à la suite de l’expérience vécue par la CTC, qui n’a, pendant des années, reçu aucune réponse concernant ses propositions réglementaires – vous le savez, puisqu’on a beaucoup discuté de l’une d’elles, et d’une seulement –, ce qui n’est pas normal.

Le Premier ministre a adressé une instruction au secrétaire général du Gouvernement pour que ces demandes soient transmises immédiatement au ministère technique concerné, afin que celui-ci y réponde. Cependant, nous sommes prudents : nous ne saurions nous engager sur un délai de six mois.

Sur le fond, je comprends, compte tenu de ce qui s’est produit par le passé, que des amendements de précision soient déposés. Cependant, je ne peux qu’être défavorable à ces amendements, qui visent un délai trop bref. De petits problèmes demeurent avec l’article 39 de la Constitution, mais nous comprenons de quoi il s’agit.

Enfin, le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n° 546.

Mme la présidente. Monsieur Mézard, les amendements nos 350 rectifié, 354 rectifié et 355 rectifié sont-ils maintenus ?

M. Jacques Mézard. Monsieur le corapporteur, vous avez souligné que le motif de la commission, pour aller un peu au-delà de la loi existante, était la création de grandes régions. Pour résumer, du fait de l’élargissement du périmètre des régions, on peut finalement leur accorder un peu plus de pouvoir… Eh bien, je ne suis pas d’accord : je ne vois pas en quoi l’élargissement de leur périmètre est un argument pour augmenter le pouvoir réglementaire des régions !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. J’admets que ce n’est pas le meilleur argument.

M. Jacques Mézard. C’est donc une question de principe : nous sommes hostiles à l’augmentation du pouvoir réglementaire des conseils régionaux.

Madame la ministre, je vous ai d'ailleurs récemment donné un exemple de ce que deviennent les pouvoirs des présidents de conseils régionaux, en vous communiquant le courrier d’un président de région m’indiquant que, si je ne reconnaissais pas mes erreurs, il bloquerait le versement des subventions à ma collectivité.

M. Bruno Sido. Incroyable !

M. Jacques Mézard. Et cela se passera de plus en plus ainsi. C’est donc une question de principe.

Par conséquent, madame la présidente, je retire les amendements nos 354 rectifié et 355 rectifié, mais je maintiens l'amendement n° 350 rectifié, qui, je le répète, est un amendement de principe.

Mme la présidente. Les amendements nos 354 rectifié et 355 rectifié sont retirés.

La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote sur l'amendement n° 350 rectifié.

M. André Reichardt. Je tiens à souligner mon hostilité à l’égard de l’amendement n° 350 rectifié de M. Mézard.

Il s’agit ici de propositions visant à adapter des dispositions législatives ou réglementaires qui seraient autorisées aux conseils régionaux. Ces propositions seraient transmises au représentant de l’État - le Premier ministre ou un autre représentant, selon qu’il s’agit d’un texte d’adaptation à la loi ou au règlement.

Lorsque notre collègue Éric Doligé avait déposé une proposition de loi visant à une certaine adaptabilité des normes, je le rappelle, on lui avait répondu que ce n’était possible que dans la mesure où la loi le permettait. Nous avons donc l’occasion, mes chers collègues, de faire en sorte que cela soit possible. Nos collectivités croulent suffisamment sous les normes pour que nous nous saisissions de cette occasion.

Enfin, vous permettrez à un Alsacien de considérer qu’une capacité qui est prévue pour la collectivité territoriale de Corse devrait pouvoir être étendue à d’autres collectivités régionales. Pour une raison de droit local, je considère notamment que cela devrait s’appliquer à l’Alsace. Jusqu’à présent, d'ailleurs, nous le savons, le dispositif n’a pas été couronné de succès, puisque les propositions formulées par la Corse n’ont jamais obtenu de réponse.

C’est la raison pour laquelle, tout en m’opposant à l’amendement n° 350 rectifié, je suis tout à fait favorable aux amendements identiques nos 487 rectifié et 547 qui ont reçu, si je ne m’abuse, un avis favorable de la commission des lois.