Mme Esther Benbassa. L’objet de cet amendement est de définir les aires de grand passage, qui ne sont évoquées dans la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 qu’au travers du prisme des financements dont elles peuvent bénéficier.

Nous considérons en effet qu’il convient de faire, dans la loi, une distinction entre l’itinérance de petits groupes et celle de grands groupes. Cette distinction existe de fait dans les circulaires relatives aux équipements dont doivent se doter les communes.

Les aires de grand passage, les AGP, répondent aux besoins de groupes composés de 50 à 200 caravanes. Au-delà, il s’agit des EGR, les emplacements de grand rassemblement.

Dans sa rédaction actuelle, l’article 1er de la loi Besson, relatif aux obligations des communes, ne cite pas explicitement les AGP, ce qui entraîne une certaine confusion. Certains les considèrent comme des aires permanentes d’accueil, alors qu’elles n’en ont ni les caractéristiques techniques ni les caractéristiques financières. D’autres les confondent avec les EGR. Cette confusion se retrouve en conséquence dans les arrêtés municipaux prévus au I de l’article 9 de la loi Besson, qui renvoie à l’article 1er de celle-ci.

De surcroît, la définition figurant à l’article 4 de la loi Besson ne correspond plus à la réalité du terrain. Les aires de grand passage ne répondent pas seulement aux besoins en amont et en aval des grands rassemblements.

D’une part, on distingue les rassemblements religieux évangélistes encadrés par une circulaire annuelle. Plus d’une centaine de groupes sillonnent ainsi le territoire national chaque année, entre les mois d’avril et d’août. Ces deux dates correspondent aux grands rassemblements annuels de Neuvoy dans le Loiret, point de départ, et à celui qui se déroule généralement sur une base militaire désaffectée du nord ou de l’est de la France, point d’arrivée.

D’autre part, des groupes laïcs organisés traversent également le territoire, sans que leurs déplacements soient pour autant balisés par de grands rassemblements ; c’est notamment le cas de l’association France Liberté Voyage.

Ce phénomène s’explique pour partie par le fait que les équipements d’accueil ne peuvent pas toujours remplir leur véritable fonction pour les petits groupes de passage. En effet, la plupart sont largement occupés par des voyageurs qui y sont fixés par défaut et souhaiteraient quitter des équipements collectifs afin de bénéficier de solutions d’habitat individuelles, en pleine propriété ou en location.

Devant ces difficultés de circulation, la taille des groupes a augmenté pour inverser le rapport de force avec les autorités locales. Il s’agit donc, avec cet amendement, de reconnaître la diversité de ces processus, afin de mieux les encadrer.

(M. Jean-Léonce Dupont remplace Mme Bariza Khiari au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont

vice-président

M. le président. L'amendement n° 53, présenté par M. J.P. Michel et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa du II de l’article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est ainsi rédigé :

« Le schéma départemental détermine les communes où les aires de grand passage doivent être réalisées, ainsi que la capacité de chaque aire. Les aires de grand passage comprennent les emplacements destinés à répondre aux besoins de déplacement des gens du voyage en grands groupes à l’occasion des rassemblements traditionnels ou occasionnels, avant et après ces rassemblements. Le schéma départemental définit les conditions dans lesquelles l’État intervient pour assurer le bon déroulement de ces rassemblements sur ces aires. »

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel. Plutôt que de « déterminer les emplacements susceptibles d’être occupés temporairement » à l’occasion des grands passages, comme le prévoit actuellement l’article 1er de la loi du 5 juillet 2000, le schéma départemental devrait déterminer les modalités de choix des emplacements susceptibles d’accueillir les grands passages.

Le schéma départemental indiquerait alors le nombre de terrains devant être disponibles chaque année pour accueillir des grands passages, ainsi que, si nécessaire, les secteurs où ces terrains doivent être situés.

Sur cette base, le préfet définirait chaque année les terrains retenus pour accueillir des grands passages pendant la saison d’été. Les communes concernées seraient ainsi prévenues très à l’avance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur. Il est dommage que ces amendements aient été déposés à l’article 1er, alors que les grands passages et les grands rassemblements sont traités aux articles 6 et 7 du texte de la commission. Ainsi, l’article 6 donne au représentant de l’État dans le département la charge du bon ordre des grands passages, tandis que l’article 7 prévoit une procédure pour les mouvements de plus de 150 caravanes.

Sur le fond, l’amendement n° 15 est satisfait par le II de l’article 1er de la loi du 5 juillet 2000. En outre, je le répète, les articles 6 et 7 du texte adopté par la commission comportent un certain nombre de dispositions de nature à vous donner satisfaction, madame Benbassa.

L’amendement n° 53 tend, quant à lui, à récrire le quatrième alinéa de l’article 1er de la loi du 5 juillet 2000, relatif aux grands passages. Les articles 6 et 7 de la proposition de loi, tels qu’ils ont été modifiés par la commission des lois, devraient également répondre à vos préoccupations sur le fond, monsieur Michel.

Il ne serait pas nécessairement facile de destiner ad vitam aeternam tel ou tel emplacement à accueillir de grands rassemblements ou de grands passages. Cela ne favoriserait pas forcément l’accueil de ces événements : prévoir une rotation peut être préférable.

Par conséquent, je demande aux auteurs de ces deux amendements de bien vouloir les retirer. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Les aires de grand passage sont définies par la combinaison des articles 1er et 4 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage.

L’article 1er de cette loi dispose notamment que « le schéma départemental détermine les emplacements susceptibles d’être occupés temporairement à l’occasion de rassemblements traditionnels ou occasionnels et définit les conditions dans lesquelles l’État intervient pour assurer le bon déroulement de ces rassemblements ».

L’article 4 de la loi du 5 juillet 2000 précise même le dispositif de financement susceptible d’être mobilisé par l’État et spécifique aux aires de grand passage.

Les aires de grand passage sont d’ores et déjà bien prises en compte dans les schémas départementaux. L’amendement n° 15 tend à les intégrer explicitement dans ces schémas.

Si le Gouvernement est favorable à cette intégration explicite, une telle mesure ne peut prendre son sens que dans le cadre d’un texte équilibré. En effet, l’objectif premier de la loi du 5 juillet 2000 est, d’une part, d’assurer un équilibre satisfaisant entre la liberté d’aller et venir des gens du voyage garanti par la Constitution et leur accueil dans des conditions décentes, et, d’autre part, de répondre à la préoccupation des élus locaux d’éviter les installations illicites portant atteinte au droit de propriété, qui occasionnent des difficultés de coexistence avec leurs administrés et peuvent susciter, le cas échéant, des troubles à l’ordre public.

Cet équilibre repose sur le respect par chacun de ses droits et devoirs : par les collectivités locales, auxquelles la loi confère la responsabilité de l’accueil des gens du voyage ; par les gens du voyage, qui s’engagent à être respectueux des règles collectives ; par l’État, qui doit être le garant de cet équilibre et affirmer la solidarité nationale.

Or, si l’équilibre recherché n’a été que très partiellement atteint jusqu’à présent, il ne l’est pas davantage au travers de la présente proposition de loi, qui est à visée essentiellement répressive.

Toutefois, l’amendement n° 15 tendant à améliorer l’équilibre du texte, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

J’en viens maintenant à l’amendement n° 53.

La loi du 5 juillet 2000 a donné compétence aux communes et aux EPCI pour la réalisation des aires de grand passage, qui relève de l’accueil des gens du voyage. La procédure d’élaboration du schéma départemental, qui détermine le choix des emplacements des aires de grand passage, associe d’ores et déjà étroitement les communes inscrites au schéma, celui-ci étant fondé sur une étude des besoins à l’échelle départementale.

L’amendement n° 53 vise à prévoir que les schémas départementaux déterminent explicitement les communes d’implantation des aires de grand passage. Il tend donc à préciser les termes de la loi du 5 juillet 2000.

Le Gouvernement est favorable à cette démarche. Toutefois, cette mesure ne peut prendre son sens que dans le cadre d’un texte équilibré. En effet, l’objectif premier de la loi du 5 juillet 2000 modifiée relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est, d’une part, d’assurer un équilibre satisfaisant entre la liberté d’aller et venir des gens du voyage, garantie par la Constitution, et leur accueil dans des conditions décentes, et, d’autre part, de répondre à la préoccupation des élus locaux d’éviter les installations illicites, qui portent atteinte au droit de propriété, occasionnent des difficultés de coexistence et créent, le cas échéant, des troubles à l’ordre public.

Cet équilibre repose sur le respect par chacun de ses droits et devoirs. Or si l’équilibre recherché n’a été que partiellement atteint jusqu’à présent, il ne l’est pas davantage dans la présente proposition de loi, qui est à visée essentiellement répressive.

Cependant, cet amendement visant lui aussi à améliorer l’équilibre du texte, le Gouvernement s’en remet, comme sur le précédent, à la sagesse du Sénat.

M. le président. Madame Benbassa, l'amendement n° 15 est-il maintenu ?

Mme Esther Benbassa. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 53.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 142 :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 345
Pour l’adoption 159
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 54 rectifié, présenté par M. J.P. Michel, Mme Benbassa et les membres du groupe socialiste et apparentés et les membres du Groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du quatrième alinéa du II de l’article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est ainsi rédigée :

« Une annexe au schéma départemental recense les terrains aménagés dans les conditions prévues par l’article L. 444-1 du code de l’urbanisme. »

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel. Il s’agit ici de la sédentarisation des gens du voyage.

Cet amendement tend à prévoir qu’une annexe au schéma départemental recense les terrains aménagés pour accueillir les caravanes comme habitations permanentes.

L’article L. 444-1 du code de l’urbanisme dispose que l’aménagement de terrains bâtis pour permettre l’installation de caravanes constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs est soumis, selon la capacité d’accueil de ces terrains, à permis d’aménager ou à déclaration préalable. Ces terrains doivent être situés dans des secteurs constructibles.

Actuellement, l’article 1er de la loi du 5 juillet 2000 prévoit seulement qu’une « annexe au schéma départemental recense les autorisations délivrées sur le fondement de l’article L. 443-3 du code de l’urbanisme ».

Cet amendement vise à faire en sorte que l’accueil des gens du voyage soit mieux pris en compte dans les schémas départementaux, par le biais d’un recensement des terrains aménagés pour les caravanes comme habitations permanentes, et à favoriser ainsi la réalisation de terrains familiaux et la sédentarisation de ces populations.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur. Cet amendement, tendant à prévoir qu’une annexe au schéma départemental recense les terrains aménagés pour accueillir des caravanes constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs, a reçu un avis favorable de la commission.

Le texte actuel ne prévoit que le recensement des autorisations correspondantes. La proposition qui nous est faite semble tout à fait adéquate : sa mise en œuvre permettrait de mieux organiser les mouvements et de bien comprendre les besoins des gens du voyage. La commission émet donc un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Cet amendement a pour objet de préciser les éléments contenus dans le schéma départemental d’accueil des gens du voyage, en prévoyant d’y inclure obligatoirement une annexe recensant les terrains aménagés pour permettre l’installation de caravanes constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs.

Aux termes de l’article 444-1 du code de l’urbanisme, ces terrains doivent être situés dans des secteurs constructibles. À la différence de l’aire d’accueil destinée aux itinérants, le terrain familial répond à une demande des gens du voyage, qui souhaitent disposer d’un ancrage territorial au travers de la jouissance d’un lieu stable, aménagé, privatif, sans pour autant renoncer au voyage une partie de l’année.

Le Gouvernement est favorable à l’intégration des terrains familiaux dans les schémas départementaux. Toutefois, il nous apparaît que cette disposition pourrait utilement trouver sa place dans un texte équilibré, plutôt que dans un texte à vocation uniquement répressive. Aussi le Gouvernement s’en remet-il à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Nous soutenons cet amendement plein de bon sens. Une telle disposition est bienvenue à l’heure où l’on revoie de nombreux schémas départementaux, où les intercommunalités acquièrent de nouvelles compétences, notamment en matière d’urbanisme ou d’aménagement du territoire, et où l’on révise l’ensemble des documents d’urbanisme.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Requier. Cet amendement me paraît sympathique et je suis prêt à le voter, mais je voudrais soulever une interrogation.

Dans le cas où un PLU interdit le stationnement des caravanes sur des terrains appartenant à des particuliers, une exception sera-t-elle possible pour les gens du voyage ?

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.

M. Pierre Hérisson. Je ne comprends pas très bien le sens de cet amendement. En effet, la loi Besson prévoit la révision des schémas tous les six ans : il me semble que les schémas ayant été révisés assez récemment ont complètement intégré les propositions qui viennent d’être formulées, en prenant en compte les terrains familiaux ou l’habitat social adapté. Il en est en tout cas ainsi dans les départements où un travail en commun entre les services de l’État, le conseil général et les associations de maires a été conduit. En outre, cet amendement serait à mon avis plus à sa place dans un texte général sur ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je partage l’interrogation de mon collègue Hérisson à propos de cet amendement.

On peut toujours faire des recensements, mais que fait-on des chiffres que l’on obtient et quelles conclusions en tire-t-on ?

Dans des départements très urbanisés tels que ceux de la première couronne parisienne, il existe un certain nombre de terrains qui sont de facto aménagés, c'est-à-dire que l’on y trouve de l’habitat mobile permanent à côté d’un pavillon, et qui ne sont pas forcément déclarés. Je ne sais pas très bien comment on les comptabilisera.

Je m’interroge vraiment sur l’utilité d’un tel recensement dès lors que l’on ne tient pas compte de ses résultats. Dans mon département, un certain nombre de maires ont argué du fait que beaucoup de parcelles accueillent déjà de l’habitat mobile occupé par des personnes en fait semi-sédentaires pour refuser de créer une aire de stationnement pour les gens du voyage.

Je ne comprends pas très bien la finalité de cet amendement ; c’est pourquoi je ne le voterai pas.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur. Je souhaite répondre à la question de M. Requier.

Cette disposition n’aura pas de conséquence au regard du PLU : il s’agit simplement de pouvoir disposer d’une information utile aux gens du voyage, d’une part, et à la définition de la politique à mener dans le département, d’autre part. Cet amendement ne vise qu’à permettre une meilleure connaissance des besoins : son adoption n’aura pas d’incidence sur la politique de l’urbanisme ni de conséquences normatives.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 143 :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 315
Pour l’adoption 177
Contre 138

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 1er.

L'amendement n° 56, présenté par M. J.P. Michel et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du I de l’article 3 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :

« Si, à l’expiration des délais prévus à l’article 2, une commune ou un établissement public de coopération intercommunale n’a pas rempli les obligations mises à sa charge par le schéma départemental, le représentant de l’État dans le département met en demeure la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale de prendre les mesures nécessaires pour y satisfaire dans un délai déterminé.

« Au terme de cette procédure, si la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale n’a pas obtempéré à cette injonction dans le délai imparti par la mise en demeure, le représentant de l’État peut l’obliger à consigner entre les mains d’un comptable public une somme correspondant au montant des mesures prescrites, laquelle est restituée au fur et à mesure de l’exécution de ces mesures.

« Il est procédé au recouvrement de cette somme comme en matière de créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine. L’opposition à l’état exécutoire pris en application d’une mesure de consignation ordonnée par le représentant de l’État devant le juge administratif n’a pas de caractère suspensif.

« Si au terme d’un délai de six mois à la suite de la consignation de la somme prévue au I, la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale n’a pas pris les mesures nécessaires pour remplir les obligations mises à sa charge par le schéma départemental, le représentant de l’État met à nouveau en demeure la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale de prendre les mesures nécessaires pour y satisfaire dans un délai déterminé.

« Au terme de cette procédure, si la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale n’a pas obtempéré à cette injonction dans le délai imparti par la mise en demeure, l’État peut acquérir les terrains nécessaires, réaliser les travaux d’aménagement et gérer les aires d’accueil au nom et pour le compte de la commune ou de l’établissement public défaillant.

« Le représentant de l’État peut faire procéder d’office, en lieu et place de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale mis en demeure et à ses frais, à l’exécution des mesures nécessaires. Les sommes consignées en application du I peuvent être utilisées pour régler les dépenses ainsi engagées.

« À cette fin, le représentant de l’État peut se substituer à l’ensemble des organes de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale pour faire procéder d’office à l’exécution des mesures nécessaires. Il peut notamment procéder à la passation d’un marché public, selon les règles de procédures applicables à l’État, au nom et pour le compte de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel. Cet amendement très important tend à renforcer les pouvoirs de substitution du préfet aux communes ou aux EPCI n’ayant pas respecté leurs obligations en matière de construction et de gestion d’aires d’accueil. Il en existe aujourd'hui encore un certain nombre…

L’article 3 de la loi du 5 juillet 2000 accorde à l’État un pouvoir de substitution pour la réalisation et la gestion des aires si la commune ou la communauté de communes n’a pas satisfait à ses obligations en la matière dans les délais prescrits après mise en demeure. Toutefois, ce pouvoir de substitution n’a jamais été mis en œuvre, car l’État ne dispose pas des fonds nécessaires.

L’objet de cet amendement est donc de renforcer le pouvoir de substitution des préfets en leur permettant d’avoir recours à une procédure de consignation des fonds communaux ou intercommunaux dans les mains d’un comptable public en cas de refus caractérisé et après échec de toutes tentatives de conciliation.

Il ne devra être recouru à cette possibilité qu’en dernier ressort, au terme d’une longue procédure. C’est une sorte de bombe atomique !

Cette procédure, qui pèsera sur les élus locaux, présente l’avantage, selon le préfet Hubert Derache, de permettre à ceux d’entre eux qui sont confrontés à une forte opposition locale de se retrancher – je n’aime pas trop ce terme – pour agir derrière une force supérieure pleinement légitime, intervenant au nom de l’intérêt général.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur. Il s’agit en effet d’un amendement majeur.

Certaines occupations illicites de terrains résultent du fait que des communes ne respectent pas leurs obligations en matière de réalisation d’aires d’accueil et qu’il est par conséquent impossible de s’y installer autrement.

Le législateur ne peut que constater que les dispositions de la loi de 2000 relatives à la substitution directe de l’État ne fonctionnent pas, puisque ce pouvoir de substitution n’a jamais été mis en œuvre. Il faut néanmoins trouver un processus qui permette de forcer les communes ne respectant pas leurs obligations à s’y conformer, ne serait-ce que par égard pour celles qui respectent la loi.

La procédure proposée ici de substitution de l’État après mises en demeure et consignation permet une réponse graduée qui – nous l’espérons – sera plus efficace que les dispositions actuelles pour amener les communes concernées à respecter la loi, qui leur impose de prévoir des aires d’accueil pour les gens du voyage dès lors qu’elles comptent plus de 5 000 habitants.

La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement, dont l’adoption permettra d’atteindre un équilibre entre la nécessité de donner de nouveaux outils aux communes pour faire face aux occupations illicites de terrains et celle d’accorder à l’État les moyens d’amener progressivement les communes aujourd'hui hors la loi à respecter celle-ci. Cet amendement est indispensable au bon équilibre de la loi.

C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le Gouvernement est sensible à la nécessité d’améliorer l’effectivité de la réalisation des aires d’accueil des gens du voyage.

Il est ainsi favorable à la création d’une procédure de consignation et à la précision des modalités de mise en œuvre du pouvoir de substitution du représentant de l’État dans le département.

Dans un premier temps, après avoir invité la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale à présenter ses observations et lui avoir adressé une mise en demeure de prendre les mesures nécessaires pour satisfaire aux obligations mises à sa charge par le schéma départemental dans un délai déterminé, le préfet pourrait obliger la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale à consigner entre les mains d’un comptable public une somme correspondant au coût des mesures prescrites.

Dans un second temps, si la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale continue à ne pas se conformer aux obligations mises à sa charge par le schéma départemental, le préfet pourrait à nouveau inviter la commune ou l’EPCI à présenter ses observations et procéder à une nouvelle mise en demeure. Si la commune ou l’EPCI ne prend pas les mesures prescrites par la mise en demeure dans le délai imparti, le préfet pourrait alors se substituer à la collectivité en mettant en œuvre ces mesures aux frais de cette commune ou de cet EPCI.

Il se substituerait alors à l’ensemble des organes de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale pour faire procéder à l’exécution des mesures nécessaires à la réalisation de l’aire d’accueil, notamment au moyen de la passation d’un marché public selon les règles de procédure applicables à l’État, au nom et pour le compte de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale.

En tout état de cause, la procédure de substitution constitue le dernier recours permettant de pallier la carence d’une collectivité et a vocation à demeurer une procédure exceptionnelle. Nous comprenons combien ce sujet est sensible et nous savons de quel discernement il convient de faire preuve pour attribuer un pouvoir de substitution au préfet.

Cependant, la mise en place cette procédure ne se conçoit que dans le respect de l’équilibre entre les obligations en matière d’aménagement et de gestion des aires mises à la charge des communes et les droits dont celles-ci disposent dans ce domaine.

Ainsi, rendre effective la possibilité d’obliger une commune à créer une aire d’accueil suppose, en contrepartie, de renforcer l’effectivité de ses pouvoirs en matière d’évacuation des campements illicites. Il s’agit là de dispositifs juridiques complexes reposant sur des équilibres très précis et garantis par une approche concertée entre divers ministères, associant des représentants des élus locaux et des gens du voyage. Je ne crois pas que cette proposition de loi procède de cette méthode de travail. Dans ces conditions, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.