M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je pensais voter l’amendement présenté par Mme Pasquet, mais l’avis émis par M. le ministre me conduit à poser une question.

En effet, vous indiquez, monsieur le ministre, que les employeurs ne peuvent pas payer deux fois : ils ne peuvent être assujettis à la CSG et à d’autres prélèvements parce qu’ils le sont déjà par ailleurs. Puis-je savoir quelle solution est la plus intéressante du point de vue des finances publiques : celle qui prévaut actuellement ou celle à laquelle tend l’amendement du groupe CRC ? Il faut bien trouver un peu d’argent ! J’ai cru comprendre que nous étions en période de rigueur...

L’amendement dont nous discutons ne vise pas à frapper les moins riches : il s’attaque aux retraites chapeaux, et non pas aux retraites « planchers ».

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Exact !

M. Jean Desessard. S’il s’avérait que la solution proposée par le groupe CRC était plus intéressante financièrement que les dispositions actuelles, il me semble qu’elle aurait pour autre mérite de satisfaire à l’exigence de justice sociale, en ce qu’elle tendrait à aligner le régime de contributions des employeurs pour les grosses retraites sur celui des petites.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Monsieur le sénateur, la surtaxe acquittée au titre des retraites chapeaux est comprise entre 7 % et 14 %. Le prélèvement au titre de la CSG n’est, lui, que de 7 %. Vous voyez que le Gouvernement n’a pas pour but d’avantager ceux qui bénéficient de ces dispositifs. (Sourires.)

M. Jean Desessard. Merci de cette précision, monsieur le ministre !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 162.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 163, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 5 du chapitre 5 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale, est complétée par un article L. 245 ainsi rédigé :

« Art. L. 245-... – Il est institué au profit de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l’article L. 245-14 et une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l’article L. 245-15. Ces contributions additionnelles sont assises, contrôlées, recouvrées et exigibles dans les mêmes conditions et sont passibles des mêmes sanctions que celles applicables à ces prélèvements sociaux. Leur taux est fixé à 5 %. »

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. À la différence du Gouvernement, nous faisons le constat que notre système de protection sociale souffre moins de ses dépenses que d’une insuffisance chronique de recettes. La preuve en est que la part relative de la dépense sociale dans les dépenses totales tend à diminuer progressivement. Comme le rappelait le Comité pour l’annulation de la dette du tiers-monde, « la prise en charge des dépenses de soins et de médicaments par la sécurité sociale est passée de plus de 80 % à la fin des années 1970 à 75,5 % en 2009 ». Et il ajoutait : « De plus en plus de personnes sont aujourd’hui exclues de l’accès aux soins. »

Monsieur le ministre, avec l’adoption du traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, le TSCG, vous avez fait vôtre le discours libéral – je dirai même ultra-libéral –, qui vise à la réduction de la dépense, et renoncé à celui qui prône l’accroissement des ressources. Désormais, le TSCG impose de rogner sur les dépenses sociales quand le déficit structurel dépasse 0,5 % du PIB.

À l’inverse, il nous semble important de renforcer le financement de la sécurité sociale et de le faire, pour reprendre une formule chère au Gouvernement, dans la justice. C’est ce que nous proposons avec cet amendement, qui tend à augmenter de cinq points le taux des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les produits de placements financiers, sous la forme d’une contribution additionnelle.

De l’aveu même de M. Bapt, se prononçant en séance publique à l’Assemblée nationale sur un amendement identique au nôtre, présenté par Jacqueline Fraysse, « le taux global des prélèvements sociaux sur les revenus du capital est actuellement de 15,5 % ». Autrement dit, contrairement à ce que l’on entend trop souvent, les prélèvements sociaux sur les revenus du capital sont nettement inférieurs à ceux qui s’appliquent aux revenus du travail.

Or nous constatons que les salariés et les retraités voient croître les prélèvements opérés sur les salaires et les pensions dans des proportions considérables : plus de 70 milliards d’euros sont ponctionnés au titre de la seule CRDS.

La crise dont nous parlons, liée au sous-financement de la protection sociale, profite d’abord et avant tout aux marchés financiers et à la spéculation. Pour ne prendre qu’un exemple, l’obligation faite à la CADES d’emprunter sur les marchés financiers constitue une manne pour les banques et les fonds spéculatifs, qui ont engrangé, en 2011, plus de 38 milliards d’euros au titre des intérêts et commissions.

Pour toutes ces raisons, je vous propose, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à créer deux nouvelles contributions additionnelles sur les revenus du patrimoine et les produits de placements, dont le produit serait affecté à la branche maladie du régime général. Il s’agit de doubler, par ce moyen, le taux des prélèvements sociaux assis sur les revenus du patrimoine et les produits de placements.

Nous ne pouvons qu’être sensibles au produit attendu de ces taxes, qui se situerait, selon l’exposé des motifs de l’amendement, aux alentours de 5 milliards à 6 milliards d’euros en 2014. Cependant, la mesure proposée paraît excessive. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Comme vous le savez, monsieur le sénateur, les taux de prélèvements sociaux sur les produits d’épargne ont considérablement augmenté entre 2009 et 2012 : ils sont passés d’environ 10 % à 15,5 %.

Il m’est arrivé d’entendre des députés de votre sensibilité politique expliquer que la mesure d’harmonisation des taux de prélèvement sur l’épargne que nous avons proposée, et dont il sera sans doute question lorsque nous aborderons l’article suivant, ne se justifiait pas. Cette mesure, pourtant, ne correspond ni à une taxe nouvelle ni à une augmentation de taux sur les prélèvements sociaux au titre des produits d’épargne. La décision d’augmenter de manière significative les taux des prélèvements sociaux sur les produits d’épargne a été prise entre 2009 et 2012 et elle a donné lieu à une recette de quelque 6 milliards d’euros.

Et il ne s’agit pas simplement de produits d’épargne ou de placements de capitaux détenus par des contribuables très fortunés. De nombreux contribuables ayant de petits plans épargne logement, de petits plans d’épargne en actions ou de petits contrats d’assurance vie étaient concernés par cette augmentation massive des prélèvements sociaux sur les produits de placement.

Ce que vous proposez, c’est de les augmenter encore de manière significative. Si nous le faisions, nous toucherions indistinctement les épargnants, quels que soient leurs revenus ou leurs capacités contributives. Je ne suis pas certain qu’une telle mesure serait juste.

En revanche, je suis assuré qu’elle ne serait pas constitutionnelle. En effet, compte tenu des décisions récentes du Conseil constitutionnel sur les taux marginaux d’imposition, il y a fort à parier qu’une augmentation aussi massive du niveau des prélèvements sur l’épargne par une hausse aussi significative des taux serait condamnée par le Conseil constitutionnel.

Pour ces deux raisons, je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 163.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels avant l'article 8
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014
Article additionnel après l'article 8

Article 8

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

A. – L’article L. 136-7 est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– la seconde occurrence des mots : « du code général des impôts » est supprimée ;

– après la référence : « III bis de l’article 125 A », est insérée la référence : « et au I de l’article 125 D » ;

– les mots : « au I du même article 125 A et ceux mentionnés au I de l’article 125-0 A » sont remplacés par les références : « au I des articles 125 A et 125-0 A » ;

b) À la première phrase du 1°, après le mot : « impôts, », sont insérés les mots : « les revenus distribués sur lesquels est opéré le prélèvement prévu à l’article 117 quater du même code, ainsi que » ;

1° bis (nouveau) Après la première occurrence du mot : « montant », la fin du premier alinéa du 1 du III bis est ainsi rédigée : « de l’assiette déterminée en application du b du même 3° est négatif, un excédent est reversé au contrat, correspondant à la contribution calculée sur la base de ce montant, sans pouvoir excéder le montant de la contribution déjà acquittée dans les conditions du a dudit 3°. » ;



2° Le second alinéa du 1 du IV est ainsi modifié :



a) La deuxième phrase est ainsi rédigée :



« Son paiement intervient le 15 octobre au plus tard pour 97 % de son montant. » ;



b) À la dernière phrase, les mots : « ces dates » sont remplacés par les mots : « cette date » ;



B. – Le premier alinéa de l’article L. 245-15 est ainsi modifié :



1° Les mots : « assujettis à la contribution prévue aux I et II de » sont remplacés par les mots : « mentionnés à » ;



2° Sont ajoutés les mots : « dont l’assiette est celle définie à ce même article » ;



(nouveau). – Le chapitre VIII bis du titre III du livre Ier est ainsi modifié :



1° L’intitulé est complété par les mots : « et par l’administration fiscale » ;



2° Il est rétabli un article L. 138-21 ainsi rédigé :



« Art. L. 138-21. – Les contributions et prélèvements sociaux définis aux articles L. 136-7 et L. 245-15 du présent code, au 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles pour son renvoi à l’article L. 245-15 du présent code, au 2° du I de l’article 1600-0 S du code général des impôts et à l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale pour son renvoi à l’article L. 136-7 du présent code sont précomptés, déclarés et versés globalement par les établissements payeurs. »



II. – Le 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :



1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :



« L’assiette de ces contributions additionnelles est celle définie à ces mêmes articles. » ;



2° À la deuxième phrase, le mot : « assises, » est supprimé.



III. – Le second alinéa du II de l’article 1600-0 S du code général des impôts est ainsi modifié :



1° Le mot : « assis, » est supprimé ;



2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :



« L’assiette de ce prélèvement est celle définie à ce même article. »



III bis (nouveau). – À la fin du second alinéa du 1 du II de l’article 1678 quater du même code, la date : « 25 novembre » est remplacée par la date : « 15 octobre ».



IV. – L’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifié :



1° Après le mot : « placement », la fin du I est ainsi rédigée : « mentionnés à l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, dont l’assiette est celle définie à ce même article. » ;



2° Le II est ainsi rédigé :



« II. – Les III à VI dudit article sont applicables à la contribution mentionnée au I du présent article. »



V. – Les taux mentionnés au 2° du I de l’article L. 136-8 et au I de l’article L. 245-16 du code de la sécurité sociale s’appliquent à la totalité de l’assiette définie au II de l’article L. 136-7 du même code.



VI. – A. – Les A et C du I du présent article et le 2° du IV du présent article, en tant qu’il rend le IV de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale applicable à la contribution mentionnée au I de l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, entrent en vigueur le 1er janvier 2014.



B. – Sous réserve du A du présent VI en tant qu’il concerne le 2° du IV du présent article, le B du I et les II à V s’appliquent aux faits générateurs intervenant à compter du 26 septembre 2013, nonobstant les articles 5 et 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 (n° 97-1164 du 19 décembre 1997), l’article 19 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, l’article 72 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, l’article 28 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, l’article 6 de la loi n° 2010-1657 du 9 décembre 2010 de finances pour 2011, l’article 10 de la loi n° 2011-1117 du 19 septembre 2011 de finances rectificative pour 2011, l’article 2 de la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 et l’article 3 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.



(nouveau). – Pour l’application du B, pour les faits générateurs intervenus entre le 26 septembre 2013 et le 30 avril 2014 inclus, les établissements payeurs procèdent à titre provisoire à la liquidation, au précompte et à la déclaration des contributions et prélèvements sociaux dus, selon les règles et sous les conditions applicables avant l’entrée en vigueur du présent article.



La différence entre le montant total dû en application du présent article et le montant liquidé et précompté à titre provisoire dans les conditions prévues au premier alinéa du présent C donne lieu à une régularisation en 2015. Cette régularisation est opérée selon les règles prévues au III de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale et sur le même article de rôle que l’impôt sur le revenu dû au titre de 2014.



Pour l’application du présent article, les établissements payeurs informent, avant le 31 mai 2014, les personnes physiques assujetties, par écrit ou par voie dématérialisée, du caractère provisoire de la liquidation des contributions et prélèvements sociaux et des modalités de régularisation définies au deuxième alinéa. Ils indiquent sur la déclaration prévue à l’article 242 ter du code général des impôts déposée en 2015, pour les faits générateurs intervenus, d’une part, entre le 26 septembre 2013 et le 31 décembre 2013 inclus et, d’autre part, entre le 1er janvier 2014 et le 30 avril 2014 inclus, les montants de l’assiette de la contribution sociale définie au II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale et le montant total des contributions et prélèvements déjà précomptés à titre provisoire. Pour les produits définis au b du 3° du même II, la déclaration précitée fait apparaître l’assiette déterminée selon les modalités prévues au même b, le montant des contributions et prélèvements déjà précomptés en application du a du même II et le montant des contributions et prélèvements déjà précomptés, ou le cas échéant restitués, à titre provisoire.



VII. – A. – Sont applicables à Mayotte, à compter de l’imposition des revenus perçus au cours de l’année 2013, la contribution prévue à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale et les autres contributions et prélèvements assis, contrôlés et recouvrés selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions.



B. – Sont applicables à Mayotte, à compter du 1er janvier 2014, la contribution prévue à l’article L. 136-7 du même code et les autres contributions et prélèvements assis, contrôlés et recouvrés selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions.



C. – Le 3° du I de l’article 28-3 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte est abrogé pour les revenus perçus à compter du 1er janvier 2014.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, sur l'article.

Mme Isabelle Debré. L’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 réforme les modalités de calcul des prélèvements sociaux appliqués à certains produits de placement exonérés d’impôt sur le revenu.

Plus précisément, il est prévu que les plus-values constituées depuis 1er janvier 1997 seront soumises au taux unique de 15,5 %.

Tout d’abord, je voudrais souligner combien il me semble parfaitement inéquitable de modifier les règles du jeu en cours de route. Les Français, à l’époque, ont fait confiance à l’État pour investir à long terme. Et voilà que, une fois encore, l’État revient sur ses engagements ! Comment voulez-vous que les Français retrouvent cette confiance que le Président de la république appelle de ses vœux ?

Par voie de conséquence, les épargnants devront faire face à l’augmentation des contributions sociales dues sur les gains de leurs placements.

Sous couvert d’une mesure technique habillée de bons sentiments, le Gouvernement procède ni plus ni moins à un hold-up sur l’épargne des Français ! (M. Roland Courteau s’exclame.)

Non contents d’avoir alourdi la fiscalité de près de 60 milliards d’euros depuis le début du quinquennat, vous entendez poursuivre votre politique de prélèvements tous azimuts sans le moindre discernement, alors que les Français sont aujourd’hui victimes d’une overdose fiscale.

Certains, dans votre majorité, semblent en avoir pris conscience, mais bien tardivement. C’est ainsi que, juste après le vote à l’Assemblée nationale du taux unique de 15,5 %, applicable à la plupart des produits de placement, des voix se sont élevées dans votre propre famille politique pour demander que l’épargne populaire, c'est-à-dire le PEL –plan d’épargne logement – et l’épargne salariale, soit préservée.

Le rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale lui-même, Gérard Bapt, a opéré une volte-face en exprimant le souhait que des corrections puissent être apportées lors de l’examen du texte au Sénat.

Puis ce fut au tour du Premier ministre de vouloir faire marche arrière et de demander aux ministres de l’économie et du budget, M. Moscovici et vous-même, des améliorations s’agissant du régime des prélèvements sociaux sur les comptes et plans d’épargne logement.

Et que dire de la prochaine réforme de l’assurance vie, présentée ce mercredi en conseil des ministres ? Avec cette réforme, vous avez l’ambition d’orienter l’épargne de nos compatriotes vers les entreprises, notamment les PME et les entreprises de taille intermédiaire. Parfait ! Vous mettez en avant des incitations fiscales – d’ailleurs, elles ne sont pas encore très clairement définies, et risquent même de se révéler très décevantes – pour promouvoir ces nouveaux produits de placement.

Mais alors, pourquoi proposez-vous dans ce PLFSS d’alourdir les contributions sociales sur des supports d’épargne qui, pour certains, servent au financement de notre économie et de nos entreprises ? Comprenne qui pourra !

Bref, ce gouvernement agit, une fois encore, dans la précipitation et l’impréparation.

M. Alain Gournac. Il est brouillon !

Mme Isabelle Debré. La vérité, c’est que les Français sont éreintés et n’en peuvent plus d’être ponctionnés chaque jour davantage.

La vérité, c’est que leur pouvoir d’achat diminue de manière dramatique, 2012 ayant été, je le rappelle, l’année où le recul du pouvoir d’achat de nos concitoyens a été le plus fort depuis 1984, alors que vous étiez aux affaires à cette époque. Cruelle répétition de l’histoire ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

La vérité, c’est que ce sont toujours les mêmes qui paient le prix de votre politique : les classes populaires et les classes moyennes ! Pourtant, ce sont elles qui contribuent majoritairement à l’effort de redressement des comptes de la Nation.

Certes, conscients de la crise, les Français sont prêts à fournir d’importants efforts. Mais ils attendent en contrepartie une politique claire, équitable et stable. (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.)

Quand vous déciderez-vous à engager les vraies réformes structurantes,…

M. Yannick Vaugrenard. Celles que vous n’avez pas faites ?

Mme Isabelle Debré. … celles qui consistent à réduire drastiquement les dépenses, à alléger le poids des normes et à réduire des transferts sociaux toujours plus élevés, qui sont autant de primes dédiées à l’assistanat, au lieu de choisir la facilité en ponctionnant encore une fois nos concitoyens sur leurs économies souvent acquises au prix de sacrifices ?

Les faits sont têtus. La France, dont la note vient d’être dégradée par l’agence de notation Standard & Poor’s, ne peut pas s’exonérer d’une véritable révolution quant aux méthodes et moyens de son redressement.

Vous l’avez compris, le groupe UMP s’oppose à cet article et présentera un amendement de suppression. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, comme ce débat va être riche, dense et interactif, je préférerais que, dès le début de notre échange, nous soyons sûrs de parler de la même chose.

Je me permets d’intervenir parce qu’un certain nombre de choses que vous avez dites, madame la sénatrice, correspondent à ce que vous croyez – je suis en effet convaincu de votre sincérité –, mais absolument pas à la réalité. Donc, je vais m’expliquer très précisément.

D’abord, la mesure que nous avons prise n’est pas du tout une mesure consistant à créer une taxe supplémentaire sur l’épargne, un nouvel impôt ou à augmenter un taux sur des produits d’épargne. Le taux, c’est vous qui l’avez augmenté, entre 2009 et 2012.

Je veux vous livrer, madame la sénatrice, des éléments extrêmement précis, qui vont vous rassurer tout à fait quant à nos intentions et vous permettre d’effectuer un petit examen rétrospectif sur les années qui viennent de s’écouler.

En 2009, les taux de prélèvement sur l’épargne sont de 10 %. Ils augmentent d’un peu plus de 1,5 % par an pendant trois ans. En 2012, ils sont de 15,5 %. Autrement dit, en trois ans, la majorité que vous souteniez a prélevé sur les épargnants français 6 milliards d’euros.

M. Roland Courteau. Ah, quand même !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Et cela sans aucune distinction de capacité contributive, c'est-à-dire sur tous les patrimoines, quels qu’ils soient.

Employant des mots choisis, madame la sénatrice, vous parlez de « hold-up » quand nous prenons une mesure d’harmonisation consistant à faire en sorte que tous les produits d’épargne se voient prélever de manière identique et conduisant à un prélèvement de 600 millions d’euros. Faut-il en conclure que, lorsque vous prélevez en trois ans 6 milliards d’euros sur les épargnants français, vous leur faites une bonne manière ? (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Yannick Vaugrenard. Bien envoyé !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Vous conviendrez que j’aie quelques difficultés à accéder à ce type de raisonnement.

Je comprends que l’on puisse s’opposer en politique et qu’il soit parfois nécessaire, pour les besoins de l’argumentation, de convoquer des mots qui blessent inutilement ou qui travestissent la réalité. Mais moi, je considère que ce qui compte, c’est la vérité.

La vérité, c’est que vous avez pris une mesure d’augmentation massive des prélèvements sociaux sur les produits d’épargne entre 2009 et 2012 – 6 milliards d’euros en plus ! – quand nous avons pris une mesure consistant à faire en sorte que tous les produits d’épargne, par souci de simplification et d’harmonisation, soient taxés de manière identique.

. Vous avez aujourd'hui des PEL, des PEA et des produits d’assurance vie qui sont d’ores et déjà taxés à 15 % à la sortie et d’autres qui ne l’étaient pas. Ce sont là des faits incontestables

Vous parlez de rétroactivité. Il n’y en a pas : cette mesure ne s’applique qu’aux contrats qui ont été dénoués après qu’elle a été annoncée.

Vous parlez de matraquage fiscal. Moi, comme ministre du budget, je ne connais que les chiffres. Je viens de vous donner les chiffres relatifs aux décisions qui ont été prises par la précédente majorité s’agissant des prélèvements sur les produits d’épargne. Mais je connais les chiffres des prélèvements globaux. Vous les connaissez vous-même également, parce que vous avez un esprit rigoureux.