M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.

M. Jean Bizet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les nouvelles tensions économiques mondiales qui existent depuis la fin du mois de juillet 2011 annoncent un scénario de conjoncture très dégradée pour les prochains mois et peut-être – voire assurément, je le crains – les prochaines années. Tous les experts s’accordent sur un point : la voie de sortie sera très étroite. Seule une compétitivité durable de notre pays et de nos entreprises contribuera efficacement au rétablissement de la croissance et à la réduction des dettes souveraines.

Dans ce contexte, les pouvoirs publics doivent offrir aux entreprises, qui sont les principales sources de richesse, un environnement propice à leur croissance et à leur compétitivité. Nos entreprises, plus particulièrement nos PME, doivent pouvoir faire face efficacement à la concurrence d’autres sociétés, qu’elles soient nationales ou étrangères.

Aujourd’hui, le niveau de vie d’une population tient quasi exclusivement à la compétitivité conjuguée de son pays et de ses entreprises. Or plusieurs critères qui mesurent la compétitivité de ces dernières sont aujourd’hui dans le rouge. Je pense au coût du travail, au manque de flexibilité du marché du travail ou à la complexité de notre fiscalité.

Mais je veux insister sur un autre point qui me paraît fondamental : l’accès des entreprises aux crédits bancaires. La mission première des banques est non pas la spéculation sur certains marchés, mais le financement des entreprises, notamment des PME. Or nos PME et PMI se plaignent d’avoir de grosses difficultés d’accès au crédit, surtout depuis la crise. Pourtant, nous savons tous qu’elles sont les plus vulnérables et que, faute de mesures spécifiques, elles seront les premières victimes de la crise.

Quelles sont les mesures, monsieur le secrétaire d'État, qui ont été ou vont être prises par le Gouvernement pour renforcer l’accès au crédit des petites et moyennes entreprises et, plus généralement, pour améliorer le financement de l’économie ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous décrivez une situation que je rencontre très régulièrement. Comme je le disais, je fais trois déplacements par semaine, partout dans notre pays. C’est grâce à la rencontre des acteurs économiques que j’ai eu l’idée de demander à la Banque de France de mettre en place un indicateur de suivi des petits crédits. Je me suis en effet aperçu que les petits crédits, ceux de moins de 25 000 euros, ne sont pas suivis. Or ceux-ci sont essentiels quand les petites entreprises rencontrent un problème de délai de paiement.

L’encours des crédits aux PME s’élève, au 31 octobre 2011, à 267 milliards d’euros, dont 195 milliards d’euros de crédits aux PME indépendantes et aux micro-entreprises, en progression de 4,5 % par rapport à 2010. Au contraire de la situation prévalant dans les autres pays européens, cet encours n’a jamais diminué pendant la crise, grâce à la mobilisation du Gouvernement, aux outils de financement créés pour l’occasion ainsi qu’aux dispositifs mis en place, comme le médiateur du crédit, par exemple. L’intervention du médiateur a permis le déblocage de 3,6 milliards d’euros depuis 2008, répartis entre 14 500 entreprises. Plus de 99 % des entreprises accompagnées en médiation sont des PME.

Devant les difficultés rencontrées par un certain nombre d’acteurs, notamment les artisans ou les commerçants, qui s’en ouvrent à moi depuis un certain nombre de semaines, j’ai mis en place un numéro azur « Soutien TPE-PME », le 0810 00 12 10. Ce numéro leur permet d’être immédiatement en contact avec les services du médiateur du crédit ou, en cas de problème administratif, de marché public, ou d’anomalie dans des déclarations d’impôt, avec le correspondant PME de leur département. Plus de cent appels par jour sont actuellement recensés, avec des solutions qui sont trouvées dans environ 70 % des cas.

Nous sommes donc mobilisés, mais il faut évidemment rester vigilant.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d’État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Pour terminer, j’indique que, à chaque publication des statistiques de la Banque de France sur les petits crédits, je réunirai le réseau bancaire ayant les meilleurs résultats pour qu’il m’explique ses bonnes pratiques, que nous pourrons diffuser auprès des autres réseaux, et celui le moins performant, pour qu’il s’en explique également.

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour la réplique.

M. Jean Bizet. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de vos réponses, notamment celle ayant trait à la mise en réseau des banques les plus performantes avec celles qui le sont moins. J’insiste sur ce point, car certains organismes bancaires n’entendent pas toujours le message qui leur est envoyé, comme je peux le constater dans mon département. Je tiens à saluer l’action du Gouvernement sur ce point précis, car elle est pertinente.

Il me tarde que la convergence des deux plus grandes économies de l’Union européenne, à savoir la France et l’Allemagne, puisse enfin se produire, non seulement sur le plan fiscal, mais aussi sur le plan social. C’est en effet la seule solution pour disposer, à terme, d’un marché unique performant.

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la compétitivité de la France s’érode : la balance commerciale est dangereusement déficitaire, la croissance de notre PIB est nulle, voire négative. Plusieurs facteurs sont en jeu.

Je pense tout d’abord à la non-maîtrise de nos finances publiques, qui occasionne sans cesse de nouvelles taxes pour augmenter nos recettes, lesquelles freinent notre compétitivité.

Cette instabilité fiscale a lourdement pesé sur certains secteurs, notamment sur la filière photovoltaïque française, dont les baisses successives de tarifs de rachat de l’électricité ont sévèrement affecté la compétitivité pourtant prometteuse.

M. Roland Courteau. C’est bien vrai !

M. Vincent Delahaye. Je pense ensuite à l’instabilité fiscale, qui va de pair avec une complexité administrative toujours plus pesante sur nos entreprises, empêchant des TPE de devenir de vraies PME. Monsieur le secrétaire d’État, quelles mesures comptez-vous prendre afin de simplifier durablement l’environnement réglementaire et fiscal des entreprises ?

Je pense enfin au coût du travail, qui est trop élevé en France : il a augmenté pour l’ensemble de l’industrie et des services marchands de 40 % entre 2000 et 2010, contre seulement 19 % en Allemagne.

Un moyen de retrouver un avantage compétitif sur les coûts salariaux serait d’adopter une mesure, souvent évoquée mais jamais concrétisée, du type « TVA sociale ». Cela consisterait à faire peser le financement de notre protection sociale non plus sur le travail, mais sur une hausse de la TVA et donc sur la consommation. En plus de réduire le coût du travail et donc d’améliorer notre compétitivité, cette disposition permettrait de lutter contre les délocalisations et de faire participer les produits importés à l’effort de protection sociale des Français.

Monsieur le secrétaire d’État, quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière et quels sont les freins actuels à la mise en place rapide d’une TVA sociale ? (Applaudissements sur les travées de lUCR. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous avez eu raison de souligner que, depuis trente ans, tous les gouvernements – ce n’est pas une question de droite ou de gauche ! – ont emprunté le chemin de la facilité en trouvant dans l’endettement et le déficit la solution à toutes les difficultés.

M. Roland Courteau. Certains plus que d’autres !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Je vois que vous le revendiquez !

M. Roland Courteau. C’est vous les 500 milliards d’endettement en cinq ans !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Avec près de 10 % de prélèvements obligatoires de plus que les entreprises de nos principaux compétiteurs, c’est un facteur majeur de la baisse de la compétitivité de nos entreprises. Voilà la réalité !

C’est pourquoi la réduction du niveau des prélèvements obligatoires a été un enjeu constamment à l’esprit du Gouvernement. J’en veux pour preuve la suppression de la taxe professionnelle, qui a rendu près de 7 milliards d’euros aux entreprises, tout particulièrement aux TPE et aux PME, lesquelles irriguent nos territoires. Mais il faut aller plus loin !

Vous me permettrez de prendre un peu de distance avec la formule de « TVA sociale », car elle donne le sentiment…

M. Alain Néri. … d’être antisociale !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. ... que le seul moyen est d’augmenter la TVA. Or vous connaissez l’importance du moteur de la consommation dans notre pays.

Le Président de la République a annoncé l’installation prochaine d’un Haut Comité sur le financement de la protection sociale, qui devrait prendre en compte cette préoccupation dans sa réflexion. Le dispositif à imaginer devra trouver le meilleur équilibre entre cet objectif de réduction de coût, qui affaiblit notre compétitivité, et celui qui est non moins impérieux de préserver la consommation des ménages, laquelle demeure un moteur important, si ce n’est essentiel, de la croissance française.

M. Alain Néri. Un moteur qui a des ratés !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Maintenir la trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques sans affecter la croissance nous impose des exigences. C’est pourquoi nous avons respecté, y compris lorsque nous avons annoncé un plan d’effort national partagé, tous les dispositifs qui préparent l’avenir de notre pays, à savoir le crédit d’impôt recherche ou le programme des investissements d’avenir.

Il aurait pourtant été si facile de couper dans les investissements. Une telle décision ne met personne dans la rue ! Reste que ce n’est pas la meilleure façon de préparer l’avenir de nos enfants.

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour la réplique.

M. Vincent Delahaye. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, mais elle ne me satisfait pas complètement.

Le terme de « TVA sociale » n’est peut-être pas le plus approprié. Certains ont parlé de « TVA antidélocalisations ». Manuel Valls, qui n’appartient pas au même parti que moi, a employé les mots de « TVA emploi ». Pourquoi pas ! Quoi qu’il en soit, une telle mesure serait favorable au développement de l’emploi, notamment industriel, en France, et l’on en aurait bien besoin.

Concernant les prélèvements obligatoires et la nécessité de revenir à un déficit maîtrisé ou, ce que je préférerais, à l’équilibre budgétaire, je souhaite que l’on fasse plus d’efforts sur les dépenses que sur les recettes. Mais, pour l’instant, ce n’est pas la direction qui nous est proposée.

Même en ne prenant pas de mesures drastiques sur les dépenses, on risque quand même une récession. Je ne la souhaite pas, mais quitte à avoir la récession, autant avoir pris les mesures drastiques qui s’imposaient. Ayons le courage de le faire rapidement, faute de quoi nous irons dans le mur !

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin.

M. Martial Bourquin. Monsieur le secrétaire d'État, après ces différentes interventions, je voudrais faire un sort à quelques idées reçues. Pour cela, je me servirai des dernières statistiques de l’INSEE.

Le coût du travail en 2011 pour l’industrie manufacturière est de 33,16 euros en France, contre 33,37 euros en Allemagne.

Un sénateur du groupe socialiste-EELV. C’est plus cher !

M. Martial Bourquin. La durée hebdomadaire du travail, selon une étude Natixis, est à peu près la même dans les deux pays.

Le taux de chômage est, en France, de 9,7 % ; il recule à 6,9 % en Allemagne !

En France, le déficit du commerce extérieur est abyssal ; en Allemagne, il est largement excédentaire.

M. Roland Courteau. Oui, largement !

M. Martial Bourquin. Aujourd'hui, le Président de la République est en Haute-Savoie, où il fera un énième effet de communication.

M. Roland Courteau. Bien sûr !

M. Martial Bourquin. Monsieur le secrétaire d'État, nous avons besoin d’actes ! La France perd ses usines et des centaines de milliers de personnes sont au chômage.

Selon moi, le Gouvernement fait fausse route : d’abord, parce qu’il n’a pas de politique industrielle ; ensuite, parce qu’il pense tout régler avec le coût du travail. Expliquez-moi comment se fait-il que des pays européens qui ont un coût du travail bien inférieur au nôtre n’ont pas une politique industrielle beaucoup plus performante ?

En réalité, les choses sont plus compliquées que cela ! Le Gouvernement a fait l’erreur de tout miser sur les grands groupes, oubliant ces milliers de PME et de TPE qui travaillent très dur et qui créent des emplois. (Eh oui ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Elles sont les oubliées du Gouvernement, et cette erreur est catastrophique.

M. Michel Vergoz. Monumentale !

M. Martial Bourquin. En outre, il faut « clustériser » nos territoires, les aider afin que recherche, innovation et investissement soient intimement liés, et que soient mis en place ces écosystèmes productifs qui leur font cruellement défaut.

Voilà comment nous parviendrons à régler la question industrielle en France ! Mais, pour l’instant, je le répète, le Gouvernement fait complètement fausse route. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. J’attends toujours la question ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

J’ai pourtant écouté avec beaucoup d’attention, me disant qu’elle allait arriver à la fin de votre propos, monsieur le sénateur.

M. Roland Courteau. Qu’a fait le Gouvernement depuis dix ans ? La question est celle-là !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. J’étais à Sallanches, en Haute-Savoie, avec le Président de la République. Nous étions aux côtés des acteurs économiques, comme je le suis quotidiennement, je l’ai rappelé précédemment. Je vous invite à aller vous-même à leur rencontre partout en France.

M. Michel Vergoz. On le fait aussi !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Vous constaterez que les artisans, les TPE et les PME sont parfaitement conscients de la mobilisation exceptionnelle de l’État, notamment pendant la crise de 2009, et de la mise en place d’outils, pour la première fois depuis bien longtemps. Je pense en particulier à la banque des PME, OSEO, dont beaucoup avaient rêvé. Elle existe ! Je pense évidemment à l’ensemble des outils de financement qui ont été mis en place pour être aux côtés des acteurs économiques.

M. Roland Courteau. Sans beaucoup de résultats !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Visiblement, nous ne sommes pas en possession des mêmes chiffres. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.) Selon l’INSEE, le coût salarial unitaire, qui inclut la productivité du travail, s’est accru en France de 7,5 % sur la période 2000-2010, pendant qu’il reculait en Allemagne de 3,5 %. J’ajoute que les charges sociales représentent actuellement 53 % du coût du travail en France, contre 40 % en Allemagne.

M. Alain Néri. Qui est au Gouvernement ? C’est bien vous, non !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. C’est dire combien la question posée par M. Delahaye était importante.

Encore une fois, il ne s’agit pas seulement d’une différence de mots. Que l’on parle de TVA sociale ou non, il est sain que, dans notre pays, chacun se pose la question de savoir comment on peut limiter le poids des charges sociales sur le coût du travail. Je sais qu’un certain nombre d’élus le font, que ce soit au parti socialiste, dans notre famille politique, l’UMP, ou encore au Nouveau centre.

Je ne vais pas vous expliquer une nouvelle fois ce que tout le monde sait et ce que tous les acteurs économiques, je dis bien tous, vous répéteraient si vous alliez à leur rencontre quotidiennement : les 35 heures pèsent sur notre pays depuis les années 2000. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. le président. Il faut conclure, monsieur le secrétaire d'État !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. En termes de compétitivité, elles sont responsables du différentiel.

M. Roland Courteau. Cela fait combien de temps que vous êtes au pouvoir ? Dix ans !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Aussi avons-nous mis en place un certain nombre de dispositifs destinés aux entreprises. Je pense aux heures supplémentaires, dont j’entends parfois dire que vous voulez les supprimer.

M. Michel Vergoz. On ne veut pas les supprimer, elles existaient avant. En revanche, l’exonération des heures supplémentaires, ce n’est pas la même chose !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Écoutez les artisans, les entrepreneurs, les salariés ! Les heures supplémentaires, c’est gagnant-gagnant, car elles permettent de répondre aux attentes et aux besoins des entreprises comme des salariés.

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour la réplique.

M. Martial Bourquin. Monsieur le secrétaire d'État, sachez que nous sommes des élus et que nous avons un contact régulier avec les entreprises, qu’elles soient grandes ou petites. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

Nous, nous voulons que nos territoires puissent répondre aux défis auxquels ils sont confrontés. Or, aujourd'hui, votre échec est absolument impressionnant, et des familles en subissent les conséquences. Regardez le taux de chômage !

Lorsqu’on apprend que 4 000 emplois vont être supprimés chez PSA à Sochaux-Montbéliard, alors que, à côté, chez Volkswagen, on embauche, ne croyez-vous pas qu’il y a un problème ?

M. Michel Vergoz. Où est la convergence ?

M. Martial Bourquin. Lors des auditions de la mission commune d’information sur la désindustrialisation des territoires, que je présidais, on nous a démontré qu’il était possible d’avoir une politique industrielle très efficace et très offensive, et cela avec à peu près les mêmes coûts du travail.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Mais sans les 35 heures !

M. Martial Bourquin. Monsieur le secrétaire d'État, vous cachez votre échec, que les Français payent très cher, en matière de politique industrielle. Il est donc temps d’avoir enfin une politique dans ce domaine, car il n’en existe pas dans ce pays.

Il n’y a pas non plus de patriotisme industriel. Il suffit de voir que La Poste a acheté récemment 3 000 scooters taïwanais, alors que l’usine Peugeot Motocycles, PMTC, était en difficulté.

C’est situation n’est plus possible. Elle est révoltante ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet.

M. François-Noël Buffet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, dans cette assemblée, nous savons tous que l’innovation est un atout pour la compétition mondiale ; c’est également un moteur important de la compétitivité de nos entreprises.

Le Gouvernement a déjà mis en place un certain nombre d’outils ; je pense bien sûr au crédit d’impôt recherche et – faut-il le rappeler ? – aux soixante et onze pôles de compétitivité ainsi qu’à la part du grand emprunt affectée à la recherche, soit quasiment 8 milliards d’euros.

Toutefois, la crise qui perdure se fait fortement sentir. Aussi aimerions-nous connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre en matière d’aide publique à nos entreprises afin d’être rassurés.

J’ajouterai une seconde question à la première. À quel moment sera effectivement mis en place le fonds commun de placement à risques destiné au financement des entreprises innovantes, tout particulièrement dans le domaine des biotechnologies ou des nanotechnologies, prévu par le grand emprunt et dont l’État et les régions seront deux actionnaires importants ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous venez d’insister sur un point qui est revenu d’ailleurs dans plusieurs interventions, y compris dans la mienne. Je vais vous répondre de la manière la plus claire : non, il n’est pas question de revenir sur les dispositifs de soutien à l’innovation de notre pays, bien au contraire !

C’est le choix du courage que nous faisons, car, face aux difficultés, il est tellement facile de mettre la question sous le tapis, de ne pas réformer et de se dire que les successeurs le feront. C’est ainsi que rien n’est fait ! Ce fut souvent le cas dans le passé, et sous tant de gouvernements. Je pense au problème des retraites. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

Nous, au contraire, nous affrontons ces réalités et, dans le même temps, je le répète, nous privilégions avant tout le soutien à l’innovation, car c’est une chance pour les entreprises françaises. Nous avons des traditions. Nous sommes le pays de l’immatériel, des savoir-faire portés par des artisans que je rencontre tous les jours sur tous vos territoires, et que je défends, comme l’a fait le Président de la République ce matin,...

M. Roland Courteau. Qu’avez-vous fait pour le statut de l’auto-entrepreneur ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. ... en faisant la promotion du « fabriqué en France » plus que du « achetons français ».

En effet, vous n’aidez pas l’économie française et les territoires si vous achetez des produits fabriqués par une entreprise française délocalisée. En revanche, vous l’aidez si vous achetez des produits fabriqués, même dans une entreprise étrangère implantée dans notre pays, par les salariés français qui y travaillent.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Bien évidemment, vous l’avez dit, des dispositifs sont nécessaires. Le Fonds national d’amorçage, mis en place dans le cadre des investissements d’avenir, est opérationnel depuis le mois de juillet 2011. Doté de 400 millions d’euros et géré par CDC Entreprises, il a déjà engagé, en six mois, 200 millions d’euros dans une dizaine de fonds, ce qui représente potentiellement 400 millions d’euros d’investissement dans les entreprises innovantes.

L’innovation concernant également les services, j’ai engagé un plan destiné à favoriser l’innovation dans les entreprises de services. Des moyens d’OSEO seront mobilisés : 7 millions d'euros ; des appels à projets seront lancés partout sur le territoire. Cela représente plus de 50 % du PIB national et concerne des entreprises mondialement connues.

Dans un contexte budgétaire qui est contraint, maîtriser les finances publiques, c’est en même temps soutenir la croissance. Je pourrais développer ce point, par exemple en évoquant le soutien au télétravail. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d’État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Quoi qu’il en soit, si je m’exprime avec conviction, c’est parce que, chaque jour, en matière d’innovation, nous mettons en œuvre de nouveaux dispositifs pour être aux côtés des acteurs économiques. C’est là qu’est la clef de l’avenir !

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour la réplique.

M. François-Noël Buffet. Je remercie M. le secrétaire d’État d’avoir apporté ces précisions. Je le répète, si, dans le contexte de crise, le Gouvernement est conduit à adopter des mesures conjoncturelles, l’action menée en matière d’innovation est proprement structurelle, elle prépare l’avenir. Voilà ce qui compte !

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès.

Mme Christiane Demontès. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ces questions cribles thématiques consacrées la compétitivité interviennent en pleine tourmente économique, à laquelle le Gouvernement n’apporte qu’une seule réponse : la rigueur budgétaire.

Mme Christiane Demontès. Or, dans ce contexte, les entreprises de nos territoires se battent pour maintenir leur activité.

Pour que notre pays puisse construire l’avenir, il lui faut concevoir une nouvelle gouvernance économique, renouant avec cette ambition industrielle que le Gouvernement a peu à peu abandonnée.

Mme Christiane Demontès. À cette fin, il nous faut défendre la compétitivité de nos entreprises et particulièrement celles de nos TPE et PME, car ce sont elles qui portent en germe la croissance de demain, à condition toutefois d’être innovantes. C’est pourquoi il est nécessaire de mieux orienter les aides fiscales à la recherche, tel le crédit d’impôt recherche, vers les PME. Il faut que ces entreprises soient soutenues et qu’OSEO redevienne un instrument de financement efficace de ces PME, procédant non à des prêts mais à des avances de trésorerie.

Il faut également que ces entreprises s’insèrent dans le tissu économique de nos territoires, par une structuration de leur réseau et une nouvelle réflexion sur leur place au sein des pôles de compétitivité.

Il faut de surcroît que les pouvoirs publics soutiennent les TPE et les PME à l’international, en leur proposant des plates-formes de services les guidant à travers les méandres de la défense de la propriété industrielle comme dans le difficile parcours vers l’export.

Monsieur le secrétaire d’État, au-delà des effets d’annonce, comment comptez-vous mettre enfin en œuvre une politique industrielle forte, érigeant la transition énergétique en un tremplin,…

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Christiane Demontès. … s’appuyant sur des salariés qualifiés et bien formés, combinant les dispositifs nationaux et régionaux pour une meilleure efficacité ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, vous appelez de vos vœux un « recentrage » du crédit d’impôt recherche sur les PME. Je vous sais gré de saluer cet outil, qui, depuis sa création en 2007, a fait preuve de son efficacité.

Mme Christiane Demontès. Pas pour les PME !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Savez-vous quelle est la part des PME parmi les nouveaux bénéficiaires du crédit d’impôt recherche ? Près de 80 % !

Mesdames, messieurs les sénateurs, je me souviens du débat qui s’est tenu il y a quelques mois : sur toutes les travées de cet hémicycle, on entendait alors qu’il fallait limiter le crédit d’impôt recherche aux PME.

Toutefois, lorsqu’une grande entreprise bénéficie du CIR en France, 30 euros sont pris en charge par l’État sur 100 euros qu’elle investit dans le domaine de la recherche. Pour les salariés et les entreprises françaises, notamment les plus petites, ce dispositif apporte une aide considérable, il permet de les tirer vers le haut pour créer de la croissance et de l’emploi. Voilà la réalité !