M. le président. La parole est à M. Roland Ries, rapporteur pour avis.

M. Roland Ries, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vais vous présenter, sur trois sujets liés aux transports, des observations inspirées par le souci de respecter le Grenelle de l’environnement, dans sa lettre mais aussi dans son esprit.

J’observe tout d’abord que le projet de budget ne donne pas suffisamment la priorité à l’entretien de nos réseaux de transports, quels qu’ils soient.

Nous savons que le programme 203 « Infrastructures et services de transport » est la principale victime des deux « coups de rabot » décidés par le Gouvernement : ses crédits ont été amputés de 98 millions d’euros par l’Assemblée nationale.

Dans le domaine ferroviaire, 300 millions d’euros manqueront chaque année, d’ici à 2015, selon les estimations de Réseau ferré de France, pour répondre, en régénérant le réseau, aux objectifs du scénario C préconisé par le rapport de l’École polytechnique de Lausanne.

Dans le domaine routier, la seule hausse des crédits de paiement de l’action n° 12 Entretien et exploitation du réseau routier national ne suffira pas à enrayer la dégradation inquiétante de nos routes, après des années de crédits insuffisants. Je suis d’autant plus inquiet que les députés souhaitent autoriser la circulation des poids lourds de 44 tonnes à cinq essieux, dont on sait pourtant qu’ils sont très agressifs pour les chaussées et les ponts. C’est un choix que je n’approuve pas.

Enfin, la remise à niveau du réseau magistral fluvial n’est toujours pas achevée, alors même que le Parlement examine actuellement le projet de loi relatif à l’Agence nationale des voies navigables.

J’observe ensuite que le projet de budget ne donne pas davantage la priorité aux modes de transport alternatifs à la route.

La baisse des crédits de l’action n° 11 Développement des infrastructures fluviales et ferroviaires nuira bien entendu à la relance de nos ports.

S’agissant du réseau routier, je déplore que l’action n° 1 Développement des infrastructures routières englobe indifféremment les crédits liés au développement du réseau et ceux destinés à sa modernisation, de sorte qu’il est impossible de savoir quels projets profiteront de l’augmentation de 60 % des autorisations d’engagement affectées à cette action.

Si je ne nie pas la nécessité d’investir fortement dans l’entretien et la modernisation de notre réseau routier, je suis beaucoup plus réticent à l’égard du développement du réseau et de la construction d’infrastructures routières nouvelles qui, inévitablement, pèseront sur le choix modal de nos concitoyens.

À ce propos, monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement a-t-il dégagé les crédits nécessaires à l’établissement des cahiers des charges des onze projets de désenclavement routier ? Le 8 juin dernier, à l’unanimité, le groupe de suivi de notre commission sur le schéma national des infrastructures de transport, le SNIT, a apporté son soutien à ces projets, compte tenu des enjeux qu’ils représentent pour l’aménagement du territoire et la sécurité routière.

J’observe aussi que l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, ne bénéficie pas, contrairement à ce qui a été dit, de ressources suffisantes à court, moyen et long terme.

À court terme, elle verra ses ressources fondre : la baisse sera de plus de 280 millions d’euros l’an prochain.

À moyen terme, elle devrait certes bénéficier de la taxe poids lourds. Mais, pour l’heure, elle pâtit cruellement des nombreux retards pris dans sa mise en place, prévue en 2013. Au bout du compte, chaque année de retard contraint l’État au versement d’une subvention d’équilibre de 1 milliard d’euros : chaque mois perdu creuse un peu plus la dette !

À long terme, si l’on veut réaliser le SNIT, dont l’avant-projet vient d’être envoyé au Conseil économique, social et environnemental, 1 milliard d’euros au bas mot manqueront à l’agence chaque année, même lorsque la taxe poids lourds sera entrée en vigueur. Il faudra par conséquent hiérarchiser les projets du SNIT et réfléchir, pour l’AFITF, à de nouvelles ressources fiables et à fort rendement.

Je souhaite enfin que l’État poursuive ses efforts en matière de transports en commun en milieu urbain. La possibilité de lancer un troisième appel à projets doit être étudiée.

En outre, notre commission a adopté un amendement très important destiné à instaurer un versement transport « interstitiel » au bénéfice des régions, ce qui permettra de financer les TER. Nous l’examinerons en séance publique au début du mois de décembre.

Afin que la route finance davantage le train, je souhaite rééquilibrer les recettes du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » au moyen d’une hausse progressive de la taxe d’aménagement du territoire acquittée par les sociétés autoroutières.

J’appelle également l’État à jouer pleinement son nouveau rôle d’autorité organisatrice de transports pour les trains d’équilibre des territoires, en imposant à la SNCF des objectifs ambitieux de qualité de service.

S’agissant enfin du compte d’affectation spéciale « Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres », je salue l’initiative des députés qui l’ont transformé en compte de concours financier : de cette façon, le Gouvernement devra désormais équilibrer les recettes du malus et les dépenses du bonus. Il n’y a pas de raison, en effet, que la réduction de la pollution imputable aux véhicules neufs se fasse au détriment des finances publiques !

Pour conclure, la commission de l’économie a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » et du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ». En revanche, elle a émis un avis favorable à l’adoption des crédits du compte de concours financier « Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres », ainsi qu’à l’adoption de l’article 50 relatif à la taxe hydraulique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur pour avis.

M. Bruno Sido, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’exercice 2012 sera marqué, en matière d’environnement, par l’élaboration de la stratégie nationale pour la biodiversité et la priorité donnée à la sûreté nucléaire.

Au cours de l’examen du projet de loi de finances par l’Assemblée nationale, les crédits du programme 113 « Urbanisme, paysage, eau et biodiversité » et ceux du programme 181 « Prévention des risques » ont été réduits de 12 millions d’euros. Je ne m’y attarderai pas. Toutefois je tiens à noter que, malgré le contexte budgétaire contraint, les autorisations d’engagement allouées à ces programmes augmentent de près de 6 % par rapport à l’année dernière. Si je ne peux que m’en réjouir, monsieur le secrétaire d’État, je me pose néanmoins certaines questions.

S’agissant d’abord du programme 113 « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité », je constate que les deux « coups de rabot » intervenus à l’Assemblée nationale ont réduit de 6 millions d’euros les autorisations d’engagement qui s’élevaient, dans le projet de loi de finances initial, à 361 millions d’euros. Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le secrétaire d’État, que les crédits destinés à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement et, notamment, de la stratégie nationale pour la biodiversité seront épargnés par cette diminution ?

L’année 2012 constitue aussi un rendez-vous important pour les agences de l’eau, qui devront adopter leur dixième programme d’intervention. En adoptant l’article 51 quinquies, l’Assemblée nationale a porté de 108 à 128 millions d’euros la somme qui sera prélevée sur leurs budgets en 2012 pour financer l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’ONEMA. Pouvez-vous nous assurer, monsieur le secrétaire d’État, que cette mesure ne pèsera pas trop sur ces agences ?

S’agissant ensuite du programme 181 « Prévention des risques », j’observe que les crédits relatifs à la prévention des risques technologiques et des pollutions connaissent l’augmentation la plus forte : elle s’élève à 17 %. L’élaboration des plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, a pris beaucoup de retard. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d’État, à quel moment la totalité des PPRT seront prescrits et approuvés ?

Concernant les crédits de la sûreté nucléaire, si les recommandations de simplification émises par l’Office parlementaire pour l’évaluation des choix scientifiques et technologiques ont été mises en œuvre par l’attribution directe de moyens à l’Autorité de sûreté nucléaire, pourquoi n’avoir pas achevé le regroupement de tous ces crédits au sein d’un seul programme ?

Enfin, le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds « Barnier », a reçu des dotations exceptionnelles pour absorber le choc des acquisitions de biens décidées à la suite de la tempête Xynthia. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous garantir que l’équilibre entre les dépenses et les recettes de ce fonds sera assuré à l’avenir ?

En définitive, monsieur le secrétaire d’État, j’ai proposé à la commission d’approuver les crédits affectés à ces deux programmes. Celle-ci en a décidé autrement. Je le regrette et, à titre personnel, je voterai les crédits proposés par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Charles Revet. Très bien !

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle aussi que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante-cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Mireille Schurch.

Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » pour l’année 2012 étaient, dans le projet de loi de finances initial, en baisse de 2 % en autorisations d’engagement et en hausse de 2,4 % en crédits de paiement par rapport à ceux votés en 2011. Leur montant a été diminué, à l’Assemblée nationale, par l’adoption, à la dernière minute, de deux amendements du Gouvernement : le budget de la mission a été amputé de 84 millions d’euros, puis de 55,6 millions d’euros. Après s’être prévalu, dans un premier temps, d’avoir augmenté les crédits de cette mission, le Gouvernement a donc fait supporter par les députés la responsabilité de leur diminution, au nom d’une rationalité économique imposée dans l’urgence par les agences de notation…

Au sein de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », le programme 203 « Infrastructures et services de transports » est le plus touché : l’adoption des deux amendements a réduit ses crédits de 98,5 millions d’euros.

Par exemple, le montant des crédits alloués aux voies navigables – initialement fixés à 840 millions d’euros – a été réduit de 5 millions d’euros. Ces sommes sont très inférieures aux besoins qui résultent du plan de relance de la voie d’eau et aux 2,5 milliards d’euros nécessaires, d’ici 2018, pour financer la régénération de ces voies. Et je ne parle pas des projets inscrits au schéma national d’infrastructures de transport, le SNIT, dont le coût est évalué à 13 milliards d’euros : ils ressemblent de plus en plus à des déclarations d’intention…

Or les besoins en investissements sont réels, qu’il s’agisse de la régénération du réseau ferroviaire, de la relance du fret ferroviaire, de la maintenance des routes – qui risque de connaître le même sort que celle du réseau ferroviaire – ou de l’entretien des voix navigables.

Nous savons tous que les réseaux de transports sont décisifs non seulement pour stimuler le commerce, l’attractivité économique et la nécessaire réindustrialisation de nos territoires, mais aussi pour garantir à tous un accès aux besoins et services de base que sont le travail, la santé et l’éducation.

Vous promettiez, voilà deux ans, d’investir 13 milliards d’euros dans le plan de régénération du réseau ferré, 870 millions d’euros pour le transport dans le cadre du plan de relance face à la crise et 7 milliards d’euros dans le plan fret d’avenir.

Nous ne pouvons que constater la baisse continue de la part modale du fer, qui peine à atteindre les 10 %. Il faudrait au moins 20 % de croissance par an pour atteindre l’objectif de part modale fixé par le Grenelle.

Rien ne semble engagé pour enrayer la spirale infernale dans laquelle RFF est entraîné. Les concours de l’État baissent, les péages augmentent et la dette explose : le blocage du système ferroviaire semble, dans ces conditions, irréversible. Ainsi, le concours de l’État à la gestion des infrastructures ferroviaires est en baisse, à 2,54 milliards d’euros, contre 2,654 milliards d’euros en 2011.

La régénération de 3 940 kilomètres de voies ferrées engagée en 2006 ne se fera donc qu’à la faveur d’une augmentation des péages en 2012. Ces péages étant payés par les opérateurs à RFF, le transfert de charge porte encore principalement sur la SNCF. L’État continue donc de maltraiter les services publics que sont RFF et la SNCF.

La subvention de l’État à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, qui était déjà en baisse dans le précédent budget, poursuit sa chute – presque 290 millions d’euros de moins par rapport à 2011. Pourtant, l’AFITF devra, « d’ici à 2014, procéder à des financements s’élevant à plus de 13,91 milliards d’euros ». Le décalage énorme entre les moyens de l’AFITF et les besoins persiste et, une fois n’est pas coutume, les documents budgétaires soulignent la situation financière intenable de l’agence. En cinq ans d’existence, elle a perçu 10 milliards d’euros de recettes, alors même qu’elle s’est engagée à payer 17 milliards d’euros et qu’elle en a déjà payé 10 milliards. L’évolution du « reste à payer » de l’AFITF constitue donc un facteur de risque réel et grandissant. Pourquoi, dès lors, avoir plafonné à 610 millions d’euros les recettes issues de la taxe d’aménagement du territoire, payée par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, qui constitue une ressource de l’agence ?

En ce qui concerne plus particulièrement le maillage du territoire, je partage les inquiétudes du rapporteur pour avis sur la pérennité des trains d’équilibre du territoire, qui, malgré tous leurs handicaps, jouent un rôle essentiel dans l’aménagement du territoire et dans le quotidien de nos concitoyens. Un compte d’affectation spéciale a été créé l’an dernier afin d’en assurer la pérennité. Il est abondé par la SNCF, d’une part, via une taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires, qui passe de 75 millions d’euros à 155 millions d’euros, et par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, d’autre part, à hauteur de 35 millions d’euros, via une fraction de la taxe d’aménagement du territoire.

Au sujet de cette dernière, il semble bien difficile d’affirmer que ces 35 millions d’euros ne sont pas pris sur ce qui était destiné à l’AFITF pour les infrastructures. C’est pourquoi nous souscrivons totalement aux conclusions du rapporteur pour avis quant à la nécessité d’augmenter significativement la taxe d’aménagement du territoire payée par les sociétés d’autoroutes. Comme il l’écrit, « il n’est pas cohérent […] que la route ne finance le rail qu’à la marge ».

Enfin, face à l’absence de traduction de l’engagement national en faveur du fret ferroviaire de 7 milliards d’euros, annoncé pourtant à grand bruit en septembre 2009,…

M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Ah ça oui !

Mme Mireille Schurch. … nous réitérons notre demande de reconnaissance du caractère d’intérêt général de l’activité « wagon isolé ». Pourquoi ne pas créer un mécanisme similaire à celui mis en place pour les trains d’équilibre du territoire ?

S’agissant des infrastructures routières, l’action Entretien et exploitation du réseau routier national est en hausse de 45 millions d’euros par rapport au budget pour 2011 ; toutefois, il faut garder à l’esprit que cette action avait connu une baisse significative de ses crédits de 27 % en 2011. L’augmentation actuelle est loin d’être à la hauteur des besoins. Ainsi, avec le niveau prévu des crédits, il faudrait quinze ans pour renouveler les chaussées. Or 2 % du réseau routier national supportent 25 % du trafic total et 50 % du trafic des poids lourds, avec l’effet d’érosion des chaussées qui en résulte. En outre, on sait que les chaussées les plus sollicitées doivent être renouvelées en moyenne tous les huit ans. On est loin de pouvoir faire face à cet impératif. Si l’on n’y prend garde, l’effort de rattrapage sera aussi douloureux que celui observé dans le domaine ferroviaire. Ce qui est vrai pour l’État l’est aussi pour certaines collectivités territoriales.

Enfin, l’austérité budgétaire au sein de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » se traduit par la suppression de 1 309 équivalents temps plein. La poursuite aveugle de la RGPP entraînera, si vous n’y prenez garde, la disparition quasi totale d’une ingénierie publique performante, avec un impact négatif sur les territoires.

Ce budget traduit le fossé entre les ambitions affichées dans le SNIT et les moyens budgétaires mobilisés. Pourtant, l’inscription au SNIT de certains projets, comme celui de la LGV Paris–Orléans–Clermont-Ferrand, a suscité de grands espoirs et de grandes attentes. La population et les élus se mobilisent, alors que, dans le même temps, on n’observe aucune traduction financière ou budgétaire, pas même la moindre indication.

L’absence de référence, dans ce projet de budget, aux concessions d’infrastructures et aux contrats de partenariat public-privé pour la réalisation des grands projets du SNIT semble indiquer que le Gouvernement en souhaite la généralisation. À la longue, si l’on n’y prend garde, la perte de la maîtrise publique risque être entérinée au profit des sociétés privées.

Par ailleurs, aucune réflexion n’est engagée sur la remise en cause de la privatisation des sociétés d’autoroutes, qui entraîne chaque année un manque à gagner de près de deux milliards d’euros. C’est pourquoi les sénateurs de mon groupe et moi-même avons déposé une proposition de loi en ce sens.

M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Très bien !

Mme Mireille Schurch. De plus, comment comprendre le énième report de l’écotaxe poids lourds, pourtant présentée comme une mesure phare du Grenelle de l’environnement ? Il représente la perte de plus de 1,2 milliard d’euros de ressources pérennes pour le financement des grands projets d’infrastructures et la régénération ferroviaire.

Enfin, comment accepter la généralisation des poids jours de 44 tonnes sur les routes, alors que nous dressons tous un constat alarmant sur l’état du réseau ?

Ce projet de budget n’est pas en mesure de répondre à la réalité des besoins. C’est pourquoi les sénateurs du groupe CRC ne voteront pas ces crédits, qui sont en décalage complet avec les annonces et les promesses du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)

M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.

M. Louis Nègre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le budget affecté aux transports, notamment le programme 203 et ses actions nos 10, 12 et 13, dans un contexte de crise européenne et mondiale majeure et sans précédent.

En tant qu’élus responsables, nous ne pouvons pas faire abstraction de la gravité de la situation économico-financière dans laquelle se trouve notre pays. Dans les actions à mener, la sauvegarde de notre pays, pour reprendre l’expression du Président de la République, est une priorité absolue. L’objectif essentiel, pour l’avenir, consiste à rétablir, à terme, l’équilibre de nos finances publiques ; il sera sans doute atteint grâce à l’augmentation des recettes, mais aussi, et surtout, grâce à une réduction significative de la dépense publique courante non productive. Nous ne devons pas le cacher aux Français !

Notre responsabilité première, dans le cadre de la loi de finances pour 2012, est donc de revenir à des principes sains de gestion des deniers publics, de prendre le contre-pied de la politique menée sans interruption depuis 1975 dans notre pays, qui a dépensé, année après année, un argent qu’il n’avait pas.

Malgré ce contexte on ne peut plus difficile, le budget de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » s’inscrit dans une démarche volontariste du Gouvernement, qui se traduit, et je m’en félicite, par une stabilité positive – plus de 7 millions d’euros –, malgré deux « coups de rabot » successifs pour contribuer à l’effort national. Quant au programme 203 « Infrastructures et services de transports », il est en augmentation nette, d’une année sur l’autre, de près de 40 millions d’euros. Au vu du contexte économique, ce budget peut donc être considéré comme globalement positif.

Au-delà de l’évaluation de ces masses globales, je retiendrai quelques points.

En premier lieu, je me félicite de la décision politique prise par le Gouvernement, qui a tenu compte des différentes alertes que nous lui avons transmises, notamment dans le cadre de notre rapport sur le schéma national d’infrastructures de transport, le SNIT. Je rappelle que nous avions alors tous constaté un état d’entretien très préoccupant de nos routes. Nous avons souhaité leur éviter, cela a été dit, de se retrouver dans une situation analogue à celle du réseau ferroviaire. Une dégradation inquiétante des voies ferrées, à laquelle il n’avait pas été porté remède en son temps, se traduit aujourd’hui par des conséquences très négatives, avec des retards de trains, des services dégradés et une grogne légitime de nos concitoyens.

Gouverner, monsieur le secrétaire d’État, c’est prévoir. Il importe donc, avant même d’engager de nouvelles opérations, de préserver notre patrimoine d’infrastructures. Comme le confirme le projet de budget pour 2012, l’entretien des réseaux actuels constitue un engagement fort de l’État. Ce choix politique responsable, qui est aussi une décision heureuse, était particulièrement attendu par tous les usagers.

Je constate que les crédits consacrés à l’entretien des routes augmentent de près de 50 millions d’euros et que la priorité est donc redonnée à l’entretien préventif et aux réparations importantes des chaussées, sans oublier le grand programme de sécurisation des tunnels. Mais, monsieur le secrétaire d’État, il faudrait éviter de mener une politique de Gribouille et s’assurer que l’autorisation des poids lourds de 44 tonnes n’entraînera pas plus d’inconvénients que d’avantages pour le réseau !

Au total, près de 680 millions d’euros sont consacrés à l’entretien et à la rénovation des routes. Mais, parallèlement à cet effort nécessaire pour le transport routier, le projet de loi de finances pour 2012 contribuera aussi fortement à la rénovation du réseau ferroviaire, conformément aux orientations du Grenelle de l’environnement.

Une dotation de 2,5 milliards d’euros est apportée par l’État dans le cadre du contrat de performance 2008-2012 pour financer le réseau. Cette subvention permettra de renouveler près de 4 000 kilomètres de voies sur la période : ainsi, le contrat devrait être respecté. Je constate avec plaisir, alors même que seulement 450 kilomètres de voies avaient été renouvelés en 2005, que plus de 1 000 kilomètres l’ont été en 2010 et que cet objectif est maintenu pour 2011 et 2012, malgré la situation financière que nous connaissons.

Autre point positif, la priorité donnée au rééquilibrage modal et à la complémentarité des différents modes de transport, par le biais, principalement, de l’intervention de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF. L’agence est dotée de plus de 2 milliards d’euros grâce à un effort tout particulier de l’État.

De plus, je me félicite vivement que Mme la ministre de l’écologie ait proposé une mission nouvelle à l’AFITF en lui demandant d’engager une démarche de programmation sur cinq ans, afin de distinguer et de définir les premières priorités du SNIT. Il arrive que nous soyons entendus ! (Sourires.) L’AFITF bénéficiera également d’une subvention exceptionnelle de 96 millions d’euros pour compenser le retard malheureux de la redevance poids lourds.

Ce budget permettra aussi de poursuivre vigoureusement le développement des infrastructures, auquel nous sommes tous très attachés, notamment des lignes à grande vitesse, les LGV.

En 2012, pour la première fois en France, trois LGV seront mises en chantier : l’achèvement de la LGV est-européenne ainsi que les lignes Tours-Bordeaux et Le Mans-Rennes. Le contournement ferroviaire de Nîmes et de Montpellier sera également engagé.

Par ailleurs, monsieur le président du Groupement des autorités responsables de transport, grâce à l’AFITF, plus de cent vingt projets de transports collectifs en site propre, dans quatre-vingts agglomérations, seront soutenus par l’État. Cette action remarquable de notre pays nous place résolument en tête, en Europe, dans le développement des transports en commun en site propre, les TCSP. Mais, monsieur le secrétaire d’État, cet effort doit être poursuivi par un nouvel appel à projets, à terme, pour toutes les agglomérations qui sont encore dans l’attente de voir leurs projets aidés par l’État.

M. Roland Ries. Très bien !

M. Louis Nègre. Je me félicite aussi que les engagements pris par l’État soient respectés quant au soutien indispensable au démarrage de la filière industrielle naissante du véhicule électrique.

Le maintien du bonus à 5 000 euros, au vu de la situation financière de notre pays, est un geste politique significatif, mais je souhaite, sur ce point, que le Gouvernement tienne le plus grand compte des conclusions du Livre vert. Ce dernier préconisait une vision et un soutien à moyen et long terme, avec une sortie en biseau, dès lors que cette industrie naissante aurait atteint sa vitesse de croisière, ainsi que la création d’une task force spécifique pour accompagner la montée en puissance de l’industrie des véhicules de demain dont la France est, à ce jour, un des leaders mondiaux. Je suis dans l’attente, monsieur le secrétaire d’État, d’une gouvernance plus précise dans un domaine aussi crucial pour l’avenir de l’industrie française.

De même, je souhaite de nouveau attirer l’attention du Gouvernement sur la situation très préoccupante du secteur ferroviaire et notamment de l’industrie, dont les plans de charge n’ont plus aucune visibilité, ce qui me paraît particulièrement inquiétant. J’espère que les Assises du ferroviaire permettront, dans ce domaine, de créer une vraie filière, avec des objectifs et une stratégie claire et partagée par tous les acteurs. Il y va de l’avenir du ferroviaire français !

Je terminerai enfin, monsieur le secrétaire d’État, en espérant que le débat tant attendu sur le SNIT, ait enfin lieu dans cet hémicycle, car ce schéma développe une vision prospective de toutes les infrastructures de transport, pour un montant de 260 milliards d’euros – excusez du peu ! Je crois sincèrement que l’organisation d’un débat digne de l’importance de ce dossier est parfaitement justifiée.

En conclusion, je voterai bien entendu les crédits du programme 203 et, plus globalement, ceux de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », ainsi que ceux des comptes spéciaux. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – M. Raymond Vall applaudit également.)