M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue.

M. François Zocchetto. Cependant, madame la secrétaire d’État, même si cette convention MEDICRIME est ouverte à la signature d’États non membres du Conseil de l’Europe, une convention internationale ad hoc n’est-elle pas nécessaire ? Dans l’affirmative, la France a-t-elle l’intention de peser de tout son poids pour qu’une telle convention soit signée dès 2011 ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Vous avez raison, monsieur Zocchetto, le trafic de médicaments est un véritable fléau. Il est beaucoup plus lucratif que le trafic de drogues lui-même ou que le trafic de tabac – dix fois plus lucratif que le trafic d’héroïne et cinq fois plus lucratif que le commerce illicite de tabac – et, paradoxalement, moins pénalisé. En effet, les sanctions observées atteignent, au maximum, trois ans de prison.

Vous avez évoqué l’appel de Cotonou, dont le but était de sensibiliser le plus grand nombre de pays possible à ce problème et de les encourager à converger vers l’élaboration d’une convention. Celle-ci pourrait être le point de départ d’une démarche visant à protéger les personnes susceptibles d’être victimes du trafic de médicaments contrefaits et, de ce fait, exposées à des risques.

Quoi qu’il en soit, même si je ne peux pas en cet instant vous indiquer de date précise, la décision devant être prise ultérieurement au niveau européen, la convention MEDICRIME sera ouverte à la signature des États membres en 2011.

M. le président. La parole est à M. François Zocchetto, pour la réplique.

M. François Zocchetto. La lutte contre le trafic de médicaments ne peut être l’affaire d’amateurs, car ce trafic est entre les mains de mafias.

Je pense donc que la France doit non seulement intervenir sur la scène internationale pour que des instruments de lutte soient mis en place contre ces mafias, mais également montrer l’exemple et mettre rapidement en place sur son territoire des équipes pluridisciplinaires chargées d’enquêter sur ces affaires et de réprimer ce type de pratiques. Les Douanes ne peuvent procéder seules à ce travail. Elles doivent être épaulées par des équipes de policiers, de gendarmes et de magistrats spécialisées dans la lutte contre ces nouvelles mafias.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour le groupe RDSE.

M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’importance du trafic de médicaments a été soulignée : celui-ci se monte à 45 milliards de dollars, soit 10 % du marché pharmaceutique mondial.

Si les contrefaçons sont essentiellement retrouvées dans les pays du tiers-monde, mais aussi dans certaines pharmacies des États-Unis ou de Grande-Bretagne, la France est relativement préservée, compte tenu de son système de distribution des médicaments, très contrôlé.

Toutefois, comme cela a déjà été souligné par les orateurs précédents, la menace vient d’Internet, sur lequel on trouve toutes sortes de médicaments. Gain de temps, facilité, économie, confidentialité ou encore absence d’ordonnance sont autant de raisons qui poussent les patients à acheter sur Internet.

Faut-il rappeler les risques de mauvais usage ou de contre-indication, qui sont grands, la provenance souvent douteuse des produits et leur composition aléatoire ? Par exemple, certains compléments alimentaires se sont révélés contenir des principes actifs, comme la sibutramine, qui est inscrite sur la liste des substances vénéneuses. D’autres produits contenaient de la caféine à des concentrations beaucoup plus élevées que celles qui sont recommandées en France.

Devant ce constat, madame la secrétaire d’État, votre prédécesseur – Mme Roselyne Bachelot-Narquin – avait mis en place un groupe de travail chargé de réfléchir à un projet de « cyber-pharmacie » sur un portail qui pourrait être hébergé par l’Ordre national des pharmaciens et renverrait vers les sites des officines.

Plutôt que de chercher à bloquer un phénomène incontrôlable, il est sans doute plus efficace d’amener sur le marché une offre pharmaceutique en ligne qui serait sécurisée et encadrée. Une telle offre existe d’ailleurs depuis longtemps chez certains de nos voisins européens : en Allemagne, en Suisse ou encore en Belgique. Avec la télémédecine, lancée en octobre dernier, elle pourrait apporter une réponse intéressante aux difficultés d’accès aux soins.

Avez-vous repris cette réflexion, madame la secrétaire d’État ? Où en sont les travaux de ce groupe de travail ? Seuls les médicaments délivrés sans ordonnance et non remboursables seront-ils concernés ?

Quoi qu’il en soit, gardons à l’esprit qu’Internet ne remplacera pas la relation entre le malade et le médecin ou entre le patient et le pharmacien, seul gage de sécurité et de qualité des soins. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. Jacques Blanc. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, la Direction générale de la santé pilote bien, depuis le printemps 2010, un groupe de travail.

Je ne vais pas citer toutes les directions ministérielles qui y participent, mais ce groupe est largement fédérateur au sein des différentes instances de l’État et comprend également des représentants d’instances professionnelles, comme l’Ordre national des pharmaciens ou le syndicat des entreprises du médicament, le LEEM.

Sa mission est de déterminer le cadre juridique approprié pour permettre aux pharmaciens d’officine qui le souhaitent de créer des sites internet. Je vais vous en indiquer les axes de travail, qui tiennent compte du cadre européen

Premièrement, les sites internet de pharmacie doivent être le prolongement virtuel des officines physiques existantes, afin que les patients aient la garantie de s’adresser à des sites sécurisés, gérés par des professionnels compétents et intégrés dans la chaîne de distribution. En d’autres termes, seules les pharmacies seront autorisées à vendre en ligne des médicaments.

Deuxièmement, seuls les médicaments pour lesquels la prescription médicale est facultative pourront être commercialisés par le biais des sites internet de pharmacie. Seront donc exclus de ce marché les médicaments délivrés sur prescription médicale obligatoire.

Troisièmement, il faudra définir les conditions de création et de gestion de ces sites internet de pharmacie. Dans ce cadre, des déclarations aux différentes instances de gouvernance, par exemple, aux agences régionales de santé ou à l’Ordre national des pharmaciens, seront probablement prévues.

Quatrièmement, on pourra envisager la mise en place d’un portail internet géré par le Conseil national de l’ordre des pharmaciens, d’où les patients pourraient avoir accès aux différents sites internet de pharmacie.

Cinquièmement, des contrôles et des sanctions en cas de non-respect des règles sur les sites internet de pharmacie seront éventuellement mis en œuvre.

Sixièmement, toujours dans le cadre de ce groupe de travail, il faudra également réfléchir à l’adoption de règles relatives à la protection et à la confidentialité des données personnelles et de santé de l’internaute, qui viendront compléter l’exercice déontologique du pharmacien.

Septièmement, il faudra adapter les règles relatives à la publicité des médicaments et en faveur de l’officine au média internet, ainsi qu’aux règles du commerce électronique.

M. le président. Il faut conclure, madame la secrétaire d’État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Huitièmement, enfin, il faudra adopter un arrêté relatif aux bonnes pratiques sur l’élaboration d’un site internet de pharmacie.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour la réplique.

M. Gilbert Barbier. Je voudrais simplement, en complément, évoquer un autre problème existant dans notre pays : certains médecins prescrivent en trop grande quantité et, de ce fait, des médicaments sont remboursés par la sécurité sociale pour être ensuite revendus sur les sites internet. C’est un problème, madame la secrétaire, qu’il faudrait traiter de manière efficace dans les études que vous poursuivez.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour le groupe UMP.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je voudrais d’abord remercier la conférence des présidents d’avoir inscrit ce sujet à l’ordre du jour. Les médicaments ne sont effectivement pas des marchandises comme les autres, et la fraude met ici en jeu des vies humaines, puisque vendre un faux médicament à un malade, c’est l’empoisonner.

Je ne reviendrai pas sur les chiffres qui ont été évoqués par mes collègues. Je voudrais néanmoins rappeler qu’un médicament sur quatre utilisés dans les pays en voie de développement est faux et que 200 000 décès par an pourraient être évités si les médicaments prescrits contre le paludisme étaient conformes à la réglementation et susceptibles de traiter réellement la maladie.

On l’a dit, la France est relativement épargnée par ce phénomène. Elle ne l’est pas totalement, parce qu’il existe différentes formes de trafics : la quantité de principe actif du médicament peut être trop faible ou trop forte, celui-ci peut être inexistant, voire remplacé par une substance toxique. C’est ainsi, par exemple, que l’on a récemment assisté, dans un pays d’Afrique, à la mort d’une centaine de nourrissons qui avaient absorbé du faux sirop au paracétamol.

Comme l’a souligné Gilbert Barbier, la France n’est donc pas à l’abri de ce trafic, du fait du détournement et de la vente de médicaments à d’autres fins que thérapeutiques ou de l’augmentation de la vente de faux médicaments sur Internet.

Le Conseil de l’Europe a élaboré une convention intitulée « MEDICRIME », qui doit être signée en 2011 par les ministres des affaires étrangères de quarante-sept de ses États membres.

M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Madame la secrétaire d’État, je voudrais savoir si le Président de la République a l’intention de signer l’appel de Cotonou et si la France compte s’engager concrètement dans cette lutte, au travers d’un soutien financier – par exemple, à l’Agence française de développement – et d’une pénalisation de ce trafic. Enfin, ce sujet sera-t-il porté au sein du G8 présidé par la France ? (M. Gilbert Barbier applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour une réponse qui, je le rappelle, ne doit pas dépasser deux minutes. Je souhaiterais effectivement que M. Alain Milon, dernier intervenant inscrit, puisse poser sa question.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Madame Hermange, il est très difficile, aujourd’hui, d’évaluer les budgets alloués spécifiquement aux actions de lutte contre le trafic de médicaments, car la comptabilité des organismes concernés ne permet pas de les mettre en exergue. Néanmoins, la lutte contre le trafic de faux médicaments est bien évidemment une priorité pour les autorités sanitaires.

S’agissant de la convention MEDICRIME, l’appel de Cotonou a effectivement donné l’élan, car l’ensemble des pays ont été invités à rejoindre une démarche visant à élaborer de bonnes pratiques internationales, afin de protéger les personnes, notamment dans les pays en voie de développement, où les besoins sont criants mais l’offre est insuffisante.

Le Conseil de l’Europe a adopté cette convention le 9 décembre 2010. La France a participé à l’élaboration du texte et a soutenu l’objectif fixé. Cette convention, premier instrument international dans le domaine du droit pénal, fait obligation aux États parties d’ériger en infraction pénale la fabrication de médicaments contrefaits.

Je le répète, la convention sera ouverte à la signature dès 2011. Nous serons bien entendu mobilisés aux côtés des autres pays concernés. Cette initiative dépasse, d’ailleurs, le cadre européen, et l’on peut souligner la mobilisation du Canada, du Japon et d’Israël, présents en qualité d’observateurs.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour la réplique.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je serai très brève, pour laisser du temps à mon collègue Alain Milon, mais j’aurais souhaité que Mme la secrétaire d’État nous confirme que le Président de la République signera l’appel de Cotonou et que ce sujet sera bien porté au niveau du G8. (Applaudissements sur certaines travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour le groupe socialiste.

M. Ronan Kerdraon. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, un médicament n’est pas un produit comme un autre ; cela a été rappelé à l’instant et l’actualité récente, avec le Mediator, le prouve. Un médicament mal utilisé ou contrefait ne soigne pas, et ses effets secondaires peuvent provoquer une grave dégradation de la santé des patients, voire entraîner la mort.

La contrefaçon de médicaments est donc criminelle !

Cela a également été rappelé, le marché de la contrefaçon est très lucratif. Il représenterait environ 10 % du marché mondial du médicament et rapporterait aux trafiquants entre 50 milliards d’euros et 75 milliards d’euros par an.

Chacun d’entre nous doit mesurer qu’il s’agit là d’un fléau aussi grave que le trafic de drogues. Dans les pays pauvres, en particulier en Afrique, ce sont ainsi des centaines de milliers de femmes, d’hommes et d’enfants qui trouvent la mort alors qu’ils pensent se soigner.

Tous les experts le reconnaissent, c’est sur le « terreau » de la pauvreté que ce fléau prospère le mieux. L’Organisation mondiale des douanes a d’ailleurs qualifié ce trafic de « crime du XXIe siècle ».

En effet, ces médicaments contrefaits concernent le plus souvent des pathologies graves. Pire, ils peuvent contribuer à réduire à néant les efforts faits pour endiguer les grandes épidémies. Dès lors, se pose la question des moyens susceptibles d’endiguer de telles pratiques.

Il est impératif de déclarer la mobilisation générale des systèmes douaniers, des polices nationales, d’INTERPOL et de l’OMS.

Des solutions existent !

Il faut résoudre les problèmes de prévention, apporter des réponses répressives plus dissuasives, mais, surtout, il faut résoudre les problèmes financiers de l’accès aux médicaments essentiels.

Il est primordial de lutter contre le trafic de médicaments non pas parce que certains gros industriels y perdent de l’argent, mais parce que des gens en meurent !

M. Ronan Kerdraon. En cela, l’appel de Cotonou, lancé le 12 octobre 2009 et formalisé par la déclaration de Zanzibar, va dans le bon sens. Mais, après les intentions, il est temps de passer aux actes ! Cet appel doit trouver une application réelle et efficace.

Madame la secrétaire d’État, quelles sont les actions que la France entend initier avec les organisations internationales et l’ensemble des pays émergents ou en voie de développement pour contribuer à lutter efficacement contre ces activités criminelles ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous évoquez des points sur lesquels je suis déjà intervenue. Nous sommes tous d’accord s’agissant de la mobilisation de la France, pays leader dans la lutte contre les trafics, et assez exemplaire dans ce domaine.

Sur le plan international, un groupe a été créé en 2006 sous l’impulsion de l’OMS. Il s’agit de l’International Medical Products Anti-Counterfeiting Taskforce, IMPACT, qui rassemble les principaux acteurs concernés afin de promouvoir la collaboration et la coordination à l’échelle internationale, pour que soient mises au point et appliquées rapidement des politiques et des approches techniques nouvelles. IMPACT permet aussi un partenariat de choix entre les organisations internationales, les organisations non-gouvernementales, les organismes chargés du contrôle et de la répression, les représentants des industries pharmaceutiques, les autorités de régulation des secteurs pharmaceutiques ainsi que les associations des pays développés ou en voie de développement.

Depuis la création d’IMPACT, les participants partagent leur expertise, l’identification des problèmes, la recherche de solutions et la coordination des activités, afin que soit promue et renforcée la collaboration internationale.

La France a diligenté un envoyé spécial pour coordonner cette action aux échelons national et international. M. Thierry Le Lay est donc chargé de la lutte contre les médicaments falsifiés.

À l’échelon national, sa mission consiste à contribuer à l'élaboration des positions de la France en facilitant, le plus en amont possible, la coordination entre les ministères concernés.

M. le président. Il faut conclure, madame la secrétaire d’État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. À l’échelon international, il est notamment chargé de mobiliser notre réseau diplomatique afin de sensibiliser les dirigeants des pays concernés et de les amener à prendre la pleine mesure du fléau.

Tout cela va dans le sens de l’appel de Cotonou et de l’organisation de la mobilisation internationale.

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour la réplique.

M. Ronan Kerdraon. Je regrette que Mme la secrétaire d’État fasse dans sa réponse le même constat que nous, sans autre forme de proposition ou d’engagement.

M. Ronan Kerdraon. Ma collègue Marie-Thérèse Hermange évoquait notamment la signature de l’appel de Cotonou. Je n’ai pas entendu, dans cet hémicycle, de vrais engagements en la matière de la part du Gouvernement, et je le déplore.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour le groupe UMP.

Mme Catherine Procaccia. Madame la secrétaire d’État, mes collègues l’ont dit, du fait du développement d’Internet, tous les pays développés sont aujourd’hui concernés par la diffusion illégale de médicaments. Cette question ne concerne donc plus seulement des pays dans lesquels l’offre sanitaire est insuffisante.

La vente sans contrôle et sans ordonnance de médicaments est dangereuse en elle-même, mais elle l’est encore plus lorsqu’il s’agit, comme souvent, de médicaments contrefaits.

Une étude récente montre que près d’un Européen sur deux a d’ores et déjà acheté des médicaments sans ordonnance sur Internet, et que 62 % de ces médicaments seraient des contrefaçons contenant parfois des substances dangereuses. Il y a donc un réel risque sanitaire !

La France s’est dotée, depuis 2008, d’un plan d’action contre la cybercriminalité. En décembre 2009, le Gouvernement a annoncé la signature d’une charte de lutte contre la contrefaçon sur Internet. Cette charte implique notamment les entreprises du médicament, le LEEM et plusieurs laboratoires pharmaceutiques.

Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous dire si ces deux actions ont donné des premiers résultats ?

Je m'inquiète aussi de l'amélioration des normes relatives à la traçabilité du médicament. L'an passé, de pseudo-vaccins contre la grippe étaient vendus sur Internet. Aujourd’hui, nos messageries sont en permanence envahies de spams sur le Viagra.

Pouvez-vous nous préciser si le Gouvernement envisage de prendre des mesures pour améliorer la traçabilité de ces médicaments et pour sécuriser d’une part les voies logistiques d’approvisionnement et de distribution du médicament – le respect de la température, par exemple –, d’autre part, le produit lui-même ?

Enfin, j’ai découvert sur Internet, en préparant cette séance de questions cribles, l’existence d’une opération internationale intitulée PANGEA, qui a permis de démanteler dix-neuf sites internet illégaux en France, et cent soixante-quatre sites dans le monde. Je m’étonne que nous n’en ayons pas parlé davantage.

M. Jacky Le Menn. Tout à fait !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Je pense avoir évoqué tout à l’heure PANGEA III, madame la sénatrice. L’opération a impliqué plusieurs pays, sous l’égide d’INTERPOL et de l’OMS. Sont visés les sites internet revendant de façon illicite des médicaments ou des produits présentés comme tels.

Cette opération internationale annuelle a permis d’identifier cent soixante-quatre sites illégaux, dont dix-neuf sont rattachés à la France, grâce à l’intervention des services de police, de l’administration des douanes et des autorités compétentes en matière de médicaments. Elle a également reçu le concours des fournisseurs d’accès à Internet.

Onze sites ont été fermés du fait d’infractions caractérisées. Huit autres sites relèvent pour le moment de procédures judiciaires, et le secret de l’instruction ne me permet pas d’aller plus loin dans ma réponse.

La charte de lutte contre la contrefaçon sur Internet, quant à elle, a été signée en décembre 2009 sous l’égide de Mme la ministre chargée de l’économie, de l’industrie et de l’emploi. Les signataires de cette charte sont les plateformes de commerce électronique et les titulaires de droits de propriété industrielle, afin que soient protégés les consommateurs risquant d’être trompés. Les signataires s’engagent à informer les consommateurs, mais également les vendeurs, sur les catégories de produits les plus touchés par la contrefaçon.

L’un des objectifs est donc de porter une attention particulière au comportement du vendeur et aux informations qu’il fournira au consommateur.

Surtout, et c’est ce qui nous intéresse plus particulièrement aujourd’hui, cette charte comporte des engagements concernant spécifiquement les médicaments. Ainsi, les plateformes de commerce électronique signataires s’engagent à mettre en place des mesures pour détecter les offres portant sur des médicaments et empêcher leur mise en ligne.

M. le président. Veuillez conclure, madame la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Si une offre n’est pas détectée avant sa mise en ligne, les plateformes s’engagent à la retirer sans délai.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous ferai part des résultats du bilan de l’application de cette charte qui sera réalisé en juin 2011.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour la réplique.

Mme Catherine Procaccia. Je renonce à mon temps de parole au profit de mon collègue Alain Milon, monsieur le président.

M. le président. La parole est donc à M. Alain Milon, pour le groupe UMP.

M. Alain Milon. Madame la secrétaire d'État, en intervenant en huitième position, il m’est difficile de poser des questions véritablement nouvelles !

Je voudrais cependant insister sur le fait que la lutte contre le trafic des médicaments nécessite une triple coopération : d’abord interministérielle à l’échelon national, ensuite européenne, enfin, internationale.

Au niveau national, l’ensemble des autorités administratives compétentes doivent collaborer pour permettre l’échange d’informations nécessaire à une lutte plus efficace contre les activités illicites du secteur. Il serait intéressant que vous nous précisiez quelles ont été les actions entreprises pour développer cette collaboration.

Au niveau européen, une directive est en cours de discussion afin de modifier la législation pharmaceutique dans le souci de mieux lutter contre les médicaments falsifiés. Elle tend également à proposer l’introduction de dispositifs de sécurité. Pouvez-vous nous indiquer quel sera l’impact de cette directive ?

Au niveau international, des initiatives, que nous avons largement évoquées, ont été développées – je pense en particulier aux travaux de l’Organisation mondiale de la santé et de son groupe de travail IMPACT, créé en 2006. Vous serait-il possible, madame la secrétaire d'État, de nous informer des suites qui ont été données à ces travaux ?

Par ailleurs, pouvez-vous nous apporter des précisions sur le rôle qui sera joué par les autorités françaises dans la lutte contre ce fléau, en particulier en matière de prévention, et notamment dans le cadre de la signature de l’appel de Cotonou ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, l’une des avancées majeures de la directive que vous évoquez concerne le développement de dispositifs de sécurité obligatoires pour une certaine classe de médicaments. Rappelons que ces dispositions ne s’appliquent qu’aux médicaments à usage humain.

Cette proposition législative concerne le produit lui-même et a pour objectif de permettre aux professionnels du secteur d’identifier les médicaments falsifiés présents dans la chaîne d’approvisionnement, ce qui aboutit à une sécurisation de la distribution en gros et de la dispensation du médicament par les officines et les établissements de santé.

Le dispositif doit permettre l’identification de chaque unité de conditionnement par le biais d’un identifiant unique et la vérification tant de l’authenticité des médicaments que du caractère intact du conditionnement extérieur.

Pour ce qui est de la chaîne d’approvisionnement française, la vérification concernera les fabricants, les distributeurs en gros et les personnes autorisées à vendre des médicaments au public.

Cependant, les autorités sanitaires françaises ont pesé de tout leur poids pour que les particularités nationales de la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique soient prises en compte. Le champ d’application de la directive concernant ces dispositifs de sécurité est donc restreint aux médicaments soumis à prescription médicale obligatoire. De manière exceptionnelle, les médicaments à prescription facultative pourront bénéficier d’un tel dispositif de sécurité.

En outre, à la demande des autorités françaises, un État membre pourra étendre spécifiquement le champ d’application des dispositifs d’inviolabilité à d’autres médicaments, dans un objectif de protection des patients, ce qui permettra de faire bénéficier les médicaments en libre accès de ces dispositifs d’inviolabilité.

M. le président. Il faut conclure, madame la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Je voudrais terminer en rappelant un point important : la traçabilité est, en France, une exigence réglementaire qui s’applique à l’ensemble des médicaments, et ce depuis le 1er janvier 2011.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.

M. Alain Milon. Dans notre pays, la médecine curative a toujours pris le pas sur la médecine préventive. En l’espèce, la prévention doit prendre le pas sur le curatif : il faut prémunir les malades contre leur naïveté face à ce fléau.

M. le président. Madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques consacrées à l’important sujet du trafic des médicaments.

Avant d’aborder la suite de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures, sous la présidence de M. Guy Fischer.)