Mme Bariza Khiari. …. la retraite à 60 ans, en la repoussant à 62 ans et, par effet mécanique, à 67 ans, sans même vous poser la question de ce que cela implique comme souffrances supplémentaires pour nos concitoyens.

En conséquence, nous voterons contre l’article 33, qui fixe les conditions d’entrée en vigueur de plusieurs dispositions de ce projet de loi que nous jugeons iniques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. L’article 33 figurant sous le titre VI intitulé « Dispositions finales » fixe les dates d’entrée en vigueur de certains articles.

Nous avons eu un débat très intéressant sur la pénibilité. Mais je constate que, dès qu’il s’agit d’un droit pour les travailleurs, le dossier médical en santé au travail, celui-ci est rabaissé, rogné, avant même que le projet de loi ne soit voté. On ne pourra donc pas véritablement prendre en compte l’ensemble des travailleurs concernés.

Quant à l’alinéa 6 de l’article 33, il prévoit que l’article 30 est applicable aux indemnités journalières d’assurance maternité versées dans le cadre des congés de maternité débutant à compter du 1er janvier 2012. J’en ai parlé au moment du débat sur l’égalité professionnelle, de nombreuses femmes revendiquaient ce droit, celui de tenir compte des indemnités journalières versées dans le cadre d’un congé de maternité pour le calcul de la pension de retraite.

Certes, nous avons obtenu ce droit, qui était très attendu, mais de manière tout à fait discriminante, puisqu’il n’a absolument pas d’effet rétroactif. De plus, cette disposition ne s’appliquera qu’à partir du 1er janvier 2012. Toutes les mamans ne bénéficieront donc pas dès aujourd'hui de cette nouvelle mesure. Cela vous fait sourire, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mais je constate que le droit des travailleurs, en l’espèce celui des femmes, est, une fois encore, bafoué.

En revanche, l’alinéa 8 relatif à l’article 32 ter dont nous avons longuement débattu cet après-midi et qui concerne le transfert automatique d’une partie de la participation dans le PERCO, en cas de non-demande du salarié de bénéficier de tout ou partie des sommes qui lui sont attribuées au titre de sa participation, …

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il est applicable immédiatement !

Mme Annie David. … s’appliquera dès la promulgation de cette loi. Il faut dire que cette disposition vous intéressait beaucoup !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous êtes formidables !

Mme Annie David. Le groupe Malakoff Médéric…

M. Guy Fischer. Dirigé par Guillaume Sarkozy !

Mme Annie David. … et l’ensemble des cabinets de placement vous remercient, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État. Cette disposition, qui rapportera sans doute beaucoup d’argent, …

M. Guy Fischer. Aux sociétés d’assurance !

Mme Annie David. En effet !

M. Guy Fischer. Il y avait urgence !

Mme Annie David. … prendra effet dès la promulgation de la loi.

Mais les femmes, elles, ma foi, …

M. Guy Fischer. Elles peuvent attendre !

Mme Annie David. C’est déjà bien que l’on prenne en compte le congé maternité ! Mais ce sera dans pas mal d’années. Cette mesure ne vous coûtera rien tout de suite.

Quant aux droits des travailleurs et à la reconnaissance de la pénibilité, je n’en parle même pas !

Pour ce qui concerne l’alinéa 1 de l’article 33 relatif à l’article 3, c'est-à-dire le droit à l’information des assurés, il faudra là aussi attendre le 1er janvier 2012 pour qu’il entre en vigueur. Pourtant, il était souhaitable que les assurés puissent avoir, de manière régulière, une information sur leurs droits à retraite et un entretien personnalisé à partir de l’âge de 45 ans. Mais là encore, il faudra attendre pour que ce dispositif entre en application.

Vous le voyez bien, vous nous parlez de réforme juste et équitable. Mais, une fois encore, preuve est faite que vous prenez votre temps pour rendre applicables les mesures tendant à donner de nouveaux droits aux salariés, alors que vous vous empressez de les rendre applicables dès lors qu’il s’agit d’engraisser encore un peu plus le capital !

C’est pourquoi nous ne voterons pas cet article 33, qui comprend, comme l’a souligné notre collègue Bariza Khiari, des dispositions finales parfaitement iniques. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Demandez-vous pourquoi le peuple rejette votre réforme ! Posez-vous cette question ! Vous avez la réponse !

Mme la présidente. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.

Mme Christiane Demontès. C’est un fait, les Français rejettent majoritairement votre texte.

Votre conception du dialogue et de la concertation n’est pas la leur. Votre conception de l’équité les inquiète et, quant à celle que vous avez de la justice, ils la réprouvent.

Comment pourrait-il en être autrement quand vous faites peser sur les épaules des salariés plus de 90 % des efforts demandés et que vous épargnez les revenus du patrimoine ?

Vous parlez de la sauvegarde de notre régime par répartition, mais vous multipliez les dispositions qui vont dans le sens contraire. Votre réforme va entraîner une diminution du niveau de pension de nos concitoyens, au moins de certains de nos concitoyens. À terme, ce sont plusieurs centaines d’euros qui manqueront, chaque année, à ceux qui perçoivent un salaire modeste. Vous me direz que ce n’est pas beaucoup ! Mais c’est énorme pour les personnes qui ont des retraites modestes, et, dans ce pays, elles sont des millions !

M. Guy Fischer. Effectivement !

Mme Christiane Demontès. La situation que vous créez pour ceux qui sont privés d’emploi en fin de carrière est pire. Quel sort leur réservez-vous ? L’allongement de la période de précarité !

Quant à ceux qui ont des carrières hachées, aux jeunes qui éprouvent tant de difficultés à intégrer le monde de l’emploi, aux seniors qui se désespèrent de ne pouvoir mettre à disposition leurs acquis professionnels et leur expérience, ils ont été les grands absents de ce texte !

Il ne suffit pas de légiférer pour imposer le travail jusqu’à 62 ans, encore faut-il regarder la réalité de nos concitoyens en face et réorienter votre politique défaillante.

La réalité renvoie aussi à votre bilan et à sa mise en perspective. Nous l’avons dit, la crise ne peut servir d’unique prétexte à votre texte. Les comptes sociaux étaient dans une situation déficitaire bien avant la crise.

Vous ne pouvez pas non plus avancer la démographie comme argument, car rien n’a changé dans notre pays depuis 2003, notamment le taux de natalité.

En fait, vous devriez faire face au bilan de votre gestion caractérisée notamment par les 30 milliards d’exonérations de cotisations sociales annuelles, la multiplication du nombre des niches fiscales pour les personnes aisées, l’explosion du chômage et de la précarité, alliée à la perte de pouvoir d’achat, pour l’immense majorité.

Mais, comme vous n’assumez pas cette situation et que vous êtes contraints par les agences de notation, comme par votre déplorable logique comptable, vous exigez des Français qu’ils le fassent. C’est tout simplement détestable et très injuste !

Non contents de ce choix, vous imposez également au pays des mesures paramétriques qui dégraderont encore la situation. Non seulement vous effectuez un hold-up sur le Fonds de réserve pour les retraites, mais, en plus, vous allez faire porter le poids de votre texte sur l’UNEDIC. À charge pour les partenaires sociaux de trouver des solutions pour financer le coût occasionné par celles et ceux que mettez sciemment en situation de précarité dès 60 ans, et souvent, malheureusement, bien avant.

Enfin, comment ne pas parler de votre propension à créer toujours plus de dettes ? Tel est bien le but de l’allongement de la durée de vie de la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, et la commission mixte paritaire saisie de ce projet de loi organique s’est d’ailleurs réunie dans la journée. À charge pour les Français, notamment les générations à venir, de trouver des solutions ! Pour le moment, il semble que vous vous en laviez les mains, mais les fonds de pension seront là pour quelques-uns.

Face à cet incroyable montage financier, nous vous opposons la sanctuarisation du FRR, une répartition de l’effort mettant à contribution, de manière équitable, les revenus du patrimoine et ceux du travail. Nous voulons majorer les prélèvements sociaux sur les bonus et les stock-options, relever le « forfait social » appliqué à l’intéressement et à la participation, remettre en cause la défiscalisation des plus-values sur les cessions de filiales. Bref, nous voulons inscrire la justice fiscale et sociale là où vous instaurez l’iniquité et l’injustice.

M. Robert del Picchia. Votre temps de parole est épuisé !

Mme Christiane Demontès. Je n’ai pas terminé !

Votre projet de loi dégrade la vie de nos concitoyens. Non seulement le montant général des pensions servies va baisser, mais, en plus, vous pénalisez les plus faibles, bref toujours les mêmes.

Ne vous êtes-vous pas rendu compte que notre économie est terriblement marquée par l’inégalité salariale ? On pourrait être porté à le croire, tellement vous pénalisez les femmes de notre pays, celles qui ont les salaires les plus faibles, les emplois à temps partiel imposé. Faire œuvre de justice sociale aurait consisté à remédier à cette situation, et c’est ce que nous vous avons proposé.

Avec deux amendements, vous avez voulu nous faire croire que vous endossiez le costume de Robin des bois ! Ce rôle ne vous sied pas, …

Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Christiane Demontès. … vous le jouez d’ailleurs à l’envers, si je puis dire : vous pillez les pauvres et les modestes pour donner aux plus aisés !

Plusieurs sénateurs de l’UMP. Arrêtez ! Votre temps de parole est épuisé !

Mme Christiane Demontès. Chacun le sait, votre réforme est injuste, brutale et inefficace. Elle appelle d’autres réformes.

Pour notre part, nous entendons répondre au besoin de justice sociale de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. L’article 33 vise à fixer les dates d’application des dispositions prévues dans ce projet de loi, mais j’attire l’attention de ceux qui n’en seraient pas pleinement conscients sur le fait que les mesures d’âge prendront effet à compter du 1er juillet 2011.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le texte n’est pas encore voté !

M. David Assouline. De façon récurrente, vous n’avez cessé de vous référer, monsieur le ministre, mes chers collègues – même si vous le faites moins ! – aux exemples étrangers, voulant démontrer par là même que l’opposition ne regarde pas ce qui se fait ailleurs et vit dans un vase clos.

M. David Assouline. Permettez-moi, à mon tour, de revenir sur ces exemples.

Vous avez cité l’Allemagne et la Suède notamment.

M. Jean-Pierre Fourcade. Tout à fait !

M. Nicolas About. Le Liechtenstein ! (Sourires.)

M. David Assouline. Pour comprendre ce qui se passe en ce moment dans notre pays, l’ampleur du choc que représentent votre réforme et les raisons pour lesquelles vous avez perdu la bataille de l’opinion, remémorons-nous quelques dates et les temps forts de la réforme.

M. Alain Fouché. Vous n’en savez rien !

M. David Assouline. En février, le Gouvernement annonçait qu’il allait faire une réforme, sans plus, n’ayant pas arrêté ses choix. Il faut dire que le Président de la République s’était engagé devant le pays, comme candidat, à ne pas toucher à l’âge légal de la retraite, et il l’avait répété après son élection.

M. Jean-Pierre Raffarin. C’est faux !

Mme Christiane Demontès. Non, c’est juste, monsieur Raffarin !

M. David Assouline. Nos concitoyens en étaient donc restés là.

Ensuite, les syndicats l’ont dit, il n’y a eu aucune négociation réelle.

M. Jean-Pierre Raffarin. C’est faux !

M. David Assouline. Mais non, ce sont ces mêmes syndicats qui ont reconnu que des négociations avaient bien eu lieu avec des gouvernements de droite, notamment sur la loi Fillon en 2003. Or là, ils disent : rien de tel !

Le Gouvernement a mis sur la table ses propositions dans les mois suivants.

M. Jean-Pierre Raffarin. C’est faux d’un bout à l’autre !

M. David Assouline. Et en juin, nos concitoyens ont enfin appris que l’âge légal de la retraite allait passer de 60 ans à 62 ans et celui de la retraite à taux plein de 62 ans à 67 ans.

M. Éric Woerth, ministre. On en a parlé avant !

M. David Assouline. Ensuite, est venue la période estivale durant laquelle partent en vacances ceux qui le peuvent ! D’ailleurs, beaucoup de Français n’ont pu partir cet été à cause de la crise ; un sur deux d’après les estimations. Et à la rentrée, en septembre, six mois à peine après, dont deux mois de vacances, a été présenté dare-dare un texte à l’Assemblée nationale.

Mais, mes chers collègues, ce processus a duré dix ans en Suède !

M. Nicolas About. Oui, mais avec une opposition constructive, qui a le sens des responsabilités !

M. Gérard Longuet. Cela fait trente ans qu’on en parle !

M. David Assouline. Et, durant ces dix ans, le gouvernement a négocié avec les syndicats.

Par ailleurs, vous avez cité l’exemple de l’Allemagne.

M. Nicolas About. C’est le même cas de figure : l’opposition est constructive !

M. David Assouline. La durée de cotisation n’a rien à voir puisqu’elle est en moyenne de trente-cinq ans.

M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. Avec une décote !

M. David Assouline. Mais ce que vous ne dites pas, c’est que le dispositif s’appliquera en 2027 ! Mes chers collègues, 2027, ce n’est pas le 1er juillet 2011 !

Cette brutalité d’application s’ajoute à la brutalité de l’injustice de votre réforme, et ce cocktail-là fait que la majorité des Français n’acceptent ni l’injustice, ni votre façon de gouverner, qui devient insupportable ! C’est pour cela que vous avez perdu la bataille de l’opinion ! (Protestations sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Jean-Patrick Courtois. Ce n’est pas vrai !

M. David Assouline. Nous ne pouvons donc que nous opposer à cet article instaurant des délais d’application d’une brutalité extrême, véritable concentré de votre méthode et de votre réforme ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Raffarin. Ça suffit, monsieur Assouline ! La bataille de l’opinion, vous ne l’avez pas gagnée ! La seule bataille de l’opinion qui compte, c’est celle des élections. Aujourd’hui, c’est cette majorité qui est légitime ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Vous vous vantez d’avoir gagné 2012,…

M. David Assouline. Je ne dis pas ça !

M. Jean-Pierre Raffarin. … mais ce n’est pas encore fait ! Nous, nous ferons en sorte que les Français comprennent.

M. Balladur, en 1993, a eu, quant à lui, le courage d’informer les Français sur la réalité de la situation ; M. Juppé, en 1995, l’a fait lui aussi ; je l’ai fait moi-même, en 2003, avec l’accord de la CFDT. Il y a longtemps que les Français sont informés !

Nous voyons bien la situation : il y a de plus en plus de cotisants…

Mme Nicole Bricq. Mais non, c’est le contraire ! Il y en a de moins en moins ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jean-Pierre Raffarin. … mais ils n’arrivent pas à financer parce qu’il y a encore plus de retraités ! C’est parce qu’il y a plus de retraités que de cotisants qu’il faut faire ces réformes !

Nous avons informé les Français avec Alain Juppé, nous avons informé les Français avec Édouard Balladur, nous avons informé les Français avec François Fillon : aujourd’hui, les Français connaissent la réalité ! Alors, vous pouvez essayer de nous faire perdre du temps ici, en espérant que la rue le rattrapera ; mais la démocratie, elle est ici ! (M. le rapporteur applaudit.)

Nous sommes fiers, dans la majorité, d’être rassemblés aujourd’hui pour dire la vérité aux Français. Or la vérité, c’est que sans travail, il n’y a pas d’avenir, que sans efforts, il n’y a pas de progrès et qu’aujourd’hui, nous devons nous rassembler pour l’avenir du pays, et certainement pas le diviser.

J’ai écouté M. Mauroy tout à l’heure. Je comprends ce qu’il peut penser, lui qui fut à l’origine, à un moment différent de notre histoire, de ce qui était, pour lui, un acte historique ; mais, depuis ce temps-là, nous avons tous mesuré que la France n’avait pas d’avenir sans effort des Français ! (Vifs applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste. – De nombreux sénateurs de l’UMP se lèvent pour applaudir.)

Mme Annie David. Vous enfoncez les plus pauvres !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le Premier ministre, avec tout le respect que nous vous devons et que je vous dois, ce que nous vous reprochons, ce n’est pas ce que vous dites, mais ce que vous ne dites pas aux Français ! (Sourires ironiques sur les travées de lUMP.)

Ce que vous ne dites pas, c’est que la situation dans laquelle nous sommes – et serons encore demain – est le produit d’une politique qui fait fi des problèmes de l’emploi ! Vous pourrez faire toutes les réformes que vous voulez, si vous ne réformez pas votre politique économique, nous allons dans le mur, et nous y resterons ! (Vives protestations sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Alors, mettez tout sur la table ! Parlez-nous d’une politique économique qui nous permettra de faire face à l’avenir !

M. Jean-Patrick Courtois. Et les 35 heures ?

M. Pierre-Yves Collombat. Parlez-nous d’une politique fiscale qui nous permettra d’équilibrer vraiment les régimes et de ne pas faire peser le financement seulement sur les cotisations ! Parlez-nous de tout cela, mettez tout cela sur la table ! Alors, effectivement, nous pourrons discuter.

Mais vous ne nous parlez que de l’allongement de la durée de cotisation. Or vous savez très bien que ceux que vous voulez garder au travail ne pourront pas travailler. Oui, vous le savez très bien ! Finalement, ce que vous visez, bien que vous prétendiez le contraire, ce n’est pas l’allongement de la durée effective du travail – parce que cela ne sera pas possible sans changement de politique – mais bien une réduction du niveau des pensions qui seront effectivement perçues !

M. Nicolas About. Ça, c’est Aubry !

M. Pierre-Yves Collombat. Encore une fois, une politique des retraites qui ne tient pas compte de la politique économique, c’est du vent ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le Premier ministre, nous sommes un peu surpris par la tonicité – je dirais même, l’agressivité – de votre intervention (Protestations sur les travées de lUMP et de l’Union centriste.).

Nous avons bien compris que votre discours était exclusivement à usage interne, qu’il s’agissait de galvaniser les troupes qui, en fin de discussion, expriment par leur passivité à la fois leur lassitude et le peu de crédibilité qu’elles accordent aux propositions faites par le Gouvernement. (Mêmes mouvements.)

M. Jean-Pierre Raffarin. Il faut dire que la répétition sans fin de vos interventions engendre plutôt l’ennui et n’incite pas à la présence.

M. Jean-Jacques Mirassou. Si vous voulez remonter le temps, monsieur le Premier ministre, alors il faut dire quelle était la situation de l’emploi il y a dix ans ! Ce qui n’a pas été assez dit ici, en tout cas pas assez fort, c’est que, quand il y a des problèmes sur les retraites, c’est par manque de cotisants ; et quand on manque de cotisants, c’est le signe flagrant que le chômage progresse !

M. Jean-Pierre Raffarin. Et la démographie, monsieur ?

M. Jean-Jacques Mirassou. Vous ne pourrez pas, même pas vous, vous exonérer de vos responsabilités en la matière !

Votre propos témoignait d’ailleurs de votre absence tout au long de ce débat, parce que, si vous aviez été présent dans les rangs de votre majorité, vous vous seriez rendu compte que ni les socialistes ni la gauche n’ont nié la nécessité de mettre en place une réforme des retraites. (Nouvelles protestations sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Simplement, nous avions la prétention de penser qu’on pouvait dépasser assez facilement les critères démographiques et statistiques pour inscrire le travail du Sénat dans une réforme à portée sociétale, qui puisse tenir compte de cette constatation-là, mais aussi des principes fondamentaux du CNR dont, par ailleurs, certains d’entre vous ont revendiqué la paternité avec un peu trop de facilité.

En fin de parcours, venir de la sorte nous donner des leçons, c’est un peu juste. En tout état de cause, la démonstration a été faite dans les rangs de la gauche que les arguments que nous avons essayé d’établir par rapport à la pénibilité, au report à 62 ans de l’âge légal de départ à la retraite et au report à 67 ans de l’âge du départ à taux plein, auraient pu trouver un commencement de début de résolution s’il y avait eu la volonté politique d’avoir un débat, que vous revendiquez aujourd’hui, mais que votre majorité n’a jamais consenti à instaurer dans les rangs du Sénat ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le Premier ministre, nous sommes très honorés de votre présence dans ce débat…

M. Jean-Pierre Raffarin. Mais c’est pour vous, madame ! (Rires.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Merci, je n’en doutais pas ! Mais permettez-moi cependant de vous dire, avec tout le respect que je vous dois, comme tout le monde…

M. Jean-Pierre Raffarin. Respect réciproque, madame ! (Nouveaux sourires.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … permettez-moi donc de vous dire que ce que nos concitoyens ne supportent pas, ne supportent plus en tout cas, c’est que vous demandiez toujours aux mêmes, et à eux exclusivement, les efforts dont vous parlez ; je veux parler des salariés les plus modestes.

Alors qu’à l’inverse, pour les bénéficiaires de niches fiscales, de stock-options, de retraites chapeaux, de bouclier fiscal,…

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Et c’est reparti !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … pour ceux-là, pas d’efforts ! Au contraire, que des privilèges, que des sourires, que des avantages !

Ce n’est pas cela, demander un effort au pays ! L’effort, nos concitoyens savent quand il faut le faire ; mais ils le font quand il est juste et quand, en plus, ils considèrent que ce sera pour le bénéfice de tous. Or, ce n’est pas le cas ! La réforme des retraites proposée par le Gouvernement sera supportée exclusivement par les salariés.

Et que fera-t-on en 2018, comme le régime sera encore en déficit ? On leur imposera un changement de régime de retraite et la retraite par capitalisation. (Protestations sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Nicolas About. Pas du tout !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà ce qui est visé ! Et cela, vous n’avez même pas le courage de le dire ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. Nicolas About. Il ne suffit pas de l’asséner pour que ça devienne vrai !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Caffet. Madame la présidente, je serai relativement bref car l’heure commence à devenir tardive.

Je me réjouis des propos que nous venons d’entendre dans la bouche du Premier ministre Raffarin, qui, à la fin de son intervention, a essayé de démontrer que Pierre Mauroy était l’homme du passé (Protestations sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Jean-Pierre Raffarin. Je n’ai jamais dit cela, c’est une caricature !

M. Jean-Pierre Caffet. Je ne vous dirai pas, monsieur Raffarin, que vous êtes l’homme du passif ! (Exclamations indignées sur les mêmes travées.)

Un sénateur de l’UMP. Et voilà, ça revient encore une fois !

M. Jean-Pierre Caffet. Mais vous savez comment ce débat s’est terminé autrefois…

M. Jean-Pierre Raffarin. Ayez autant de respect pour M. Mauroy que moi !

M. Jean-Pierre Caffet. Eh oui, monsieur Raffarin ! Souvenez-vous de l’homme du passif ! (Mêmes mouvements.)

M. Jean-Pierre Raffarin. M. Mauroy ne parlerait pas sur ce ton !

M. Jean-Pierre Caffet. À l’heure actuelle, c’est ce débat que nous avons !

Et savez-vous pourquoi, monsieur Raffarin ? Parce que quand vous nous dites qu’il n’y a pas de progrès social sans effort des Français, je vous réponds, monsieur le Premier ministre, que c’est toujours les mêmes qui passent à la caisse depuis des années ! (Ça suffit ! sur les travées de l’UMP.)

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Du calme !

M. Jean-Pierre Caffet. Mais oui, je suis calme ! Ne vous inquiétez pas, monsieur Tron ! Je sais me maîtriser, contrairement à certains ! (Rires ironiques sur les travées de lUMP.)

C’est toujours les mêmes qui passent à la caisse, monsieur Raffarin ! (M. Gérard Longuet s’exclame.) Vous le savez aussi bien que moi : cette réforme des retraites est financée à 85 %, sinon plus, par les salariés ! C’est toujours aux mêmes que vous demandez des efforts !

Monsieur Raffarin, je vous ai connu, sur ces bancs, beaucoup plus attentif aux propos que nous tenions…

M. Jean-Pierre Raffarin. Ah ! Je vous aime mieux comme ça !

M. Jean-Pierre Caffet. … oui, je me souviens très bien de débats où je vous ai senti beaucoup plus attentif à certains de nos arguments ! Et je suis extrêmement surpris ce soir de vous voir épouser une réforme qui est, en vérité, le symbole de l’injustice. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Raffarin. Ma patience a des limites !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Permettez-moi un mot, en cette fin de débat sur l’article 33.

Tout à l’heure, monsieur Assouline, je vous ai entendu indiquer un certain nombre de choses. Vous disiez : « Vous êtes allés trop vite, vous n’avez pas consulté, vous n’avez pas concerté, vous n’avez pas négocié… » Bref, vous nous accusiez de passer en force. Voilà ce que vous dites depuis je ne sais pas combien de dizaines d’heures, et vous vous répétez beaucoup !

M. Jean-Jacques Mirassou. Mais oui, parce que c’est la vérité !

M. Éric Woerth, ministre. Or, la réalité est tout autre. Premièrement, je tiens à rappeler que cette majorité a déjà réalisé un certain nombre de réformes des retraites. Nous avons fait celle de 1993 ; celle de Jean-Pierre Raffarin, en 2003 ; nous avons fait la réforme de 2007, celle des régimes spéciaux ; et nous faisons aujourd’hui une autre réforme.

M. Marc Daunis. C’est donc que les précédentes étaient mal faites !

M. Jean-Marc Todeschini. Des essais, rien que des essais !

M. Éric Woerth, ministre. Évidemment, en matière de réforme des retraites, votre expérience est nettement plus limitée, c’est le moins qu’on puisse dire ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Deuxièmement, en ce qui concerne cette réforme, ce n’est pas du tout comme vous dites, monsieur Assouline ; il ne s’agit pas d’une réforme que nous aurions élaborée dans notre coin, sans jamais interroger qui que ce soit ! (Mêmes mouvements.)