M. le président. Le Sénat a entamé hier l’examen de l’amendement n° 218 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. J’indique que la commission a estimé devoir préciser et, en quelque sorte, adoucir la rédaction de cet amendement.

M. le président. Je suis en effet saisi d’un amendement n° 218 rectifié bis, présenté par MM. Arthuis et Marini, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :

Alinéa 7

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Y sont également ajoutés les États ou territoires qui ont signé avec  la France une convention d'assistance administrative permettant l'échange de tout renseignement nécessaire à l'application de la législation fiscale des parties et qui ont pris la décision de suspendre sa ratification, de ne pas la ratifier ou de ne pas l'appliquer.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général de la commission des finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit de la liste des États et territoires non coopératifs : « Y sont également ajoutés les États ou territoires qui ont signé avec la France une convention d’assistance administrative permettant l’échange de tout renseignement nécessaire à l’application de la législation fiscale des parties et ...» – c’est sur ce point que porte la modification – « ...qui ont pris la décision de suspendre sa ratification, de ne pas la ratifier ou de ne pas l'appliquer. »

M. le président. Je rappelle, pour la clarté des débats, les termes du sous-amendement n° 229, présenté par M. Charasse, et ainsi libellé :

Amendement n° 218 rectifié.

Alinéa 3

Après le mot :

qui

rédiger comme suit la fin de cet alinéa :

ne respectent pas l'obligation de réciprocité prévue à l'article 55 de la Constitution

Monsieur le rapporteur général, compte tenu de la rectification que vous venez de présenter, quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 229 ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Défavorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 218 rectifié bis et sur le sous-amendement n° 229 ?

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État. Je ne suis pas favorable à cet amendement, je l’ai déjà indiqué au président de la commission et au rapporteur général.

Nous avons déjà eu cette conversation hier. Certes, on peut jouer sur les mots et trouver des formulations comme celle que vous proposez, monsieur le rapporteur général.

Je rappelle cependant qu’un État qui, au bout d’un an, n’a pas répondu à la demande de la France en vue de la signature d’une convention d’échanges fiscaux, entre dans la liste des États qui subissent les sanctions visant les paradis fiscaux.

Nous avons aujourd’hui dans le texte un dispositif qui permet de ne pas laisser perdurer une situation dont la France ne voudrait pas.

Cet amendement, je le sais, part d’une bonne intention : il s’agit de montrer l’engagement du Sénat dans la lutte contre les paradis fiscaux, lutte ô combien difficile, où l’on vous demande sans cesse de vous expliquer, où vous vous retrouvez systématiquement sur le banc des accusés, alors que vous luttez contre le vol.

Le procédé est assez classique, d’ailleurs, dans les pièces de théâtre ou au cinéma, mais, dans la réalité, il est incroyable que l’on en vienne à se demander si ce n’est pas le fraudé qui est le fraudeur. C’est tout à fait étonnant, mais il faut le prendre avec un certain détachement, et une bonne dose d’humour, aussi...

Il s’agit ici de nos relations internationales, en l’occurrence nos relations avec l’État suisse, qui font aujourd’hui l’actualité, mais ce pourra être aussi le cas, à un autre moment, de nos relations avec d’autres États ; je ne veux donc pas jeter d’huile sur le feu. C’est vraiment ma conviction profonde et je vous demande de me croire, car je pense avoir une certaine crédibilité dans ce domaine.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il ne faut pas adopter cet amendement, le texte en l’état suffit. Votre plaidoyer a été entendu, c’est le moins que l’on puisse dire puisqu’il a été très fort, plus fort que celui de l’Assemblée nationale.

Je vous le demande, restons-en là.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il sait nous caresser dans le bon sens ! (Sourires.)

M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le président, je sollicite une suspension de séance de quelques minutes.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le ministre, comme vous l’aurez observé, le Sénat tout entier, et pas seulement la commission des finances, est particulièrement attentif à toutes les démarches et procédures qui ont été lancées en matière d’entraide fiscale internationale.

Il y a, à la vérité, différentes considérations à évoquer : les suites du G20, certes, mais aussi la nécessité d’encourager et de motiver les équipes chargées du contrôle fiscal et de satisfaire les grandes exigences de l’opinion publique, légitimes dans la conjoncture économique que nous connaissons.

Le Parlement reflète cet état d’esprit et il doit, me semble-t-il, appuyer les efforts que vous accomplissez, dans des conditions ingrates, pour obtenir les meilleurs résultats possibles. Nous avons pu constater que vous étiez injustement critiqué dans votre action, parfois par ceux qui devraient au contraire veiller à tout faire pour créer un climat d’unité, et même – j’oserai le dire – d’unité nationale autour de ces efforts.

C’est dans ce contexte que nous sommes saisis, par le Gouvernement, des dispositions relatives aux paradis juridiques et fiscaux, dont nous n’avons peut-être pas suffisamment souligné l’importance. En effet, si la procédure de discussion des textes accorde une place essentielle aux propositions des sénateurs, il ne faudrait pas que l’arbre, en l’occurrence les amendements, cache la forêt, c'est-à-dire ici le dispositif juridique porté par le présent article 14.

Cet article se fonde sur une méthode évolutive. Il s'agit en quelque sorte d’un compteur, qui affiche au départ un niveau modeste, car il est étalonné sur la légalité financière internationale, sur les relations d’État à État et sur les normes établies par l’OCDE.

Ce compteur affichera pour 2010 une liste modeste d’États et de territoires non coopératifs. Toutefois, il est construit pour évoluer : en quelque sorte, son aiguille se déplacera en fonction des progrès des uns et de la manière dont les autres tiendront ou non leurs engagements, car c’est bien la notion de parole qui est ici essentielle.

Signer des conventions d’assistance administrative, c’est bien ; les ratifier c’est mieux, mais les appliquer, c’est bien mieux encore ! Le compteur a justement pour objet de marquer la gradation entre ceux qui ne signent pas, ceux qui le font mais ne se pressent pas d’honorer leur engagement, ceux qui ratifient mais n’appliquent pas les textes, et enfin ceux qui les mettent en œuvre plus ou moins bien.

Nous disposerons d’un outil grâce auquel le Parlement sera associé à ce processus et suivra son évolution, sinon quotidiennement, du moins chaque mois, en fonction des événements et de l’actualité.

Monsieur le ministre, vous êtes à la manœuvre, et nous ne vous envions pas nécessairement (Sourires), car il y a bien sûr de nombreux coups à prendre, entre ceux qui trouvent que vous en faites trop, ceux qui estiment que vous n’en faites pas assez, ceux qui considèrent que vous êtes dans le droit et tous les avocats qui rêvent de trouver les moyens les plus efficaces pour contrecarrer les initiatives que vous prenez.

Il me semble que le Sénat, ou du moins la commission des finances, a bien mis l’accent jusqu’ici sur la priorité qui s’attache à progresser dans le sens de la moralité fiscale internationale.

S’agissant de la Suisse, ceux d’entre nous qui connaissent quelque peu ce pays savent qu’il est passionnément attaché à son indépendance, ce qui est normal, et nous ne pouvons que le respecter.

Si un débat doit avoir lieu avec la Suisse, il sera mené entre les gouvernements, et le Parlement, nécessairement en retrait de ces discussions, aura pour rôle, en quelque sorte, d’acter les résultats. Si les démarches en cours se révélaient décevantes dans les prochains mois, nous pourrions prendre des initiatives utiles lors du rendez-vous qui se tiendra exactement dans un an, c'est-à-dire lors de l’élaboration de la loi de finances pour 2011, en fonction de ce qu’affichera en quelque sorte le compteur.

Que nos partenaires sachent que nous sommes très attentifs à ces questions et faisons entièrement confiance au Gouvernement ; il reviendra à ce dernier de faire en sorte que la moralité fiscale progresse et que les droits de la France tout comme les décisions du G20 et de l’OCDE soient pleinement respectés.

Là est l’essentiel, me semble-t-il, et si, en cet instant, l’amendement de la commission des finances va être retiré, bien qu’il soit très correctement rédigé, ce n’est certainement pas de notre part une manifestation de laxisme. Tout au contraire, il s'agit d’une preuve de notre vigilance, et nous l’exercerons au long des semaines et des mois qui viennent, en lien étroit avec vous, monsieur le ministre.

Vous indiquiez au président de la commission des finances – peut-être nous le confirmerez-vous –, qu’il ne serait pas impossible, quand vous serez auditionné par notre commission, par exemple à la fin du mois de janvier, car nous aurons alors de nouveaux rendez-vous avec vous, que vous nous apportiez des éléments supplémentaires sur les échanges d’informations fiscales, avec la Suisse, certes, mais sans doute aussi avec d’autres États.

Ainsi serons-nous associés à vos efforts et, le cas échéant, aux difficultés que vous rencontrerez et que nous pourrons vivre avec vous, pour vous apporter tout notre soutien.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, une fois encore, je veux exprimer tout le soutien que nous entendons vous apporter dans le combat que vous avez engagé contre les paradis fiscaux et contre la fraude.

Nous avons tenté de vous apporter un appui supplémentaire à travers un amendement que la commission des finances a approuvé hier midi, et dont vous aurez observé que la rédaction initiale avait été progressivement corrigée.

Nous avons d'abord gommé les dates, puisque cet amendement visait l’inscription de la Suisse sur la liste noire au 1er janvier 2010. Nous avons compris que cette disposition était peut-être un peu brutale et qu’elle ne constituait pas le meilleur moyen de vous aider et d’appuyer le Gouvernement dans une démarche de nature assez diplomatique…

Ensuite, nous avons de nouveau rectifié cet amendement, en substituant à « l’intention de suspendre le processus de ratification » la « décision de suspendre la ratification ». À ce moment, au fond, nous étions dans le domaine du symbole. La portée juridique de notre proposition était plus que marginale : c’était une façon pour le Parlement de souligner combien il était solidaire d’un ministre aussi opiniâtre et aussi franchement volontaire que vous.

Monsieur le ministre, c’est vous qui êtes en effet à la manœuvre, et vous ne vivez pas nécessairement comme un atout supplémentaire la contribution que nous vous proposons, ce que nous comprenons.

Je me résigne donc, mais qu’il soit clair que notre vigilance sera sans faille.

Nous avons bien compris que le texte que vous soumettez à notre délibération est assez rigoureux, puisqu’un pays dont le processus de ratification serait suspendu et n’aboutirait pas au 31 décembre 2010 serait ipso facto inscrit sur la liste noire. C’est ainsi qu’il faut concevoir l’application du texte que le Sénat votera sans doute dans quelques minutes.

Monsieur le ministre, nous avons été très impressionnés cet été par la floraison de signatures de conventions à laquelle nous avons assisté. Ce que nous voulons, comme je le rappelais hier, c’est traquer l’hypocrisie et les jeux de dupes.

Il semble que certains espaces non coopératifs – vos services nous aideront peut-être à les identifier – aient signé entre eux des conventions de coopération, ce qui est très prometteur… (Sourires.) Ce bal des hypocrites - supposés hypocrites - doit être rapidement dénoncé !

Fort de vos engagements, et attentif aux souhaits que vous exprimez, je me suis donc résolu, dans un esprit de sagesse, à retirer cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 218 rectifié bis est retiré.

En conséquence, le sous-amendement n° 229 n’a plus d’objet.

La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous remercier d’avoir bien voulu retirer cet amendement.

Je pense que nous visons les mêmes objectifs, même si nous pouvons diverger par la suite sur la manière d’imaginer, d’adopter ou de rédiger certaines mesures. Mon intuition est que le texte que nous vous présentons aujourd'hui suffit à mettre en œuvre les conventions que la France a signées avec de nombreux États durant l’été et l’automne derniers, et, sur ce point, je partage tout à fait votre souci.

Note véritable défi, c’est de faire en sorte que ces conventions soient réellement appliquées, c'est-à-dire que l’échange d’informations entre les États ait lieu dans le cadre des normes et des règles internationales ; c’est là un point crucial. Nous nous assurerons que tel est bien le cas. D'ailleurs, des règles de vérification ont été élaborées par les États de l’OCDE. C’est cette phase de contrôle qui va aujourd'hui s’ouvrir.

Je suis comptable devant les Français, en tant que ministre chargé du budget, de la réussite de ce processus. Il est de ma responsabilité de faire en sorte que les règles qui sont édictées au plus haut niveau soient appliquées sur le terrain, afin tout simplement que nous évitions, limitions et combattions les actions frauduleuses qui sont dirigées contre les Français.

Et il faut, pour cela, faire preuve d’une grande opiniâtreté ; il est nécessaire de descendre dans l’arène et de disposer d’un soutien politique. Je suis donc très sensible au soutien que le Sénat m’apporte, ainsi qu’au Gouvernement tout entier, dans ce travail de lutte contre la fraude.

Dans les semaines et les mois qui viennent, je serai vigilant sur la réalité des progrès accomplis, et, bien sûr, je me présenterai avec plaisir devant la commission des finances pour rendre compte régulièrement de l’évolution de la situation.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il ne faut pas inverser les rôles. Il est tout de même extraordinaire que l’État qui lutte contre la fraude soit considéré comme un agresseur.

Je remercie le Sénat d’avoir rétabli l’ordre des valeurs.

Je suis le ministre du budget de la France. Ce qui m’intéresse, c’est la fraude réalisée par les Français, qui relève de l’État français, selon les règles de droit français. Tel est exactement le sens de mon action, et je ne vois pas comment on pourrait faire un péché de la lutte contre ceux qui fraudent et qui, ce faisant, nuisent directement aux intérêts de notre pays.

Il faut garder la tête froide et appréhender la situation objectivement : comme tout État de droit, la France lutte contre la fraude avec opiniâtreté, avec des armes et des instruments juridiques que ce texte renforce. Je dispose dans cette lutte d’un appui politique très fort, celui du Président de la République et du Premier ministre, et le vôtre, mesdames, messieurs les sénateurs, dont je vous remercie encore.

Je conclus par un petit message publicitaire. (Sourires.) L’ensemble des Français doivent régulariser leur situation d’ici au 31 décembre prochain et signaler tout compte ouvert à l’étranger. Un service de régularisation très compétent a été mis en place à cette fin. Il faut toujours offrir une solution. C’est celle que nous proposons à ceux de nos compatriotes qui, pour une raison ou pour une autre, se trouveraient dans ce cas.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 207 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 32

Compléter cet alinéa par les mots :

, sauf si le débiteur démontre que les opérations auxquelles correspondent ces revenus et produits ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de ces revenus et produits dans un État ou territoire non coopératif

II. – Alinéa 35

Remplacer les mots :

avant le 1er janvier 2010 et non renouvelés à compter de cette date

par les mots :

avant le 1er mars 2010 et dont la date d'échéance n'est pas prorogée à compter de cette date, ainsi que les emprunts conclus à compter du 1er mars 2010 mais assimilables à un emprunt conclu avant cette date

III. – Alinéa 64

Supprimer cet alinéa.

IV. – Alinéas 65 à 67

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

...° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Toutefois, les intérêts, arrérages et autres produits des obligations, créances, dépôts et cautionnements, à l'exception de ceux dus au titre d'emprunts conclus avant le 1er mars 2010 ou conclus à compter de cette date mais assimilables à ces derniers, ainsi que les redevances de cession ou concession de licences d'exploitation, de brevets d'invention, de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication et autres droits analogues ou les rémunérations de services, payés ou dus par une personne physique ou morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui sont domiciliées ou établies dans un État ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A, ne sont pas admis comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt.

« Les dispositions du troisième alinéa s'appliquent, sauf si le débiteur apporte la preuve mentionnée au premier alinéa et démontre que les opérations auxquelles correspondent les dépenses ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de ces dépenses dans un État ou territoire non coopératif. » ;

...° Au dernier alinéa, les mots : « les dispositions du premier alinéa » sont remplacés par les mots : « les dispositions des premier et troisième alinéas » et les mots : « visés au même alinéa » sont remplacés par les mots : « visés, respectivement, aux premier et troisième alinéas » ;

V. – Alinéa 115

Supprimer cet alinéa.

VI. – Alinéa 117

Remplacer les références :

D, J, K, N bis, N ter, N quater et P du I

par les références :

D, F, G, H, J, K, L, N bis, N ter, N quater et P du I et le III

La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement a souhaité que soient adoptées un certain nombre de mesures à l’encontre des États et territoires qui ne sont pas coopératifs ; elles ont été votées par l’Assemblée nationale.

Or il est apparu que les dispositions en cours de discussion relatives au traitement des intérêts soulevaient certaines difficultés d’ordre technique ou pourraient porter préjudice au financement d’activités économiques réelles. Telle n’est pas l’intention du Gouvernement, qui entend gêner les autres activités économiques, celles qui ne sont pas réelles.

Cet amendement vise donc à tenir compte des observations ainsi recueillies, afin de cibler les mesures sur les opérations financières véritablement contestables, qui témoignent d’une intention d’évasion fiscale. À cet effet, l’amendement tend à introduire pour la retenue à la source perçue sur les intérêts, soit une retenue à la source de 50 %, une clause de sauvegarde analogue à celle qui figure déjà dans le texte relatif à la déductibilité des charges.

Afin de sécuriser les opérations de financement en cours, l’amendement a pour objet de ne pas appliquer la nouvelle retenue à la source de 50 % sur les intérêts d’emprunts conclus avant le 1er mars 2010 ou rattachables à de tels emprunts. Cela reprend l’objet de l’amendement n° 2 de la commission des finances.

M. le président. Le sous-amendement n° 219 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer les III et IV de cet amendement.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Les collaborateurs de Mme Lagarde qui ont élaboré ce texte m’ont averti qu’une erreur s’y était malencontreusement glissée.

Les émissions d’obligations susceptibles d’être détenues pour une part par des agents économiques situés dans les pays non coopératifs – en raison soit d’un placement privé, soit d’une cotation sur le marché – peuvent être à l’origine de problèmes sérieux pour les entreprises, c'est-à-dire pour les émetteurs.

Rappelons que la documentation financière internationale comporte usuellement une clause qui, s’agissant de grandes entreprises, met à la charge de l’émetteur la fiscalité sur les intérêts. Si les obligations se trouvent entre les mains d’agents économiques des États figurant sur la liste, un prélèvement à la source de 50 % est prévu.

La perspective d’avoir à assumer cette taxation potentielle de 50 % des intérêts d’une fraction peut-être appréciable d’une émission obligataire ne manquerait pas d’inquiéter les dirigeants de grandes entreprises françaises.

Je comprends qu’il soit nécessaire de rectifier à la marge l'article 14, pour tenir compte de cette situation. C’est ce que vous appelez la « clause de sauvegarde », monsieur le ministre.

Toutefois, il faut se limiter strictement à cela, ne serait-ce que parce que c’est le seul sujet dont m’ont entretenu les collaborateurs de Christine Lagarde.

Il faut travailler en toute transparence : je comprends qu’il puisse exister un risque de délocalisation de certaines émissions obligataires de grandes sociétés françaises. La commission des finances, saisie de ce problème par mon intermédiaire, en a délibéré et a considéré qu’il était légitime de prendre en compte la préoccupation exprimée par le Gouvernement.

En 2010, la liste sera courte et le compteur affichera un niveau très modeste. En revanche, pendant la durée de vie de ces émissions obligataires, il est tout à fait concevable que la liste englobe bien d’autres États, si le comportement de ces derniers n’est pas irréprochable au regard des règles du jeu internationales.

C'est la raison pour laquelle la commission des finances a déposé ce sous-amendement, qui vise à supprimer les III et IV de l'amendement n° 207 rectifié, car il s’agit d’exceptions dont on ne m’a pas parlé.

Je le répète, il nous faut travailler en toute transparence sur ces sujets.

Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 207 rectifié, sous réserve de l’adoption de son sous-amendement n° 219 rectifié.

M. le président. L'amendement n° 106, présenté par M. Badré et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :

Alinéa 32

Compléter cet alinéa par les mots :

sauf si le débiteur démontre que les opérations auxquelles correspondent les sommes versées ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de ces sommes dans un État ou territoire non coopératif.

La parole est à M. Denis Badré.

M. Denis Badré. Monsieur le président, par cohérence et par commodité, je présenterai simultanément les amendements nos 106, 107 et 108, qui sont complémentaires et tendent tous trois à répondre à la préoccupation que viennent d’exprimer le Gouvernement et la commission des finances.

J’indique d’emblée que, si le ministre et le rapporteur général me confirment que notre souci est intégralement pris en compte, je retirerai ces amendements.

L'amendement n° 106 vise à permettre au débiteur d'apporter la preuve qu’il était de bonne foi et que l'emprunt qu'il a souscrit n'avait pas principalement pour objet ou pour effet de localiser les intérêts dans un État ou territoire non coopératif.

L'amendement n° 107 tend à exclure de manière plus explicite les emprunts conclus avant le 1er janvier 2010 et dont le terme a été repoussé et à étendre le même dispositif aux émissions d'obligations dites « assimilables ».

L'amendement n° 108 a pour objet de compléter la période transitoire d'un an prévue à l'alinéa 116 par une mesure relative aux emprunts conclus avant l'entrée en vigueur de la loi, par analogie avec celle qui est prévue à l'alinéa 35 à propos des retenues à la source.

Il vise également à mettre en place un dispositif spécifique en faveur du produit des obligations assimilables, en soumettant ces émissions au même régime fiscal que celui des obligations auxquelles elles sont assimilées.

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéa 35

Rédiger ainsi cet alinéa :

H. – À l'article 131 quater, après le mot : « France », sont insérés les mots : « avant le 1er mars 2010 et dont la date d'échéance n'est pas prorogée à compter de cette date, ainsi que les emprunts conclus à compter du 1er mars 2010 mais assimilables à un emprunt conclu avant cette date » ;

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je retire cet amendement, car il est satisfait par l'amendement n° 207 rectifié auquel la commission est favorable.

M. le président. L'amendement n° 2 est retiré.

L'amendement n° 107, présenté par M. Badré et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :

Alinéa 35

Remplacer les mots :

et non renouvelés à compter de cette date

par les mots :

et dont la date d'échéance n'a pas été prorogée à compter de cette date, ainsi que ceux des emprunts assimilables à un emprunt antérieur au 1er janvier 2010, contractés entre le 1er janvier 2010 et le 1er janvier 2011

Cet amendement a été défendu.

L'amendement n° 208, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 47

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

bis. - Au premier alinéa du I de l'article 209, après les mots : « en France » sont insérés les mots : «, de ceux mentionnés aux a, e, e bis et e ter du I de l'article 164 B » ;

II. - Après l'alinéa 67

Insérer sept alinéas ainsi rédigés :

N bis A. - L'article 244 bis est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Le taux : « 50 % » est remplacé par le taux : « 33,1/3 % » ;

b) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« Par dérogation, le taux est porté à 50 % lorsque les profits sont réalisés par ces mêmes contribuables ou sociétés lorsqu'ils sont domiciliés, établis ou constitués hors de France dans un État ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A. » ;

2° La seconde phrase de l'avant-dernier alinéa est ainsi rédigée :

« Pour les personnes morales et organismes résidents d'un État de l'Union européenne ou d'un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en matière d'échange de renseignements et de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales et n'étant pas non coopératif au sens de l'article 238-0 A, l'excédent du prélèvement sur l'impôt dû est restitué. » ;

III. - Alinéa 70

Après le pourcentage :

50 %

insérer les mots :

à compter du 1er mars 2010

IV. - Après l'alinéa 70

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

bis Le second alinéa du III est ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa du I et à l'alinéa précédent, le prélèvement dû par des personnes morales résidentes d'un État membre de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales et n'étant pas non coopératif au sens de l'article 238-0 A, est déterminé selon les règles d'assiette et de taux prévues en matière d'impôt sur les sociétés, dans les mêmes conditions que celles applicables à la date de la cession aux personnes morales résidentes de France. » ;

V. - Alinéa 71

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° La seconde phrase du second alinéa du V est complétée par les mots : « aux personnes morales résidentes d'un État de l'Union européenne ou d'un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en matière d'échange de renseignements et de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales et n'étant pas non coopératif au sens de l'article 238-0 A » ;

VI. - Alinéa 117

Supprimer la référence :

N bis,

VII. - Après l'alinéa 117

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

bis. Les dispositions du L bis du I revêtent un caractère interprétatif.

VIII. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État des dispositions du N bis A du I du présent article est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.