M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Braye, rapporteur. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, vous connaissez mon attachement à ce principe, qui me paraît juste et équitable, contrairement à d’autres dispositions dont nous venons de débattre, car il fait reposer le coût du traitement des déchets sur les personnes qui en bénéficient. Vous l’avez d’ailleurs rappelé, mon cher collègue.

Au fond, c’est la traduction logique d’un autre principe consacré juridiquement, celui du « pollueur-payeur ».

Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Avis favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 742.

(L'amendement est adopté à l'unanimité des présents.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 78.

Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 743, présenté par MM. Miquel, Daunis et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 78, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 541-10 du code de l'environnement, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Au plus tard le 1er janvier 2012, toutes les filières dédiées de responsabilité élargie des producteurs devront assurer une prise en charge minimale de 80 % des coûts de référence de collecte, de valorisation et d'élimination du gisement des déchets concernés. »

La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous nous mettons à cinq pour présenter les amendements dont notre collègue Gérard Miquel est le premier signataire. C’est dire à quel point ils nous semblent importants et combien nous y tenons.

Nous estimons communément que le meilleur moyen non seulement de responsabiliser les producteurs de biens, les distributeurs et les consommateurs mais aussi de développer des filières de récupération et de recyclage, est d’appliquer le principe de responsabilité élargie des producteurs. C’est une notion à laquelle nous sommes attachés, parce qu’il faut que chacun entre dans cette démarche.

Toutefois, la contribution des producteurs selon les filières ne permet, au mieux, qu’une prise en charge de 30 % à 40 % des coûts réels de collecte, de valorisation et d’élimination du gisement des déchets générés.

Pour nous, le niveau de financement et de contribution des producteurs devrait être plus élevé et atteindre 80 % de ces frais en 2012.

C’est l’objet de notre amendement. Une telle mesure allégera fortement la facture des consommateurs.

M. le président. L'amendement n° 744, présenté par MM. Miquel, Daunis et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 78, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - À partir du 1er janvier 2015, le principe de responsabilité élargie du producteur est progressivement élargi à l'ensemble des produits de grande consommation. »

La parole est à M. Claude Bérit-Débat.

M. Claude Bérit-Débat. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que les deux précédents.

Depuis une quinzaine d’années, la responsabilité élargie des producteurs, qui étend la responsabilité des fabricants à la gestion de leurs produits en fin de vie, s’applique à un nombre croissant de produits et de filières.

Les fabricants d’imprimés papier, d’équipements électriques et électroniques ménagers, de produits textiles, d’habillement et des chaussures, sont tenus de contribuer ou de pourvoir à la collecte, au recyclage et au traitement des déchets issus de ces produits.

C’est d’ailleurs grâce aux travaux du Grenelle de l’environnement que nous avons décidé d’élargir encore ce principe à certains secteurs.

Notre amendement tend à officialiser dans le code de l’environnement notre engagement d’étendre progressivement l’application du principe de responsabilité élargie du producteur à l’ensemble des produits de grande consommation.

Nous proposons donc que tous les produits soient ainsi concernés par ce principe.

M. le président. L'amendement n° 745, présenté par MM. Miquel, Mirassou et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 78, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Au plus tard le 1er janvier 2012, le niveau de contribution de chaque produit soumis à un dispositif de responsabilité est fonction des coûts réels de traitement des déchets générés. »

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Alors que les collectivités locales et les citoyens sont confrontés à une inflation de déchets ménagers dont les coûts de gestion sont de plus en plus élevés, il nous semble impératif d’appréhender cette problématique dans toute son ampleur et de n’en négliger aucun aspect.

Il s’agit par conséquent de ne pas minimiser le coût de la collecte et du traitement des déchets et de ne pas jeter un voile pudique sur les responsabilités des uns et des autres en la matière.

Nous devons clairement définir le lien existant entre les coûts des déchets, qui comprennent leurs conséquences environnementales, les contributions de la collectivité dans leur prise en charge et les responsabilités des acteurs privés, au nombre desquels figurent les producteurs de biens de consommation.

Une politique environnementale de gestion des déchets ne sera crédible et efficace que si nous recherchons d’abord à réduire les déchets à la source.

Le meilleur moyen d’aboutir à une réduction significative des déchets et de leurs coûts pour la société est avant tout de responsabiliser les producteurs.

Notre amendement s’inscrit dans la droite ligne du principe de responsabilité élargie du producteur, puisque nous proposons que le montant de la contribution du fabricant soit lié au coût réel de traitement des déchets.

En effet, le producteur conserve une part de responsabilité jusqu’à la fin de vie du produit, car c’est lui qui a décidé de la conception de son produit, des matériaux utilisés pour le contenant et l’emballage. Des différents choix du producteur dépendront les coûts réels de gestion des déchets finaux.

Ce coût réel est défini en fonction du caractère recyclable ou non du bien et / ou de l’emballage concerné, de son éco-conception, des économies de ressources naturelles dont il est possible de se prévaloir dans le cadre de sa production, de sa durée de vie, ainsi que des possibilités de valorisation offertes, sous forme de matière ou d’énergie.

Pour que le principe de la responsabilité élargie du producteur soit vraiment efficace, il est nécessaire que le montant de la contribution financière incite les fabricants à modifier leurs pratiques et à utiliser des matériaux recyclables ou générant moins de déchets. C'est la raison pour laquelle nous proposons que le niveau de contribution de chaque produit soumis à un dispositif de REP dépende des coûts réels de traitement des déchets générés.

L’adoption de cet amendement constituerait un signal fort et témoignerait de la volonté de la Haute Assemblée et du Gouvernement d’apporter de véritables solutions au problème récurrent et de plus en plus aigu de la production de déchets ménagers.

M. le président. L'amendement n° 746, présenté par MM. Miquel, Mirassou et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 78, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - À partir du 1er janvier 2012, les produits de grande consommation ne participant pas à un dispositif de responsabilité élargie des producteurs sont soumis à la taxe générale sur les activités polluantes. »

La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.

M. Jean-Jacques Mirassou. Le vent semblant souffler dans le bon sens (Sourires), je continue avec un amendement qui porte, là encore, sur l’application du principe de la responsabilité élargie du producteur.

Il nous semble important de tout faire pour diminuer les déchets à la source afin de faciliter les tâches de traitement qu’assument nos communes et, ainsi, d’alléger leur charge financière.

À cette fin, et avant que, comme nous le souhaitons, le principe de la REP soit étendu à tous les produits de grande consommation, il serait beaucoup plus efficace d’appliquer la taxe générale sur les activités polluantes au produit consommé, quand le producteur ne participe pas à un dispositif de REP, plutôt qu’aux déchets qui entrent dans un centre de stockage ou d’incinération. Cela revient à traiter le problème en amont.

Appliquer la TGAP aux déchets entrant dans un centre de stockage n’a pas vraiment d’impact sur les comportements de consommation ; l’essentiel a déjà été fait. En revanche, l’appliquer aux produits de grande consommation dont les fabricants ne paient pas de contribution financière pourrait inciter les consommateurs à délaisser de tels produits mais aussi les fabricants à promouvoir des éco-conceptions de leurs produits, afin que ceux-ci génèrent moins de déchets.

M. le président. L'amendement n° 831 rectifié bis, présenté par Mme Keller et MM. Grignon et Richert, est ainsi libellé :

Après l'article 78, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement, il est inséré́ un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Au plus tard le 1er janvier 2012, toutes les filières dédiées de responsabilité́ élargies des producteurs devront assurer une prise en charge minimale de 80 % des coûts de référence de collecte, de valorisation et d'élimination du gisement des déchets concerné. Par ailleurs, le principe de responsabilité élargie du producteur doit être progressivement élargi à l'ensemble des produits de grande consommation sans remettre en cause les principes du service public de collecte et de traitement des déchets sous l'égide des communes ou de leurs groupements.

« Au plus tard le 1er janvier 2012, le niveau de contribution de chaque produit soumis à un dispositif de responsabilité tiendra compte de sa recyclabilité, de son éventuelle éco-conception, des économies de ressources naturelles, de l'utilisation de matériau recyclé, de la durée de vie des produits et des possibilités de valorisation possible sous forme de matière ou d'énergie des déchets générés. Une signalétique pédagogique sera mise en place sur les produits pour informer le consommateur afin de l'orienter dans ses choix en consommation.

« À partir du 1er janvier 2012, les produits de grande consommation ne participant pas à un dispositif de responsabilité́ élargie des producteurs sont soumis à la taxe générale sur les activités polluantes visée à l'article 266 sexies du code des douanes. »

La parole est à Mme Fabienne Keller.

Mme Fabienne Keller. Pour l’essentiel, nous regroupons ici les dispositions contenues dans les quatre amendements qui viennent d’être présentés.

Nous le savons tous, le seul déchet qui vaille est celui qui n’existe pas, c'est-à-dire celui que l’on ne produit pas ! Et, s’il est nécessaire d’emballer un produit, le meilleur déchet reste celui dont le cycle complet est le moins destructeur pour l’environnement. Telle est la philosophie qui sous-tend l’amendement n° 831 rectifié bis et qui inspire l’ensemble des mesures relatives à la REP, concept défini voilà de longues années pour les véhicules hors d’usage, les piles, les huiles de vidange, et complété par les déchets des équipements électriques et électroniques, le recyclage des courriers non sollicités, le traitement des textiles en fin de vie.

Le Grenelle I traite de manière très fine – de la dentelle ! – des déchets d’activités de soins à risques infectieux, des déchets encombrants issus de l’ameublement et du bricolage ou des produits chimiques. Nous appuyant sur ces expériences, nous entendons, avec cet amendement, amplifier le dispositif et lui donner sa pleine mesure.

Cet amendement a un triple objet.

Premièrement, il s’agit de prendre en compte le coût réel du traitement des déchets, y compris jusqu’à leur stockage sous la forme de déchets ultimes, quand cela a lieu.

Deuxièmement, il convient d’élargir le principe de la REP à l’ensemble des produits de grande consommation. Pour cela, nous prévoyons la date du 1er janvier 2012. Certes, l’échéance est assez éloignée dans le temps, mais il importe de poser un principe général applicable à tous les produits de consommation.

Enfin, pour que la mesure soit efficace, une pénalité est prévue : les produits de grande consommation ne participant pas à un dispositif de responsabilité́ élargie des producteurs seraient soumis à la taxe générale sur les activités polluantes.

Nous avons tenu compte des expériences réussies. Reconnaissons toutefois franchement que certaines d’entre elles sont tout à fait inefficaces : il n’est qu’à voir comme nos boîtes aux lettres continuent à déborder !

Nous savons également tous que le coût réel de certains déchets n’est pris en compte que très partiellement ou qu’à très court terme. Il importe donc d’aller plus loin si nous voulons inaugurer une ère nouvelle, où la production de déchets diminuerait et où l’environnement et les ressources seraient mieux respectés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Braye, rapporteur. L’enfer est pavé de bonnes intentions : ces amendements en sont la preuve ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

L'amendement n° 743 vise à unifier le régime de financement et de contribution des producteurs dans le cadre des filières REP à un niveau de 80 % de prise en charge des coûts.

Tout le monde en conviendra, l’adoption de cette mesure aurait un inévitable effet inflationniste, qui viendrait amplifier les effets de la crise économique.

En outre, les particuliers contribuent déjà au financement du traitement des ordures ménagères via la fiscalité locale, à travers soit la redevance d’enlèvement des ordures ménagères, la REOM, soit la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, la TEOM. Augmenter la couverture des coûts par les producteurs reviendrait à taxer doublement les ménages, à la fois en tant que contribuables et en tant que consommateurs.

Par ailleurs, cette taxation n’est pas cohérente avec les objectifs du Grenelle de l’environnement. Puisqu’elle serait déconnectée de toute notion de performance environnementale, elle ne favoriserait en rien l’amélioration des taux de collecte et de recyclage.

Enfin, cette mesure ne tient pas compte de la concertation mise en œuvre dans le cadre du Grenelle de l’environnement : l’ensemble des acteurs concernés ont choisi de n’adopter le principe de la couverture des coûts que pour la filière « emballages ».

En réalité, l’adoption de cet amendement pousserait paradoxalement les collectivités à ne pas agir. Imposer aux industriels de couvrir 80 % de l’ensemble des coûts reviendrait à inciter les collectivités à ne pas favoriser la collecte sélective, alors même qu’elles sont très bien financées si elles mettent en place ces collectes.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 743.

L'amendement n° 744 tend à généraliser progressivement le principe de la responsabilité élargie des producteurs à l’ensemble des produits de grande consommation

Je suis l’un des promoteurs des dispositifs relevant de la REP. S’ils ont montré leur efficacité, n’oublions pas que c’est d’abord parce qu’ils ont été jusque-là organisés filière par filière, sur des enjeux spécifiques. La généralisation de ces dispositifs pourrait aller à l’encontre de ce principe de base en transformant un outil adapté en un moyen de lever uniquement une nouvelle taxe.

Convenons-en : établir une responsabilité élargie du producteur pour les fruits et légumes ou pour les cotons-tiges n’a aucun sens ! C’est pourtant ce à quoi aboutirait l’adoption de cet amendement, comme d’ailleurs celle de l'amendement n° 831 rectifié bis.

Nous avons élargi progressivement les filières REP en fonction de problématiques identifiées : textiles, déchets d’activités de soins à risques infectieux, déchets dangereux diffus des ménages et assimilés, déchets encombrants issus de l’ameublement et du bricolage. C’est logique ! Les filières de collecte et de valorisation ne sont pertinentes que pour certains flux homogènes, définis quantitativement et qualitativement.

Pour être efficace, la REP doit donc être étudiée au cas par cas, filière par filière.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 744.

J’en viens à l'amendement n° 745. Il existe manifestement un décalage entre le texte de l’amendement et la présentation qui en a été faite.

Cet amendement aurait pour objet d’inciter les producteurs à utiliser des matériaux recyclables ou générant moins de déchets. Toutefois, ce n’est pas à cela qu’aboutirait l’adoption de l'amendement. En effet, cette incitation ne peut être obtenue que grâce à la modulation de la contribution selon les performances environnementales des produits. Or la modulation de la contribution selon les coûts de traitement produirait l’effet exactement inverse : la collecte sélective, le recyclage et la valorisation sont beaucoup plus coûteux que la collecte en mélange et l’incinération. Tout le monde en convient et Alain Vasselle l’a démontré avec force.

Dès lors, l’indexation des contributions sur les coûts de collecte et de traitement reviendrait à inciter les producteurs à mettre sur le marché des produits dont les déchets ne sont pas valorisables.

La mise en œuvre de cette disposition produirait l’inverse de l’effet visé. C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 745.

L'amendement n° 746 tend à prévoir que, à partir du 1er janvier 2012, les produits ne participant pas à un dispositif de REP seront soumis à la TGAP.

Le principe de la REP vise à impliquer les opérateurs économiques dans la mise en place de filières de recyclage et de valorisation des déchets issus des produits qu’ils mettent sur le marché. Cet amendement est contraire à ce principe, car la disposition qu’il prévoit déconnecte la REP de la création d’une filière spécifique de collecte et de valorisation.

La commission est donc défavorable à cette proposition, qui conduirait à mettre en place une nouvelle taxe généralisée sur l’ensemble des produits de grande consommation, au premier rang desquels les produits alimentaires.

Dans un contexte de fragilisation du pouvoir d’achat des ménages, je ne prendrai pas la responsabilité d’instaurer une TGAP sur les fruits et légumes ou sur les cotons-tiges… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Didier Guillaume. Et la taxe carbone ?

M. Dominique Braye, rapporteur. Ce n’est pas le sujet ! Et si vous estimez qu’il y a trop de taxes, n’en rajoutez pas ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Ce n’est pas très cohérent !

M. Dominique Braye, rapporteur. Enfin, l'amendement n° 831 rectifié bis reprend pour en quelque sorte les compiler les dispositions contenues dans certains amendements sur lesquels je me suis déjà exprimé.

Ainsi, sur l’unification du régime des contributions dans le cadre des filières REP, j’ai déjà expliqué qu’il convenait de ne pas adresser aux collectivités un mauvais signal, qui les dissuaderait de mettre en place des collectes sélectives.

Je me suis déjà exprimé sur la généralisation de la REP, je n’y reviens donc pas.

Enfin, je le répète, je suis totalement opposé à la généralisation de la TGAP, qui revient, ni plus ni moins, à mettre en place une nouvelle taxe généralisée sur l’ensemble des produits de base, c'est-à-dire ceux dont les ménages ont besoin.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 831 rectifié bis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission et est également défavorable aux amendements nos 743, 744, 745, 746 et 831 rectifié bis.

Comme l’a très justement rappelé M. le rapporteur, unifier le régime de financement et de contribution des producteurs dans le cadre des filières REP à un niveau de 80 % de prise en charge des coûts entraînerait un recul pour la filière des équipements électriques et électroniques, les EEE. Certes, dans le cadre du Grenelle I, nous nous étions fixé cet objectif pour les emballages, mais sans viser d’autres filières, car il faut agir au cas par cas.

En outre, avant d’engager la généralisation des filières REP, il convient d’examiner les quatorze filières qui existent déjà : elles couvrent à peu près tout le champ des déchets concernés, sauf les produits alimentaires – d’ailleurs, comment créer une filière REP sur ces produits ? –, les jouets et une partie des cosmétiques.

Nous souhaitons maintenir l’équilibre qui a été trouvé dans le cadre du Grenelle de l’environnement : nous cherchons à mettre strictement en pratique les engagements qui ont été pris à cette occasion. L’extension de la filière REP à l’ensemble des filières, surtout aux produits alimentaires, n’est pas possible aujourd'hui.

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote.

M. Jacques Muller. J’ai bien entendu l’ensemble des explications de la commission et du Gouvernement, notamment sur la prise en charge minimale de 80 % des coûts de référence ou l’extension aux produits de grande consommation de la TGAP.

Pour autant, l'amendement n° 831 rectifié bis contient, de mon point de vue, une disposition tout à fait centrale, sur laquelle nous devrions pouvoir nous mettre d’accord.

C'est la raison pour laquelle je vais déposer un sous-amendement, qui vise à ne conserver qu’un seul des paragraphes de l’amendement, ainsi rédigé : « Au plus tard le 1er janvier 2012, le niveau de contribution de chaque produit soumis à un dispositif de responsabilité tiendra compte de sa recyclabilité, de son éventuelle éco-conception, des économies de ressources naturelles, de l’utilisation de matériau recyclé, de la durée de vie des produits et des possibilités de valorisation possible sous forme de matière ou d’énergie des déchets générés. Une signalétique pédagogique sera mise en place sur les produits pour informer le consommateur afin de l’orienter dans sur ses choix en consommation. »

Si nous ne parvenons pas à inscrire dans ce projet de loi un tel dispositif, c’est que nous n’avons pas saisi les enjeux du Grenelle de l’environnement !

Enfin, monsieur le rapporteur, prendre l’exemple des bananes et des cotons-tiges ne me paraît guère heureux !

M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Mme Fabienne Keller. J’ai cru comprendre que ces amendements ne recueillaient pas beaucoup d’avis positifs de notre rapporteur…

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Je le confirme !

M. Dominique Braye, rapporteur. C’est un euphémisme !

Mme Fabienne Keller. Je le regrette.

Mme la secrétaire d'État nous a expliqué que l’essentiel des produits étaient déjà couverts. C’est une raison de plus, à nos yeux, pour affirmer un principe général fort, celui de la responsabilité élargie du producteur, ...

M. Dominique Braye, rapporteur. Non, au contraire !

Mme Fabienne Keller. … quitte à exclure les fruits et légumes, si cela pose encore problème ! Ce serait déjà une bonne nouvelle de savoir que tous les autres déchets sont concernés.

M. le rapporteur m’oppose la nécessité de travailler filière par filière. À l’évidence, dans la réalité concrète, la seule vraie question est de déterminer la manière dont les déchets seront traités.

En l’occurrence, cependant, nous sommes appelés à légiférer, à poser des principes, et non à nous préoccuper de leur mise en œuvre dans le détail.

C’est pourquoi nous vous proposons de fixer un principe, à charge pour les nombreux organismes compétents travaillant d’ores et déjà sur quatorze filières de s’organiser pour en traiter une quinzième, une seizième ou une vingtième.

L’objectif en vaut la peine. Les volumes de déchets continuent d’augmenter.

M. Dominique Braye, rapporteur. Ce n’est pas vrai !

Mme Fabienne Keller. Les collectivités, qui les trient pourtant bien volontiers, sont confrontées à cet accroissement continu. Il va bien falloir que cela cesse, d’où l’utilité de fixer le principe dans la loi, sachant que nos sommes tout à fait dans notre rôle puisqu’une loi vise bien à fixer des orientations.

Il m’est objecté que le Grenelle I n’est pas allé aussi loin. Mais permettez-moi de défendre ma conviction : s’agissant des déchets, nous n’avons pas encore trouvé les bons outils.

Nous proposons d’envoyer un signal fort pour sensibiliser l’ensemble des industriels produisant ces déchets non seulement à la pollution générée tout au long du cycle de vie jusqu’à la destruction par incinération, enfouissement, tri et valorisation, mais aussi aux coûts correspondants : si les industriels sont appelés à les assumer en totalité, l’effet en retour sera extrêmement positif quant au type d’emballage qu’ils utilisent et aux déchets qu’ils produisent.

En tout état de cause, je vous serais reconnaissante d’accorder tout l’intérêt qu’elle mérite à cette démarche.

Nos voisins produisent encore plus de déchets que nous par habitant, ce qui prouve que l’on peut encore laisser le tonnage annuel augmenter. Mais l’on peut aussi se donner les moyens d’une vraie politique pour infléchir la tendance.

Telle est la philosophie qui inspire l’ensemble de ces amendements, même si leur formulation peut-être maladroite.

M. Roland Courteau. Très beau plaidoyer !

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Mirassou. Je ne ferai pas de philosophie, je m’en tiendrai au bon sens, ce qui, d’ailleurs, peut relever aussi d’une approche philosophique.

Il est urgent de responsabiliser les producteurs sur le problème des déchets, nous sommes d’accord sur le diagnostic.

Cependant, on nous dit que nos amendements vont trop loin sur ce point, tout en nous expliquant que nombre de mesures sont déjà prêtes sur le plan réglementaire.

Pour ma part, j’ai la faiblesse de penser que ces amendements sont pertinents et qu’ils sont parfaitement complémentaires les uns par rapport aux autres.

Si elle ne consacre pas le principe de la responsabilisation du producteur, la loi ne servira à rien.

J’admire le souci du rapporteur, M. Dominique Braye, de chercher à toute force des effets pervers ou des dégâts collatéraux dans les dispositions innovantes que nous proposons.

Ainsi, lorsque nous recommandons d’inciter le producteur, quitte à le faire par le biais d’une taxe, à utiliser des emballages faciles à éliminer, le rapporteur nous objecte le risque d’un effet d’aubaine pour les collectivités qui seraient tentées de mettre en place un dispositif d’élimination moins performant, donc plus coûteux.

Les deux approches ne sont pas contradictoires à mes yeux : ce n’est pas parce que les producteurs produiront des déchets plus faciles à éliminer que les collectivités locales se dégageront de leur responsabilité pour autant.

En conséquence, nous souhaitons que le principe de la responsabilisation du producteur soit véritablement acté dans la loi, quelle que soit la mouture proposée et sans se contenter d’un petit mieux au motif que modifier ce qui existe déjà sur le plan réglementaire entraînerait des bouleversements considérables.

Le bon sens doit prévaloir, et c’est la raison pour laquelle nous restons attachés à nos amendements.