réforme des juges d’instruction

M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Catherine Dumas. Ma question s’adresse à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice.

Madame le ministre, permettez-moi tout d’abord de vous adresser, au nom du groupe UMP, nos plus chaleureuses félicitations pour la naissance de votre petite Zohra. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Permettez-moi également de vous renouveler notre soutien le plus total à l’action réformatrice que vous menez avec courage et détermination. (Mêmes mouvements.)

Mme Catherine Dumas. Madame le ministre, le Président de la République, à l’occasion de la rentrée solennelle de la Cour de cassation, a annoncé qu’il était temps que le juge d’instruction cède la place à un juge de l’instruction qui contrôlera le déroulement des enquêtes, mais ne les dirigera plus.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est scandaleux ! C’est la mainmise du pouvoir !

Mme Catherine Dumas. En effet, le juge d’instruction, actuellement chargé de l’enquête pour les affaires judiciaires les plus graves, ne peut raisonnablement veiller, dans le même temps, à la garantie des droits de la personne mise en examen.

Le chef de l’État a insisté, lors de cette rentrée solennelle, sur la nécessité de placer le contradictoire au cœur de notre système judiciaire, qui doit être plus soucieux des libertés et mieux adapté aux évolutions de la police technique et scientifique. La procédure pénale ne peut plus avoir pour seul socle le culte de l’aveu : elle doit avoir le culte de la preuve.

Pouvez-vous, madame le garde des sceaux, nous apporter plus de précisions sur vos intentions en la matière et nous indiquer les grandes lignes directrices de cette réforme profonde de notre procédure pénale afin que, demain, les droits individuels soient mieux protégés ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle n’est pas encore faite, cette réforme !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Sarkozy a déjà tout décidé !

M. le président. Bien entendu, l’ensemble du Sénat s’associe aux félicitations qui viennent d’être adressées à Mme la ministre. Zohra signifiant « étoile du berger », puisse celle-ci la conduire tout au long de sa vie ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

La parole est à Mme le garde des sceaux.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. Je vous remercie, monsieur le président, de ces félicitations qui me touchent beaucoup. Je remercie également l’ensemble des sénatrices et sénateurs, sur toutes les travées de la Haute Assemblée – ce n’est pas un sujet partisan –, des messages que j’ai reçus. Cette naissance a été pour moi un immense bonheur et je suis très émue que vous l’ayez partagé avec moi.

Madame la sénatrice, la question que vous posez a suscité de nombreuses interrogations à la suite du discours de Nicolas Sarkozy.

Le Président de la République a été élu sur un mandat clair : conduire des réformes ambitieuses. La réforme de la justice, notamment celle du code de procédure pénale, s’inscrit dans cette dynamique.

On se focalise sur la mesure relative au juge d’instruction. Mais il faut savoir que ce n’est qu’un volet de la réforme du code de procédure pénale. Chaque fois que des faits divers ou des situations dramatiques ont marqué l’actualité, le caractère obsolète et inadapté de notre procédure pénale a été unanimement dénoncé.

Il est indispensable de réformer le code pénal et le code de procédure pénale, afin de rendre sa cohérence au système et redonner la place qu’il mérite au principe du contradictoire, devenu une exigence pour tous.

Qui peut dire aujourd’hui qu’il ne faut pas réfléchir à l’évolution de la procédure pénale ? Qui peut soutenir raisonnablement que l’on peut se satisfaire de la protection des libertés individuelle en France ?

Le 14 octobre dernier, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, j’ai installé une commission qui est présidée par M. Philippe Léger. Cette commission poursuit ses travaux et il lui appartiendra de faire des propositions ambitieuses pour une réforme en profondeur de notre code de procédure pénale. À partir de ces propositions – et cela répond à la question de M. le président Bel –, tout le monde sera associé à la concertation, y compris les parlementaires.

M. Jean-Pierre Godefroy. Ce sera comme pour l’audiovisuel au Sénat ?

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Un débat extrêmement large sera organisé sur les propositions issues de cette commission.

Dès lundi prochain, je recevrai Philippe Léger pour revoir le calendrier, la méthode de travail et les points abordés dans le cadre de cette réforme du code de procédure pénale ; je recevrai également l’ensemble des membres de la commission et tous les acteurs concernés par cette réforme.

L’intérêt général doit absolument prévaloir, car si ce sujet fait l’objet d’une polémique, nous n’avancerons pas et nous ne ferons pas progresser les libertés individuelles, qui sont vraiment une exigence pour chacun d’entre nous.

M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre !

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Dans les affaires pénales les plus graves, qui font encourir les peines les plus lourdes à nos concitoyens, il est primordial que l’on puisse, d’abord, répondre à l’exigence de protection des droits des personnes mises en cause, ensuite, accorder une plus grande place aux victimes, enfin, permettre aux enquêteurs et à la défense d’être beaucoup plus efficaces. Tel est le sens de cette réforme du code pénal et du code de procédure pénale. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

suppression des juges d’instruction

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Baylet.

M. Jean-Michel Baylet. Ma question s’adresse à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, et elle porte sur le même thème que la précédente.

Vous avez rappelé, madame le ministre, que le Président de la République avait été élu pour mener des réformes. Il faut vraisemblablement réformer la justice : des dysfonctionnements récents et fameux l’ont montré.

Au début de l’été, le Président de la République nous a convoqués en Congrès à Versailles pour réformer la Constitution afin de renforcer les droits du Parlement. Or j’ai l’impression que c’est l’inverse qui se produit. Ainsi le Sénat est-il appelé à examiner depuis hier un texte sur l’audiovisuel, dont l’une des mesures phares, à savoir la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, est d’ores et déjà une réalité.

À l’évidence, l’heure n’est pas au renforcement des droits du Parlement, et encore moins au respect et à la réhabilitation du travail parlementaire dont on a pourtant beaucoup parlé.

La manière dont, hier, le Président de la République a annoncé devant la Cour de cassation la suppression du juge d’instruction procède du même mépris du Parlement.

Madame le ministre, nous aimerions donc avoir, tant sur le fond que sur la forme, un certain nombre d’éclaircissements. Il faut nous en dire plus !

Le juge d’instruction sera remplacé par un juge de l’instruction. Soit ! Mais quelles seront les compétences et les prérogatives de celui-ci ? Comment la politique pénale sera-t-elle menée ? Aujourd’hui, ce sont les procureurs généraux, sous votre autorité, qui appliquent une politique pénale cohérente et homogène.

On entend parler de l’indépendance du parquet. Mais quelle sera la politique pénale mise en place sous la responsabilité de la représentation nationale ? Qu’en sera-t-il de la garde à vue ? Continuera-t-on à recourir à cette espèce de torture des temps modernes qui consiste à mettre les personnes en prison pour essayer de les faire avouer ? Donnera-t-on enfin à la défense les droits qu’elle mérite ? Les avocats de la défense pourront-ils accéder rapidement à l’ensemble des dossiers ?

Voilà toute une série de questions qui méritent désormais d’être posées puisque la réforme a été annoncée à l’opinion publique, avant même que le Gouvernement vienne la présenter aux parlementaires. Cela aurait pourtant été la moindre des choses dans une démocratie, dans une République, notamment après la révision constitutionnelle que nous avons votée l’été dernier.

Madame le ministre, au-delà de ce que nous venons d’entendre, pouvez-vous nous donner les grandes orientations du texte à venir, si tant est que vous les connaissiez ? (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.) Pouvez-nous nous garantir que le Parlement sera consulté et que le débat aura bien lieu à l’Assemblée nationale et au Sénat, et non devant l’opinion publique ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste. – M. Yves Détraigne applaudit également.)

M. Alain Fouché. Elle vient de le dire !

M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, il n’y a aucun mépris du Parlement, puisque la réforme du code pénal et du code de procédure pénale sera menée dans la plus grande concertation. Je vous rappelle que cette réforme est attendue par tous les Français, et ce depuis fort longtemps.

Transcendant les clivages politiques, cette question a figuré dans tous les programmes des partis et des candidats aux différentes élections, y compris l’élection présidentielle. Une réforme de la justice, en particulier du code pénal et du code de procédure pénale, est en effet systématiquement annoncée.

Ce sujet a toujours fait débat, en particulier à gauche, mais aucun consensus ne s’est dégagé, notamment à propos de l’indépendance du parquet. Sur ce point, on n’a jamais abouti, parce que l’on n’a pas voulu débattre du fond, mettre tous les problèmes sur la table et reconnaître que le système actuel n’est pas satisfaisant.

Les réformes auxquelles il a été procédé ne sont donc que de simples ajustements. Le code de procédure pénale a été modifié à vingt reprises, mais sans aucune cohérence d’ensemble.

M. Paul Raoult. Qui a fait ces réformes ?

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Cela a finalement abouti, vous le savez très bien, à une multitude de régimes de garde à vue et de procédures d’instruction.

À chaque fois que l’on considère qu’une affaire ne se passe pas bien ou que le principe de proportionnalité risque de ne pas être respecté, on polémique, mais sans vraiment s’intéresser aux questions de fond.

M. Jean-Pierre Bel. La droite est au pouvoir depuis sept ans !

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. La réforme du code pénal et du code de procédure pénale figurait clairement dans le programme du Président de la République. Je vous y renvoie, car la volonté de Nicolas Sarkozy était de tout dire avant pour tout faire après !

Donc, le débat parlementaire aura bien lieu (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.).

M. Jean-Pierre Godefroy. Comme pour l’audiovisuel…

M. Simon Sutour. Vous n’aurez pas le choix !

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Il est même obligatoire en pareille circonstance : cette réforme ne pourra se faire sans le Parlement !

M. Jean-Pierre Bel. Vous nous rassurez !

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Cela étant, la concertation sera menée le plus largement et le plus en amont possible. Je l’ai dit, je procéderai aux premières consultations dès lundi prochain. Dans le même temps, la commission présidée par M. Philippe Léger continue à mener de nombreuses auditions, y compris de parlementaires. Vous pouvez tout à fait demander à être auditionné, monsieur Baylet ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

situation au proche-orient

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Aujourd’hui, les roquettes du Hamas continuent de tomber sur la population du sud d’Israël et celles du Hezbollah sur la population du Nord.

Aujourd’hui, les civils continuent d’être les victimes terriblement nombreuses des bombardements israéliens et de l’offensive terrestre à Gaza.

Au Proche-Orient, les gestes de la diplomatie internationale se heurtent à des réalités meurtrières.

Oui, il faut obtenir un cessez-le-feu ; oui, il faut créer, là, dans l’urgence, des couloirs humanitaires. Car jamais on n’a vu une guerre de cette intensité où 1,5 million d’êtres humains, dont 700 000 enfants, privés d’eau potable, d’électricité, de médicaments, de vivres ne peuvent fuir les bombes.

Mme Nathalie Goulet. Absolument !

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je voudrais ici rendre hommage aux agents de l’ONU, de la Croix-Rouge et des ONG, qui secourent les victimes, et aux journalistes, qui bravent le blocus de l’information.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Mais l’urgence est aussi de sortir de cette spirale, qui, après chaque négociation en trompe-l’œil, après chacune des guerres qui suit, laisse les Israéliens plus inquiets de l’avenir de leur pays et les Palestiniens plus dominés, appauvris sur un territoire mité par les colonies ou soumis au blocus.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Madame la secrétaire d’État, la France préside actuellement le Conseil de sécurité des Nations unies. Elle doit obtenir une résolution de cessez-le-feu contraignante, j’y insiste, pour les deux parties, sous peine de sanctions. C’est ce que demande le parti socialiste.

Ensuite, le Conseil de sécurité doit s’attaquer au fond du problème : faire adopter une résolution destinée à définir les sanctions encourues par ceux qui, à l’avenir, viendraient à violer la légalité internationale construite par les résolutions des Nations unies, aussi bien celle qui a créé l’État d’Israël en 1948 que toutes celles qui devraient garantir les droits du peuple palestinien.

En effet, il n’y aura de paix que fondée à la fois sur la création d’un véritable État palestinien et sur la garantie de sécurité pour l’État d’Israël. La seule solution est politique.

Madame la secrétaire d’État, nous demandons que soit inscrit à l’ordre du jour du Sénat un débat sur cette guerre, et ce dès le début de la semaine prochaine. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Rama Yade, secrétaire d’État chargée des affaires étrangères et des droits de l’homme. Madame Cerisier-ben Guiga, vous avez raison, devant le drame humanitaire que connaît Gaza, la politique partisane n’a plus lieu d’être, et il est donc tout à fait légitime que la représentation nationale souhaite débattre d’un sujet qui touche tous les Français, quelles que soient leur sensibilité et leur appartenance.

Les chiffres sont, en effet, éloquents et tragiques : aux victimes israéliennes des tirs de roquette du Hamas, qui sont une menace quotidienne pour les populations, viennent s’ajouter, à ce jour, plus de 700 Palestiniens tués, dont 220 enfants, et plus de 3 000 blessés.

Je n’évoquerai même pas le bilan économique, alors que, nous le savons tous, la solution passera par l’édification d’un État palestinien viable.

Face à une réalité aussi dramatique, personne ne saurait détenir, à lui seul, les clés de la solution. Mais personne, non plus, ne saurait rester inactif et immobile, au risque de faillir à ses responsabilités.

Madame la sénatrice, vous en conviendrez avec moi, le Président de la République a su répondre à sa mission d’homme d’État et à l’attente des Français en faisant preuve d’un engagement de tous les instants pour tenter d’enrayer l’engrenage infernal de la violence et pour enclencher un processus de sortie de crise, comme le prouve le projet de plan de paix franco-égyptien.

Dans ces conditions, la contribution des représentants de la nation est évidemment essentielle. Un débat aura donc bien lieu au Parlement dans les prochains jours, ainsi que l’a souhaité hier soir la conférence des présidents de la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mmes Monique Cerisier-ben Guiga et Bariza Khiari, MM. Jean-Pierre Plancade et Hervé Maurey applaudissent également.)

M. le président. Le Sénat se tient en étroit contact avec le Gouvernement pour fixer la date de ce débat.

plan franco-égyptien pour la paix

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Christian Cambon. Depuis plus de douze jours, en réponse aux tirs de roquettes du Hamas contre les populations du sud d’Israël, les bombardements de la bande de Gaza par l’armée israélienne atteignent une rare intensité.

L’armée israélienne a lancé également sur Gaza une offensive terrestre, qui n’a fait qu’aggraver la situation des populations civiles.

En réplique, cette nuit même, des roquettes ont été tirées à partir du Liban sur le nord d’Israël, faisant craindre une escalade militaire, donc une extension du conflit.

Lundi et mardi, le Président de la République a effectué une mission très importante au Moyen-Orient pour contribuer au rétablissement du dialogue entre les deux parties, afin que cessent les combats et les violences de part et d’autre.

Cette initiative du Président de la République, saluée de manière unanime, bien au-delà de notre territoire national, a replacé sans conteste la France, donc l’Europe, au cœur du processus de négociations.

Concrètement, ce voyage a permis d’élaborer un plan de paix franco-égyptien, résultat d’une véritable coopération avec le président Moubarak, à qui il convient également de rendre hommage. Nous nous félicitons des premiers résultats concrets de ce plan de paix et de l’accueil positif qui lui a été réservé par l’Autorité palestinienne, par l’État hébreu, ainsi que par les États-Unis.

Nous espérons que le Gouvernement saura faire fructifier cette initiative de la France, tout en coopérant avec la nouvelle administration américaine. Néanmoins, l’inquiétude demeure.

Madame la secrétaire d’État, ne pensez-vous pas qu’il est maintenant nécessaire d’engager un processus de paix négocié avec tous les acteurs politiques de la zone ?

Par ailleurs, pouvez-vous nous préciser la position du Gouvernement quant à la participation éventuelle de la France au déploiement d’une force internationale de maintien de la paix et à la mise en œuvre d’un contrôle international de la frontière entre l’Égypte et la bande de Gaza, pour mettre un terme à la contrebande d’armes qui sévit dans cette zone ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Rama Yade, secrétaire d’État chargée des affaires étrangères et des droits de l’homme. Monsieur Cambon, comme vient de le faire le Premier ministre, je voudrais, tout d’abord, condamner très fermement les tirs de roquette depuis le Liban. Une escalade au sud Liban serait lourde de conséquences pour l’ensemble de la région.

Nous sommes également très préoccupés par la poursuite et l’élargissement des opérations militaires israéliennes dans le sud de la bande de Gaza. Nous rappelons l’urgence d’un arrêt total des tirs de roquette.

Comme vous l’avez indiqué, le Président de la République s’est mobilisé personnellement, sans relâche. Il a eu hier encore des entretiens téléphoniques avec ses homologues égyptien, tchèque, saoudien, qatarien et syrien, ainsi qu’avec les premiers ministres turc et israélien.

Par ailleurs, M. Bernard Kouchner préside aujourd’hui les discussions qui ont lieu au Conseil de sécurité des Nations unies.

Les efforts du Président de la République ont permis d’initier une dynamique, et ce sur plusieurs plans.

Sur le plan humanitaire, d’abord, Israël a donné son accord pour l’ouverture d’un corridor humanitaire et la mise en place d’une trêve de trois heures par jour.

Sur le plan politique, ensuite, la France se réjouit que le plan franco-égyptien ait été accueilli favorablement par les parties. Elle appuie, bien évidemment, les efforts de l’Égypte, qui accueillera sous peu une délégation israélienne pour définir les modalités de sécurisation de la frontière entre Gaza et l’Égypte, notamment la lutte contre la contrebande d’armes.

C’est le point de départ de l’initiative franco-égyptienne, qui doit déboucher sur un arrêt complet des hostilités et enclencher une dynamique de sortie de crise. Cela suppose donc la levée du blocus.

Quant au règlement durable du conflit, il sera le fruit d’une négociation entre toutes les parties qui souhaitent sincèrement la paix.

Monsieur le sénateur, vous posez la question de la participation de la France à des dispositifs permettant de garantir la sécurité. Notre pays a toujours dit qu’il était disposé à reprendre sa participation à la mission d’assistance frontalière de l’Union européenne à Rafah et, au besoin, à l’étendre aux autres points de passage. L’ouverture régulière et contrôlée de l’ensemble des points de passage est, en effet, une priorité pour assurer la normalisation de la situation et le passage des biens humanitaires et des personnels.

La France est également disposée à renforcer son concours aux arrangements de sécurité, selon des modalités qui dépendront de l’accord auquel parviendront l’Égypte, Israël et, bien sûr, l’Autorité palestinienne.

À plus long terme, enfin, et comme le Président de la République l’avait annoncé à la Knesset le 23 juin, la France est disposée à participer à une force internationale pour accompagner, dans le cadre d’un accord entre Israël et l’Autorité palestinienne, le retrait de l’armée israélienne des territoires palestiniens. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Solidité du plan de relance

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Martial Bourquin. Nous sommes nombreux, sur les travées de cette assemblée, à nous trouver aux premières loges s’agissant de la grave crise industrielle que nous vivons, crise aux conséquences humaines tragiques.

Ma collègue Mme Éliane Assassi a évoqué longuement ...

Un sénateur de l’UMP. Trop longuement !

M. Martial Bourquin. ... la situation de beaucoup entreprises. Je trouve pour le moins inopportun qu’elle ait été interrompue, alors qu’il existe dans notre pays une véritable angoisse et une urgence sociale que l’on ne peut négliger.

Des millions de Français sont dans une situation extrêmement préoccupante et on ne saurait sous-estimer cette réalité. Dans les entreprises, les suppressions d’emplois sont massives. Il est donc pour le moins déplacé de chahuter l’une de nos collègues lorsqu’elle évoque la conjoncture actuelle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Nous ne pouvons, dans cet hémicycle, ignorer la réalité !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas leur problème !

M. Martial Bourquin. Pour répondre à cette crise, vous avez érigé une succession de digues de sable, que vous avez baptisées « plan de relance ».

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de l'industrie et de la consommation, a déclaré mardi dernier qu’ « acheter une voiture est un acte citoyen ». (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.) Cette formule illustre l’inadéquation de l’approche gouvernementale de la crise automobile actuelle, et de la crise en général. En d’autres temps, Marie-Antoinette suggérait aux affamés de manger de la brioche : c’est un peu la même chose !

Les chômeurs, celles et ceux qui craignent de perdre leur emploi, qui ont peur de l’avenir et qui ne peuvent pas acheter un véhicule sont-ils des demi-citoyens ?

Lorsqu’on garde une voiture plus de dix ans, c’est non pas par choix, mais parce que l’on ne peut pas en acquérir une neuve ! Si vous voulez que nos concitoyens puissent acheter un véhicule neuf, il faut leur donner du pouvoir d’achat. Quelles mesures le Gouvernement a-t-il prévues pour relancer le pouvoir d’achat ? C’est la question essentielle !

M. Martial Bourquin. Que compte-t-il faire pour que les banques s’impliquent réellement et proposent des taux de crédit décents ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n’y en a que pour les actionnaires !

M. Martial Bourquin. Aujourd’hui, pour l’achat d’une automobile, les taux de crédit sont de 6 % à 8 % !

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Martial Bourquin. Il faut également préparer l’avenir de l’industrie automobile en concevant le véhicule propre de demain, et aider beaucoup plus sensiblement les pôles de compétitivité.

La politique économique ne s’oppose pas à la politique sociale. Or j’ai l’impression que vous pensez l’économie contre le social.

Une sénatrice de l’UMP. Ce n’est pas une question !

M. Martial Bourquin. C’est au contraire avec une grande politique sociale que nous mènerons une grande politique économique.

Albert Camus disait : « La vraie générosité envers l’avenir consiste à tout donner au présent ». Quand allez-vous redonner du pouvoir d’achat à nos concitoyens ? Quand allez-vous défendre nos territoires ? L’espoir et la confiance en l’avenir sont à ce prix ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Monsieur le sénateur, il n’y a pas, d’un côté, ceux qui ne se préoccupent pas du pouvoir d’achat et, de l’autre, ceux qui ne pensent qu’à cela !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mme Lagarde a dit qu’il fallait acheter des manteaux ! Pour ce faire, il faut du pouvoir d’achat !

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Je tiens à vous livrer quelques chiffres. Qui a décidé de verser une prime exceptionnelle de 220 euros pour les titulaires du RMI et de l’ASS ? Qui a décidé de verser dans trois mois, en avril prochain, une prime de solidarité active de 200 euros en anticipation du revenu de solidarité active, ce RSA qui n’a d’ailleurs pas été voté sur toutes les travées de cette assemblée ? Qui a décidé de revaloriser le minimum vieillesse et les pensions de réversion des plus modestes de près de 11 % ?

M. Jacques Mahéas. Et les 15 milliards d’euros pour le bouclier fiscal ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. J’en viens au cœur de votre question, monsieur le sénateur : le secteur automobile. Eh bien, parlons-en !

Vous le savez, la crise n’affecte pas uniquement la production automobile française : la récession a frappé le secteur automobile dans toute l’Europe.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La même politique produit les mêmes effets !

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Cependant, le marché automobile français s’est mieux tenu au cours de l’année 2008 que les autres marchés européens.

M. Martial Bourquin. Tout va bien !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Non, mais telle est la réalité économique ! Faut-il s’en contenter ? Absolument pas, et vous avez raison, monsieur le sénateur, d’insister sur les inquiétudes de nos concitoyens.

Face à cette crise, le Gouvernement a réagi ! Si le secteur automobile français s’en est mieux sorti que d’autres, c’est parce que nous avons pris des mesures, notamment celle du bonus-malus. Le Président de la République a également annoncé, dès le 4 décembre, la mise en place d’une prime à la casse, qui produit de bons résultats et qui stimule la demande.

Il faut, bien sûr, aller plus loin, en prenant des mesures concernant l’offre. C’est précisément ce que nous avons fait ! Le Président de la République a confié à Luc Chatel – votre remarque à son endroit est très injuste ! – une mission dont les conclusions sur les mesures structurelles à prendre en matière d’offre automobile seront rendues publiques à la fin du mois de janvier. Par ailleurs, des états généraux se tiendront à Bercy sur ce point dès le 20 janvier.

Nous sommes conscients que nous devons adapter l’offre automobile. Nous allons réagir pour permettre à notre industrie automobile de surmonter les difficultés. Vous devez regarder ce que nous faisons et ne pas vous contenter de critiquer des mesures qui, pour l’instant, ont produit de bons résultats sur le marché automobile ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)