SEANCE DU 14 FEVRIER 2002


M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Béteille au nom de la commission, est ainsi libellé :
« A la fin du texte proposé par le III ter de l'article 4 pour l'article 373 du code civil, supprimer les mots : ", ou s'il s'est rendu coupable d'un déplacement illicite de l'enfant vers l'étranger ". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Laurent Béteille, rapporteur. Avec cet amendement, nous abordons un problème délicat qui ne peut laisser aucun de nous indifférent, celui du déplacement illicite d'un enfant vers l'étranger, c'est-à-dire de l'enlèvement international. Il s'agit d'un véritable fléau qui tend à se développer avec la multiplication des unions extranationales.
Pour tenter de remédier à cette situation, l'Assemblée nationale a proposé de priver automatiquement de l'exercice de l'autorité parentale celui des parents qui s'est rendu coupable d'un tel déplacement pour ramener son enfant dans son pays d'origine. Après avoir analysé la question et procédé à des consultations, nous nous sommes aperçus que cette disposition risquait d'aller à l'encontre de l'objectif visé par le texte en instituant la privation de l'exercice de l'autorité parentale comme sanction.
En outre, si un tribunal français prive de manière automatique ce parent de l'autorité parentale, on ouvre des possibilités de recours qui risquent d'être exploitées et d'aller à l'encontre des dispositions de la convention de La Haye, laquelle prévoit le retour de l'enfant, car cela peut inciter des juges étrangers à priver de l'autorité parentale le parent français.
De plus, une telle disposition se retournerait contre des parents français résidant dans un pays dont la législation ne répond pas forcément aux mêmes critères que la nôtre, et souhaitant rapatrier leur enfant vers la France. Ce serait une conséquence particulièrement grave et choquante, qui n'a manifestement pas été prévue par l'auteur de l'amendement à l'Assemblée nationale.
Pour toutes ces raisons, je demande au Sénat de bien vouloir supprimer cette disposition permettant la privation automatique de l'exercice de l'autorité parentale, d'autant qu'un tribunal a toujours le pouvoir de prononcer cette privation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. Cette question, difficile et douloureuse, des déplacements illicites d'enfants, a donné lieu à un débat très long et très approfondi à l'Assemblée nationale.
Je suis favorable à cet amendement n° 1, car je partage l'avis de la commission : un tel déplacement ne peut pas entraîner de façon automatique la perte de l'exercice de l'autorité parentale. Celle-ci constituant en effet un ensemble de droits autant que des devoirs - qui seront rappelés solennellement dans cette proposition de loi -, la perte d'un tel exercice doit donc non pas être maniée comme une menace ou une sanction, mais être adaptée au cas par cas par le juge aux affaires familiales selon l'intérêt de l'enfant, ce dernier ne devant pas devenir un enjeu important dans un conflit qui opposerait les parents.
Une telle disposition serait de nature, en effet, à nuire également au bon fonctionnement des conventions internationales relatives au déplacement de l'enfant puisque ces conventions posent le principe que l'Etat vers lequel l'enfant est enlevé ordonne le retour de l'enfant au lieu de sa résidence habituelle une fois le caractère illicite du déplacement constaté.
Je rejoins donc tout à fait l'argumentation que vient de développer M. le rapporteur.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 373 du code civil.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE 373-1 DU CODE CIVIL