SEANCE DU 10 DECEMBRE 2001


M. le président. L'amendement n° II-183, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Après l'article 50, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Au f du 1° de l'article 261 C du code général des impôts, les mots : "de fonds communs de placement" sont remplacés par les mots : "d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières".
« II. - Les dispositions du I s'appliquent à compter du 1er janvier 2003.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I et du II ci-dessus est compensée par la création à due concurrence d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous restons dans le domaine de la gestion de capitaux.
Il convient de rappeler que les OPCVM, les organismes de placement collectif en valeurs mobilières, se répartissent en deux grandes familles : les FCP d'un côté, et les SICAV de l'autre.
Alors que les SICAV sont soumises de plein droit à la TVA pour leur activité de gestion, les FCP en sont exonérés. Cette distorsion fiscale semble provenir d'une interprétation littérale et restrictive du terme « fonds d'investissement » tel qu'il figure dans la sixième directive TVA transposée en droit français.
Ainsi s'est créée une discrimination entre les SICAV et les FCP. Mais à la vérité, ce qui est grave, c'est non pas cette discrimination entre les SICAV et les FCP en France, mais la différence de traitement fiscal entre les SICAV françaises et les SICAV des autres pays de l'Union européenne.
En effet, selon nos informations, à l'exception de la Finlande, tous les autres pays membres de l'Union européenne semblent avoir exonéré de TVA l'activité de gestion des SICAV ou outils comparables. C'est donc dans le but de promouvoir la compétitivité de l'industrie française de la gestion de capitaux que la commission propose de placer les SICAV sous le régime de l'exonération de TVA.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je ne peux pas être favorable à cette mesure dont le coût dépasserait 100 millions d'euros, selon une estimation des professionnels eux-mêmes.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-183.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je suis à nouveau étonné par la réponse de Mme le secrétaire d'Etat. Le problème n'est pas d'avoir ou non des incitations fiscales, ni de savoir ce que cela coûte. Il est de savoir ce que l'on veut obtenir.
Si l'on arrive à de tels montants, c'est que la mesure est utile et qu'elle générera de l'activité. Si vous souhaitez que, dans l'Europe financière qui est en train de se créer, la place de Paris soit une place de seconde zone, vous n'avez qu'à continuer dans cette voie !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini. rapporteur général. Je crois utile d'apporter deux précisions.
En premier lieu, cet amendement, discuté en deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001, ne joue pas dans l'immédiat sur le solde puisqu'il n'entraînerait de conséquences financières qu'à partir de 2003. Si la croissance revient, comme vous l'espérez, madame le secrétaire d'Etat, et comme nous le dit M. Fabius...
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Vous l'espérez sûrement aussi !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... il ne devrait pas être si difficile de trouver une centaine de millions d'euros pour 2003.
En second lieu, et pour être plus sérieux, je voudrais reprendre la démonstration de M. Jean Chérioux. Nous sommes confrontés à un problème de compétitivité. Si l'on n'est pas en mesure d'aligner notre régime fiscal sur celui qui est applicable à des outils identiques partout dans l'Union, il se produira des effets d'éviction défavorables à nos professionnels. On ne peut pas vouloir l'Union monétaire et l'euro, on ne peut pas vouloir l'interconnexion des marchés financiers, on ne peut pas promouvoir, par exemple, Euronext et la négociation sur une même plate-forme d'un maximum de valeurs européennes si l'on n'établit pas l'unicité - ou du moins la neutralité - du cadre fiscal. Ce sont des éléments incontournables, et vous le savez aussi bien que nous.
L'argument du coût ne suffit pas. En effet, à nous en tenir à une position aussi regrettable, nous pourrions voir la matière fiscale sinon s'évanouir, du moins décroître, avec des rendements d'impôt qui seraient inéluctablement de plus en plus mauvais. Si nous ne nous prêtons pas au jeu de la compétition, notre base fiscale va inéluctablement se rétrécir en ce qui concerne des activités aussi concurrentielles, aussi mobiles, voire volatiles que la gestion de capitaux.
Enfin, madame le secrétaire d'Etat, sans vouloir être déplaisant sur ce point, il faudrait, si nous en avions le temps et la possibilité, débattre des conditions dans lesquelles vous avez chiffré la mesure. Nous n'avons pas la possibilité de connaître la méthode qui a abouti à cette évaluation. Par conséquent, même si nous prenons comme une information les 100 millions d'euros que vous avez évoqués, ce chiffrage ne peut pas être l'élément décisif dans la position du Sénat, d'autant qu'il s'agit d'une mesure dont l'application ne se ferait concrètement sentir qu'en 2003.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-183, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 50.

Article 51