SEANCE DU 22 NOVEMBRE 2001


M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture.
En effet, la pêche française traverse une nouvelle crise, qui touche plus particulièrement les pêcheurs de la côte Atlantique.
Après la détresse des marins-pêcheurs de l'île d'Yeu, à la suite de l'interdiction des filets maillants dérivants, les pêcheurs d'anchois s'élèvent aujourd'hui contre les pratiques espagnoles qui viennent détruire l'équilibre qui avait été obtenu par l'accord d'Arcachon de 1992. Les pêcheurs de soles, de langoustines et de merlus ne sont pas moins inquiets pour leur avenir.
Nos marins-pêcheurs demandent une répartition juste et équilibrée des efforts de pêche entre les partenaires européens et plus particulièrement entre la France et l'Espagne. Ce déséquilibre se retrouve par exemple dans l'octroi des aides européennes, qui ont permis de construire soixante-quatre bateaux en France en sept ans et 1 200 en Espagne.
Nos marins-pêcheurs sont parfaitement conscients de la nécessité de préserver les ressources halieutiques. Toutefois, ils demandent que les mesures prises soient fondées sur des réalités scientifiques et incontestables faisant l'objet d'expertises et de contre-expertises.
Il est difficilement compréhensible de voir les propositions de taux admissibles de captures, les fameux TAC, et de quotas diminuer de 50 % à 60 % d'une année sur l'autre. Cela signifie soit que les bases étaient mal déterminées, soit que le suivi annuel de l'effort de pêche n'a pas été effectué correctement.
Le monde de la pêche demande que la gestion des stocks et la détermination des quotas fassent l'objet d'une meilleure concertation. Il demande que les TAC soient contrôlés et surveillés d'une manière identique et équitable dans tous les pays de la Communauté. Il demande la suppression de la pratique du black fish, ce poisson débarqué, non contrôlé et non déclaré. Il ne peut accepter de voir encore cassé, dans un proche avenir, l'équivalent de 50 à 60 bateaux français de 22 mètres.
Ce secteur vital pour notre nation et pour notre littoral doit pouvoir vivre ; ma question sera donc triple.
Premièrement, quelles sont les mesures concrètes que le Gouvernement entend prendre pour trouver un accord définitif au problème récurrent de nos relations avec l'Espagne dans le domaine de la pêche ? Une renégociation juste et équitable des accords d'Arcachon est-elle à l'ordre du jour et pourra-t-elle déboucher ?
Deuxièmement, la France entend-elle, lors du prochain conseil européen de la pêche des 17 et 18 décembre, répondre à l'appel désespéré des marins-pêcheurs en soumettant à nos partenaires des propositions destinées à préserver les intérêts légitimes et vitaux de la pêche française ?
Enfin, troisièmement, sur la base du livre vert de la Commission, quelle position adoptera la France pour la renégociation de la politique européenne de la pêche afin que celle-ci devienne scientifiquement crédible et économiquement acceptable ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat. (Rires et exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Mesdames, messieurs les sénateurs, votre réaction peut se comprendre mais sachez que, si je me permets de répondre au nom de M. Glavany, c'est parce que pendant ma vie politique antérieure, pendant seize années, j'ai siégé à la Commission pêche du Parlement européen. Ce sujet m'est donc relativement familier. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Bien entendu, monsieur le sénateur, Jean Glavany vous prie d'excuser son absence.
Depuis 1994, nos relations de pêche avec l'Espagne font l'objet d'un suivi attentif et régulier dans le cadre du comité franco-espagnol des pêches, le COFEP. Ce comité se réunit régulièrement afin de résoudre, avec la participation directe des professionnels de nos deux pays, l'ensemble des problèmes qui peuvent se présenter. Ainsi, un code de bonne conduite a été adopté, même s'il n'a pas toujours été respecté, afin de répondre aux problèmes récurrents de cohabitation entre les métiers, problèmes que j'ai toujours connus depuis vingt ans, particulièrement dans le golfe de Gascogne.
S'agissant de la pêche à l'anchois, et plus spécialement des dispositions de l'accord d'Arcachon, je peux vous annoncer qu'un COFEP se réunira à Paris le 12 décembre prochain afin d'entamer la négociation visant à renouveler et à adapter les règles actuellement en vigueur en matière d'accès à cette ressource tout au long de l'année.
Jean Glavany a tout lieu de penser que cette négociation aboutira à un accord équilibré, dans la mesure où les deux parties, l'Espagne et la France, ont notamment un intérêt commun à stabiliser, pour les dix prochaines années, les échanges de quotas. Je rappellerai très brièvement - je n'ai pas le temps de m'attarder - que nous avons échangé de notre quota de merlus et de baudroies contre du quota espagnol de l'anchois, compte tenu de la réalité de nos marchés intérieurs. Nous avons tout intérêt - c'est évident - à instaurer un équilibre entre nos ressources et nos marchés pour la durée la plus longue possible.
Comme d'habitude, tout en étant attentif à l'état biologique de chacun des stocks, notre pays défendra, lors du conseil des ministres des 17 et 18 décembre prochain, les intérêts légitimes de la pêche française.
La France, je vous le rappelle, a été le premier Etat membre à soumettre à la Commission et au Conseil de l'Union européenne, dès octobre 2000, un mémorandum présentant son analyse et les orientations qu'elle préconise pour la future politique commune des pêches.
Dans ce mémorandum, la France réaffirme son soutien à une gestion durable de la ressource qui s'appuie notamment sur les avis scientifiques et sur une approche pluriannuelle de la fixation des taux admissibles de capture, les TAC, et des quotas afin d'assurer une lisibilité économique à moyen terme pour nos entreprises de pêche.
En outre, notre pays a marqué son souci d'une meilleure prise en compte de la dimension sociale ; cette dimension n'a jamais été absente des décisions que nous avons prises. Il ne s'agit pas de s'en tenir aux données arithmétiques fondées sur les avis scientifiques. Il s'agit aussi de prendre pleinement en compte la dimension économique de nos flottilles et la dimension sociale de nos marins-pêcheurs. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas le ministre de la pêche, mais quelle pêche ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Raffarin. C'est vrai que c'était mieux que M. Glavany !

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